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Date : 20191113


Dossier : IMM-42-19

Référence : 2019 CF 1417

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 13 novembre 2019

En présence de monsieur le juge Phelan

ENTRE :

ADNAN MARUF CHOWDHURY

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I.  Introduction

[1]  La présente demande de contrôle judiciaire concerne le refus d’un agent des visas à Singapour de délivrer un permis de travail au demandeur parce qu’il craignait que celui-ci ne quitte pas le Canada à la fin de la période autorisée.

II.  Contexte

[2]  Le demandeur, un citoyen du Bangladesh, travaille comme « découpeur de viande principal » dans une boucherie, où il n’a suivi qu’une formation à l’interne en découpe de viande avant de devenir « découpeur principal ».

[3]  Il a demandé un permis de travail pour un emploi à temps plein comme superviseur des bouchers dans un supermarché local de Toronto. Une étude d’impact sur le marché du travail à l’appui de la demande de permis de travail et d’une demande de résidence permanente a été délivrée.

[4]  L’agent des visas [l’agent] a rejeté la demande de permis de travail parce que le demandeur n’avait pas démontré qu’il satisfaisait aux exigences du poste ni qu’il allait quitter le Canada à la fin de son séjour autorisé, compte tenu de ses biens personnels et de sa situation financière.

[5]  L’agent était préoccupé par le manque de renseignements sur la façon dont le demandeur avait été promu au poste de découpeur de viande principal. Il n’a pas été convaincu par les documents à l’appui non signés, les compétences linguistiques du demandeur, les éléments de preuve relatifs au salaire de ce dernier et l’absence d’une preuve de fonds ou d’autres indices sur son patrimoine financier. Cette absence d’éléments de preuve convaincants relativement à l’établissement du demandeur au Bangladesh et son manque de ressources financières a amené l’agent à craindre que le demandeur ne quitte pas le Canada une fois au pays.

III.  Questions en litige

[6]  La présente demande de contrôle judiciaire soulève deux questions en litige :

  1. Y a-t-il eu manquement à l’équité procédurale?

  2. La décision sur le fond est‑elle justifiable?

IV.  Analyse

[7]  Malgré l’excellent argument de Mme Joundi en faveur du demandeur, la présente demande de contrôle judiciaire sera rejetée.

[8]  La norme de contrôle à appliquer à une question d’équité procédurale est celle de la décision correcte. Autrement dit, la Cour doit déterminer si la procédure est équitable.

Par contre, la décision elle‑même est susceptible de contrôle selon la norme de la décision raisonnable, comme l’a établi l’arrêt Dunsmuir c Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9, et comme l’a fait récemment la Cour dans l’affaire Baran c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CF 463, au par. 15 [Baran].

A.  Équité procédurale

[9]  Sur cette question, le demandeur fait valoir que l’agent ne l’a pas avisé de ses préoccupations. Il prétend qu’il s’agissait d’un élément très important qui aurait permis à l’agent de comprendre qu’il avait une double intention, c’est‑à‑dire obtenir à la fois un permis de travail et la résidence permanente.

[10]  Dans la présente affaire, l’agent n’était pas tenu d’aviser le demandeur de ses préoccupations puisque le niveau d’équité procédurale requis est faible (voir Baran, au par. 15). Il n’appartient pas à un agent de souligner les lacunes d’une demande.

[11]  Même si des décisions comme celle rendue dans l’affaire Li c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 484 établissent que certaines exceptions à la règle générale pourraient obliger un agent à informer un demandeur de ses préoccupations, ce n’est pas le cas en l’espèce. Il n’y a rien dans la présente affaire qui soit inhabituel au point de donner lieu à pareille exception — il n’y a ni ambiguïté dans la loi, ni refus d’informer le demandeur, ni manquement fondamental à l’équité. Les principes applicables à des affaires d’« aides familiaux résidants » ne s’appliquent pas aux faits de la présente affaire.

B.  Caractère raisonnable

[12]  Le demandeur soutient que l’agent a appliqué le mauvais critère puisqu’il n’a pas cherché à déterminer s’il allait quitter le pays advenant que sa demande de résidence permanente soit rejetée.

[13]  Il convient de noter que son avocat de l’époque a présenté des observations selon lesquelles le demandeur allait quitter le Canada après l’expiration de son permis de travail, mais qu’il n’a pas indiqué si le demandeur allait quitter le pays si la résidence permanente lui était refusée. La question de la double intention n’a pas non plus été soulevée.

[14]  L’agent était préoccupé par le fait que le demandeur avait peu de liens avec le Bangladesh et qu’il n’y avait guère d’éléments pour l’inciter à quitter le Canada. Il s’agissait d’une préoccupation raisonnable eu égard à toutes les circonstances. Il n’appartient pas à la Cour de soupeser à nouveau les éléments de preuve et de substituer ses conclusions à celles de l’agent.

[15]  En outre, l’agent avait des motifs raisonnables de conclure que le demandeur aurait de la difficulté à satisfaire aux exigences du poste en raison de son manque d’expérience en supervision et de l’insuffisance de ses compétences linguistiques (aucune autre langue que l’anglais n’a été mentionnée comme langue de travail).

[16]  J’ai conclu que la décision était raisonnable.

V.  Conclusion

[17]  Pour tous ces motifs, la demande de contrôle judiciaire est rejetée. Il n’y a aucune question à certifier.


JUGEMENT dans le dossier IMM-42-19

LA COUR STATUE que la demande de contrôle judiciaire est rejetée.

« Michael L. Phelan »

Juge

Traduction certifiée conforme

Ce 21e jour de novembre 2019.

Julie-Marie Bissonnette, traductrice agréée


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-42-19

 

INTITULÉ :

ADNAN MARUF CHOWDHURY c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 29 OctobRE 2019

 

JUgEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE PHELAN

 

DATE DU JUGEMENT ET DES MOTIFS :

LE 13 NOVEMBRE 2019

 

COMPARUTIONS :

Talia Joundi

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Nicholas Dodokin

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Poulton Law Office

Avocats

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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