Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20040225

Dossier : IMM-1486-04

Référence : 2004 CF 322

                                   

ENTRE :

                                                      SEEVARATNAM KANDIAH

SARASU SEEVARATNAM

                                                                                                                                          demandeurs

                                                                             

et

LE SOLLICITEUR GÉNÉRAL DU CANADA

                                                                                                                                             défendeur

                                                  MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE PHELAN

INTRODUCTION

[1]                Le 24 février 2004, la Cour a rejeté une demande dans laquelle les demandeurs cherchaient à obtenir un sursis à l'exécution d'une mesure d'expulsion datée du 15 janvier 2004 en vertu de laquelle ils devaient être renvoyés du Canada aux États-Unis le 25 février 2004.


LES FAITS

[2]                Les demandeurs, des citoyens du Sri Lanka, sont mari et femme. Ils sont âgés respectivement de 68 et de 57 ans.

[3]                Les demandeurs ont quitté le Sri Lanka et ont déménagé en Suède en 1992. Leur demande de statut de réfugié a été rejetée en 1995. Ils se sont ensuite rendus aux États-Unis, et c'est de là qu'ils sont venus au Canada en 1995.

[4]                Les demandeurs ont initialement présenté une demande de statut de réfugié fallacieuse, contenant de fausses déclarations sur des faits cruciaux comme les circonstances entourant une demande de statut de réfugié antérieure et le métier de M. Seevaratnam. Celui-ci est en réalité un policier à la retraite et touche une pension du Sri Lanka. Après que leurs mensonges ont été démasqués, les demandeurs ont pu obtenir une audition de novo de leur demande grâce à un concours de circonstances.

[5]                La première demande des demandeurs a été rejetée pour cause de manque de crédibilité. Les demandeurs se sont vu refuser leur demande d'autorisation de contrôle judiciaire et une demande DNRSRC, et ils ont été renvoyés aux États-Unis en mars 2000.

[6]                Trois mois plus tard, les demandeurs ont présenté une seconde demande de statut de réfugié, qui a été rejetée en juillet 2001. L'autorisation de contrôle judiciaire leur a encore une fois été refusée. Ils ont présenté une demande CH, mais ont été renvoyés aux États-Unis en avril 2002.

[7]                Six mois plus tard, les demandeurs ont présenté une troisième demande de statut de réfugié, qui a elle aussi été rejetée. Ils ont fait l'objet d'un ERAR qui leur a été défavorable et qui a débouché sur la mesure de renvoi vers les États-Unis dont ils font actuellement l'objet.

[8]                Comme je l'ai mentionné au paragraphe 6, les demandeurs ont présenté une demande CH avant leur deuxième renvoi aux États-Unis. Cette demande, datée du mois de janvier 2002, n'a pas encore été tranchée.

[9]                Les demandeurs font l'objet d'une mesure d'expulsion vers le Sri Lanka aux États-Unis.

[10]            Les diverses procédures d'immigration qu'ils ont entreprises au Canada et dans d'autres pays font toutes état des problèmes de santé éprouvés par les deux demandeurs ou par l'un d'entre eux. Les problèmes de stress de M. Seevaratnam et la dépression de Mme Seevaratnam ont tous les deux été invoqués dans la première demande. L'état émotionnel et mental de Mme Seevaratnam ont été mis en cause dans les deux demandes qui ont suivi.

[11]            En l'espèce, les demandeurs font valoir que les problèmes de santé de Mme Seevaratnam témoignent d'une détérioration de son état équivalant à un préjudice irréparable. Ils allèguent que les problèmes de santé de Mme Seevaratnam continuent de s'aggraver depuis qu'ils ont été mentionnés pour la première fois dans la demande de statut de réfugié qu'ils ont présentée en Suède au début des années 90.

[12]            Pour faire le point sur l'état de santé des demandeurs, leur avocat a déposé, lors de l'audition de la demande de sursis, une lettre d'un médecin dans laquelle celui-ci confirmait les problèmes de santé de M. Seevaratnam, y compris sa fracture du poignet, et revenait sur l'état mental de Mme Seevaratnam. Je prends note du fait que le médecin qui a rédigé la lettre n'est pas le même que celui qui a traité Mme Seevaratnam auparavant.

[13]            Le fait que sa demande de statut de réfugié au Canada ait été rejetée à trois reprises et qu'elle sera peut-être renvoyée aux États-Unis et ensuite au Sri Lanka est une des principales causes de l'état dépressif de Mme Seevaratnam.

[14]            L'avocat des demandeurs a insisté devant la Cour sur l'importance de la preuve d'ordre médical, surtout celle touchant Mme Seevaratnam, et sur la possibilité que la demande CH soit tranchée dans un proche avenir.


QUESTIONS EN LITIGE

[15]            La présente demande de sursis soulève la question de savoir si les demandeurs ont satisfait au critère à tripartite de la question sérieuse, du préjudice irréparable et de la prépondérance des inconvénients.

[16]            À mon avis, c'est la question du préjudice irréparable qui est au coeur de la présente demande.

[17]            Les demandeurs affirment que tout ce qu'ils souhaitent c'est un sursis jusqu'à ce que la demande CH soit tranchée. Ceci présuppose que la demande en question sera accueille.

ANALYSE

Question sérieuse

[18]            Le critère de la question sérieuse n'est pas très exigeant, il est moins exigeant que le critère applicable à l'octroi de l'autorisation de contrôle judiciaire.

[19]            Aux fins de la présente demande de sursis (et à cette seule fin), je tiendrai pour acquis que les demandeurs ont satisfait au critère de la question sérieuse.


Préjudice irréparable

[20]            Sur ce point, je suis d'avis que les demandeurs n'ont pas réussi à prouver qu'ils allaient subir un préjudice irréparable, ce qui m'aurait permis d'accueillir la présente demande de sursis.

[21]            Les demandeurs insistent beaucoup sur l'état dépressif de Mme Seevaratnam, qui est en grande partie causé par sa crainte de retourner au Sri Lanka.

[22]            Si l'on accepte qu'il s'agit là d'un motif suffisant pour octroyer un sursis, les demandeurs ne pourront jamais être renvoyés dans leurs pays d'origine, et ce, même si leur présence au Canada n'est absolument pas justifiée. Ce que les demandeurs souhaitent obtenir en réalité c'est une injonction permanente interdisant leur renvoi.

[23]            Je ne suis pas disposé à rendre une ordonnance à cet effet en l'espèce. Le dossier de la présente affaire contient plusieurs lettres émanant de médecins, dont bon nombre renferment un mélange d'implorations de compassion et de commentaires d'ordre médical. Une grande partie des commentaires d'ordre médical reposent uniquement sur ce que l'un des demandeurs a dit aux médecins. Tous les tribunaux qui se sont penchés sur la question de la crainte de persécution au Sri Lanka, une question subjective, ont rejeté cette dernière. Je constate que la soi-disant preuve médicale sur laquelle les demandeurs se fondent pour demander à la Cour de rendre ce qui équivaut à une injonction permanente n'est en fait qu'un ensemble de lettres qui n'ont jamais fait l'objet d'un contre-interrogatoire et qui n'ont pas été signées sous serment.


[24]            Les demandeurs doivent être renvoyés aux États-Unis, un pays dans lequel ils ont déjà été renvoyés à deux reprises et où ils n'ont subi aucun préjudice catastrophique apparent.

[25]            La question de savoir si les demandeurs seront expulsés des État-Unis avant que la demande CH ne soit tranchée, même l'on suppose qu'une telle tournure des événements donnerait lieu à un préjudice irréparable, est très hypothétique.

[26]            Les répercussions que subiraient les demandeurs ne seraient qu'une conséquence logique du processus de renvoi.

[27]            Même si les demandeurs sont renvoyés au Sri Lanka, leur crainte de persécution a été jugée non crédible. Sur le plan factuel, la CISR a conclu que les demandeurs allaient pouvoir bénéficier de soins médicaux gratuits au Sri Lanka, ce qui constitue une amélioration par rapport à leur situation actuelle.

Prépondérance des inconvénients

[28]            Compte tenu de la conclusion à laquelle je suis parvenu concernant le préjudice irréparable, il n'est pas strictement nécessaire que je me penche sur ce volet.

[29]            Toutefois, si les demandeurs avaient prouvé qu'ils allaient subir un préjudice irréparable pour les raisons qu'ils ont invoquées, ils auraient eu gain de cause sur ce dernier point.

CONCLUSION

[30]            Par conséquent, la présente requête en sursis à l'exécution d'une mesure de renvoi est rejetée.

       _ Michael L. Phelan _       

        Juge                      

Traduction certifiée conforme

Aleksandra Koziorowska, LL.B.


                                                             COUR FÉDÉRALE

                                                                             

                                              AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                                 IMM-1486-04

INTITULÉ :                                                SEEVARATNAM KANDIAH et

SARASU SEEVARATNAM                    c.

LE SOLLICITEUR GÉNÉRAL DU CANADA

LIEU DE L'AUDIENCE :                         TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :                        LE 23 FÉVRIER 2004

MOTIFS DE L'ORDONNANCE : LE JUGE PHELAN

DATE DES MOTIFS :                              LE 25 FÉVRIER 2004

COMPARUTIONS:

Osborne Barnwell                                         POUR LES DEMANDEURS

Stephen Jarvis                                               POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:

Hinkson Sachak Mcleod & Barnwell    POUR LES DEMANDEURS

Toronto (Ontario)

Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada               POUR LE DÉFENDEUR


                                         

                         COUR FÉDÉRALE

                                         

Date : 20040225

Dossier : IMM-1486-04

ENTRE :

SEEVARATNAM KANDIAH

SARASU SEEVARATNAM

                                                                demandeurs

                                         

et

LE SOLLICITEUR GÉNÉRAL DU CANADA

                                                                   défendeur

                                                                      

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

                                                                      


 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.