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Date : 20040714

Dossier : IMM-3119-03

Référence : 2004 CF 950

Vancouver (Colombie-Britannique), le 14 juillet 2004

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE BEAUDRY

ENTRE :

                                                    MAHADEVAN SINNADURAI

                                                                                                                                          demandeur

                                                                             et

                                            LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                           défendeur

                      MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE MODIFIÉS

(modifiant mes motifs de l'ordonnance et mon ordonnance datés du 2 juillet 2004)

LE JUGE BEAUDRY

[1]                Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire relative à la décision datée du 3 avril 2003 par laquelle la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (Commission) a statué que le demandeur n'était pas un réfugié au sens de la Convention ni une personne à protéger.

[2]                La requête du défendeur en vue de faire rejeter la demande de contrôle judiciaire est accueillie pour les motifs exposés ci-après.

[3]                Dans sa demande visant à faire réviser la décision contestée, le demandeur a allégué qu'il craignait avec raison d'être persécuté par les forces armées sri-lankaises et par les Tigres de libération de l'Eelam tamoul (TLET) du fait de sa race, de sa nationalité, de ses opinions politiques et de son appartenance à un groupe social, soit les Tamouls de Jaffna. Il a également allégué qu'il était une personne à protéger.

[4]                Le demandeur est arrivé au Canada le 27 septembre 1998. Le 28 juin 1999, la Section du statut de réfugié (SSR) a statué que le demandeur n'était pas crédible et qu'il ne craignait pas avec raison d'être persécuté. Le 29 octobre 1999, la Cour fédérale a rejeté la demande d'autorisation du demandeur. Le 20 novembre 2001, le demandeur est allé aux États-Unis. Il est revenu au Canada le 20 février 2002 et a demandé l'asile le même jour. Sa demande d'autorisation a été accueillie par suite de la décision négative du 3 avril 2003.

[5]                Étant donné que le demandeur est resté aux États-Unis pendant environ trois mois avant de venir au Canada en février 2002, le défendeur a entrepris, conformément à l'alinéa 231(3)b) du Règlement sur l'immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227, des démarches pour renvoyer le demandeur aux États-Unis.

[6]                Il appert de la preuve présentée par le défendeur que le demandeur a quitté volontairement le Canada pour aller au Sri Lanka et qu'il a acheté son billet d'avion au moyen d'un passeport valide obtenu en février 2004. Le départ du demandeur a été confirmé le 4 mars 2004.

[7]                Le défendeur soutient qu'en raison de la conduite du demandeur, la demande de celui-ci est devenue entièrement théorique. Il conviendrait donc que la Cour exerce son pouvoir discrétionnaire et refuse d'entendre le litige en rejetant sommairement la demande de contrôle judiciaire.

[8]                Pour sa part, l'avocate du demandeur a déposé un affidavit dans lequel la nièce du demandeur déclare qu'elle savait que son oncle craignait de retourner aux États-Unis parce qu'une mesure d'expulsion devant entraîner son retour au Sri Lanka avait été prise contre lui là-bas. Elle ajoute que son oncle lui a téléphoné il y a quelque temps et lui a dit qu'il était à Singapour. Elle n'est pas certaine du statut de son oncle à Singapour, mais sait que les Sri-Lankais n'ont pas besoin de visa et peuvent rester là-bas pendant 15 jours. Par la suite, ils peuvent se rendre en Malaisie. Elle croit que son oncle a choisi le vol à destination de Colombo, qui serait une zone de transit d'où il pourrait se rendre à Singapour, et qu'il reviendra au Canada si la demande d'asile qu'il a déposée est accueillie.

[9]                Le demandeur a sollicité la protection du Canada à deux reprises au motif qu'il serait maltraité et peut-être tué s'il devait retourner au Sri Lanka. Je suis d'avis qu'en achetant de son plein gré son billet d'avion, en obtenant de son propre chef un passeport valide des autorités sri-lankaises au Canada et en confirmant son départ vers Colombo, le demandeur a agi de façon à rendre entièrement théoriques les questions soulevées dans sa demande de contrôle judiciaire.

[10]            La demande de contrôle judiciaire du demandeur ne soulève plus de litige actuel devant la Cour (Borowski c. Canada (Procureur général), [1989] 1 R.C.S. 342; Bouslimani c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1997] A.C.F. n ° 336 (C.F. 1re inst.) (QL)).

[11]            Comme l'a dit Madame la juge Tremblay-Lamer dans Bouslimani, précité, je ne puis trouver aucune circonstance exceptionnelle qui pourrait donner ouverture à l'exercice du pouvoir discrétionnaire de cette Cour de trancher un litige devenu théorique.

[12]            Le demandeur soumet la question suivante à faire certifier :

[traduction] Dans quelles circonstances l'acceptation par un ressortissant étranger d'une offre de départ volontaire en remplacement d'une mesure d'expulsion prise par le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration a-t-elle pour effet de rendre théorique une demande de contrôle judiciaire que ce ressortissant a prise en vertu de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés?


[13]            Le demandeur soutient que la Cour fédérale et la Cour d'appel fédérale ont rendu très peu de décisions au sujet du lien entre le caractère théorique d'un litige et l'absence du Canada d'un demandeur et que la décision de la Cour à ce sujet pourrait avoir des répercussions importantes sur le programme de départ volontaire du ministre qui visait à réduire le coût des renvois pour les contribuables.

[14]            Le défendeur s'oppose à cette question, au motif qu'elle ne transcende pas l'intérêt des parties au litige ni n'aborde des éléments ayant des conséquences importantes ou qui sont de portée générale.

[15]            Je suis d'accord avec le défendeur. La preuve en l'espèce n'indique nullement que l'agent d'immigration a offert au demandeur de retourner dans son pays d'origine. Étant donné que j'en suis arrivé à la conclusion que c'est le départ volontaire du demandeur qui a rendu la demande de celui-ci entièrement théorique, il n'est pas nécessaire de certifier cette question.

ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE que la requête soit accueillie. La demande de contrôle judiciaire du demandeur est rejetée. Aucune question n'est certifiée.

        « Michel Beaudry »          

Juge

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.


                                                             COUR FÉDÉRALE

                                                                             

                                              AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                                                 IMM-3119-03

INTITULÉ :                                                                MAHADEVAN SINNADURAI c.

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                            

LIEU DE L'AUDIENCE :                                          Montréal (Québec)

DATE DE L'AUDIENCE :                                        le 29 juin 2004

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE MODIFIÉS :                         LE JUGE BEAUDRY

DATE DES MOTIFS :                                               le 14 juillet 2004

COMPARUTIONS:

Pia Zambelli                                                                               POUR LE DEMANDEUR

François Joyal                                                               POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:

Viken Artinian                                                               POUR LE DEMANDEUR

Montréal (Québec)

Morris Rosenberg                                                                      POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

Montréal (Québec)


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