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Date : 20040722

Dossier : IMM-2609-03

Référence : 2004 CF 1023

Ottawa (Ontario), le 22 juillet 2004

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE O'REILLY                          

ENTRE :

                                             MATHIVANNAN RATNASABAPATHY

                                                                                                                                           demandeur

                                                                             et

                         LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                             défendeur

                                         MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

[1]                À différents moments au cours des 20 dernières années, M. Ratnasabapathy a subi des mauvais traitements aux mains des Tigres de libération de l'Eelam tamoul (TLET), de l'armée sri lankaise , de la marine sri lankaise et de la police de Colombo. Il a finalement décidé de quitter le Sri Lanka et a cherché à obtenir l'asile au Canada. Un tribunal de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié a entendu sa demande et a conclu que le récit des événements qu'il a présenté était crédible. Malgré cela, la Commission a conclu que M. Ratnasabapathy n'avait pas démontré qu'il avait une crainte fondée de persécution s'il était renvoyé au Sri Lanka aujourd'hui.


[2]                M. Ratnasabapathy allègue que la décision de la Commission n'est pas conforme aux éléments de preuve dont elle disposait et me demande d'ordonner la tenue d'une nouvelle audience. Toutefois, je ne vois pas d'erreur de la part de la Commission qui justifierait d'écarter sa décision. Par conséquent, je dois rejeter la présente demande de contrôle judiciaire.

I. Question en litige

[3]                Une seule question ressort de la présente affaire : La Commission a-t-elle commis une erreur grave en concluant que les expériences vécues par M. Ratnasabapathy ne donnaient pas ouverture à une crainte fondée de persécution?

II. Analyse

[4]                Je puis écarter la décision de la Commission uniquement si je conclus qu'elle était manifestement déraisonnable, c'est-à-dire qu'elle n'était aucunement étayée par la preuve.


[5]                M. Ratnasabapathy était pêcheur à Valvettithurai. Il a énuméré plusieurs événements qui, selon lui, appuyaient sa demande d'asile. Par exemple, la marine l'a arrêté et détenu pendant 16 jours en 1984. Plus tard cette année-là, la marine s'en est prise à son bateau et il a été blessé. En 1990, il a été détenu par les TLET pendant 39 jours. En 1993, les TLET ont confisqué deux de ses bateaux. En 1994, la marine a tiré des coups de feu en direction de l'un de ses bateaux, et un de ses employés a péri. Le soupçonnant d'être un partisan des TLET, l'armée l'a convoqué en 1996 et il a été battu. En 1997, l'armée a démoli sa maison. En 1999, les TLET ont détourné l'un de ses bateaux. Il a rapporté ce vol à l'armée mais, parce que cette dernière le soupçonnait encore d'appuyer les TLET, il a été détenu pendant six jours. Il a été relâché après le paiement d'un pot-de-vin. En 2000, les TLET ont forcé M. Ratnasabapathy à transporter certains de leurs membres sur la côte est du Sri Lanka. L'année suivante, les TLET ont exigé du demandeur qu'il transporte de la marchandise pour eux à partir de l'Inde. Il a refusé. Lorsqu'on l'a menacé de mort, il a décidé d'aller à Colombo où il a été arrêté, torturé et détenu par la police. Une fois relâché, il a quitté le pays.

[6]                M. Ratnasabapathy a dit à la Commission que sa plus grande crainte était que les TLET ne cherchent à se venger de lui parce qu'il avait rapporté le vol de son bateau.

[7]                La Commission a dit que les TLET seraient probablement au courant du fait que M. Ratnasabapathy avait déjà été détenu et battu après avoir rapporté le vol du bateau. Il leur serait sans doute inutile de chercher à se venger maintenant. De plus, les TLET ont eu la possibilité de se venger de M. Ratnasabapathy avant son départ de Valvettithurai mais ils ne l'ont pas fait. En fait, les TLET ont continué à tenter d'obtenir son aide.


[8]                La Commission a également remarqué que les membres de la famille de M. Ratnasabapathy étaient toujours à Valvettithurai et qu'il n'avait aucune preuve que les TLET les maltraitaient. M. Ratnasabapathy a expliqué que son épouse ne pouvait rien lui dire de négatif concernant les TLET par téléphone parce qu'elle craignait que les TLET n'épient leurs conversations. Il dit que sa famille est demeurée au Sri Lanka parce que ses enfants sont encore à l'école et parce qu'il n'avait pas les moyens de payer le coût de transport jusqu'au Canada. La Commission a conclu que les explications de M. Ratnasabapathy n'appuyaient pas sa prétention relativement au risque grave de persécution.

[9]                Enfin, la Commission a fait remarquer l'existence du « fragile cessez-le-feu » qui a présentement cours au Sri Lanka. Les TLET sont moins actifs dans les régions que le gouvernement contrôle qu'ils ne l'étaient durant les périodes de grands conflits des années 1990.

[10]            En se fondant sur cette analyse de la preuve, la Commission a conclu que M. Ratnasabapathy « n'a pas réussi à établir le bien-fondé de sa crainte d'être persécuté aujourd'hui au Sri Lanka » . Je ne puis conclure que la décision de la Commission était manifestement déraisonnable. La Commission a étudié attentivement le témoignage de M. Ratnasabapathy ainsi que toutes les allégations qu'il avait présentées. Elle a apprécié le risque actuel que présentent les TLET, tel qu'il lui était loisible de le faire.

[11]            Par conséquent, je dois rejeter la présente demande de contrôle judiciaire. Aucune des parties n'a soulevé de question de portée générale pour certification et aucune question n'est formulée.


                                                                   JUGEMENT

LA COUR ORDONNE :

1.          La présente demande de contrôle judiciaire est rejetée.

2.          Aucune question de portée générale n'est formulée.

                                                                                                                          « James W. O'Reilly »         

                                                                                                                                                     Juge                      

Traduction certifiée conforme

Caroline Raymond, LL.L.


COUR FÉDÉRALE

                                              AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                                     IMM-2609-03

INTITULÉ :                                                    RATNASABAPATHY

c.

MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                             

LIEU DE L'AUDIENCE :                              TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :                            LE LUNDI 19 JUILLET 2004

MOTIFS DU JUGEMENT :                        LE JUGE O'REILLY

DATE DES MOTIFS :                                   LE 22 JUILLET 2004

COMPARUTIONS :

John M. Guoba                                                 POUR LE DEMANDEUR

Robert Bafaro                                                   POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

John M. Guoba                                                 POUR LE DEMANDEUR

Avocat

Toronto (Ontario)                                             

Morris Rosenberg                                              POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada                   


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