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Date : 20050602

 

Dossier : IMM‑3055‑04

 

Référence : 2005 CF 796

 

Ottawa (Ontario), le 2 juin 2005

 

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE O’REILLY

 

 

ENTRE :

 

                                          LETICIA REYES (alias Leticia Mariano Reyes)

 

 

                                                                                                                                       demanderesse

                                                                             et

 

 

                         LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

                                                                                                                                             défendeur

 

 

 

                                         MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

 

[1]               L’époux ainsi que le père de Mme Leticia Reyes ont été assassinés aux Philippines. Mme Reyes prétend que les coupables étaient membres de la Nouvelle armée du peuple (NAP) et qu’elle courait elle‑même un risque de préjudice grave de la part de la NAP en raison de ses opinions politiques. Elle s’est enfuie au Canada en 2000 et a revendiqué ici l’asile.

 


[2]               Un tribunal de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié a rejeté la revendication de Mme Reyes parce qu’il n’était pas convaincu que son époux a été tué pour des raisons politiques. En outre, la Commission a conclu que Mme Reyes pouvait bénéficier de la protection de l’État aux Philippines. Mme Reyes prétend que la Commission a fait de graves erreurs pour arriver à ses conclusions et me demande d’ordonner une nouvelle audience. Je ne peux trouver aucun motif justifiant l’annulation de la décision de la Commission et je dois, par conséquent, rejeter la présente demande de contrôle judiciaire.

 

I.  Les questions en litige

 

1.         Est‑ce que la Commission a commis une erreur en concluant que Mme Reyes n’avait pas établi le bien‑fondé de sa crainte de persécution?

2.         Est‑ce que la Commission a commis une erreur en concluant que Mme Reyes pouvait bénéficier de la protection de l’État aux Philippines?

 

II.  Analyse

 

A.  Est‑ce que la Commission a commis une erreur en concluant que Mme Reyes n’avait pas établi le bien‑fondé de sa crainte de persécution?

 

[3]               Je ne peux renverser les conclusions de fait de la Commission que si elles ne sont pas soutenues par la preuve.

 

[4]               Mme Reyes conteste deux des conclusions de la Commission : 1) les meurtriers de son époux ont été _ emprisonnés _, et 2) que les meurtriers n’étaient pas membres du NAP.

 

[5]               La Commission a déclaré que les personnes responsables du décès du mari de Mme Reyes ont été _ accusés de meurtre et ont été emprisonnés _. En fait, les suspects ont été arrêtés et accusés de meurtre, mais ils sont détenus avant la tenue de leur procès. Mme Reyes prétend que la Commission a conclu à tort que les responsables ont été condamnés pour meurtre et que l’on peut supposer qu’ils ne posent plus une menace pour elle.

 

[6]               Les mots employés par la Commission ne sont pas aussi précis qu’ils auraient dû l’être. Cependant, je ne peux pas conclure qu’elle a commis une grave erreur de fait. La preuve présentée à la Commission indiquait clairement que les suspects avaient été accusés et qu’ils étaient détenus avant la tenue de leur procès. Ce fait était pertinent pour établir le bien‑fondé de la crainte de Mme Reyes, de même que la capacité de l’État de la protéger. Comme l’a reconnu la Commission, le point principal était de savoir si _ les personnes apparemment responsables de la mort de l’époux de la demanderesse sont traités conformément à la loi _. Je ne peux pas trouver une faute dans le traitement de la preuve par la commission sur cette question.

 

[7]               Pour ce qui est de l’affiliation politique des suspects du meurtre, Mme Reyes et sa belle‑soeur ont témoigné que les agresseurs étaient membres de la NAP. La Commission a conclu que cela n’avait pas été prouvé.


 

[8]               Rien dans la preuve documentaire présentée à la Commission ne faisait référence à une motivation politique derrière le meurtre de l’époux de Mme Reyes. En fait, les documents de la Cour indiquaient que les tueurs étaient des parents de la victime, avec qui il avait eu une longue dispute personnelle. D’autres documents faisaient état de menaces constantes contre l’avocat et les témoins de la famille dans l’affaire, ainsi que contre d’autres membres de la famille, y compris Mme Reyes. Cependant, il n’existe aucun renseignement révélant que les menaces venaient de la NAP. Encore, je ne peux trouver d’erreur dans le traitement par la Commission de la preuve présentée devant elle.

 

B.  Est‑ce que la Commission a commis une erreur en concluant que Mme Reyes pouvait bénéficier de la protection de l’État aux Philippines?

 

[9]               Je ne peux rejeter la conclusion de la Commission selon laquelle que Mme Reyes peut bénéficier de la protection de l’État que si je la trouve déraisonnable.

 

[10]           Mme Reyes prétend que la Commission n’a pas pris en considération les menaces constantes contre elle et a conclu à tort que les Philippines étaient capables de la protéger. La Commission a expressément mentionnée la preuve documentaire qui fait état à quelques reprises de menaces contre diverses personnes. Elle a aussi mentionné la prétention de Mme Reyes qu’elle et sa famille étaient menacées par la NAP. Je ne peux conclure que la Commission a passé sous silence la preuve relative aux menaces.


 

[11]           En outre, la preuve présentée à la Commission indiquait que les suspects du meurtre avaient été arrêtés rapidement et avaient été détenus en attendant leur procès. Il n’y avait pas de preuve que les Philippines ne pouvaient ou ne voulaient pas fournir la protection nécessaire à Mme Reyes ou à sa famille. Mme Reyes a assumé le fardeau de démontrer l’absence de protection par l’État. La conclusion de la Commission qu’elle n’avait pas réussi à s’acquitter de ce fardeau n’était pas déraisonnable.

 

[12]           Je note que Mme Reyes a reçu des informations plus récentes des Philippines, indiquant que son fils s’est fait blessé par balle en septembre 2004, et qu’il y a des problèmes avec le déroulement du procès contre les tueurs présumés de son époux. Cette information ne peut être utilisée pour attaquer la décision de la Commission, simplement parce qu’elle n’a pas été transmise à la Commission. Cependant, elle sera certainement pertinente et considérée sérieusement dans le cadre d’un examen des risques avant renvoi.

 

[13]           En me fondant sur l’analyse exposée ci‑dessus, je doit rejeter la présente demande de contrôle judiciaire. Aucune partie ne m’a proposé de question de portée générale aux fins de certification, et aucune n’est énoncée.

 


                                                                   JUGEMENT

 

 

LE JUGEMENT DE LA COUR EST le suivant :

 

1.         La demande de contrôle judiciaire est rejetée;

 

2.         Aucune question de portée générale n’est formulée.

 

 

                                                                                                                          _ James W. O’Reilly _         

                                                                                                                                                     Juge                       

 

 

 

Traduction certifiée conforme

David Aubry, LL.B.


                                                             COUR FÉDÉRALE

 

                                              AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                                    IMM‑3055‑04

 

 

INTITULÉ :                                                   LETICIA REYES

c.

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                             TORONTO (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                           LE 27 AVRIL 2005

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                                          LE JUGE O’REILLY

 

DATE DES MOTIFS :                                  LE 2 JUIN 2005

 

 

COMPARUTIONS :

 

Hamza N.H. Kisaka                                         POUR LA DEMANDERESSE

 

Bernard Assan                                      POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Hamza N.H. Kisaka                                         POUR LA DEMANDERESSE

Avocat

Toronto (Ontario)

 

John H. Sims, c.r.                                             POUR LE DÉFENDEUR

Sous‑procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

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