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                                                                                                                                            Date : 20010525

                                                                                                                                Dossier : IMM-4250-00

                                                                                                               Référence neutre : 2001 CFPI 515

Entre :

                                    MUKTI ROY KARMA HARAKRISHNA

                                                                                                                     demandeur

                                                               - et -                                

                                  LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉET

DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                     défendeur

                                           MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE PINARD

[1]         Le demandeur sollicite le contrôle judiciaire d'une décision de Gail Rowe, une agente d'immigration de Citoyenneté et Immigration Canada, en date du 21 juillet 2000, par laquelle elle a refusé de continuer à traiter la demande de résidence permanente du demandeur en tant que réfugié au sens de la Convention en raison du fait que son passeport ne satisfaisait pas aux exigences du paragraphe 46.04(8) de la Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), ch. I-2 (la Loi).


[2]         Le demandeur est un citoyen du Bangladesh. Il est arrivé au Canada en août 1998 et il a obtenu le statut de réfugié au sens de la Convention le 6 mai 1999. Au moment où il a présenté une demande de résidence permanente, on lui a demandé de fournir un document de voyage ou des papiers d'identité en cours de validité. Il a fait des démarches auprès du haut-commissariat du Bangladesh à Ottawa et un passeport lui a été délivré le 16 avril 1999. À la demande d'Immigration Canada de fournir d'autres documents, le demandeur a envoyé son certificat de naissance et son certificat de fin d'études secondaires. Le demandeur a été informé par une lettre datée du 21 juillet 2000 que ces documents ne [TRADUCTION] « satisfont pas aux exigences du paragraphe 46.04(8) » de la Loi parce que son passeport n'était pas « en cours de validité » et que les deux autres documents n'étaient pas des papiers « d'identitéacceptables » . En conséquence, le traitement de la demande d'établissement du demandeur a été suspendu.

[3]         Dans sa lettre du 21 juillet 2000, Gail Rowe, agente d'immigration au Centre de traitement des demandes de Vegreville (Alberta), écrit :

[TRADUCTION]

Cette lettre concerne votre demande de résidence permanente. Bien que vous soyez admissible à présenter une demande en tant que réfugié au sens de la Convention, la poursuite du traitement de votre demande n'a pas été possible pour les raisons suivantes :

- le certificat de naissance, le certificat de fin d'études secondaires et le passeport qui a étédélivr épar Ottawa que vous avez soumis ne satisfont pas aux exigences du paragraphe 46.04(8) de la Loi sur l'immigration. Le paragraphe 46.04(8) prévoit qu'un agent d'immigration est tenu de refuser le droit d'établissement tant que le demandeur n'est pas en possession d'un passeport ou d'un document de voyage en cours de validité ou de papiers d'identité acceptables.

Dans son affidavit, Mme Rowe donne les motifs du rejet des documents d'identité :

[TRADUCTION]

3.             À l'appui de sa demande de résidence permanente, le demandeur avait produit... , et une copie de son passeport délivré à Ottawa le 16 avril 1999;

4.             Quand j'ai commencé à traiter la demande de résidence permanente présentée par le demandeur le 10 août 1999, j'ai remarqué que le demandeur avait déclaré à la question 28 de son FRP qu'il avait utilisé un faux passeport pour venir au Canada et qu'il n'avait pas conservé ce document. J'ai de plus remarqué, à la question 29 de son FRP, que le demandeur n'avait mentionné aucun document qu'il aurait eu en sa possession;

5.             J'ai immédiatement envoyé une lettre au demandeur lui demandant de fournir à CIC une copie des documents qu'il avait utilisés pour obtenir son passeport, [...]


[...]

7.             Le 21 mars 2000, le demandeur a fourni un certificat de naissance délivré au Bangladesh le 7 septembre 1998. J'ai remarqué que ce document avait été délivré après l'arrivée du demandeur au Canada et que le demandeur n'avait pas mentionné ce document à la section D de sa demande de résidence permanente ou en réponse à la question 29 de son FRP;

8.             Le demandeur a de plus soumis un certificat d'études délivré au Bangladesh le 14 juillet 1988. Le document n'était pas énuméré à la section D de la demande de résidence permanente présentée par le demandeur ou en réponse à la question 29 de son FRP;

[...]

16.           En fait, le demandeur a soumis un passeport au nom de Mukti Roy Karma Harakrishna. Cependant, deux documents qu'il a soi-disant fournis pour obtenir son passeport, c'est-à -dire son certificat de naissance et son certificat d'études, indiquent que son nom est Mukti Roy Karmakar. Dans sa demande de résidence permanente, le demandeur a déclaré que son nom était Multi Roy Karmakar Harakrishna alors que dans son FRP, il a indiqué que son nom était Multi Roy Karmakar;

[4]         Le demandeur conteste la décision de l'agente d'immigration seulement en ce qui a trait à son passeport. Il allègue que son passeport, qui a été délivré par le haut-commissariat du Bangladesh, le représentant officiel du gouvernement du Bangladesh au Canada, est « en cours de validité » .

[5]         Le demandeur fonde sa contestation de la décision de l'agente d'immigration quant au rejet de son passeport sur l'ordonnance rendue par mon collègue M. le juge Gibson dans l'affaire Popal c. Ministre de la Citoyennetéet de l'Immigration (17 mars 2000), IMM-525-99 (suivie par M. le juge McKeown dans l'affaire Ogunmefun c. Ministre de la Citoyennetéet de l'Immigration (18 août 2000), IMM-2761-99).


[6]         La présente affaire peut être distinguée d'avec ces autres affaires en ce que la Cour n'a pas à décider si un agent d'immigration a ou n'a pas la compétence pour apprécier si le passeport soumis par un demandeur est suffisant comme preuve d'identité. En l'espèce, l'agente d'immigration n'était pas simplement insatisfaite de la façon dont le passeport avait été délivré, mais elle considérait plutôt que l'identité du demandeur semblait incertaine. Elle a par conséquent mis en doute la validité du passeport. Le demandeur tente d'utiliser, comme preuve de son identité, un passeport délivré sous un nom autre que celui qu'il prétend être le sien. Simplement, la logique veut qu'un passeport n'est pas validement détenu par une personne autre que celle à laquelle il a été délivré.                                                                

[7]         Le paragraphe 46.04(1) de la Loi prévoit que toute personne reconnue par la Section du statut de réfugié comme étant un réfugié au sens de la Convention peut demander le droit d'établissement au Canada. Cependant, suivant le paragraphe 46.04(8), une telle demande ne sera pas accordée tant que l'intéressé n'est pas « en possession d'un passeport [...] en cours de validité [...] » [non souligné dans l'original]. Il en résulte que, dans la présente affaire, la décision de l'agente d'immigration quant au passeport du demandeur relevait totalement de sa compétence suivant le paragraphe 46.04(8).

[8]         En l'espèce, il existe bel et bien des doutes quant au nom sous lequel le passeport a été délivré. En fait, le nom inscrit sur le passeport est « Mukti Roy Karma Harakrishna » , alors que sur un formulaire présenté par le demandeur à Immigration Canada afin de modifier « L'avis de revendication du statut de réfugié » , le demandeur a déclaré que son nom exact était « Mukti Roy Karmakar » . Dans la section intitulée « Pourquoi demandez-vous cette correction? » , le demandeur a écrit : [TRADUCTION] « Parce que mon nom de famille est Karmakar, mais sur la documentation c'est Harakrishna » .

[9]         Le fardeau de prouver qu'il est celui qu'il prétend être appartient au demandeur. À la lumière des observations précédentes, je ne peux conclure que la décision de refuser le passeport du demandeur comme preuve d'identité était déraisonnable.


[10]       Par conséquent, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.

[11]       La question suivante est certifiée :

Aux termes du paragraphe 46.04(8) de la Loi sur l'immigration, un agent d'immigration peut-il refuser d'accorder le droit d'établissement à un demandeur qui soumet un passeport délivré par son pays de nationalité s'il croit que le passeport a été délivré sur la foi de faux documents ou de documents d'identité contradictoires ou s'il a des doutes raisonnables quant à l'identité du demandeur?

« YVON PINARD »

Juge

OTTAWA (ONTARIO)

Le 25 mai 2001

Traduction certifiée conforme

Danièle Laberge, LL.L.


                                                                                                                                            Date : 20010525

                                                                                                                                Dossier : IMM-4250-00

Ottawa (Ontario), le 25 mai 2001

En présence de Monsieur le juge Pinard

Entre :

                                    MUKTI ROY KARMA HARAKRISHNA

                                                                                                                     demandeur

                                                               - et -

                                  LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉET

DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                     défendeur

                                                       ORDONNANCE

La demande de contrôle judiciaire de la décision prise le 21 juillet 2000 par Gail Rowe, une agente d'immigration de Citoyenneté et Immigration Canada, est rejetée.

« YVON PINARD »

Juge

Traduction certifiée conforme

Danièle Laberge, LL.L.


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

NUMÉRO DU GREFFE :                                   IMM-4250-00

INTITULÉ DE LA CAUSE :                 MUKTI ROY KARMA HARAKRISHNA c. M.C.I.

LIEU DE L'AUDIENCE :                                  MONTRÉAL (QUÉBEC)

DATE DE L'AUDIENCE :                                 Le 11 avril 2001

MOTIFS DE L'ORDONNANCE PAR :          Monsieur le juge Pinard

DATE DES MOTIFS :                           Le 25 mai 2001

ONT COMPARU

Pia Zambelli                                                                                                  POUR LE DEMANDEUR

Sébastien Dasylva                                                                                        POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER           

Joseph W. Allen                                                                                          POUR LE DEMANDEUR

Montréal (Québec)

Morris Rosenberg                                                                                        POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

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