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Date : 20040213

Dossier : T-2106-01

Référence :2004 CF 228

ENTRE :

                                                          LANTECH, INC.

                                                                                                                          demanderesse

                                                                     - et -

                                          WULFTEC INTERNATIONAL INC.

                                                                                                                           défenderesse

                           MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

                                      (Prononcés à l'audience à Montréal (Québec),

                                                           le 12 février 2004)

LE JUGE HUGESSEN

[1]                Il s'agit d'une requête en modification présentée par la défenderesse pour être autorisée à ajouter une demande reconventionelle aux actes de procédure déposés dans la présente action. L'action, qui est en instance depuis quelque temps, n'a pas encore été inscrite au rôle et aucune conférence préparatoire n'a été ordonnée. Il s'agit d'une instance à gestion spéciale.


[2]                L'action a trait à la contrefaçon d'un brevet. Dans la défense qu'elle a déposée, la défenderesse nie qu'il y ait eu contrefaçon mais ne conteste pas la validité du brevet. Elle voudrait ajouter, par demande reconventionnelle, une allégation d'invalidité visant plus de la moitié des revendications du brevet, à savoir les revendications 25 à 58, au motif qu'il s'agit de revendications en trop.

[3]                Je dois d'abord dire que je suis convaincu que la modification proposée n'est pas frivole, qu'elle n'est pas vouée à l'échec ou, selon les termes employés habituellement, qu'il n'est pas clair et manifeste que la demande reconventionnelle sera rejetée. Bien que la question soulevée par la demande reconventionnelle en soit, au fond, une de droit, il serait difficile, à mon avis, d'interpréter le brevet en cause sans l'aide d'éléments de preuve. Comme tous les brevets, le brevet en question est destiné aux personnes compétentes dans le domaine au moment où il est délivré et, malgré la tentative courageuse des avocats de la demanderesse pour me convaincre du contraire, je ne pense pas que la question de son interprétation soit aussi simple et qu'il suffise de s'asseoir et de l'examiner. En fait, compte tenu de certaines des antériorités qui ont été portées à mon attention dans les actes de procédure et du fait que la défenderesse détient apparemment un brevet américain concernant essentiellement les mêmes objets que ceux dont il est question dans les revendications contestées, je soupçonne que la Cour exigera de nombreux témoignages d'expert à l'audience, et il n'y en a aucun actuellement.


[4]                Par ailleurs, la demanderesse ne m'a pas démontré, en supposant qu'elle ait pu le faire, que la modification n'est pas demandée en conformité avec des instructions données de manière appropriée par la défenderesse à ses avocats. On a tenté d'aller au-delà de ces instructions et d'examiner la gestion interne de la défenderesse. Or, je suis d'avis qu'il ne convient pas d'agir ainsi, et rien ne me permet de refuser la modification pour cette raison.

[5]                De plus, il est tout à fait clair que, si elle est autorisée, la modification proposée aura des conséquences graves sur la requête en jugement sommaire qui a été présentée par la demanderesse et qui, après avoir fait l'objet d'un certain nombre d'ajournements - qui, pourrais-je ajouter, ont tous été demandés par la défenderesse pour diverses raisons - devait être entendue aujourd'hui. Cette requête, dont j'ai évidemment pris connaissance ainsi que du mémoire des faits et du droit, fait grand état de ce que la validité du brevet n'est pas contestée. Il ne fait aucun doute à mes yeux que, si la modification est autorisée, la requête en jugement sommaire devra, si elle n'est pas radiée en entier, être reformulée complètement et qu'elle ne pourra pas être entendue aujourd'hui.

[6]                Cela m'amène finalement à ce qui, selon moi, constitue la principale question soulevée par la requête en modification : quel préjudice sera causé à la demanderesse si la modification est autorisée aussi tardivement et l'adjudication des dépens peut-elle compenser adéquatement ce préjudice?


[7]                Deux faits sont importants à cet égard. Premièrement, l'action n'a pas encore été inscrite au rôle et, deuxièmement, on me dit que, si la défenderesse s'est livrée à de la contrefaçon, elle a cessé de le faire depuis quelque temps.

[8]                La demanderesse subira un préjudice si la modification proposée et le dépôt de la demande reconventionnelle sont autorisés, mais ce préjudice est, à mon avis, entièrement lié aux récentes procédures inhérentes à l'action. En particulier, il semblerait, comme je l'ai indiqué, qu'une allégation d'invalidité affaiblirait considérablement - si ce n'est totalement - le fondement de la requête en jugement sommaire, pour dire le moins. J'apprends également que les parties ont entrepris des négociations en vue d'en arriver à un règlement après le dépôt de la requête en jugement sommaire. Ces négociations n'ont forcément rien donné, et la demanderesse a ainsi perdu temps, efforts et argent.

[9]                Finalement, il y a la présente requête. Il m'est impossible de blâmer la demanderesse pour ne pas avoir su résister à la requête en modification. Par conséquent, j'estime que les dépens afférents à cette requête devront également être portés au compte de la défenderesse.


[10]            À mon avis, tous les préjudices causés à la demanderesse peuvent être compensés par l'adjudication des dépens. Avant d'inviter les avocats à faire des observations sur cette question, je tiens à ce qu'il soit clair que, à mon avis, l'adjudication des dépens dans les circonstances de l'espèce doit compenser réellement la demanderesse. J'entends par là, sous réserve de ce que les avocats pourraient me dire, que l'adjudication des dépens sur la base avocat-client doit compenser totalement la demanderesse. J'invite les avocats à me faire part de leurs observations sur ce point.

[Plus tard]

[11]            Ayant entendu les observations des avocats sur la question des dépens, il appert que, contrairement à ce que je souhaitais, ils ont été incapables jusqu'à maintenant de s'entendre sur une somme globale appropriée. Je devrai simplement renvoyer la question des dépens à la taxation en conformité avec les motifs exposés ci-dessus. Je poursuivrai l'examen de la requête en jugement sommaire à une date indéterminée. Je suis donc d'avis de rendre l'ordonnance qui suit.

ORDONNANCE

1. La défenderesse est autorisée à modifier sa défense et à y ajouter une demande reconventionnelle, le tout devant être signifié et déposé dans les 10 jours qui suivent.

2. L'examen de la requête en jugement sommaire de la demanderesse se poursuivra à une date indéterminée.

3. La défenderesse paiera les dépens de la demanderesse qui seront taxés sur la base avocat-client en conformité avec les motifs exposés ci-dessus.


4. Une fois taxés, ces dépens seront payables sans délai et quelle que soit l'issue de la cause.

                                                                                                              « James K. Hugessen »           

                                                                                                                                           Juge                         

Ottawa (Ontario)

Le 13 février 2004

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.


                                                        COUR FÉDÉRALE

                                         AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                                         T-2106-01

INTITULÉ :                                                  LANTECH, INC.

c.

WULFTEC INTERNATIONAL INC.

                                                                        

LIEU DE L'AUDIENCE :                                 MONTRÉAL (QUEBEC)

DATE DE L'AUDIENCE :                                LE 12 FÉVRIER 2004

MOTIFS DE L'ORDONNANCE :              LE JUGE HUGESSEN

DATE DES MOTIFS :                                      LE 13 FÉVRIER 2004

COMPARUTIONS :

John Harris                                                           POUR LA DEMANDERESSE

Constance Too

Bob Sotiriadis                                                       POUR LA DÉFENDERESSE

Alexandra Steele

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Gowling Lafleur Henderson LLP                           POUR LA DEMANDERESSE

Ottawa

Léger Robic Richard                                             POUR LA DÉFENDERESSE

Montréal


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