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Date : 20020201

Dossier : IMM-2143-01

Référence neutre : 2002 CFPI 125

OTTAWA (ONTARIO), LE 1er FÉVRIER 2002

EN PRÉSENCE DE MADAME LE JUGE DANIÈLE TREMBLAY-LAMER

ENTRE :

                                                                       KE YU WANG

                                                                                                                                                     demandeur

                                                                              - et -

                      LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                                      défendeur

                                  MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

  • [1]                 Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire d'une décision de la Section d'appel de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la Section d'appel). La Commission a rejeté l'appel du demandeur portant sur la mesure d'exclusion prise contre lui par un arbitre le 20 avril 2001.

LES FAITS

  • [2]                 Le demandeur, Ke Yu Wang, est un citoyen chinois. Il a présenté une demande d'immigration au Canada à titre d'immigrant indépendant le 30 avril 1997. À l'époque, il n'était pas marié. Cependant, il s'est marié le 1er mai 1997. Par la suite, il a été interrogé par un agent d'immigration le 17 avril 1998. Il semblerait qu'au cours de l'entrevue le demandeur n'ait pas révélé son changement d'état matrimonial. Après l'entrevue, l'agent des visas a conclu que le demandeur respectait les critères de sélection. Le demandeur a obtenu un visa d'immigrant au Canada le 23 juin 1998, aux termes de l'article 9 de la Loi sur l'immigration, L.R.C. 1985, ch. I-2 et ses modifications (la Loi).
  • [3]                 Le fils du demandeur est né le 3 novembre 1998. Le 3 mai 1999, le demandeur est arrivé au Canada, et un agent d'immigration l'a interrogé au point d'entrée, comme l'exige le paragraphe 12(1) de la Loi. Au cours de cette entrevue, il a indiqué qu'il était marié et qu'il avait un fils. Par conséquent, l'agent d'immigration a dressé un rapport aux termes de l'alinéa 20(1)a) de la Loi, en déclarant qu'à son avis le fait d'admettre le demandeur au Canada contrevenait à la Loi et au Règlement sur l'immigration de 1978, DORS/78-172 et ses modifications (le Règlement).
  

  • [4]                 Lors de l'enquête en matière d'immigration, qui s'est tenue le 20 avril 2000, l'arbitre a conclu que le demandeur ne respectait pas l'article 12 du Règlement, étant donné que l'agent des visas n'avait pas été informé de l'existence des personnes à charge du demandeur afin que leur admissibilité puisse être évaluée.
  • [5]                 L'arbitre a conclu que le demandeur était membre d'une catégorie de personnes non admissibles visées à l'alinéa 19(2)d) de la Loi.
  
[6]                 Le demandeur en a appelé de cette décision devant la Section d'appel, aux termes du paragraphe 70(2) de la Loi, au motif que la mesure d'exclusion n'était pas valide en droit. Subsidiairement, le demandeur a fondé son appel sur le motif qu'il ne devrait pas être renvoyé du Canada pour des raisons d'ordre humanitaire.

LA DÉCISION DE LA SECTION D'APPEL

  • [7]                 Dans son évaluation de la validité de la mesure d'exclusion, la Section d'appel a d'abord traité de l'article 9 de la Loi. Le paragraphe 9(1.1) autorise une personne à demander un visa pour les personnes à charge qui l'accompagnent.
  • [8]                 Le paragraphe 9(2) précise que l'agent des visas doit évaluer la demande pour déterminer si le demandeur et toutes les personnes à sa charge semblent répondre aux critères de l'établissement.
  
  • [9]                 La Section d'appel a noté que, compte tenu de la distinction qu'il y a entre le paragraphe 9(1.1), qui fait référence aux « personnes à charge qui l'accompagnent » et le paragraphe 9(2), qui fait référence à « chacune des personnes à sa charge » , il semble évident que le paragraphe 9(2) fait référence à toutes les personnes à la charge du demandeur, qu'elles l'accompagnent ou non. Cette distinction est maintenue au paragraphe 9(4) de la Loi.
  • [10]            La Section d'appel a donc conclu que l'article 12 du Règlement était conforme à l'intention de la Loi, et par conséquent qu'il n'était pas ultra vires.
  
[11]            La Section d'appel a également statué que le demandeur ne s'était pas acquitté du fardeau qui lui incombe aux termes de l'article 8 de la Loi de prouver qu'il a le droit de venir au Canada ou que le fait d'y être admis ne contreviendrait pas à la Loi, parce que l'admissibilité des personnes à sa charge n'avait pas été évaluée comme l'exige le paragraphe 9(2) de la Loi. Par conséquent, le demandeur faisait partie d'une catégorie de personnes non admissibles parce qu'il ne respectait pas les conditions de la Loi découlant de l'article 12 du Règlement.

[12]            Pour ce qui est du redressement discrétionnaire demandé, la Section d'appel n'était pas convaincue que les circonstances présentées par le demandeur étaient suffisantes pour primer l'intérêt légitime qu'a la collectivité de s'assurer que les exigences de la Loi et du Règlement concernant l'admission sont respectées. Elle a statué que les circonstances de cette affaire ne respectaient pas les critères établis dans Chirwa c. Canada (Ministre de la Main-d'oeuvre et de l'Immigration) (1970), 4 I.A.C. 338 (C.A.I.) à la page 350, en ce qu'il n'y avait pas suffisamment de facteurs d'ordre humanitaire dans cette affaire [TRADUCTION] « qui inciteraient une [personne] raisonnable [...] à vouloir remédier aux malheurs des autres [...] » .

LES QUESTIONS EN LITIGE

1. La Section d'appel a-t-elle commis une erreur dans son interprétation des exigences de la Loi?

2. La Section d'appel a-t-elle commis une erreur dans sa décision concernant le redressement fondé sur des raisons d'ordre humanitaire?

LES DISPOSITIONS LÉGISLATIVES PERTINENTES

[13]            L'article 9 de la Loi :


9(1) Sous réserve du paragraphe (1.1), sauf cas prévus par règlement, les immigrants et visiteurs doivent demander et obtenir un visa avant de se présenter à un point d'entrée.

(1.1) La personne qui demande un visa pour elle-même peut également en demander un pour chacune des personnes à charge qui l'accompagnent.

(1.2) La personne qui demande un visa de visiteur doit convaincre l'agent des visas qu'elle n'est pas un immigrant.

(2) Le cas du demandeur de visa d'immigrant est apprécié par l'agent des visas qui détermine si le demandeur et chacune des personnes à sa charge semblent répondre aux critères de l'établissement.

(2.1) Le cas du demandeur de visa de visiteur est apprécié par l'agent des visas qui détermine si le demandeur et chacune des personnes à sa charge qui l'accompagne semblent répondre aux critères de l'autorisation de séjour.

(3) Toute personne doit répondre franchement aux questions de l'agent des visas et produire toutes les pièces qu'exige celui-ci pour établir que son admission ne contreviendrait pas à la présente loi ni à ses règlements.

(4) Sous réserve du paragraphe (5), l'agent des visas qui est convaincu que l'établissement ou le séjour au Canada du demandeur et des personnes à sa charge ne contreviendrait pas à la présente loi ni à ses règlements peut délivrer à ce dernier et aux personnes à charge qui l'accompagnent un visa précisant leur qualité d'immigrant ou de visiteur et attestant qu'à son avis, ils satisfont aux exigences de la présente loi et de ses règlements.

(5) L'agent des visas ne peut refuser de délivrer un visa à la personne qui a présenté la demande prévue au paragraphe (1) et aux personnes à sa charge parce que la personne, ou l'une des personnes à sa charge, appartient à la catégorie non admissible visée à l'alinéa 19(1)k) qu'avec l'approbation écrite du ministre et du solliciteur général.

9. (1) Except in such cases as are prescribed, and subject to subsection (1.1), every immigrant and visitor shall make an application for and obtain a visa before that person appears at a port of entry.

(1.1)    A person who makes an application for a visa may apply on behalf of that person and every accompanying dependant.

(1.2)    A person who makes an application for a visitor's visa shall satisfy a visa officer that the person is not an immigrant.

(2)    An application for an immigrant's visa shall be assessed by a visa officer for the purpose of determining whether the person making the application and every dependant of that person appear to be persons who may be granted landing.

(2.1) An application for a visitor's visa shall be assessed by a visa officer for the purpose of determining whether the person making the application and every accompanying dependant of that person appear to be persons who may be granted entry.

(3) Every person shall answer truthfully all questions put to that person by a visa officer and shall produce such documentation as may be required by the visa officer for the purpose of establishing that his admission would not be contrary to this Act or the regulations.

(4) Subject to subsection (5), where a visa officer is satisfied that it would not be contrary to this Act or the regulations to grant landing or entry, as the case may be, to a person who has made an application pursuant to subsection (1) and to the person's dependants, the visa officer may issue a visa to that person and to each of that person's accompanying dependants for the purpose of identifying the holder thereof as an immigrant or a visitor, as the case may be, who, in the opinion of the visa officer, meets the requirements of this Act and the regulations.

(5) A visa officer may refuse to issue a visa on the grounds that the person who made an application pursuant to subsection (1), or any of the person's dependants, is a member of an inadmissible class described in paragraph 19(1)(k) only with the written approval of the Minister and the Solicitor General of Canada.


[14]            Le paragraphe 12(1) de la Loi :

Sous réserve des règlements, quiconque cherche à entrer au Canada est tenu de se présenter devant un agent d'immigration à un point d'entrée ou à tout autre lieu désigné par l'agent principal en vue de l'interrogatoire visant à déterminer s'il est autorisé à entrer au Canada ou s'il peut y être admis.

Subject to the regulations, every person seeking to come into Canada shall appear before an immigration officer at a port of entry, or at such other place as may be designated by a senior immigration officer, for examination to determine whether that person is a person who shall be allowed to come into Canada or may be granted admission.


  
[15]            L'alinéa 19(2)d) de la Loi :


Appartiennent à une catégorie non admissible les immigrants et, sous réserve du paragraphe (3), les visiteurs qui_:

                 [...]

                 d) soit ne se conforment pas aux conditions prévues à la présente loi et à ses règlements ou aux mesures ou instructions qui en procèdent, soit ne peuvent le faire.

No immigrant and, except as provided in subsection (3), no visitor shall be granted admission if the immigrant or visitor is a member of any of the following classes:

                 [...]

                 (d) persons who cannot or do not fulfil or comply with any of the conditions or requirements of this Act or the regulations or any orders or directions lawfully made or given under this Act or the regulations.


    
[16]            L'article 12 du Règlement :

Un immigrant à qui un visa a été délivré et qui se présente pour examen devant un agent d'immigration à un point d'entrée, conformément au paragraphe 12(1) de la Loi, doit

                 a) si son état matrimonial a changé depuis la délivrance du visa, ou

                 b) si des faits influant sur la délivrance du visa ont changé depuis que le visa a été délivré ou n'ont pas été révélés au moment où le visa a été délivré,

établir

                 c) que lui-même et les personnes à sa charge, qu'elles l'accompagnent ou non, dans le cas où un visa a été délivré à l'immigrant conformément au paragraphe 6(1), à l'article 9 ou aux paragraphes 10(1) ou (1.1) ou 11(3) ou (4),

                 d) que lui-même et les personnes à sa charge qui l'accompagnent, dans tout autre cas,

satisfont, au moment de l'examen, aux exigences de la Loi et du présent règlement ainsi qu'à celles du Règlement sur les catégories d'immigrants précisées pour des motifs d'ordre humanitaire, y compris les exigences relatives à la délivrance du visa.

An immigrant who has been issued a visa and who appears before an immigration officer at a port of entry for examination pursuant to subsection 12(1) of the Act is required

                 (a) if his marital status has changed since the visa was issued to him, or

                 (b) if any other facts relevant to the issuance of the visa have changed since the visa was issued to him or were not disclosed at the time of issue thereof,

to establish that at the time of the examination

                 (c) the immigrant and the immigrant's dependants, whether accompanying dependants or not, where a visa was issued to the immigrant pursuant to subsection 6(1), section 9 or subsection 10(1) or (1.1) or 11(3) or (4), or

                 (d) the immigrant and the immigrant's accompanying dependants, in any other case,

meet the requirements of the Act, these Regulations and the Humanitarian Designated Classes Regulations, including the requirements for the issuance of the visa.



ANALYSE

            1. Validité de l'article 12 du Règlement

  • [17]            Le demandeur soutient que les exigences de la Loi ne régissent que les personnes qui demandent l'admission et les personnes à leur charge qui demandent à entrer au Canada. Il n'y a rien dans la Loi qui le rende inadmissible en raison de l'inadmissibilité d'un membre de sa famille qui ne l'accompagne pas. Selon le demandeur, interpréter l'article 12 du Règlement comme l'a fait la Section d'appel le rendrait ultra vires. Je ne peux accepter cette prétention.
  • [18]            La Commission a eu raison en droit de conclure que l'article 12 du Règlement était conforme au régime législatif.
  
[19]            Comme l'a noté la Commission aux paragraphes 9(1.1) et 9(4) de la Loi, le législateur fait référence à chacune des « personnes à charge qui l'accompagnent » , alors qu'au paragraphe 9(2), le législateur ne fait référence qu'à « chacune des personnes à sa charge » . En lisant une loi, il ne faut ni ajouter ni supprimer des mots et le lecteur ne devrait pas essayer de suppléer aux lacunes qu'il croit y voir (E.A. Driedger, Construction of Statutes, 2e éd. (Toronto : Butterworths, 1983), page 94; voir également P.-A. Côté, Interprétation des lois, 3e éd. (Montréal : Éditions Thémis, 1999), pages 349 et 350). Si le législateur avait voulu exclure les personnes à charge qui n'accompagnent pas le demandeur de la portée du paragraphe 9(2), il l'aurait certainement dit de façon explicite, comme il l'a fait pour les paragraphes 9(1.1) et 9(4).

[20]            Cette opinion est appuyée par la décision Singh c. Canada, précitée. Dans cette affaire, le demandeur recherchait une déclaration attestant que la Loi n'autorisait pas le gouverneur en conseil à adopter des règlements interdisant l'admission d'un immigrant parce qu'une personne à sa charge qui ne l'accompagnait pas était membre d'une catégorie de personnes non admissibles. Le juge Muldoon a statué qu'une personne qui demande la résidence permanente était légitimement tenue de révéler l'existence et l'identité de toutes les personnes à sa charge, que celles-ci l'accompagnent ou non, et a donc refusé le redressement recherché. Il déclare ceci au paragraphe 27 :

[...] il est tout à fait convenable que le gouvernement canadien sache quelles personnes entrent au Canada et sollicitent la résidence permanente, ainsi que la situation dans laquelle elles se trouvent. La situation d'avoir une personne à sa charge est tout à fait évidente lorsque cette dernière accompagne l'immigrant. Si la personne à charge n'accompagne pas l'immigrant, l'Immigration a encore parfaitement le droit de connaître l'existence et l'identité (nom, âge et sexe, au moins) de la personne en question. L'éventuel immigrant est tenu de communiquer sans mentir ces renseignements et n'a aucune excuse pour les dissimuler, que la personne à charge appartienne ou non à une catégorie non admissible.

[21]            La Cour d'appel fédérale a confirmé la décision du juge Muldoon selon lequel le règlement contesté relevait des pouvoirs du gouverneur en conseil. À mon avis, l'argument du demandeur selon lequel l'article 12 du Règlement est ultra vires doit donc être rejeté.

  • [22]            L'article 12 du Règlement exige clairement que « [l'immigrant] et les personnes à sa charge, qu'elles l'accompagnent ou non [...] [doivent satisfaire] aux exigences de la Loi et du présent règlement ainsi qu'à celles du Règlement sur les catégories d'immigrants précisées pour des motifs d'ordre humanitaire, y compris les exigences relatives à la délivrance du visa » . [Non souligné dans l'original]. Par conséquent, si une personne ne respecte pas ces exigences, elle peut se voir refuser l'admission au Canada, ou, comme en l'espèce, se voir refuser le droit d'y demeurer.
  • [23]            Donc, l'argument du demandeur selon lequel seules les personnes qui demandent l'admission ou les personnes à leur charge qui les accompagnent et qui demandent à entrer au Canada sont régies par les exigences de la Loi, ne peut être accueilli.
  
[24]            En outre, contrairement à ce que prétend le demandeur, la communication de ces renseignements au point d'entrée n'est pas suffisante pour respecter la Loi. (Voir Valdez c. MCI, [1999] A.C.F. no 365). L'article 12 du Règlement exige clairement que, lorsqu'il se produit un changement dans les faits qui peut influencer la délivrance d'un visa, son titulaire doit démontrer, au point d'entrée, que ce changement n'a pas modifié sa capacité de respecter les conditions d'octroi du visa. Cela a été expliqué dans l'arrêt Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) c. De Decaro, [1993] 2 C.F. 408 (C.A.), par le juge Marceau, qui déclare ceci aux pages 421 et 422 :

On sait que la délivrance du visa d'immigrant ne constitue pas l'octroi du droit d'établissement. Cette délivrance signifie simplement que l'agent des visas s'est formé l'opinion que le requérant satisfaisait aux exigences de la Loi et du Règlement pour pouvoir s'établir au Canada. Sans doute, l'octroi d'un visa n'est-il pas qu'un exercice académique sans aucune portée ni valeur pratique. Le visa témoigne de l'attestation d'un officier d'immigration dont c'est le rôle de vérifier de l'extérieur l'admissibilité des postulants, et cette attestation sera normalement acceptée comme telle par son collègue à l'entrée. Mais le principe demeure que le ressortissant étranger qui arrive au pays pour s'y établir doit satisfaire l'agent d'immigration de son admissibilité au point d'entrée (paragraphe 12(1) de la Loi). C'est dans ce contexte que joue l'article 12 du Règlement. Il impose d'abord à l'immigrant l'obligation de révéler tout changement dans les faits qui ont pu influer sur la délivrance du visa dont il est titulaire et, s'il y a eu tel changement, il exige de l'immigrant qu'il satisfasse à des exigences nouvelles. Son visa n'est pas nul, mais on sait qu'en lui-même le visa ne donne pas droit d'entrée; ce sont les exigences nouvelles de cet article 12 du Règlement qui doivent être respectées.

  • [25]            L'analyse du juge Marceau a par la suite été adoptée par la Cour d'appel fédérale dans l'arrêt McLeoad c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1999] 1 C.F. 257 (C.A.F.).
  • [26]            En l'espèce, le demandeur n'a pas révélé les changements de faits qui pouvaient influencer la délivrance du visa qu'il détenait, et il n'a pas non plus respecté les exigences de la Loi et du Règlement.
  
[27]            Le demandeur n'a pas établi qu'il était admissible. Il n'a pas respecté l'article 12 du Règlement. La Commission a donc statué qu'il était membre d'une catégorie de personnes non admissibles prévue à l'alinéa 19(2)d) de la Loi. Par conséquent, la mesure d'exclusion a été prise à bon droit contre lui aux termes de l'alinéa 32(5)b) de la Loi.

2. La décision de la Section d'appel concernant le redressement fondé sur des raisons d'ordre humanitaire

  • [28]            Le demandeur soutient que la Section d'appel a commis une erreur tout d'abord en notant qu'elle n'avait pas compétence pour examiner les difficultés à l'étranger et ensuite dans son analyse sur ces difficultés à l'étranger en s'engageant [TRADUCTION] « dans une pondération polycentrique d'intérêts opposés » , contrairement à la décision de la Cour suprême du Canada dans l'arrêt Chieu c. Canada, [2002], A.C.S. no 1.
  • [29]            Tout d'abord, j'aimerais souligner que la Commission n'a pas commis d'erreur en appliquant le droit qui était en vigueur au moment où elle a entendu l'affaire. Une question semblable a été examinée dans la décision A.B.Z. c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2001] A.C.F. no 804, dans laquelle le demandeur a fait valoir que la Section d'appel avait commis une erreur en ne tenant pas compte des facteurs énoncés dans l'arrêt Baker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1999], 2 R.C.S. 817, qui a été prononcé après la décision de la Section d'appel. Le juge McKeown a statué que le pouvoir de la Section d'appel à l'égard des requêtes en réouverture ne va pas jusqu'à l'application rétroactive de la Loi.
  
[30]            Deuxièmement, comme je l'ai noté à l'audience portant sur le contrôle judiciaire, bien que la Section d'appel ait statué qu'elle n'avait pas compétence pour tenir compte des difficultés à l'étranger, elle a néanmoins effectué une analyse prudente et exhaustive des difficultés possibles auxquelles pourrait faire face le demandeur dans son pays d'origine. Toutefois, elle a conclu que la situation du demandeur n'était pas [TRADUCTION] « suffisante pour primer l'intérêt légitime qu'a la collectivité de s'assurer que les exigences de la Loi et du Règlement concernant l'admission sont respectées » . Par conséquent, je suis convaincue que la décision de la Section d'appel concernant l'existence de facteurs d'ordre humanitaire en l'espèce était raisonnable.

                                           ORDONNANCE

LA PRÉSENTE COUR ORDONNE CE QUI SUIT :

[1]                 Pour ces motifs, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.

[2]                 L'avocat du demandeur a soumis les questions suivantes aux fins de la certification :

            1.         L'article 12 du Règlement sur l'immigration, qui exige que les personnes qui n'accompagnent pas le titulaire d'un visa faisant partie de la catégorie des immigrants indépendants respectent les exigences de la Loi, même si elles n'ont pas demandé à accompagner l'immigrant, est-il ultra vires du régime de la Loi énoncé aux articles 8, 9, 11, 14 et à l'alinéa 19(2)c)?

            2.         Si l'article 12 du Règlement sur l'immigration n'est pas ultra vires de la Loi, le titulaire du visa faisant partie de la catégorie des immigrants indépendants peut-il aux termes de l'article 12, « établir [qu']au moment de l'examen [...] » , c'est-à-dire au point d'entrée, devant l'arbitre, ou devant la Section d'appel, les personnes à sa charge qui ne l'accompagnent pas satisfont aux exigences de la Loi et du Règlement sans être d'abord expulsé?

3.         Contrairement à la déclaration du paragraphe 26 de la décision de la Cour suprême du Canada dans Chieu c. Canada, [2002] A.C.S. no 1, et après avoir statué à tort qu'elle n'avait pas compétence pour tenir compte des difficultés à l'étranger, la Section d'appel a-t-elle appliqué le mauvais critère en s'engageant « dans une pondération polycentrique d'intérêts opposés » (Chieu, par. 26) quand elle a statué que [TRADUCTION] « bien que son renvoi du Canada puisse lui occasionner des difficultés, je ne suis pas convaincue que les circonstances présentées par l'appelant sont suffisantes pour primer l'intérêt légitime qu'a la collectivité de s'assurer que les exigences de la Loi et du Règlement concernant l'admission sont respectées » .

  

[3]                 J'accepte de façon générale les observations écrites présentées par l'avocat du défendeur (lettre en date du 22 janvier 2002, déposée le même jour) s'opposant à la certification des [TRADUCTION] « questions proposées aux fins de la certification » et déposées par le demandeur. En fait, je suis d'avis que les questions proposées ne satisfont pas aux exigences du paragraphe 83(1) de la Loi, comme l'a expliqué le juge Décary de la Cour d'appel fédérale dans Liyanagamage c. MCI, 176 N.R. 4, à la page 5 :

Lorsqu'il certifie une question sous le régime du paragraphe 83(1), le juge des requêtes doit être d'avis que cette question transcende les intérêts des parties au litige, qu'elle aborde des éléments ayant des conséquences importantes ou qui sont de portée générale [voir l'excellente analyse de la notion d' « importance » qui est faite par le juge Catzman dans la décision Rankin c. McLeod, Young, Weir Ltd. et al (1986), 57 O.R. (2) 569 (H.C de l'Ont.)] et qu'elle est aussi déterminante quant à l'issue de l'appel. Le processus de certification qui est visé à l'article 83 de la Loi sur l'immigration ne doit pas être assimilé au processus de renvoi prévu à l'article 18.3 de la Loi sur la Cour fédérale, ni être utilisé comme un moyen d'obtenir, de la Cour d'appel, des jugements déclaratoires à l'égard de questions subtiles qu'il n'est pas nécessaire de trancher pour régler une affaire donnée. [Souligné par le défendeur.]

[4]                 Par conséquent, les questions proposées ne seront pas certifiées.

     

                                                                    « Danièle Tremblay-Lamer »

JUGE

   

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER

    

No DU GREFFE    :                                             IMM-2143-01

INTITULÉ DE LA CAUSE :                          KE YU WANG c. MCI

LIEU DE L'AUDIENCE :                                Toronto (Ontario)

DATE DE L'AUDIENCE :                              le 17 janvier 2002

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET

ORDONNANCE :                                            Madame le juge Tremblay-Lamer

DATE :                                                                le 1er février 2002

   

COMPARUTIONS :

Andrew C. Dekany                                                           pour le demandeur

Deborah Drukarsh                                                             pour le défendeur

  

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :

Andrew C. Dekany                                                           pour le demandeur

Toronto (Ontario)

Morris Rosenberg                                                              pour le défendeur

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

  
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