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Date : 20010704

Dossier : IMM-4537-00

Référence neutre : 2001 CFPI 756

ENTRE :

                                                    GALLET SAMPU

                                                                                                                        demandeur

                                                                                 - et -

                 LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                         défendeur

                                           MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE TREMBLAY-LAMER:

[1]                 La Cour est saisie d'une demande de contrôle judiciaire d'une décision en date du 4 août 2000 par laquelle la Section du statut de réfugié de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la Commission) a refusé de reconnaître le statut de réfugié au sens de la Convention à M. Gallet Sampu (le demandeur).


[2]    Le demandeur est un citoyen de la République démocratique du Congo, anciennement le Zaïre. Il a revendiqué le statut de réfugié au sens de la Convention parce qu'il craignait d'être persécuté en raison de ses présumées opinions politiques et de son appartenance à un groupe social déterminé.

[3]    Le demandeur soutenait qu'il craignait d'être persécuté parce qu'il s'était soustrait au service militaire obligatoire et qu'il avait adhéré au principal groupe d'opposition au Congo, l'UDPS (Union pour la démocratie et le progrès social).

[4]    En particulier, le demandeur affirmait avoir été détenu pendant plusieurs jours par les autorités gouvernementales et avoir été torturé parce qu'il avait exécuté en public un chant qui avait été perçu comme une critique du régime. Le demandeur alléguait aussi que les autorités gouvernementales avaient l'intention de le contraindre à servir dans l'armée avant qu'il ne s'évade de prison.

[5]    La Commission a rejeté la revendication du demandeur au motif que la preuve présentée au sujet de son affiliation à l'UDPS n'était pas crédible. La Commission a conclu que le demandeur ne connaissait pas bien la structure interne de l'UDPS (particulièrement sa cellule) et que sa description de sa carte de membre contredisait la preuve documentaire.


[6]    La Commission a également tiré une inférence négative du défaut du demandeur de produire quelque document que ce soit pour corroborer son appartenance à l'UDPS, compte tenu du fait qu'il ressort de la preuve documentaire que l'UDPS est dotée d'un mécanisme complexe de vérification de la qualité de membre.

[7]    En particulier, la Commission n'a pas jugé crédible l'explication du demandeur suivant laquelle il n'avait pas d'argent pour régler sa cotisation de l'UDPS au Canada (condition obligatoire pour vérifier sa qualité de membre), vu le grand nombre de Zaïrois à Toronto qui auraient pu le dépanner financièrement ou l'aider d'une autre façon à trouver un moyen d'établir sa qualité de membre.

[8]    L'avocat du demandeur soutient que la Commission a commis une erreur de droit en rejetant la revendication du demandeur pour ce seul motif sans évaluer sa crédibilité au sujet d'un des aspects essentiels de la revendication. Je suis du même avis.

[9]    La Commission avait bien sûr le droit de tenir compte de tous les éléments sur lesquels elle s'est fondée pour apprécier la crédibilité du demandeur, y compris son appartenance à l'UDPS, mais elle n'a pas abordé le fondement de la revendication du demandeur, en l'occurrence son arrestation et les tortures qu'il avait subies par suite de son exécution d'un chant que les autorités gouvernementales considéraient comme une critique et le fait qu'il s'était soustrait à l'enrôlement obligatoire dans l'armée.


[10]            Je conclus que la Commission a commis une erreur de droit en ne tenant pas compte de l'ensemble des éléments de preuve dont elle disposait pour appuyer la revendication du demandeur.

[11]            Dans le jugement Ahangaran c. M.C.I., (1999) 168 F.T.R. 315, le juge McGillis en est arrivée à la même conclusion dans une situation semblable dans laquelle la Commission avait rejeté la revendication du demandeur en tirant des conclusions au sujet de la crédibilité de ce dernier qui reposaient uniquement sur des éléments relatifs aux déplacements du demandeur après son départ de son pays, notamment son utilisation de faux documents de voyage et d'identité. Le juge McGillis a déclaré ce qui suit, au paragraphe 5 :

L'avocat du demandeur a soutenu, entre autres, que la Commission avait commis une erreur lorsqu'elle avait omis d'examiner l'ensemble des éléments de preuve déposés pour étayer la revendication de son client. Je souscris à cet argument. Un examen des motifs de la Commission confirme que celle-ci a effectivement omis d'examiner le fondement de la prétention du demandeur concernant le fait qu'il serait persécuté en Iran. En effet, les conclusions que la Commission a tirées en matière de crédibilité sont fondées exclusivement sur des questions concernant les déplacements du demandeur après qu'il a quitté l'Iran, y compris des questions telle l'utilisation qu'il a faite de faux documents de voyage et d'identité. Bien que la Commission eût le droit de tenir compte de toutes les questions sur lesquelles elle s'est fondée pour apprécier la crédibilité du demandeur, elle devait également apprécier la crédibilité du témoignage du demandeur concernant le fondement de la revendication du statut de réfugié qu'il a déposée. L'omission, de la part de la Commission, de tenir compte de l'ensemble de la preuve dont elle disposait constitue une erreur de droit.


[12]            Bien que je reconnaisse que l'affaire Ahangaran, précitée, portait sur une question moins importante, j'estime néanmoins que le principe posé dans ce jugement s'applique en l'espèce. La Commission avait l'obligation d'apprécier la crédibilité de la preuve sur tous les aspects essentiels de la revendication. L'adhésion à l'UDPS était un facteur pertinent, mais elle n'avait rien à voir avec les motifs pour lesquels le demandeur avait été arrêté et les raisons pour lesquelles il avait été forcé de s'enrôler dans l'armée.

[13]            La demande de contrôle judiciaire est accueillie. L'affaire est renvoyée à la Commission pour être examinée de nouveau par un tribunal différemment constitué.

« Danièle Tremblay-Lamer »                                                                       

                             Juge                              

Toronto (Ontario)

Le 4 juillet 2001.

Traduction certifiée conforme

Martine Guay, LL. L.


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                                                               Avocats inscrits au dossier

DOSSIER :                                IMM-4537-00

INTITULÉ :                               GALLET SAMPU

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

DATE DE L'AUDIENCE :     MARDI 3 JUILLET 2001

LIEU DE L'AUDIENCE :      TORONTO (ONTARIO)

MOTIFS DE L'ORDONNANCE DU JUGE TREMBLAY-LAMER

DATE DES MOTIFS :           MERCREDI 4 JUILLET 2001

COMPARUTIONS:

M. Crane                                                                           POUR LE DEMANDEUR

D. Tyndale                                                                  POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

M. Crane                                                                           POUR LE DEMANDEUR

Avocat

166, rue Pearl, bureau 200

Toronto (Ontario)

M5H 1L3

Morris Rosenberg                                                              POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

Date : 20010704

Dossier : IMM-4537-00

ENTRE :

GALLET SAMPU

                                                                                                                                                            demandeur

- et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

                                                                                       

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

                                                                                       


Date : 20010703

Dossier : IMM-4537-00

Toronto (Ontario), le mardi 3 juillet 2001

EN PRÉSENCE DE :       Madame le juge Tremblay-Lamer

ENTRE :

GALLET SAMPU

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

                                                                        ORDONNANCE

La demande de contrôle judiciaire est accueillie. L'affaire est renvoyée à la Commission pour être examinée de nouveau par un tribunal différemment constitué.

« Danièle Tremblay-Lamer »                                                                                       

                                     Juge                                 

Traduction certifiée conforme

Martine Guay, LL. L.

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