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Date : 20010807

Dossier : T-639-00

                                                       Référence neutre : 2001 CFPI 863

ENTRE :

                                BANQUE DE MONTRÉAL

                                                                                          demanderesse

                                                    - et -

                                     EDITHA CHUANICO

                                                                                           défenderesse

        ORDONNANCE ET MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE BLAIS

[1]    Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire de la décision de Mme Ruth Hartman (l'arbitre) en date du 29 février 2000, décision qui a été rendue en vertu de la partie III, section XIV, du Code canadien du travail.


[2]    L'arbitre a conclu que la défenderesse avait été congédiée injustement et elle a ordonné à la demanderesse de la réintégrer dans son emploi ainsi que de lui verser une indemnité. La demanderesse s'est exécutée en ce qui concerne l'ordonnance de réintégration, mais elle sollicite un contrôle judiciaire en ce qui concerne l'ordonnance de l'arbitre portant sur le paiement de huit mois de salaire, soit de janvier à août 1999.

LES FAITS

[3]    La défenderesse travaillait pour la demanderesse depuis 1988. Elle occupait le poste de responsable des prêts personnels et, pendant sept mois, elle avait exercé des fonctions de surveillance. En juin 1992, elle fut mutée à la succursale First Canadian en tant que directrice des services financiers, catégorie 28, poste où elle aidait les employés de la banque dans les prêts et les hypothèques.

[4]    Le 1er avril 1998, elle fut nommée directrice des services financiers, catégorie 20, avec limites de crédit discrétionnaires. Elle a relevé de la responsable de groupe, Mme Sousa, jusqu'au 3 juillet 1998. En juin 1998, la directrice des ventes, Mme Kirkwood, avait besoin de quelqu'un pour combler un poste laissé vacant dans une autre équipe. La défenderesse fut persuadée par Mme Sousa et Mme Kirkwood le 25 juin 1998 que cette mutation, présentée comme mutation latérale, lui offrirait de nouvelles possibilités. La défenderesse finit par accepter.


[5]                 Le 21 juillet 1998, la défenderesse constata que sa vie professionnelle était pour elle source de tension, pour diverses raisons. Cette tension, à l'époque, était aussi due en partie à une possible perturbation de sa vie personnelle. En raison de son état, la défenderesse voulait aussi travailler plus près de son domicile de Scarborough, afin d'être plus accessible, en cas d'urgence, pour ses deux enfants adolescents.

[6]                 Le 24 août 1998, la défenderesse posa sa candidature à un poste affiché pour une succursale de la Banque à Scarborough. Deux jours plus tard, elle rencontra son nouveau responsable de groupe pour l'examen de son rendement et, « par courtoisie professionnelle » , elle l'informa de sa candidature au poste en question.

[7]                 Le 27 août 1998, la défenderesse reçut de la succursale de Scarborough un appel où on manifestait de l'intérêt pour sa candidature. Mme Kirkwood et son responsable de groupe se présentèrent plus tard à son bureau et lui dirent qu'il était inutile pour elle de se rendre au nouvel endroit pour une entrevue parce qu'il était hors de question, à cause du facteur temps, que Mme Kirkwood la laisse partir.

[8]                 Le 28 août 1998, la défenderesse arriva chez elle avec une migraine, absorba un Tylenol et s'endormit jusqu'à 15 heures. Elle avait conservé le rendez-vous à la succursale de Scarborough, fixé à 16 heures, après avoir expliqué qu'elle devait prendre congé à cause d'une migraine. Elle donna aux gens qu'elle rencontra le numéro de Mme Kirkwood et leur dit que sa mise à disposition posait un problème.


[9]                 Mme Kirkwood indiqua à la succursale de Scarborough que la défenderesse ne serait pas mise à disposition. À l'issue d'une rencontre la semaine suivante avec Mme Kirkwood et le responsable de groupe, il fut convenu de mettre à disposition la défenderesse en janvier 1999, soit neuf mois après sa promotion du 1er avril 1998.

[10]            La défenderesse s'est rendue au travail le dimanche 6 septembre 1998 pour déballer des boîtes encore non défaites et établir l'ordre de priorité des tâches à effectuer sur les dossiers en instance. Le jour ouvrable suivant, soit le mardi 8 septembre 1998, elle téléphona pour dire qu'elle était malade, et elle ne retourna pas au travail par la suite, pour raisons médicales.

[11]            Mme Kirkwood téléphona à la défenderesse le 11 septembre 1998 pour lui demander le rapport médical requis en cas d'absence de plus de trois jours et pour lui proposer un formulaire de demande de prestations au titre de la protection du revenu à court terme. Mme Kirkwood téléphona au service de la paie la semaine suivante et lui demanda de retenir pour dépôt le salaire échu. Le salaire fut déposé le 18 septembre 1998, mais la retenue fut effectuée le 23 septembre 1998. Le salaire de la défenderesse fut déduit de son compte et des sommes furent prélevées sur son compte d'épargne.

[12]            Après le 4 septembre 1998, la défenderesse cessa d'être rémunérée et on lui donna des ultimatums sur les choix qui s'offraient à elle.


[13]            La défenderesse s'adressa à un avocat qui allait s'occuper de ses indemnités de cessation d'emploi. L'avocat de la défenderesse écrivit une première lettre à Mme Kirkwood le 5 novembre 1998. Il envoya par la suite, le 27 novembre et le 9 décembre 1998, deux autres lettres, la première à Mme Kirkwood et la deuxième à Mme Scott, conseillère en ressources humaines.

[14]            Tel qu'il appert de l'affidavit de M. Tom W. Case, Mme Scott offrit oralement à la défenderesse, par l'entremise de l'avocat de celle-ci, de la réembaucher à compter du 11 janvier 1999.

[15]            Tel qu'il appert de l'affidavit de M. Tom W. Case, Mme Scott a témoigné à l'audience tenue devant l'arbitre que l'avocat de la défenderesse avait accepté oralement toutes les conditions qui ont été finalement énoncées dans la lettre adressée le 8 janvier 1999 par Mme Scott à la défenderesse.


[16]            Tel qu'il appert de l'affidavit de M. Tom W. Case, Mme Scott a témoigné aussi que, le 7 janvier 1999, elle a communiqué avec l'avocat de la défenderesse pour confirmer que la date du 11 janvier 1999 demeurait une date acceptable pour le retour de la défenderesse au travail. L'avocat de la défenderesse a indiqué qu'il reconfirmerait la date avec sa cliente. Il téléphona à Mme Scott plus tard le 7 janvier 1999 pour l'informer qu'il ne représentait plus la défenderesse.

[17]            Tel qu'il appert de l'affidavit de M. Tom W. Case, Mme Scott a témoigné qu'elle avait préparé la lettre portant la date du 8 janvier 1999 et l'avait fait transmettre à la défenderesse par messager pour savoir si la défenderesse entendait ou non revenir au travail le 11 janvier 1999. La défenderesse n'est pas retournée au travail.

QUESTION

[18]            1.          L'arbitre a-t-elle commis une erreur de droit parce qu'elle a omis de conclure que la défenderesse avait négligé d'atténuer son préjudice en n'acceptant pas l'offre de réembauchage faite par la demanderesse dans la lettre du 8 janvier 1999, ou parce qu'elle n'a pas rendu une décision dans un sens ou dans l'autre à propos de cet aspect?

2.          L'arbitre a-t-elle commis une erreur de droit parce qu'elle a omis de dire qu'un accord de transaction avait été conclu entre la demanderesse et l'avocat de la défenderesse, ou parce qu'elle a omis de rendre une décision sur ce point dans un sens ou dans l'autre?

ANALYSE

1. L'arbitre a-t-elle commis une erreur de droit parce qu'elle a omis de conclure que la défenderesse avait négligé d'atténuer son préjudice en n'acceptant pas l'offre de réembauchage faite par la demanderesse dans la lettre du 8 janvier 1999, ou parce qu'elle n'a pas rendu une décision dans un sens ou dans l'autre à propos de cet aspect?


Norme de contrôle

[19]            Dans l'affaire Gauthier c. Banque du Canada (2000), 5 C.C.E.L. (3d) 169 (C.F. 1re inst.), le juge Lemieux s'est exprimé ainsi :

Comme nous pouvons le constater, le législateur a effectivement prévu, pour ce qui est des décisions rendues par un arbitre dans le cadre d'une plainte déposée en vertu de l'article 240 du Code, une clause privative à l'article 243 du Code. Ainsi, il va de soi que notre Cour, dans le cadre du contrôle judiciaire de telles décisions, se doit d'agir avec beaucoup de circonspection et de retenue.

En outre, je partage l'avis de Monsieur le juge Heald dans Aziz v. Telesat Canada (1995), 104 F.T.R. 267 (C.A.F.), qui a bien résumé les normes de contrôle applicables dans le cas de décisions rendues par un arbitre et ce, après avoir analysé la jurisprudence pertinente :

En résumé, la jurisprudence applicable montre clairement que le critère d'examen relatif aux erreurs de fait et de droit est le critère élevé, et même rigoureux, de l'erreur manifestement déraisonnable. Elle montre également que le critère moindre, c'est-à-dire le critère de justesse, s'applique lorsque les erreurs se rapportent à des dispositions qui définissent la compétence d'un arbitre. [Nos soulignés]

[20]            La demanderesse affirme que l'offre faite à la défenderesse était raisonnable et que l'arbitre se devait de conclure que la défenderesse aurait pu atténuer son préjudice en acceptant l'offre de réembauchage faite par la demanderesse, ou se devait de rendre une décision sur ce point dans un sens ou dans l'autre.

[21]            Dans l'ouvrage intitulé Remedies in Labour, Employment and Human Rights Law, J.T. Casey, éd., (Toronto : Carswell, feuilles mobiles), on peut lire ce qui suit, aux pages 5-20, sur la question de l'atténuation d'un préjudice :

[TRADUCTION]

Le facteur essentiel de qualification en ce qui concerne l'indemnité est que la partie lésée doit s'efforcer d'atténuer son préjudice. L'atténuation requiert que l'employé congédié cherche un autre emploi qui soit raisonnablement semblable par sa nature, sa rémunération et son statut.


[22]            Dans l'affaire Dimitrick c. Brink's Canada Ltd., [1999] C.L.A.D. No. 441, l'arbitre Mole s'est exprimé ainsi :

[TRADUCTION]

En général, un employé congédié a l'obligation de mitiger son préjudice en acceptant une offre raisonnable de nouvel emploi. La question est de savoir si, eu égard à l'ensemble des circonstances, les offres faites à Dimitrick par Brink's étaient raisonnables.

[23]            Il est clair que la question de l'atténuation du préjudice à la suite d'un congédiement intéresse l'évaluation des dommages-intérêts. Sur cet aspect, l'arbitre s'est en l'espèce exprimée ainsi, à la page 17 :

[TRADUCTION]

En ce qui concerne l'atténuation du préjudice, je suis informée que, après avoir mis fin à son emploi, Mme Chuanico s'est attachée les services d'un avocat et qu'il en a résulté des négociations entre l'avocat et la Banque. À un certain moment vers le 28 décembre 1998, Mme Chuanico a mis fin au mandat de son avocat et, le 8 janvier 1999, Mme Scott lui envoya la lettre suivante :

Nous croyons savoir que vous n'êtes plus représentée ... Nous voudrions donc confirmer directement avec vous les détails discutés avec [votre avocat à l'époque] et se rapportant à l'offre d'un emploi continu auprès de la Banque de Montréal.

Nous sommes heureux de vous offrir le poste d'agent de soutien des prêts, au Centre de soutien des ventes et du service, à First Canadian Place (FCP). Vous seriez placée au niveau 30, avec un compa-ratio [sic] de 87 %, ce qui vous donnerait un salaire annuel de 35 400 $. Vous noterez que cela s'accorde avec le niveau et la rémunération que vous aviez au moment de votre départ de la Banque. Votre statut RISR serait maintenu, et toutes les limites de crédit que vous aviez antérieurement seraient rétablies. Dans ce rôle, vous relèveriez de [M.H...]

La période allant du 21 octobre 1998 à la date de votre retour serait considérée comme un congé non rémunéré.

Lors des discussions tenues avec [votre avocat à l'époque], il a été noté que vous préfériez reporter la date de votre retour au travail au lundi 11 janvier 1999. Si vous n'avez pas l'intention de vous présenter au travail à cette date, prière d'en informer directement la soussignée.


Mme Chuanico a choisi plutôt de déposer cette plainte le 19 janvier 1999. Dans son témoignage, elle a déclaré qu'il lui était impossible de retourner au travail jusqu'à la fin de décembre 1998, pour des raisons médicales, et, de ce qui précède, on peut présumer que la date du 11 janvier était la date retenue pour un éventuel retour au travail. L'explication donnée par Mme Chuanico pour décliner l'offre a varié. Elle croyait qu'il lui serait possible de choisir le poste; elle était préoccupée par les répercussions du congé sur son ancienneté et sur ses avantages sociaux; elle craignait de se heurter à un blocage de poste ou de ne pouvoir obtenir de l'avancement. Elle a aussi témoigné que depuis août 1999 elle n'a pas cherché de travail.

[24]            L'arbitre a donc ordonné la réintégration de la défenderesse et le versement à celle-ci de huit mois de salaire, la période au cours de laquelle elle s'était mise à disposition pour travailler, soit de janvier à août 1999.

[25]            Je reconnais avec la demanderesse qu'une offre de réengagement intéresse la question de l'atténuation du préjudice et qu'il appartient à un arbitre de voir si une telle offre est raisonnable.

[26]            S'agissant de l'obligation d'accepter une offre d'emploi, on trouve l'explication suivante dans l'arrêt Peterson c. Electro Sonic Inc., [2000] O.J. No. 1418 (O.S.C.J.), encore que cette décision ne procède pas du Code canadien du travail :

[TRADUCTION]

Il est nécessaire de considérer le peu d'empressement du demandeur à accepter l'offre d'emploi que lui a faite la défenderesse. Les principes concernant l'atténuation du préjudice dans un contexte d'emploi sont énoncés dans Waddams, Law of Damages, édition à feuilles mobiles, Canada Law Book 1998, à la page 15-10 :

[TRADUCTION] « Dans les cas où le demandeur a été congédié injustement, il a souvent été jugé que le demandeur n'est pas tenu d'accepter ce qui équivaut, de la part de l'employeur en défaut, à une offre de rétrogradation. Souvent, dans de tels cas, lorsque le demandeur accepte l'offre, il s'expose à l'humiliation d'une perte de statut, ou à l'obligation de travailler avec des collègues avec lesquels il a eu des conflits, ou encore il devra abandonner le droit, que lui reconnaît la loi, de se plaindre de l'acte illégitime de l'employeur » .


La principale affaire jugée par cette juridiction en la matière est l'arrêt Misfud c. Macmillan Bathurst Inc. (1989), 28 C.C.E.L., 228 (C.A.). Le juge McKinlay, s'exprimant pour la cour dans cette affaire, a tenu les propos suivants, à la page 238 :

[TRADUCTION] « Le fait que le transfert à un nouveau poste puisse constituer en droit un congédiement présumé n'élimine pas l'obligation pour l'employé de considérer le nouveau poste offert et de l'évaluer comme moyen d'atténuer son préjudice. Dans tous les cas, une comparaison devrait être faite avec le droit contractuel de l'employeur de donner un avis raisonnable et de laisser l'employé dans son poste actuel pendant que les possibilités d'un autre emploi sont explorées » .

Puis elle a poursuivi ainsi :

[TRADUCTION] « Lorsque le salaire offert est le même, lorsque les conditions de travail ne sont pas sensiblement différentes, ni le travail dégradant, et lorsque les relations personnelles considérées ne sont pas acrimonieuses..., il est raisonnable d'espérer de l'employé qu'il accepte le poste offert, en réduction de son préjudice, pendant une période raisonnable, ou jusqu'à ce qu'il trouve ailleurs un emploi acceptable » .

[27]            Les deux parties ont admis qu'une offre d'emploi a été faite le 7 janvier 1999 ou vers cette date.

[28]            Néanmoins, il convient de se rappeler que cette offre a été faite dix jours avant que la défenderesse ne décide de déposer une plainte selon le Code canadien du travail.

[29]            Il appert de la décision de l'arbitre que cette offre a été faite à l'occasion d'une tentative de conciliation entre les parties.

[30]            Il n'a pas été démontré que la demanderesse a réitéré son offre d'emploi à la défenderesse après le 19 janvier 1999.


[31]            L'offre d'emploi du 8 janvier 1999 a été examinée et évaluée par l'arbitre dans sa décision (page 31).

[32]            Il ressort clairement aussi de la décision (page 31) que l'offre d'emploi faite avant le dépôt de la plainte a été prise en considération par l'arbitre, laquelle était fondée à se prononcer sur cet aspect.

[33]            À mon avis, l'arbitre n'a pas commis d'erreur en disant que la défenderesse n'avait aucune obligation d'accepter une offre d'emploi qui n'était pas essentiellement semblable à son ancien poste.

2. L'arbitre a-t-elle commis une erreur de droit parce qu'elle a omis de dire qu'un accord de transaction avait été conclu entre la demanderesse et l'avocat de la défenderesse, ou parce qu'elle a omis de rendre une décision sur ce point dans un sens ou dans l'autre?

[34]            La demanderesse affirme que l'arbitre a commis une erreur parce qu'elle n'a pas conclu que la Banque et l'avocat de la défenderesse en étaient arrivés à un compromis.


[35]            Dans l'affaire Banque Nationale du Canada c. Canada (Ministre du Travail), [1997] 3 C.F. 727 (C.F. 1re inst.), appel rejeté [1998] A.C.F. no 872, le juge Rothstein devait interpréter le paragraphe 168(1) du Code canadien du travail, L.R.C. (1985), ch. L-2, et il décida qu'un compromis conclu entre un employeur et un employé après le congédiement de celui-ci n'empêche pas cet employé de déposer, en vertu de l'article 240 du Code, une plainte de congédiement injuste. Le juge Rothstein a ainsi conclu :

La Banque soutient donc que, vu le règlement intervenu et la renonciation signée, Mme Paris doit intenter un recours au civil si elle entend contester la validité ou le caractère exécutoire de l'entente qu'elle a conclue avec la Banque avant de déposer sa plainte, et que l'arbitre n'a pas la compétence pour juger de la validité de l'entente. La Banque se fonde sur le paragraphe 246(1), qui protège le recours civil que les employés peuvent exercer.

À mon avis, la Banque a raison de prétendre qu'un arbitre n'a pas la compétence pour juger de la validité d'un règlement intervenu entre l'employé et l'employeur. La compétence de l'arbitre se limite à ce que prévoit la loi et, en l'occurrence, celle-ci lui permet uniquement de décider si un congédiement est injuste.

Cependant, la question de la validité d'un règlement n'a pas été soulevée devant l'arbitre et celui-ci n'avait pas à traiter de cette question. Aux termes du paragraphe 168(1), l'arbitre doit s'acquitter de ses fonctions, qu'une entente existe ou non entre l'employé et l'employeur. L'arbitre doit se contenter de décider si l'employé a été injustement congédié et, dans l'affirmative, déterminer la réparation qu'il convient d'accorder. Si l'arbitre conclut que l'employé n'a pas été injustement congédié, l'affaire s'arrête là. S'il juge au contraire qu'il l'a été, il peut enjoindre à l'employeur d'indemniser l'employé, de réintégrer celui-ci dans son emploi, ou de prendre toute autre mesure de redressement qui soit équitable.

En ce qui concerne la réparation qu'il convient d'accorder, il ne fait aucun doute que l'arbitre peut tenir compte de l'existence d'un règlement, à titre de considération factuelle; en fait, c'est ce qu'il doit faire. Un tel règlement aura, à juste titre, une incidence sur la réparation que l'arbitre peut accorder aux termes du paragraphe 242(4). Par exemple, si l'arbitre concluait que Mme Paris a injustement été congédiée et qu'elle avait droit à une somme supérieure à celle prévue dans le règlement, il pourrait ordonner à la Banque de lui verser une telle somme. Par ailleurs, si l'arbitre concluait que la somme versée à Mme Paris aux termes du règlement équivalait à la somme qu'il aurait ordonné à l'employeur de verser aux termes du paragraphe 242(4) ou encore était supérieure à celle-ci, il ne pourrait pas ordonner le versement d'un montant d'argent en raison de l'article 168. Dans un tel cas, le montant jugé convenable aux termes de la section XIV ne serait pas supérieur à celui prévu au contrat, et c'est le contrat qui s'appliquerait, malgré le dépôt d'une plainte par Mme Paris aux termes du Code.

[36]            L'arbitre a eu l'avantage d'entendre des témoins et d'évaluer les faits, ainsi que la crédibilité des témoins.


[37]            Nous n'avons pas un affidavit de Mme Scott, mais un affidavit de M. Tom W. Case, qui a signé un affidavit mentionnant qu'il était présent durant le témoignage de Mme Scott, et reproduisant des éléments ou extraits du témoignage de Mme Scott. À mon avis, c'est là une très curieuse façon de présenter des éléments de preuve à la Cour. À l'évidence, M. Case n'est pas le meilleur témoin pour déposer sur ce qu'a pu dire Mme Scott; Mme Scott est le témoin qui pouvait déposer sur ce qu'elle a dit, malheureusement nous n'avons pas l'avantage d'avoir devant nous un affidavit de Mme Scott.

[38]            Néanmoins, l'affidavit de M. Case tente d'établir qu'il y a eu entente entre la Banque et l'avocat de la défenderesse.

[39]            J'ai examiné attentivement les pièces du dossier, et il est évident que la demanderesse n'a pu convaincre l'arbitre qu'une entente existait, et elle n'a pas non plus convaincu la Cour.

[40]            À mon sens, le renvoi de l'avocat de la défenderesse le 8 janvier 1999, ainsi que le texte de la lettre de Mme Scott datée du 8 janvier 1999, montrent que, même s'il y a eu des négociations, il n'y a pas eu entente, et je ne puis conclure que l'arbitre a commis une erreur; elle a rendu une décision sur la foi de la preuve produite par les parties.


[41]            Je n'ai aucune hésitation à conclure que la demanderesse n'a pas persuadé la Cour que l'arbitre a commis une erreur sujette à révision justifiant l'intervention de la Cour.

[42]            La demande de contrôle judiciaire est donc rejetée.

Pierre Blais                                          

Juge

OTTAWA (ONTARIO)

Le 7 août 2001

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.


                          COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

                       AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                                 T-639-00

INTITULÉ DE LA CAUSE :                   Banque de Montréal c. Editha Chuanico

LIEU DE L'AUDIENCE :                       Toronto

DATE DE L'AUDIENCE :                      le 13 juin 2001

ORDONNANCE ET MOTIFS DE L'ORDONNANCE : Monsieur le juge Blais

DATE DES MOTIFS :                           le 7 août 2001

ONT COMPARU :

George Vassos                                             POUR LA DEMANDERESSE

Editha Chuanico                                           POUR LA DÉFENDERESSE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Kuretzky Vassos LLP                                  POUR LA DEMANDERESSE

Toronto (Ontario)

Editha Chuanico                                            POUR LA DÉFENDERESSE

Scarborough (Ontario)

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