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Date : 19990923

Dossier : IMM-1345-99

ENTRE :

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,

demandeur,

et

KEVIN RICHARD ALYEA,

défendeur.

MOTIFS D'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

LE JUGE CAMPBELL

[1]    Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire de la décision, datée du 15 mars 1999, dans laquelle l'arbitre Daphne Shaw Dyck de la Section d'arbitrage de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié a mis le défendeur en liberté en application du par. 103(3) de la Loi sur l'immigration.

Le contexte

[2]    Kevin Richard Alyea est arrivé au Canada le 27 mai 1983 et il a le statut de résident permanent.

[3]    Par suite d'incidents survenus entre 1990 et 1995, M. Alyea a, le 9 janvier 1997, été reconnu coupable, devant un juge et jury, de deux accusations d'agression sexuelle et de trois accusations de contacts sexuels, deux infractions prévues respectivement aux articles 271 et 151 du Code criminel du Canada.

[4]    Le 3 avril 1997, M. Alyea a été condamné à 30 mois d'emprisonnement pour chaque accusation d'agression sexuelle et à 18 mois d'emprisonnement pour chaque accusation de contacts sexuels, ces peines devant être purgées de façon concurrente.

[5]    Le 10 novembre 1997, la Cour d'appel de la Colombie-Britannique a annulé deux des trois condamnations relatives aux accusations de contacts sexuels, de sorte qu'il restait deux condamnations pour agression sexuelle et une condamnation pour contacts sexuels.

[6]    Le 2 juillet 1998, un rapport a été produit par un agent d'immigration en application de l'al. 27(1)d) de la Loi sur l'immigration. Ce rapport mentionnait que M. Alyea avait le statut de résident permanent au Canada. Le 20 novembre 1998, un représentant du ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration s'est dit d'avis que M. Alyea constitue un danger pour le public en vertu du par. 70(5) et du sous-al. 46.01(1)e)(iv) de la Loi sur l'immigration.

[7]    Le 5 mars 1999, M. Alyea a été mis en liberté par la Commission nationale des libérations conditionnelles, qui lui a imposé les conditions suivantes :

[TRADUCTION]

1. Doit éviter tout contact avec les victimes de cette infraction. Ne doit avoir aucun contact avec tout individu ou groupe d'individus âgés de moins de dix-huit ans avant d'avoir obtenu au préalable l'autorisation d'un surveillant de liberté conditionnelle, ni se trouver en présence de tels individus avant d'avoir obtenu une telle autorisation.

2. Doit résider dans un CCC/CRF. Aucune autorisation de passer la nuit ailleurs sans enquête communautaire favorable et sans l'appui d'un surveillant de libération conditionnelle. Sera évalué 90 jours avant la date d'expiration du mandat afin que la solution la moins restrictive soit toujours en vigueur.

3. Doit éviter de passer par des endroits où il est probable que s'y trouvent des enfants de moins de dix-huit ans, tels des terrains de jeux, des cours d'école et des arcades de jeux vidéos. Pouvoir discrétionnaire accordé au surveillant de libération conditionnelle.

4. Participer chaque semaine à des séances d'orientation de groupe de délinquants sexuels. Participation active requise. Doit aussi participer à des séances d'orientation individuelles données par un psychologue.

La décision faisant l'objet de la présente demande

[8]         Le 18 mars 1999, la détention pour fins d'immigration de M. Alyea a été examinée par l'arbitre qui a ordonné sa mise en liberté, sous réserve des conditions que la Commission nationale des libérations conditionnelles lui avait imposées et des exigences supplémentaires suivantes :

[TRADUCTION]

a) Que M. Alyea fournisse au ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration son adresse avant d'être libéré et qu'il ne déménage pas avant d'avoir avisé le Ministère.

b) Que M. Alyea se présente aux bureaux de l'Immigration à Prince George (Colombie-Britannique) les mardis et jeudis à partir du 23 mars 1999.

c) Que M. Alyea se présente à la demande de l'agent d'immigration pour toute fin légitime en application de la Loi sur l'immigration, ce qui comprend, si nécessaire, son renvoi du Canada, et qu'il se présente en vue de la reprise de l'enquête en matière d'immigration le concernant.

L'analyse

[9]         Le demandeur soutient que l'arbitre a décidé, dans sa décision, d'adopter simplement la décision de la Commission nationale des libérations conditionnelles et, en conséquence, qu'elle a omis de tirer une conclusion indépendante en ce qui concerne la question de la libération de M. Alyea.

[10]       Cependant, il ressort clairement du dossier que l'arbitre a analysé les arguments que l'agent chargé de présenter le cas a soulevés concernant le danger éventuel que M. Alyea pourrait poser s'il était libéré. À la page 19 de la transcription de l'instance, l'arbitre analyse en détail les crimes que M. Alyea a commis. En particulier, elle a dit, aux lignes 4 à 6 :

[TRADUCTION] Une affaire de cette nature est très délicate, comme vous le savez bien. Vous avez été reconnu coupable par un tribunal d'avoir commis des crimes extrêmement répugnants contre des enfants. J'estime devoir accorder beaucoup d'importance à cela en prenant ma décision.

Plus loin, à la page 21 de la transcription, elle dit :

[TRADUCTION] Bien entendu, la nature des crimes que vous avez été reconnu coupable d'avoir commis me préoccupe. À mon avis, les conditions que la Commission des libérations conditionnelles vous a imposées de même que celles que je vous imposerais auraient pour effet de minimiser tout danger éventuel pour le public.

[11]       En conséquence, j'estime qu'il ressort de la transcription et de l'ordonnance de mise en liberté que l'arbitre a pris en considération les arguments que l'agent chargé de présenter le cas a soulevés et qu'elle a décidé d'en tenir compte en incorporant les conditions énoncées par la Commission nationale des libérations conditionnelles et en y ajoutant ses propres conditions. Ces conditions supplémentaires visaient à traiter de la préoccupation de l'arbitre, qui voulait s'assurer que M. Alyea se présente tel que requis dans le cadre de toute autre instance en matière d'immigration le concernant.

[12]       En conséquence, j'estime qu'en l'espèce, l'arbitre n'a pas simplemente adopté la décision de la Commission nationale des libérations conditionnelles sans exercer de façon indépendante sa compétence.

[13]       En conséquence, le présent appel est rejeté.

« Douglas Campbell »

                                                                                                                                    juge

Vancouver (Colombie-Britannique)

Le 23 septembre 1999.

Traduction certifiée conforme

Bernard Olivier, B.A., LL.B.


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

NO DU GREFFE :                                 IMM-1345-99

INTITULÉ DE LA CAUSE :    MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE                                                              L'IMMIGRATION

                                                            c.

                                                            KEVIN RICHARD ALYEA

LIEU DE L'AUDIENCE :                     VANCOUVER (C.-B.)

DATE DE L'AUDIENCE :                   LE 15 SEPTEMBRE 1999

MOTIFS D'ORDONNANCE ET ORDONNANCE RENDUS PAR M. LE JUGE CAMPBELL

EN DATE DU :                                     23 SEPTEMBRE 1999

ONT COMPARU :

M. KIM SHANE                                  POUR LE DEMANDEUR

M. ZOOL SULEMAN                         POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

MORRIS ROSENBERG                      POUR LE DEMANDEUR

SOUS-PROCUREUR GÉNÉRAL

DU CANADA

SULEMAN & COMPANY                 POUR LE DÉFENDEUR

VANCOUVER (C.-B.)

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