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Date : 20021002

 

Dossier : IMM‑4699‑01

 

OTTAWA (ONTARIO), LE 2 OCTOBRE 2002

 

EN PRÉSENCE DE MADAME LE JUGE LAYDEN‑STEVENSON

 

 

ENTRE :

                                                      CHRISTIAN JUAN RIGHI,

                                                    JORGE ALBERTO GARRO,

                                                   ALEXIS MAURICIO GARRO,

                                           ELENA RITA CARRIZO DE GARRO,

                                                ESTEFANIA LOURDES GARRO

 

                                                                                                                                       demandeurs

 

                                                                          - et -

 

 

                  LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

                                                                                                                                           défendeur

 

 

 

                                                               ORDONNANCE

 

 

La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

 

                                                                                                     « Carolyn A. Layden‑Stevenson »           

                                                                                                                                                     Juge                                

Traduction certifiée conforme

 

 

 

Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.


 

Date : 20021002

 

Dossier : IMM‑4699‑01

 

Référence neutre : 2000 CFPI 1032

 

 

ENTRE :

 

                                                      CHRISTIAN JUAN RIGHI,

                                                    JORGE ALBERTO GARRO,

                                                   ALEXIS MAURICIO GARRO,

                                           ELENA RITA CARRIZO DE GARRO,

                                                ESTEFANIA LOURDES GARRO

 

                                                                                                                                       demandeurs

 

                                                                          - et -

 

 

                  LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

                                                                                                                                           défendeur

 

 

 

                                                  MOTIFS DE L’ORDONNANCE

 

 

LE JUGE LAYDEN‑STEVENSON

 

 

[1]               Les demandeurs, qui sont citoyens de l’Argentine, sollicitent le contrôle judiciaire d’une décision par laquelle la Section du statut de réfugié de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (la SSR) a refusé de leur reconnaître le statut de réfugié.

 

 

[2]               Christian Juan Righi (Righi) est le revendicateur principal. Il affirme avoir raison de craindre d’être persécuté en Argentine du fait de son orientation sexuelle, puisqu’il est homosexuel. Jorge Alberto Garro (Garro) est le beau‑père de Righi. Il affirme pour sa part avoir raison de craindre d’être persécuté du fait de son appartenance à un groupe social, en l’occurrence un syndicat, de même qu’en tant que parent d’un homosexuel. Elena De Garro est la mère de Righi, Alexis Garro est son demi‑frère et Estefania De Garro est sa demi‑soeur mineure. Leur revendication du statut de réfugié est fondée sur la présumée persécution dont Righi serait victime en tant qu’homosexuel, ainsi que sur la présumée persécution dont Garro ferait l’objet en tant que syndiqué. Tous les demandeurs habitaient Mendoza avant de quitter l’Argentine.

 

[3]               En ce qui concerne la revendication de Garro fondée sur son appartenance à un syndicat, la SSR a conclu qu’il n’avait pas présenté de preuve convaincante qu’il ne pouvait pas obtenir de l’aide de la police, ou même de son propre syndicat, au sujet de ses allégations que la police l’avait pris pour cible parce qu’il avait participé à une manifestation. La SSR a plutôt accepté la preuve documentaire objective qui démontrait que les syndicats et les syndiqués ont le droit de manifester et de défendre librement leurs droits dans le domaine du travail en Argentine. La SSR a jugé non crédible le témoignage de ce revendicateur. Les conclusions que la SSR a tirées au sujet de la revendication que Garro fondait sur son appartenance à un syndicat ne sont pas contestées.

 


[4]               La SSR a conclu que les demandeurs n’avaient produit aucune preuve crédible ou digne de foi qui lui aurait permis de rendre une décision favorable et elle a conclu qu’ils avaient embelli et fabriqué leurs revendications du statut de réfugié dans le but de rester au Canada. La SSR a reconnu que le demandeur Righi était homosexuel mais elle a conclu qu’il avait une possibilité valable de refuge intérieur (PRI).

 

[5]               Un revendicateur ne peut être un refugié au sens de la Convention s’il existe une PRI. La question de savoir s’il existe ou non une PRI fait partie intégrante de la décision à prendre au sujet de la question de savoir si un revendicateur est un réfugié au sens de la Convention. La question doit être soulevée expressément lors de l’audience soit par l’agent chargé de la revendication, soit par la Commission et le revendicateur doit avoir l’occasion d’y répondre en présentant des éléments de preuve et des arguments. La Commission doit être convaincue, selon la prépondérance des probabilités, que le revendicateur ne court pas de risque grave d’être persécuté là où se trouve la PRI et qu’il ne serait pas déraisonnable, compte tenu de l’ensemble des circonstances, y compris celles qui touchent particulièrement le revendicateur, que celui‑ci cherche à trouver refuge là où se trouve la PRI (Rasaratnam c. Canada (ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1992] 1 C.F. 706 (C.A.)

 


[6]               La question consiste à savoir si, compte tenu de la persécution qui existe dans sa partie du pays, on peut raisonnablement s’attendre à ce que le revendicateur cherche refuge dans une autre partie plus sûre de son pays avant de chercher refuge au Canada ou ailleurs. C’est un critère objectif, et le fardeau de la preuve incombe au revendicateur. La possibilité de refuge dans une autre partie du même pays ne peut être seulement supposée ou théorique : elle doit être une option réaliste et abordable. L’autre partie plus sûre du même pays doit être réalistement accessible au demandeur. S’il est objectivement raisonnable de vivre dans une telle partie du pays sans craindre d’être persécuté, la possibilité de refuge dans une autre partie du même pays existe, et le revendicateur n’est pas un réfugié. Il ne s’agit pas de savoir si l’autre partie du pays plaît ou convient au demandeur, mais plutôt de savoir si on peut s’attendre à ce qu’il puisse s’accommoder de ce lieu avant d’aller chercher refuge à l’autre bout du monde (Thirunavukkarasu c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1994] 1 C.F. 589 (C.A.)

 

[7]               La SSR a conclu que les demandeurs avaient une PRI à Buenos Aires. Il est utile de reproduire la partie de sa décision dans laquelle la Commission aborde la question de l’existence d’une PRI. 

On a demandé au revendicateur pourquoi il ne pouvait pas déménager ailleurs en Argentine, par exemple à Buenos Aires. Le revendicateur a dit que la police pourrait chercher son nom dans l’ordinateur s’il essayait de déménager de sa province natale à Buenos Aires, et que la police irait le chercher là‑bas. Le tribunal a demandé au revendicateur pourquoi la police le rechercherait. Il a dit que la police est la même partout, faisant allusion aux préjugés des policiers contre les homosexuels, et que la police à Mendoza avait déjà prétendument menacé de tuer le revendicateur. Le tribunal a tenu compte de la preuve documentaire objective qui lui a été présentée pour jauger la déposition du revendicateur. À la lumière de l’information que nous avons sous les yeux sur la ville de Buenos Aires en tant que possibilité de refuge intérieur, nous concluons que la preuve démontre de façon convaincante que le revendicateur pourrait habiter en toute sécurité dans cette ville. Nous n’avons aucune preuve convaincante que la police de Mendoza ou du reste de l’Argentine s’intéresse à ce revendicateur.

 

 

Par conséquent, le tribunal conclut que les raisons données par le revendicateur pour expliquer son refus d’aller à Buenos Aires sont incompatibles avec la preuve documentaire objective dont le tribunal est saisi relativement au traitement qui est actuellement réservé aux personnes ayant une orientation sexuelle différente à Buenos Aires. Le tribunal ne trouve aucune preuve convaincante qu’il y a actuellement un climat d’intolérance envers les hommes homosexuels à Buenos Aires.


 

La preuve documentaire suivante se trouve dans le volumineux dossier présenté à titre de pièce R‑3 et renferme le renseignement suivant :

 

 

[TRADUCTION]  La ville de Buenos Aires et la ville de Rosario ont des lois sur les droits des homosexuels qui interdisent certaines formes de discrimination contre les homosexuels [...] Quatre syndicats d’Argentine ont maintenant accordé les avantages de l’assurance‑maladie prévus par le Système national de sécurité aux partenaires de même sexe de leurs employés. Les syndicats et le système administrent conjointement le système de soins de santé.

 

 

Cette information est corroborée par une réponse à une demande d’information qui se trouve dans le même dossier :

 

 

[TRADUCTION] Un article du Washington Post signale que peu après, « dans la ville cosmopolite de Buenos Aires, où la tolérance, d’après les défenseurs des droits des homosexuels de la ville, demeure plus élevée que dans les provinces argentines, une loi interdisant aux couples de même sexe de louer des chambres d’hôtel a été abrogée le mois dernier (août 1998), le maire invoquant le droit à la “sexualité libre” » (idem). On ajoute plus loin dans l’article :

 

 

Les mesures juridiques font ressortir un extraordinaire épanouissement de la culture homosexuelle ici. La semaine dernière, un nouveau magazine à tendance homosexuelle appelé Diez Porciento (10 pour cent), titre faisant allusion à la croyance selon laquelle une personne sur dix dans le monde est homosexuelle, a fait son apparition dans les kiosques à journaux de la ville. Au moins deux dramatiques télévisées populaires en Argentine ont maintenant des personnages homosexuels qui sont présentés sous un jour favorable; dans les deux émissions, des personnages ont échangé des baisers entre hommes et entre femmes.

 

 

« Nous vivons une révolution culturelle qui ne ressemble à aucune autre en Amérique latine » a déclaré Cristian Cravello, cofondateur de Diez Porciento, qui met en vedette la mode, la musique, l’art et la culture populaires qu’affectionnent les homosexuels. « Notre pays se modernise et est en train de se brancher sur les réseaux de communication et d’Internet du monde entier, et nos attitudes deviennent plus modernes et plus ouvertes ».

 

 


Ces attitudes sont bien visibles le long de la chic avenue Santa Fe, dans le quartier huppé Barrio Norte de Buenos Aires, où les jeunes homosexuels se rassemblent ouvertement dans des places bien éclairées les soirées de fins de semaine, tandis que des hommes habillés de façon voyante distribuent des coupons‑rabais et des réclames invitant les gens à se rendre dans les discothèques, restaurants et cafés fréquentés par les homosexuels.

 

 

Bien que la tolérance envers les homosexuels et les lesbiennes n’ait pas atteint ici le niveau observé dans la plupart des villes les plus ouvertes des États‑Unis et d’Europe, on peut dire que l’acceptation sociale est maintenant la plus élevée dans toute l’Amérique latine hispanophone... [Pièce R‑2, point 2, Réponse à la demande d’information ARG33227.E, 7 décembre 1999, CISR, p. 2.]

 

 

Le tribunal trouve cette information très convaincante quant au climat de tolérance et à l’acceptation croissante à Buenos Aires envers les personnes ayant une orientation sexuelle différente. Cela corrobore également la conclusion du tribunal selon laquelle ce revendicateur a une possibilité valable de refuge intérieur à Buenos Aires s’il retourne en Argentine.

 

 

Le tribunal signale que, d’après une preuve documentaire plus récente publiée par le Comité des droits de la personne de l’Association lesbienne et gaie internationale,

 

 

[TRADUCTION] Le  30 août 1996, l’Assemblée législative de Buenos Aires a adopté à l’unanimité une mesure interdisant la discrimination fondée sur le sexe, l’âge, la race, la religion, l’idéologie politique ou l’orientation sexuelle, faisant de Buenos Aires la première ville hispanophone d’Amérique latine à prendre une telle mesure. Le 24 septembre, l’Assemblée législative de la ville a adopté une disposition abrogeant les fameux décrets policiers qui permettaient à la police d’incarcérer arbitrairement des jeunes, travestis, gais, lesbiennes et prostituées, entre autres, sans aucune forme de contrôle judiciaire [Pièce R‑2, point 3, Argentina‑World Legal Survey, The International Lesbian and Gay Association, 23 décembre 1999, p. 3 ].

 

 

La preuve documentaire indique par ailleurs qu’en Argentine, [TRADUCTION] « les couples homosexuels ont maintenant droit aux pensions pour le conjoint survivant... les soins médicaux sont également assurés aux partenaires de même sexe... et la discrimination contre les transsexuels a pris fin, à la suite d’un arrêt faisant jurisprudence et permettant à une personne née homme de devenir femme » [Pièce R‑2, point 6, Réponse à la demande d’information ARG27761.E, 16 septembre 1997]. La preuve documentaire révèle encore [pièce R‑3, point 8, « Les gais en Argentine », QueerNet.org, 6 juin 1995; point 11, « Les lesbiennes, les gais, les travestis et les transsexuels se donnent la main à Buenos Aires », 11 octobre 1995; point 13, Rapport ILGA : Le 5e défilé de la fierté gaie à Buenos Aires : Le froid n’empêche pas l’ardeur des participants, le 1er juillet 1996; point 20, The Washington Post, 28 septembre 1997] qu’il y a une importante communauté homosexuelle à Buenos Aires et que les homosexuels peuvent maintenant mener ouvertement leurs activités sociales à tendance homosexuelle sans être harcelés, et encore moins persécutés par les autorités.

 

 

 


Même si le tribunal acceptait que le revendicateur a fait l’objet de harcèlement par des policiers de Mendoza, la preuve documentaire révèle l’existence de divers mécanismes gouvernementaux qui sont à la disposition du revendicateur s’il voulait porter plainte contre la police pour corruption ou violence ou activités illégales. Le revendicateur n’a donné aucune explication satisfaisante de son défaut de se prévaloir de ces recours nationaux décrits dans divers documents obtenus en réponse à des demandes d’information que l’on trouve à la pièce R‑3, notamment le document ARG35680.E du 13 octobre 2000. Mais le plus important est toutefois que, comme on l’a dit ci‑dessus, même si le tribunal concluait que le revendicateur est menacé à Mendoza, le tribunal conclut par ailleurs que l’abondante preuve documentaire qui lui a été présentée démontre de façon convaincante que le revendicateur dispose d’une possibilité valable de refuge intérieur à Buenos Aires.

 

 

 

[8]               La SSR s’est ensuite demandée si la situation à Buenos Aires était telle qu’il serait déraisonnable, compte tenu de l’ensemble des circonstances, y compris celles qui touchent particulièrement le revendicateur, que celui‑ci cherche à trouver refuge dans cette ville, autrement dit, s’il serait exagérément sévère d’exiger du revendicateur qu’il déménage dans une autre région du pays moins hostile, par exemple à Buenos Aires, avant de chercher à obtenir le statut de réfugié au sens de la Convention au Canada. La SSR a conclu que Buenos Aires constituait une option réaliste et abordable pour le revendicateur Righi. Voici le raisonnement qu’a suivi la SSR à cet égard : 

 

Le tribunal conclut que le revendicateur n’a pas réussi à démontrer qu’il serait déraisonnable pour lui de déménager à Buenos Aires. Au contraire, le tribunal trouve qu’il serait raisonnable de s’attendre à ce que le revendicateur puisse s’adapter raisonnablement bien à la vie à Buenos Aires, endroit proposé comme possibilité de refuge intérieur.

 

 


En tirant cette conclusion, le tribunal fait observer que le revendicateur a terminé ses études secondaires et a cinq ans d’expérience dans le monde du travail. Le tribunal détermine en outre à la lumière de la preuve documentaire qu’il est raisonnable de s’attendre à ce que le revendicateur obtienne l’appui d’au moins un des groupes de soutien des homosexuels à Buenos Aires, s’il avait besoin de ce soutien pour faciliter son adaptation à la vie dans la capitale. On a demandé au revendicateur pourquoi il n’a jamais adhéré à l’un ou l’autre des groupes de soutien des homosexuels en Argentine, ni même consulté l’un de ces groupes. Il a dit que ces groupes n’existent pas; or la pièce R‑3, dans laquelle on trouve notamment la trousse d’orientation sexuelle, démontre bel et bien l’existence de tels groupes, surtout dans la ville de Buenos Aires. Leur existence contribue à étayer notre conclusion quant à la viabilité de cette grande ville à titre de PRI pour le revendicateur.

 

 

Sur le plan pratique, le revendicateur parle la langue la plus couramment parlée à Buenos Aires et dans toute l’Argentine, nommément l’espagnol. Le tribunal conclut que cette capacité linguistique ne peut faire autrement que d’augmenter ses chances de pouvoir mener une vie raisonnablement enrichissante à Buenos Aires. Le tribunal sait pertinemment que le critère de la PRI ne consiste pas à trouver la perfection même dans la nouvelle localité; c’est plutôt un critère en deux volets énoncé ci‑dessus. Le tribunal considère donc Buenos Aires comme une possibilité intéressante de refuge intérieur pour ce revendicateur.

 

 

 

[9]               Les demandeurs soutiennent que la crédibilité n’est pas le seul facteur qui entre en jeu pour déterminer si le revendicateur Righi est un réfugié au sens de la Convention. Ils affirment que la SSR a commis une erreur en concluant que les homosexuels ne sont plus victimes de persécution en Argentine et en concluant qu’il existe une PRI valable. L’avocat des demandeurs affirme que la SSR a ignoré ou mal interprété certains éléments de preuve documentaire pour en arriver à ces conclusions et que, ce faisant, elle n’a pas tenu compte de l’ensemble de la preuve dont elle disposait. Les demandeurs citent six exemples d’éléments de preuve documentaires dont la SSR n’aurait pas tenu compte et ils soutiennent que le défaut de faire mention d’éléments de preuve pertinents constitue une erreur qui vicie la décision de la CISR et en justifie la révision.

 


[10]           J’ai attentivement examiné les pièces qui ont été versées au dossier, les arguments des avocats et les éléments de preuve expressément mentionnés par l’avocat. Il vaut tout d’abord la peine de noter que la SSR n’a pas tiré de conclusion générale au sujet de l’Argentine. Les commissaires saisis de l’affaire ont conclu que, même s’ils croyaient qu’il y avait une possibilité raisonnable que le revendicateur soit harcelé à Mendoza à cause de son orientation sexuelle, et même si les commissaires ont en outre conclu qu’un tel harcèlement constituerait cumulativement une forme de persécution à Mendoza, ils n’en estimaient pas moins que le revendicateur avait une possibilité valable de refuge intérieur (PRI) à Buenos Aires. En ce qui concerne les six éléments de preuve documentaire qui ont été cités, seulement deux ont trait à Buenos Aires. Sur les quatre qui restent, deux concernent l’Argentine en général et deux portent sur la province de Cordoba. Seuls les éléments de preuve qui concernent spécifiquement Buenos Aires sont pertinents lorsqu’il s’agit pour la SSR de conclure à l’existence d’une PRI.

 

[11]           Un de ces exemples porte sur des manifestations qui ont eu lieu devant l’Assemblée législative de Buenos Aires. Des travestis, des représentants de la communauté homosexuelle argentine, des associations de prostitué(e)s, des citoyens opposés à la prostitution et un groupe de retraités ont participé à ces manifestations. Des affrontements violents ont eu lieu avec la police au cours de ces manifestations. La preuve documentaire n’a pas la valeur probante qu’affirment les demandeurs et n’aide en rien leur thèse.

 


[12]           Le second exemple propre à Buenos Aires concerne deux descentes qui ont eu lieu dans deux bars gais de Buenos Aires. La première descente, qui a eu lieu le 2 octobre 1998, s’est soldée par l’arrestation d’une quarantaine de personnes. Dans les quarante minutes qui ont suivi, toutes les personnes arrêtées ont été remises en liberté sans qu’aucune n’ait fait l’objet d’accusations formelles. La seconde descente s’est produite au cours du même mois, sur l’ordre d’un juge. Des policiers sont entrés de force dans un pub et ont détenu plus de soixante‑dix personnes pour des infractions aux lois sur les jeux et la prévention. Les lois en question ont depuis été abrogées.

 

[13]           Il est de jurisprudence constante que la Commission est présumée avoir examiné l’ensemble de la preuve portée à sa connaissance (Hassan c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), (1992), 147 N.R. 317 (C.A.F.)). Elle doit s’en remettre entièrement à la preuve documentaire de préférence au témoignage du revendicateur (Zhou c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1994] A.C.F. no 1087 (C.A.). Les deux exemples propres à Buenos Aires ne possèdent pas, à mon avis, une valeur probante telle que la SSR était tenue de les citer expressément, de les examiner et de les analyser en détail. Mon examen du dossier m’a persuadée que la SSR a soupesé et examiné la totalité de la preuve. Le défaut de la SSR de se livrer à une analyse fouillée des éléments de preuve susmentionnés ne justifie pas mon intervention. Il était loisible à la SSR de conclure que le demandeur Righi avait une PRI.

 

[14]           La demande de contrôle judiciaire est rejetée. Les avocats n’ont pas suggéré de question à certifier. Aucune question n’est par conséquent certifiée.

 

 

                                                     « Carolyn A. Layden‑Stevenson »           

                                                                                                     Juge                              

Ottawa (Ontario)

Le 2 octobre 2002

 

Traduction certifiée conforme

 

 

Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.


                       COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                   SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

 

                     AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

No DU GREFFE :                       IMM‑4699‑01

 

 

INTITULÉ :                                Christian Juan Righi et autres c. M.C.I.

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :        Toronto (Ontario)

 

 

DATE DE L’AUDIENCE :       le 26 septembre 2002

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT DE MADAME LE JUGE LAYDEN‑STEVENSON

 

 

DATE DES MOTIFS :               le 2 octobre 2002

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Me Lani Gozlan                                                                       pour le demandeur

 

Me Pamela Larmondin                                                            pour le défendeur

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Me Lani Gozlan                                                                       pour le demandeur

Max Berger & Associates

Avocats et procureurs

103, rue Bay, bureau 207

Toronto (Ontario)  M5S 3A5

 

M. Morris Rosenbergpour le défendeur

Sous‑procureur général du Canada

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