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Date : 20010821

Dossier : IMM-2801-00

OTTAWA (Ontario), le 21 août 2001.

EN PRÉSENCE DE Monsieur le juge MacKay

                                                                            

ENTRE :

STEPAN KEVORKYAN, LARISSA KEVORKYAN

et MIKAEL KEVORKYAN

demandeurs

- et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,

défendeur

VU la demande de contrôle judiciaire et la requête en ordonnance d'annulation visant une décision de la section du statut de réfugié de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié, en date du 8 mai 2000, par laquelle la SSR rejette la revendication du statut de réfugié au sens de la Convention présentée par les demandeurs;

ET après avoir entendu les avocats des parties à Saint-Jean (Terre-Neuve), le 12 avril 2001, et examiné les observations présentées le même jour, la Cour ayant alors différé sa décision;

                                                              ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE que la demande sera rejetée.

                                                                                                             (signé) « W. Andrew MacKay »     

JUGE

Traduction certifiée conforme

Richard Jacques, LL.L.


Date : 20010821

Dossier : IMM-2801-00

Référence neutre : 2001 CFPI 925

ENTRE :

STEPAN KEVORKYAN, LARISSA KEVORKYAN

et MIKAEL KEVORKYAN

demandeurs

- et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

                          MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE MacKAY

[1] Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire présentée en vertu de l'article 18.1 de la Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. (1985), ch. F-7 et de l'article 82.1 de la Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), ch. I-2 et d'une requête en ordonnance d'annulation visant une décision de la section du statut de réfugié de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (le tribunal) datée du 8 mai 2000, par laquelle le tribunal a rejeté la revendication du statut de réfugié au sens de la Convention présentée par les demandeurs.


Exposé des faits

[2]    Le revendicateur principal, son épouse et leur fils mineur réclament le statut de réfugié au sens de la Convention en raison de leur persécution pour leurs opinions politiques et leur nationalité. Le revendicateur principal, Stepan Kevorkyan, est un ressortissant arménien. Sa femme, Larissa Kevorkyan, est d'origine ethnique russe. Tous deux et leur jeune enfant sont citoyens du Kazakhstan.

[3]    Les faits relatés dans la décision du tribunal sont les suivants :

La preuve déposée dans le cadre de la revendication ici visée et que renferment le Formulaire de renseignements personnels (FRP) et le témoignage de vive voix du revendication principal et de la revendicatrice principale, montre qu'ils se sont mariés en 1992 au Kazakhstan, ont emménagé alors dans un appartement et qu'ils ont commencé à éprouver des problèmes lorsque ce dernier est devenu un sujet de controverse. Ils ont versé pour cet appartement un acompte de 5 500 $ américains et ont signé un contrat avec un notaire de l'État, puis se sont préparés à y emménager. À cette époque, le propriétaire de l'appartement, un dénommé Mambetov, ne voulait pas les laisser en prendre possession. Finalement, les choses se seraient aggravées jusqu'au point où M. Mambetov aurait brutalement frappé le revendicateur principal et menacé la revendicatrice principale, les parents de M. Mambetov seraient allés sur le lieu de travail de cette dernière la menacer également et on leur aurait dit qu'on les tuerait s'ils ne libéraient pas l'appartement. C'est pour ces raisons que le revendicateur principal et que son épouse sont venus au Canada, où ils ont demandé l'asile.


[4]                 Les faits détaillés par les demandeurs dans leurs affidavits diffèrent des constatations du tribunal à cet égard. Les demandeurs principaux se sont bien mariés en 1992, mais leurs difficultés avec Mambetov n'ont surgi qu'en août 1994. Ils allèguent que, durant un certain temps après leur mariage, des citoyens kazakhs les ont harcelés pour qu'ils leur vendent leur appartement à vil prix. Les pressions sont devenues si intenses qu'ils étaient importunés nuit et jour, menacés à l'entrée de leur immeuble et ont finalement craint pour leur vie après que la revendicatrice principale eut fait une fausse-couche suite à une altercation physique avec les Kazakhs. Finalement, et par souci pour leur sécurité, ils ont décidé de vendre l'appartement beaucoup moins cher qu'il ne valait.

[5]                 Une fois qu'ils l'eurent fait en 1993, ils en ont loué un autre. S'étant rendu compte qu'ils ne pouvaient plus continuer à vivre à loyer, ils ont résolu d'acheter un appartement. C'est alors qu'ils ont eu affaire à Mambetov et subi les violentes tentatives d'exaction qui ont suivi.

[6]                 Ils ont également soutenu dans leurs affidavits que la revendicatrice avait été violemment agressée et avait subi, en 1991, de nombreux coups de poignard; ils étaient tous les deux au courant de menaces proférées à l'encontre du père du demandeur principal. Ils en ont, chaque fois, informé la police qui n'a apparemment rien fait. Bien qu'on n'ait pas la certitude que tous les événements relatés par les demandeurs fussent attribuables à une oppression nationale ou politique, ils les ont présentés pour illustrer la persécution dont ils ont souffert et non comme des incidents liés à leurs difficultés avec Mambetov. Le tribunal a jugé que ces incidents étaient soit exagérés, soit inventés pour faire valoir les revendications des demandeurs relatives au statut de réfugié, bien qu'il n'ait pas donné les motifs du rejet de leur témoignage.

Observation des demandeurs


[7]                 Les demandeurs allèguent que le tribunal a commis un certain nombre d'erreurs qui l'ont conduit, ou auraient pu le conduire, à formuler des hypothèses erronées ou des inférences défavorables pour eux. Ils soutiennent qu'il a dénaturé à maintes reprises les faits, ce qui suscite des inquiétudes quant à l'attention qu'il accorde aux points de détail, considérant la preuve fournie. Les demandeurs soutiennent qu'en se fiant sur des faits dénaturés, le tribunal s'expose à rendre une décision inique et arbitraire qui est susceptible de contrôle.

[8]                 Ils ont également prétendu que le tribunal a omis, dans ses motifs, de tenir spécialement compte de certains éléments de preuve qui soutiennent leurs revendications. Ils soutiennent que le tribunal est tenu d'examiner toutes les preuves dont il est saisi comme l'ont reconnu la Cour d'appel dans l'arrêt Hassan c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (1992), 147 N.R. 317 (C.A.), et la Section de première instance de la Cour fédérale dans la cause Galiano c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 9 décembre 1996, IMM-848-96 (C.F. 1re inst.). De l'avis des demandeurs, le tribunal est tenu d'examiner les preuves tant orales que documentaires qui corroborent les prétentions d'un demandeur. En outre, faute par le tribunal de prendre en considération des éléments de preuve importants, sa décision sera viciée et susceptible de contrôle.

[9]                 Enfin, s'appuyant sur le principe bien établi selon lequel un tribunal doit faire part à un demandeur de toute inférence défavorable à son endroit pour lui permettre de la réfuter ou de s'en expliquer, les demandeurs affirment qu'il n'en a pas été ainsi et que cet oubli constitue une erreur susceptible de contrôle. Ils ajoutent que le tribunal a omis de leur donner l'occasion d'expliquer une inférence négative ou une incertitude quelconque qu'il aurait perçue.


Observations du défendeur

[10]            Celui-ci allègue que les demandeurs n'ont pas réussi à atteindre le seuil limite, c.-à-d. la charge d'établir, selon la prépondérance des probabilités, leur crédibilité et un lien suffisant entre la définition de « réfugié au sens de la Convention » et leur crainte d'être persécutés.

[11]            Sur la question de crédibilité le tribunal s'est exprimé en ces termes :

Le tribunal ne doute pas qu'un appartement et qu'un dénommé Mambetov aient créé à la famille Kevorkyan des problèmes, mais il est évident, pour ce qui est de la crédibilité, qu'elle a exagéré ces problèmes et qu'elle les a, dans certains cas, fabriqués afin d'embellir sa revendication.

Il a conclu, en raison de ce qui précède, que les demandeurs ne peuvent pas être considérés comme des réfugiés au sens de la Convention.

[12]            Quant à la question du lien, le tribunal s'est dit d'avis que « les questions de crédibilité mises à part, le tribunal considère qu'il n'existe aucun lien entre la revendication ici visée et la définition d'un réfugié au sens de la Convention » . Il a constaté que, si les demandeurs ont subi des préjudices par suite des agissements de Mambetov, rien n'indique que cette situation découlait d'une persécution d'ordre national ou politique. Analysant le témoignage des demandeurs au sujet de leur mauvais traitement, le tribunal s'est prononcé ainsi :

Nous croyons que ce que nous avons entendu était exagéré, en un certain sens fabriqué; mais même si cela n'était pas exagéré ni fabriqué, il est évident que le cas qui nous est soumis n'est pas visé par la Convention de 1951 sur les réfugiés. Il n'y a aucun lien entre la revendication ici visée et la définition de réfugié au sens de la Convention. C'est un acte criminel.


Ainsi, le tribunal a finalement déterminé que le harcèlement allégué par les demandeurs ne constitue pas de la persécution telle que la définit la Loi sur l'immigration, mais qu'il résulte plutôt d'une activité criminelle.

Questions litigieuses

[13]            Les demandeurs soulèvent les trois questions suivantes :

1.         Ont-ils présenté des preuves crédibles et plausibles, considérant tous les éléments de preuve fournis au tribunal? Dans la négative, celui-ci a-t-il expliqué pourquoi il ne les a pas tenus pour dignes de foi?

2.          La décision se fonde-t-elle sur des conclusions de fait erronées et sans égard à la preuve présentée au tribunal?

3.          Selon la prépondérance des probabilités, les demandeurs ont-ils établi l'existence du lien nécessaire entre leur harcèlement, en supposant qu'on puisse y voir de la persécution, et une raison quelconque, reconnue par la Convention, de leur octroyer le statut de réfugié?

[14]            Au sujet des conclusions touchant la crédibilité, il me faut examiner celles qui reposaient sur une interprétation erronée des faits. Après étude de la documentation soumise au tribunal, je note que celui-ci a formulé, dans sa décision, certaines constatations de fait qui ne semblent pas étayées par la preuve.


[15]            En premier lieu, il n'a pas fait cas de la preuve fournie par les demandeurs au sujet de leur harcèlement et persécution par des nationalistes kazakhs, ni de la vente forcée de leur appartement qui en est résultée. Ces événements, survenus en 1992-1993, n'avaient rien à voir avec les incidents mettant en cause Mambetov. Les motifs de la décision montrent que le tribunal a omis de tenir compte de ces incidents antérieurs et a imputé à Mambetov tous les actes de harcèlement subis par les demandeurs. Toutefois, leurs ennuis avec Mambetov ont seulement commencé après qu'ils lui eurent acheté un appartement en août 1994.

[16]            D'autres faits, également mal interprétés, avaient trait aux démissions des demandeurs de leurs emplois. Tant le mari que la femme ont déclaré, dans leurs affidavits, qu'ils avaient dû quitter leurs postes en raison de leur persécution par Mambetov. Et pourtant, le tribunal a déterminé dans ses motifs que la crédibilité des demandeurs était sujette à caution du fait que les FRP laissaient entendre que l'épouse demanderesse a été forcée de démissionner alors qu'à l'audience, elle a dit avoir quitté son emploi de son plein gré.


[17]            Le tribunal a conclu que le témoignage des demandeurs au sujet du rapport à la police concernant l'agression verbale que la demanderesse a subie dans son lieu de travail par le père de Mambetov n'était pas plausible, car il s'agissait d'un incident relativement négligeable, alors que d'autres incidents plus graves n'avaient pas été rapportés. La revendication elle-même était jugée invraisemblable. Ces invraisemblances étaient imputées à l'environnement politique « chaotique » et « instable » qui règne aujourd'hui en Russie. Les demandeurs vivaient au Kazakhstan et leur revendication du statut de réfugié avait trait à ce pays. Conclure à l'invraisemblance en raison d'une situation qui a cours dans un autre pays que celui des demandeurs, n'est pas raisonnable et met sérieusement en doute les autres constatations de fait du tribunal.

[18]            Le défendeur fait instamment valoir que toute interprétation fautive des faits portait sur des points de détail et n'influait en rien sur l'issue finale de la cause.

[19]            En ce qui a trait à la question du lien, le tribunal a déterminé que les demandeurs n'avaient pu établir, en fonction de la prépondérance des probabilités, que l'activité, qualifiée de criminelle par le tribunal, dont ils ont été victimes, équivalait à de la persécution du fait de la nationalité, des opinions politiques ou de toute autre raison prévue dans la Convention.

[20]            Pour être reconnu comme « réfugié au sens de la Convention » , le demandeur doit, aux termes du paragraphe 2(1) de la Loi sur l'immigration, « [craindre] avec raison d'être persécuté du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social ou de ses opinions politiques » s'il est forcé de regagner son pays de nationalité ou son domicile habituel qu'il a fui.


[21]            Il est également bien établi comme principe que si les incidents vécus constituent un acte criminel, mais non de la persécution, comme l'exige la Loi sur l'immigration, le demandeur n'est pas fondé à prétendre qu'il « [craint] avec raison d'être persécuté » (Porto c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), 3 septembre 1993, A-1549-92 (C.F. 1re inst.)). Ainsi que l'a observé le juge Teitelbaum dans l'arrêt Alifanova et al. c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (1998), 160 F.T.R. 206 (1re inst.), si la crainte du demandeur résulte d'un crime ou d'actes criminels, il n'existe aucun rapport entre cette crainte et les motifs reconnus par la Convention. Il dit en outre au paragraphe 26 de ses motifs : « ... tous les agissements criminels ne peuvent pas être considérés comme des actes de persécution... Que ces crimes soient commis par des Kazakhs contre des Russes n'en fait pas des actes de persécution » .

[22]            Bien que les demandeurs principaux aient, de vive voix et par écrit, soumis des preuves de l'intimidation et du harcèlement qu'ils avaient subis, leurs revendications se fondent pour l'essentiel sur des actes de persécution exercés sur eux par Mambetov.

[23]            Les demandeurs ont tenté d'asseoir leurs revendications sur des considérations d'ordre politique et national liées à l'intervention des parents de Mambetov, en particulier son père qui, disent-ils, occupe de hautes fonctions politiques. Il aurait prétendument harcelé et menacé la demanderesse à son lieu de travail. Cela ne suffit cependant pas à justifier la reconnaissance du statut de réfugié en raison des opinions politiques des demandeurs. C'est ainsi que l'arrêt Calero c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), 8 août 1994, IMM-3396-93 (C.F. 1re inst.), cité dans Serrano c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (1999), 166 F.T.R. 227, par. 24 (C.F. 1re inst.) énonce ce qui suit : « ... les victimes du crime organisé ne constituent pas un groupe social et il n'existe donc pas de lien entre la crainte de persécution et un motif énoncé dans la Convention » . En outre, dans l'arrêt Mia c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 26 janvier 2000, IMM-2677-99 (C.F. 1re inst.), la Cour déclare au par. 18 : « Des actes ne deviennent pas des actes de persécution du simple fait que leur auteur est un fonctionnaire du gouvernement » .


[24]            Pour établir que les agissements d'un individu sont politiquement motivés ou qu'ils relèvent simplement d'une conduite criminelle, il faut voir si le gouvernement est impliqué dans ce genre de comportement si bien que la contestation de cette activité serait vue comme une menace à l'autorité gouvernementale. Si cette relation ne peut être établie, le comportement en question peut alors être de nature criminelle, mais sans aucun rapport avec les motifs reconnus par la Convention (voir Serrano, supra).

[25]            Dans les circonstances de l'espèce, peu importe que le père de Mambetov fut ou non un fonctionnaire gouvernemental de haut rang. Il n'agissait pas en tant qu'homme politique et l'État lui-même ne se comportait pas d'une façon criminelle de sorte qu'on ne pourrait pas distinguer les agissements d'un individu de ceux de l'État. Bien que les demandeurs maintiennent que la police a refusé à plusieurs reprises de leur offrir sa protection, le tribunal a conclu que la preuve n'était pas cohérente sur ce point et qu'aucun lien avec un motif politique n'a été établi.

[26]            Les demandeurs allèguent que le harcèlement survenu entre 1992 et 1994, mais sans rapport avec l'affaire Mambetov, était motivé par la discrimination ethnique. Le tribunal a déterminé que les intéressés n'avaient pu prouver leurs dires, ni témoigner à l'audience qu'il s'agissait d'une activité à laquelle l'État était partie.


[27]            Les opinions politiques et la nationalité constituent les deux motifs prévus dans la Convention sur lesquels s'appuient les demandeurs. Le tribunal a conclu que même si l'on tenait leur récit pour véridique, la crainte de persécution qu'ils éprouvent est de nature criminelle et qu'il n'existe aucun lien entre les situations qu'ils ont vécues et les motifs reconnus par la Convention pour réclamer le statut de réfugié.

[28]            Le tribunal a conclu en ces termes :

Les questions de crédibilité mises à part, le tribunal considère qu'il n'existe aucun lien entre la revendication ici visée et la définition d'un réfugié au sens de la Convention. On a à certains moments suggéré que ce lien serait la nationalité, que ce dont les revendicateurs auraient souffert était attribuable à leur nationalité. On a cependant posé cette question un certain nombre de fois aux revendicateurs principaux et ni l'un ni l'autre n'ont laissé entendre que c'était le cas. En réponse, par exemple, à une question au sujet des raisons pour lesquelles cela leur était arrivé à eux, les deux ont aussi laissé entendre que c'était peut-être parce qu'ils avaient été témoins d'un acte illégal, l'expropriation de leur appartement. Lorsque leur conseil leur a directement demandé si leur nationalité avait joué un rôle dans leurs difficultés, ils ont répondu [traduction] « c'est difficile à dire, » . Il est évident pour le tribunal que le motif qui sous-tendait la tentative d'extorsion de leur appartement était le gain matériel, ce qui n'est pas relié à la nationalité.

Il n'y a donc aucun lien entre la revendication ici visée et la définition de réfugié au sens de la Convention pour des motifs tenant à la nationalité. Il est également évident aux yeux des membres du tribunal qu'il n'y a aucun lien entre la revendication ici visée et la définition de réfugié au sens de la Convention pour un autre motif quelconque qui y est énuméré.

Conclusion

[29]            Le tribunal s'est fondé sur des conclusions et des interprétations de fait erronées pour déterminer que les témoignages des demandeurs manquaient de crédibilité ce qui, dans de nombreux cas, aurait justifié l'intervention de la Cour. En l'espèce, le tribunal a estimé que même si l'on acceptait la version des faits que donnent les demandeurs, aucun lien n'existait entre la persécution subie et les motifs reconnus par la Convention. Ainsi, tout acte de persécution qu'on leur a infligé était de nature criminelle et non un acte de persécution au sens de la Convention.


[30]            La Cour n'est pas persuadée qu'on pourrait dire, au vu des témoignages présentés, que la conclusion finale du tribunal n'est pas raisonnable. Partant, la Cour n'a aucun motif pour intervenir dans la cause, et la demande de contrôle judiciaire fait l'objet d'une ordonnance de rejet.

Question à certifier

[31]            Suite à l'audition de la présente cause, l'avocat des demandeurs a soumis la question suivante pour certification, en application du paragraphe 83(1) de la Loi sur l'immigration.

[traduction]

Lorsqu'il appert qu'un tribunal a fait une évaluation erronée d'une partie appréciable de la preuve dont il est saisi, la Cour peut-elle confirmer une partie quelconque de la décision du tribunal fondée sur une conclusion de fait ou une autre?


[32]            À mon avis, le présent litige ne soulève pas « une question grave de portée générale » . La décision finale du tribunal, telle que je l'interprète, veut que même si l'on tient pour véridique la preuve soumise par les demandeurs, leur persécution, telle que perçue, ne constituait pas un motif reconnu par la Convention, car rien ne prouve la complicité de l'État dans les agissements qui ont donné lieu à leurs revendications. Je refuse donc de certifier la question proposée.

                                                                      (signé) « W. Andrew MacKay »     

JUGE

Ottawa (Ontario)

le 21 août 2001.

Traduction certifiée conforme

Richard Jacques, LL.L.


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

No DU GREFFE :                      IMM-2801-00

INTITULÉ :                                STEPAN KEVORKYAN et autres c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration)

LIEU DE L'AUDIENCE :         Saint-Jean (Terre-Neuve)

DATE DE L'AUDIENCE :       12 avril 2001

MOTIFS DE L'ORDONNANCE par Monsieur le juge Mackay

DATE DES MOTIFS : 21 août 2001

ONT COMPARU

Nicholas P. Summers                                                                      POUR LES DEMANDEURS

Lori Rasmussen                                                                             POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

Nicholas P. Summers                                                                      POUR LES DEMANDEURS

Saint-Jean (Terre-Neuve)

Morris Rosenberg                                                                           POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

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