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Date : 20050616

Dossier : IMM-9283-04

Référence : 2005 CF 852

Ottawa (Ontario), le 16 juin 2005

EN PRÉSENCE DE MADAME LE JUGE TREMBLAY-LAMER

ENTRE :

EVGENIA REVICH

partie demanderesse

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

partie défenderesse

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

[1]                 Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire à l'encontre d'une mesure de renvoi prise contre la demanderesse par le défendeur laquelle s'est transformée en mesure d'expulsion par l'effet combiné de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la Loi) et du Règlement sur l'immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227 (le Règlement).

[2]                 Le 19 septembre 2002, le défendeur a pris une mesure d'interdiction de séjour (MIS) contre la demanderesse conformément à l'alinéa 20(1)a) de la Loi et de l'article 6 du Règlement[1].

[3]                 En vertu du paragraphe 49(2) de la Loi, la MIS prise contre la demanderesse était conditionnelle et ne pouvait prendre effet tant que l'une des conditions prévues au paragraphe ne se soit réalisée. Le 23 octobre 2003, la Section de la protection des réfugiés (SPR) a rejeté la demande d'asile de la demanderesse.

[4]                 La MIS prise contre la demanderesse a pris effet 15 jours après la notification du rejet de sa demande d'asile (alinéa 49(2)c) de la Loi).

[5]                 Le 27 février 2004, la Cour fédérale a rejeté la demande d'autorisation déposée par la demanderesse à l'encontre de la décision de la SPR. Le rejet de la demande d'autorisation a mis fin au sursis de l'exécution de la MIS (alinéa 231(1)a) du Règlement). La MIS est devenue exécutoire le 27 février 2004 (paragraphe 48(1) de la Loi). Le 4 mars 2004, le procureur du défendeur a informé le défendeur du rejet par la Cour fédérale de la demande d'autorisation.

[6]                 Le 29 mars 2004, la MIS est devenue une mesure d'expulsion conformément au paragraphe 224(2) du Règlement.

[7]                 Le 22 mai 2004, lors de l'entrevue avec un agent d'exécution de la Loi, la demanderesse fut avisée de son droit à présenter une demande d'examen des risques avant renvoi (ERAR). L'avis donné le 22 mai 2004 a entraîné un sursis de l'exécution de la mesure d'expulsion, jusqu'à la décision ERAR (article 232 du Règlement).

[8]                 Le 23 septembre 2004, la demande ERAR fut rejetée. Tel que prévu à l'alinéa 232c) du Règlement, le sursis prévu à l'article 232 du Règlement a pris fin avec le rejet de la demande ERAR.

ANALYSE

[9]                 Suivant l'alinéa 160(3)a) du Règlement, le défendeur est tenu d'aviser les personnes visées par une mesure de renvoi, comme la présente demanderesse, qu'elles ont le droit de demander une décision ERAR (à moins que la personne ne soit visée par un certificat de sécurité pris en application du paragraphe 77(1) de la Loi). Cependant, ni la Loi ni le Règlement ne mentionnent à quel moment cet avis doit être délivré. Entre-temps, du fait que la demande d'asile de la personne a été rejetée, le sursis de l'exécution de la mesure de renvoi n'est plus en vigueur.

[10]            Autrement dit, la mesure de renvoi est « exécutoire » et, après un délai de 30 jours, la mesure deviendra une mesure d'expulsion à moins que la personne quitte volontairement le pays. Le Règlement prévoit également le sursis de l'exécution d'une mesure de renvoi lorsqu'une personne est avisée qu'elle peut présenter une demande ERAR.

[11]            La demanderesse ne s'attaque pas à l'effet combiné de ces dispositions législatives mais cible plutôt la décision du défendeur d'envoyer l'avis prévu à l'article 160 du Règlement après que la mesure de renvoi soit devenue une mesure d'expulsion, la privant ainsi de l'opportunité de bénéficier du sursis que la demande ERAR aurait déclenchée. Ainsi, la question essentielle qui sous-tend la présente demande est celle de savoir s'il est équitable pour le défendeur d'agir ainsi.

[12]            Dans le contexte de la prise de décision administrative, l'appréciation de l'équité procédurale implique de contrebalancer certains facteurs, comme la nature du régime législatif et les choix de procédure faits par l'entité administrative, l'importance de la décision pour l'intéressé ainsi que ses attentes légitimes (voir Baker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1999] 2 R.C.S. 817).

[13]            En l'espèce, la « décision » , à savoir d'envoyer l'avis après le moment où la mesure de renvoi est devenue une mesure d'expulsion a des conséquences importantes pour la demanderesse. Celle-ci ne peut pas rentrer au pays sans autorisation en raison de la mesure d'expulsion, alors qu'aucune autorisation ne serait nécessaire si la mesure d'interdiction de séjour prise à son encontre était toujours en place.

[14]            Toutefois, cela doit être apprécié en regard des objectifs du régime législatif. En ce qui a trait à l'ERAR, le juge Martineau a récemment expliqué l'ampleur et la justification de ce mécanisme dans la décision Figurado c. Canada (Solliciteur général), [2005] A.C.F. no 458 (C.F.) (QL), comme suit :

40     Le processus ERAR a été mis en oeuvre pour qu'une personne puisse demander l'examen des risques avant son renvoi du Canada plutôt qu'après. D'ailleurs, l'ERAR est le résultat de décisions de la Cour d'appel fédérale et de la Cour suprême du Canada dans lesquelles les juges ont demandé une évaluation en temps utile des risques, aux fins de l'article 7 de la Charte (Farhadi c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2000] A.C.F. no 646 (C.A.F.) (QL); Suresh c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2002] 1 R.C.S. 3). Bien entendu, en adoptant le processus ERAR, le législateur voulait surtout respecter les engagements nationaux et internationaux du Canada relativement au principe du non-refoulement (Résumé de l'étude d'impact de la réglementation, RIPR, Gazette du Canada, Partie I, le 15 décembre 2001, aux pages 4550 et 4552). En vertu du paragraphe 115(1) de la LIPR, Section 3 - Examen des risques avant renvoi qui englobe les articles 112 à 116 de la LIPR, aucune personne ne sera renvoyée du Canada à un pays où elle risque la persécution du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social ou de ses opinions politiques, ou encore risque la torture ou des traitements ou peines cruels et inusités. Bien entendu, ce droit souffre quelques exceptions qui sont mentionnées au paragraphe 115(2) de la LIPR (toutefois, pour les fins de la présente affaire, il n'est pas nécessaire de décider si ces exceptions contreviennent à l'article 7 de la Charte). Par conséquent, l'ERAR est étroitement liée à la date de renvoi prévue et elle est effectuée juste avant l'exécution de la mesure.

41       Conformément à l'article 232 du RIPR, les demandeurs d'ERAR bénéficient d'un sursis de la mesure de renvoi. Le législateur voulait donc que l'ERAR soit complété avant le renvoi des demandeurs pour faire face au risque qu'ils allèguent. L'ERAR a pour objet principal de décider si une personne peut être renvoyée d'une manière sécuritaire du Canada sans qu'elle soit exposée à la persécution, à la torture ou à des traitements inhumains. Cet objet cesse d'exister si la personne est renvoyée. [...]

[15]            Autrement dit, l'objectif d'un ERAR est d'éviter qu'un étranger, dont la demande d'asile a déjà été rejetée, puisse être contraint de retourner dans son pays de résidence ou de citoyenneté lorsque la situation a changé dans ce pays et qu'il serait exposé au risque d'être persécuté.

[16]            À mon avis, pour que cet examen soit efficace et conforme à l'intention qu'avait le législateur en le créant, l'ERAR doit coïncider autant que possible avec le départ de l'intéressé du pays.

[17]            En fait, les éléments énoncés dans le Guide des risques avant renvoi de CIC (le Guide) (section 15.4) pour déterminer à quel moment il est approprié d'aviser les personnes le démontrent. Ceux-ci se groupent autour de la capacité de la personne de quitter le pays (p. ex. si elle a un document de voyage valide), pour ainsi faire ressortir l'intention selon laquelle la décision ERAR devrait être rendue au moment où l'intéressé est susceptible de quitter le Canada, ou au moins à un moment qui s'en approche. Le Guide énonce ce qui suit :

15.4           L'évaluation du moment opportun pour l'avis d'un ERAR

Il y a plusieurs éléments qui peuvent déclencher l'envoi d'un avis de présenter une demande d'ERAR. En se basant sur l'examen du dossier et la disponibilité des documents de voyage, l'agent devrait déterminer quel est le moment le plus opportun pour aviser la personne de son droit de présenter une demande d'ERAR. L'avis peut être communiqué par la poste ou en personne, à la discrétion de l'agent et selon l'évaluation du dossier. Il est fortement recommandé de transmettre cet avis en personne dans la plupart des cas.

Voici quelques exemples de situations qui peuvent guider l'agent au moment où il doit évaluer le moment opportun pour aviser la personne qu'elle peut présenter une demande :

·          un document de voyage valide est disponible;

·          un document de voyage expiré ou un document d'identification ou de naissance valide est disponible et un document pour un aller simple, IMM 5149B peut être utilisé;

·          il n'y a aucun document de voyage valide, une demande a été présentée à une ambassade ou une mission pour en obtenir un et le document doit être émis sous peu; ou

·          il n'y a aucun document de voyage valide et une demande a été complétée et sera soumise à l'ambassade ou à la mission.

Bien que ces exemples ne soient pas exhaustifs, l'agent chargé des mesures de renvoi devrait être en mesure de juger si le dossier est prêt pour le renvoi selon son expérience ou de concert avec son superviseur, si nécessaire.

[18]            Le Guide est donc important au point de vue de l'équité. La politique adoptée par le défendeur n'a évidemment pas un caractère arbitraire et elle n'est pas fondée sur des considérations non pertinentes, lesquelles pourraient par ailleurs rendre la décision discrétionnaire inéquitable. Au contraire, les critères de la section 15.4 du Guide, lesquels envisagent la délivrance de l'avis qu'une fois que la possibilité de départ est en principe confirmée, sont conformes à l'objectif du mécanisme ERAR décrit ci-dessus.

[19]            De plus, le Guide établit également « [qu']il n'existe pas d'attente légitime ayant une incidence sur la nature de l'obligation d'équité » , Baker, précité, à la p. 841. En effet, une personne ne peut s'attendre à recevoir l'avis d'un ERAR avant que la MIS ne devienne une mesure d'expulsion puisqu'il ne s'agit pas d'une pratique habituelle du décideur administratif qui doit tenir compte de plusieurs éléments avant de décider du moment opportun, lesquels évidemment peuvent varier dans l'examen de chaque dossier.

[20]            Je reconnais que le délai créé par ce processus a pour effet de retarder généralement l'envoi de l'avis après que la MIS ne soit devenue une mesure d'expulsion. Cependant, je ne crois pas que cette situation soit inéquitable pour une personne.

[21]            L'ensemble du régime législatif, encore une fois selon moi, réduit la valeur de cette proposition. Prévoyant, d'une part, des sauvegardes cruciales comme le processus ERAR, en plus du processus ordinaire de demande d'asile, il existe un intérêt important à garantir que le cadre législatif sera efficace et généralement respecté. Cet intérêt se reflète dans les objectifs de la Loi, lesquels, parmi de nombreux engagements à remplir les obligations internationales et à promouvoir les droits de la personne en protégeant les réfugiés, comprennent ce qui suit :

3. (1) En matière d'immigration, la présente loi a pour objet :

[...]

f) d'atteindre, par la prise de normes uniformes et l'application d'un traitement efficace, les objectifs fixés pour l'immigration par le gouvernement fédéral après consultation des provinces;

[...]

3.(2) S'agissant des réfugiés, la présente loi a pour objet :

[...]

e) de mettre en place une procédure équitable et efficace qui soit respectueuse, d'une part, de l'intégrité du processus canadien d'asile et, d'autre part, des droits et des libertés fondamentales reconnus à tout être humain;

3. (1) The objectives of this Act with respect to immigration are

[...]

(f) to support, by means of consistent standards and prompt processing, the attainment of immigration goals established by the Government of Canada in consultation with the provinces;

[...]

3. (2) The objectives of this Act with respect to refugees are

[...]

(e) to establish fair and efficient procedures that will maintain the integrity of the Canadian refugee protection system, while upholding Canada's respect for the human rights and fundamental freedoms of all human beings;

[22]            Des dispositions qui visent à s'assurer du respect volontaire de la Loi et du Règlement font partie intégrante de cet important intérêt. Le Règlement, plus particulièrement le paragraphe 238(1), l'article 224 et le paragraphe 240(1), tentent clairement de faciliter le respect volontaire d'une mesure de renvoi devenue exécutoire :

238. (1) L'étranger qui souhaite se conformer volontairement à la mesure de renvoi doit comparaître devant l'agent afin que celui-ci vérifie :

a) s'il a les ressources suffisantes pour quitter le Canada à destination d'un pays où il sera autorisé à entrer;

b) s'il a l'intention de se conformer aux exigences prévues aux alinéas 240(1)a) à c) et s'il sera en mesure de le faire.

224. (1) L'exécution d'une mesure d'interdiction de séjour à l'égard d'un étranger est un cas prévu par règlement qui exonère celui-ci de l'obligation d'obtenir l'autorisation prévue au paragraphe 52(1) de la Loi pour revenir au Canada.

(2) L'étranger visé par une mesure d'interdiction de séjour doit satisfaire aux exigences prévues aux alinéas 240(1)a) à c) au plus tard trente jours après que la mesure devient exécutoire, à défaut de quoi la mesure devient une mesure d'expulsion.

240. (1) Qu'elle soit volontaire ou forcée, l'exécution d'une mesure de renvoi n'est parfaite que si l'étranger, à la fois :

a) comparaît devant un agent au point d'entrée pour confirmer son départ du Canada;

b) a obtenu du ministère l'attestation de départ;

c) quitte le Canada;

d) est autorisé à entrer, à d'autres fins qu'un simple transit, dans son pays de destination.

238. (1) A foreign national who wants to voluntarily comply with a removal order must appear before an officer who shall determine if

(a) the foreign national has sufficient means to effect their departure to a country that they will be authorized to enter; and

(b) the foreign national intends to voluntarily comply with the requirements set out in paragraphs 240(1)(a) to (c) and will be able to act on that intention.

224. (1) An enforced departure order is prescribed as a circumstance that relieves a foreign national from having to obtain authorization under subsection 52(1) of the Act in order to return to Canada.

(2) A foreign national who is issued a departure order must meet the requirements set out in paragraphs 240(1)(a) to (c) within 30 days after the order becomes enforceable, failing which the departure order becomes a deportation order.

240. (1) A removal order against a foreign national, whether it is enforced by voluntary compliance or by the Minister, is enforced when the foreign national

(a) appears before an officer at a port of entry to verify their departure from Canada;

(b) obtains a certificate of departure from the Department;

(c) departs from Canada; and

(d) is authorized to enter, other than for purposes of transit, their country of destination.

[23]            Il convient de souligner que le paragraphe 238(1), l'article 224 et le paragraphe 240(1) du Règlement ne portent d'aucune façon atteinte au droit d'une personne de présenter une demande d'ERAR. Le choix lui appartient si elle croit que les circonstances le justifient.

[24]            Dans le contexte d'un recours collectif éventuel à l'encontre du processus ERAR, la juge Snider, dans la décision Nalliah c. Canada (Solliciteur général), [2004] A.C.F. no 2005 (C.F.) (QL), a fait remarquer que, pour l'ensemble des demandes traitées, environ seulement 3 % des décisions ERAR étaient favorables; en d'autres termes, il est conclu que les demandeurs n'étaient exposés à aucun danger dans 97 % des cas. Ces renseignements statistiques ne minent d'aucune façon la fonction importante que le législateur a conférée au mécanisme ERAR, comme l'a décrite le juge Martineau dans la décision Figurado, précitée, à savoir de « respecter les engagements nationaux et internationaux du Canada relativement au principe du non-refoulement » . Il s'agit d'une sauvegarde importante qui doit demeurer, peu importe le résultat probable, statistiquement parlant. Cependant, dans l'optique du système, ces renseignements soulignent le fait qu'il y a peu d'instances où une personne qui s'est prévalue des recours offerts par la Loi, demeure à risque de persécution et ils mettent en lumière le fait que l' ERAR existe comme une soupape finale.

[25]            En résumé, si l'intéressé se conforme volontairement à une mesure de renvoi en vertu de l'article 238 du Règlement dans le délai requis, il peut éviter les conséquences d'une mesure d'expulsion. Par contre, le fait d'obliger le défendeur à délivrer un avis avant qu'une mesure d'expulsion entre en vigueur éliminerait, en retour, la principale incitation pour les personnes à se conformer volontairement à une mesure de renvoi avant une décision ERAR.

[26]            Malgré les conséquences pour la demanderesse, je ne peux conclure que la décision du défendeur d'envoyer l'avis après que la mesure d'interdiction de séjour ne devienne une mesure d'expulsion, ne réponde pas aux exigences de l'équité procédurale eu égard à l'objectif du processus ERAR qui est de servir de « sauvegarde » finale avant que l'intéressé ne doive quitter le pays.

[27]            En l'espèce, la demanderesse avait jusqu'au 29 mars 2004 pour quitter le Canada avant que la MIS ne devienne une mesure d'expulsion. Elle a choisi de demeurer au Canada et de présenter une demande ERAR. Sa demande ERAR lui a été refusée au motif qu'il n'y avait pas de risque personnel.

[28]            Je suis satisfaite que la demanderesse a bénéficié pleinement de tous les recours que lui offre la Loi. À mon avis, il n'y a rien d'inéquitable à ce qu'elle demande dans le futur une autorisation écrite pour revenir au Canada puisqu'elle savait que telle était la conséquence de son choix. La demanderesse n'a pas démontré que le défendeur a commis une erreur de droit ou de fait nécessitant l'intervention de cette Cour.

[29]            La demande de contrôle judiciaire est rejetée.


ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE :

[1]                 La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

[2]                 Le procureur de la demanderesse a demandé que la question suivante soit certifiée :

L'agent ERAR est-il tenu d'envoyer l'avis prévu sous l'article 160 du Règlement sur l'immigration et la protection des réfugiés avant que la mesure d'interdiction de séjour ne devienne une mesure d'expulsion mettant ainsi l'étranger dans une situation d'irrégularité ?

Advenant réponse affirmative à la question précédente, la mesure d'expulsion doit-elle être annulée ?

[3]                 Je suis satisfaite qu'il s'agit d'une question qui transcende les intérêts des parties au litige, qu'elle aborde des questions qui ont des conséquences importantes nécessaires pour trancher la présente affaire. Je certifierai donc la question proposée.

    « Danièle Tremblay-Lamer »

juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                        IMM-9283-04

INTITULÉ :                                       EVGENIA REVICH

                                                           et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

LIEU DE L'AUDIENCE :               Montréal, Québec

DATE DE L'AUDIENCE :              Le 18 mai 2005

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                     Madame le juge Danièle Tremblay-Lamer

DATE DES MOTIFS :                     Le 16 juin 2005

COMPARUTIONS:

Me Michel Lebrun                                                                   POUR DEMANDERESSE

Me Michèle Joubert                                                                POUR DÉFENDERESSE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:

Me Michel Le Brun

Lasalle (Québec)                                                                   POUR DEMANDERESSE

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada                                    POUR DÉFENDERESSE


ANNEXE

Les dispositions pertinentes de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés :

3. (1) En matière d'immigration, la présente loi a pour objet :

[...]

f) d'atteindre, par la prise de normes uniformes et l'application d'un traitement efficace, les objectifs fixés pour l'immigration par le gouvernement fédéral après consultation des provinces;

(2) S'agissant des réfugiés, la présente loi a pour objet :

[...]

e) de mettre en place une procédure équitable et efficace qui soit respectueuse, d'une part, de l'intégrité du processus canadien d'asile et, d'autre part, des droits et des libertés fondamentales reconnus à tout être humain;

20. (1) L'étranger non visé à l'article 19 qui cherche à entrer au Canada ou à y séjourner est tenu de prouver :

a) pour devenir un résident permanent, qu'il détient les visa ou autres documents réglementaires et vient s'y établir en permanence;

b) pour devenir un résident temporaire, qu'il détient les visa ou autres documents requis par règlement et aura quitté le Canada à la fin de la période de séjour autorisée.

(2) L'étranger visé au paragraphe 9(1) est tenu en outre, pour devenir résident permanent, de prouver qu'il détient le document délivré par la province en cause attestant que l'autorité compétente de celle-ci est d'avis qu'il répond à ses critères de sélection.

48. (1) La mesure de renvoi est exécutoire depuis sa prise d'effet dès lors qu'elle ne fait pas l'objet d'un sursis.

(2) L'étranger visé par la mesure de renvoi exécutoire doit immédiatement quitter le territoire du Canada, la mesure devant être appliquée dès que les circonstances le permettent.

49. (1) La mesure de renvoi non susceptible d'appel prend effet immédiatement; celle susceptible d'appel prend effet à l'expiration du délai d'appel, s'il n'est pas formé, ou quand est rendue la décision qui a pour résultat le maintien définitif de la mesure.

(2) Toutefois, celle visant le demandeur d'asile est conditionnelle et prend effet :

a) sur constat d'irrecevabilité au seul titre de l'alinéa 101(1)e);

b) sept jours après le constat, dans les autres cas d'irrecevabilité prévus au paragraphe 101(1);

c) quinze jours après la notification du rejet de sa demande par la Section de la protection des réfugiés ou, en cas d'appel, par la Section d'appel des réfugiés;

d) quinze jours après la notification de la décision prononçant le désistement ou le retrait de sa demande;

e) quinze jours après le classement de l'affaire au titre de l'avis visé aux alinéas 104(1)c) ou d).

3. (1) The objectives of this Act with respect to immigration are

[...]

(f) to support, by means of consistent standards and prompt processing, the attainment of immigration goals established by the Government of Canada in consultation with the provinces;

(2) The objectives of this Act with respect to refugees are

[...]

(e) to establish fair and efficient procedures that will maintain the integrity of the Canadian refugee protection system, while upholding Canada's respect for the human rights and fundamental freedoms of all human beings;

20. (1) Every foreign national, other than a foreign national referred to in section 19, who seeks to enter or remain in Canada must establish,

(a) to become a permanent resident, that they hold the visa or other document required under the regulations and have come to Canada in order to establish permanent residence; and

(b) to become a temporary resident, that they hold the visa or other document required under the regulations and will leave Canada by the end of the period authorized for their stay.

(2) A foreign national referred to in subsection 9(1) must also establish, to become a permanent resident, that they hold a document issued by the province indicating that the competent authority of the province is of the opinion that the foreign national complies with the province's selection criteria.

48. (1) A removal order is enforceable if it has come into force and is not stayed.

(2) If a removal order is enforceable, the foreign national against whom it was made must leave Canada immediately and it must be enforced as soon as is reasonably practicable.

49. (1) A removal order comes into force on the latest of the following dates:

(a) the day the removal order is made, if there is no right to appeal;

(b) the day the appeal period expires, if there is a right to appeal and no appeal is made; and

(c) the day of the final determination of the appeal, if an appeal is made.

(2) Despite subsection (1), a removal order made with respect to a refugee protection claimant is conditional and comes into force on the latest of the following dates:

(a) the day the claim is determined to be ineligible only under paragraph 101(1)(e);

(b) in a case other than that set out in paragraph (a), seven days after the claim is determined to be ineligible;

(c) 15 days after notification that the claim is rejected by the Refugee Protection Division, if no appeal is made, or by the Refugee Appeal Division, if an appeal is made;

(d) 15 days after notification that the claim is declared withdrawn or abandoned; and

(e) 15 days after proceedings are terminated as a result of notice under paragraph 104(1)(c) or (d).

Les dispositions pertinentes du Règlement sur l'immigration et la protection des réfugiés :

6. L'étranger ne peut entrer au Canada pour s'y établir en permanence que s'il a préalablement obtenu un visa de résident permanent.

160. (1) Sous réserve du paragraphe (2), pour l'application du paragraphe 112(1) de la Loi, toute personne peut faire une demande de protection après avoir reçu du ministère un avis à cet effet.

(2) La personne visée aux articles 165 ou 166 peut faire une demande de protection conformément à ces articles sans avoir reçu du ministère un avis à cet effet.

(3) L'avis est donné :

a) dans le cas de la personne visée par une mesure de renvoi ayant pris effet, avant son renvoi du Canada;

b) dans le cas de la personne mentionnée dans le certificat prévu au paragraphe 77(1) de la Loi, lorsque le résumé de la preuve visé à l'alinéa 78h) de la Loi est fourni.

(4) L'avis est donné :

a) soit sur remise en personne du formulaire de demande de protection;

b) soit à l'expiration d'un délai de sept jours suivant l'envoi par courrier du formulaire de demande de protection à la dernière adresse fournie au ministère par la personne.

224. (1) L'exécution d'une mesure d'interdiction de séjour à l'égard d'un étranger est un cas prévu par règlement qui exonère celui-ci de l'obligation d'obtenir l'autorisation prévue au paragraphe 52(1) de la Loi pour revenir au Canada.

(2) L'étranger visé par une mesure d'interdiction de séjour doit satisfaire aux exigences prévues aux alinéas 240(1)a) à c) au plus tard trente jours après que la mesure devient exécutoire, à défaut de quoi la mesure devient une mesure d'expulsion.

(3) Si l'étranger est détenu au cours de la période de trente jours ou s'il est sursis à la mesure de renvoi prise à son égard, la période de trente jours est suspendue jusqu'à sa mise en liberté ou jusqu'au moment où la mesure redevient exécutoire.

231. (1) Sous réserve des paragraphes (2) à (4), la demande d'autorisation de contrôle judiciaire faite conformément au paragraphe 72(1) de la Loi à l'égard d'une décision rendue par la Section de la protection des réfugiés rejetant la demande d'asile emporte sursis de la mesure de renvoi jusqu'au premier en date des événements suivants :

a) la demande d'autorisation est rejetée;

b) la demande d'autorisation est accueillie et la demande de contrôle judiciaire est rejetée sans qu'une question soit certifiée pour la Cour fédérale d'appel;

c) si la Section de première instance de la Cour fédérale certifie une question :

(i) soit l'expiration du délai d'appel sans qu'un appel ne soit interjeté,

(ii) soit le rejet de la demande par la Cour d'appel fédérale et l'expiration du délai de dépôt d'une demande d'autorisation d'en appeler à la Cour suprême du Canada sans qu'une demande ne soit déposée;

d) si l'intéressé dépose une demande d'autorisation d'interjeter appel auprès de la Cour suprême du Canada du jugement de la Cour d'appel fédérale visé à l'alinéa c), la demande est rejetée;

e) si la demande d'autorisation visée à l'alinéa d) est accueillie, l'expiration du délai d'appel sans qu'un appel ne soit interjeté ou le jugement de la Cour suprême du Canada rejetant l'appel.

(2) Le paragraphe (1) ne s'applique pas dans le cas où, dans sa décision, la Section de la protection des réfugiés fait état, conformément au paragraphe 107(2) de la Loi, de l'absence d'un minimum de fondement de la demande d'asile.

(3) Il n'est pas sursis à la mesure de renvoi si l'intéressé fait l'objet :

a) soit d'une mesure de renvoi du fait qu'il est interdit de territoire pour grande criminalité;

b) soit, s'il réside ou séjourne aux États-Unis ou à Saint-Pierre-et-Miquelon, du rapport prévu au paragraphe 44(1) de la Loi à son entrée au Canada.

(4) Le paragraphe (1) ne s'applique pas si la personne demande une prolongation du délai pour déposer l'une des demandes visées à ce paragraphe.

232. Il est sursis à la mesure de renvoi dès le moment où le ministère avise l'intéressé aux termes du paragraphe 160(3) qu'il peut faire une demande de protection au titre du paragraphe 112(1) de la Loi. Le sursis s'applique jusqu'au premier en date des événements suivants :

a) le ministère reçoit de l'intéressé confirmation écrite qu'il n'a pas l'intention de se prévaloir de son droit;

b) le délai prévu à l'article 162 expire sans que l'intéressé fasse la demande qui y est prévue;

c) la demande de protection est rejetée;

d) s'agissant d'une personne à qui l'asile a été conféré aux termes du paragraphe 114(1) de la Loi et qui n'a pas fait sa demande de séjour au Canada à titre de résident permanent dans le délai prévu au paragraphe 175(1), l'expiration du délai;

e) s'agissant d'une personne à qui l'asile a été conféré aux termes du paragraphe 114(1) de la Loi, la décision quant à sa demande de séjour au Canada à titre de résident permanent;

f) s'agissant d'une personne visée au paragraphe 112(3) de la Loi, la révocation du sursis prévue au paragraphe 114(2) de la Loi.

238. L'étranger qui souhaite se conformer volontairement à la mesure de renvoi doit comparaître devant l'agent afin que celui-ci vérifie :

a) s'il a les ressources suffisantes pour quitter le Canada à destination d'un pays où il sera autorisé à entrer;

b) s'il a l'intention de se conformer aux exigences prévues aux alinéas 240(1)a) à c) et s'il sera en mesure de le faire.

(2) L'étranger doit ensuite soumettre à l'approbation de l'agent le pays de destination qu'il a choisi; l'approbation n'est refusée que dans les cas suivants :

a) l'étranger constitue un danger pour le public;

b) il est un fugitif recherché par la justice au Canada ou dans un autre pays;

c) il cherche à échapper à des contraintes juridiques au Canada ou dans un autre pays.

240. Qu'elle soit volontaire ou forcée, l'exécution d'une mesure de renvoi n'est parfaite que si l'étranger, à la fois :

a) comparaît devant un agent au point d'entrée pour confirmer son départ du Canada;

b) a obtenu du ministère l'attestation de départ;

c) quitte le Canada;

d) est autorisé à entrer, à d'autres fins qu'un simple transit, dans son pays de destination.

(2) Si l'étranger à l'égard duquel la mesure de renvoi n'a pas été exécutée demande, à l'extérieur du Canada, un visa ou l'autorisation de revenir au Canada, l'agent exécute la mesure de renvoi si, à l'issue d'un contrôle, l'étranger fait la preuve de ce qui suit :

a) il est bien la personne visée par la mesure de renvoi;

b) il a obtenu l'autorisation de séjourner dans le pays où il se trouve effectivement au moment où il fait sa demande;

c) il n'est pas interdit de territoire pour raison de sécurité, pour atteinte aux droits humains ou internationaux, pour grande criminalité ou pour criminalité organisée.

6. A foreign national may not enter Canada to remain on a permanent basis without first obtaining a permanent resident visa.

160. (1) Subject to subsection (2) and for the purposes of subsection 112(1) of the Act, a person may apply for protection after they are given notification to that effect by the Department.

(2) A person described in section 165 or 166 may apply for protection in accordance with that section without being given notification to that effect by the Department.

(3) Notification shall be given

(a) in the case of a person who is subject to a removal order that is in force, before removal from Canada; and

(b) in the case of a person named in a certificate described in subsection 77(1) of the Act, on the provision of a summary under paragraph 78(h) of the Act.

(4) Notification is given

(a) when the person is given the application for protection form by hand; or

(b) if the application for protection form is sent by mail, seven days after the day on which it was sent to the person at the last address provided by them to the Department.

224. (1) An enforced departure order is prescribed as a circumstance that relieves a foreign national from having to obtain authorization under subsection 52(1) of the Act in order to return to Canada.

(2) A foreign national who is issued a departure order must meet the requirements set out in paragraphs 240(1)(a) to (c) within 30 days after the order becomes enforceable, failing which the departure order becomes a deportation order.

(3) If the foreign national is detained within the 30-day period or the removal order against them is stayed, the 30-day period is suspended until the foreign national's release or the removal order becomes enforceable.

231. (1) Subject to subsections (2) to (4), a removal order is stayed if the subject of the order has filed an application for leave for judicial review in accordance with subsection 72(1) of the Act with respect to a determination of the Refugee Protection Division to reject a claim for refugee protection, and the stay is effective until the earliest of the following:

(a) the application for leave is refused,

(b) the application for leave is granted, the application for judicial review is refused and no question is certified for the Federal Court of Appeal,

(c) if a question is certified by the Federal Court--Trial Division,

(i) the appeal is not filed within the time limit, or

(ii) the Federal Court of Appeal decides to dismiss the appeal, and the time limit in which an application to the Supreme Court of Canada for leave to appeal from that decision expires without an application being made,

(d) if an application for leave to appeal is made to the Supreme Court of Canada from a decision of the Federal Court of Appeal referred to in paragraph (c), the application is refused, and

(e) if the application referred to in paragraph (d) is granted, the appeal is not filed within the time limit or the Supreme Court of Canada dismisses the appeal.

(2) Subsection (1) does not apply if the Refugee Protection Division states in its decision, in accordance with subsection 107(2) of the Act, that there is no credible basis for the claim.

(3) There is no stay of removal if

(a) the person is subject to a removal order because they are inadmissible on grounds of serious criminality; or

(b) the subject of the removal order resides or sojourns in the United States or St. Pierre and Miquelon and is the subject of a report prepared under subsection 44(1) of the Act on their entry into Canada.

(4) Subsection (1) does not apply if the person applies for an extension of time to file an application referred to in that subsection.

232. A removal order is stayed when a person is notified by the Department under subsection 160(3) that they may make an application under subsection 112(1) of the Act, and the stay is effective until the earliest of the following events occurs:

(a) the Department receives confirmation in writing from the person that they do not intend to make an application;

(b) the person does not make an application within the period provided under section 162;

(c) the application for protection is rejected;

(d) if a decision to allow the application for protection is made under paragraph 114(1)(a) of the Act and the person has not made an application within the period provided under subsection 175(1) to remain in Canada as a permanent resident, the expiry of that period;

(e) if a decision to allow the application for protection is made under paragraph 114(1)(a) of the Act, the decision with respect to the person's application to remain in Canada as a permanent resident is made; and

(f) in the case of a person to whom subsection 112(3) of the Act applies, the stay is cancelled under subsection 114(2) of the Act.

238. A foreign national who wants to voluntarily comply with a removal order must appear before an officer who shall determine if

(a) the foreign national has sufficient means to effect their departure to a country that they will be authorized to enter; and

(b) the foreign national intends to voluntarily comply with the requirements set out in paragraphs 240(1)(a) to (c) and will be able to act on that intention.

(2) Following the appearance referred to in subsection (1), the foreign national must submit their choice of destination to the officer who shall approve the choice unless the foreign national is

(a) a danger to the public;

(b) a fugitive from justice in Canada or another country; or

(c) seeking to evade or frustrate the cause of justice in Canada or another country.

240. A removal order against a foreign national, whether it is enforced by voluntary compliance or by the Minister, is enforced when the foreign national

(a) appears before an officer at a port of entry to verify their departure from Canada;

(b) obtains a certificate of departure from the Department;

(c) departs from Canada; and

(d) is authorized to enter, other than for purposes of transit, their country of destination.

(2) If a foreign national against whom a removal order has not been enforced is applying outside Canada for a visa or an authorization to return to Canada, an officer shall enforce the order if, following an examination, the foreign national establishes that

(a) they are the person described in the order;

(b) they have been lawfully admitted to the country in which they are physically present at the time that the application is made; and

(c) they are not inadmissible on grounds of security, violating human or international rights, serious criminality or organized criminality.



[1]           Les dispositions pertinentes sont reproduites en annexe.

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