Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20020709

Dossier : IMM-4127-01

OTTAWA (ONTARIO), le 26 juillet 2002

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE ROTHSTEIN (ex officio)

ENTRE :

                                                                NAQI MOHD KHAN

                                                                 et KHAJIDA KHAN

                                                                                                                                                     demandeurs

                                                                                   et

                      LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                                        défendeur

                                                                     ORDONNANCE

La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

                                                                                                                                  « Marshall Rothstein »             

                                                                                                                                                                 Juge                          

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.


Date : 20020726

Dossier : IMM-4127-01

Référence neutre : 2002 CFPI 825

ENTRE :

                                                                NAQI MOHD KHAN

                                                                 et KHAJIDA KHAN

                                                                                                                                                     demandeurs

                                                                                   et

                      LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                                        défendeur

                                                    MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE ROTHSTEIN (ex officio)

[1]                 Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire concernant une décision négative de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. La Commission a jugé que la crainte qu'entretenait le demandeur d'être persécuté dans l'Azad Cachemire en raison de ses opinions politiques était fondée. Cependant, la Commission a également jugé qu'il existait une possibilité de refuge intérieur à l'extérieur de l'Azad Cachemire.

[2]                 La Commission a jugé que le demandeur, qui vivait dans l'Azad Cachemire, était un membre actif du Parti national unifié du peuple du Cachemire (UKPNP), auparavant le Parti national du peuple du Jammu-et-Cachemire (JKPNP), qui critiquait les gouvernements de l'Azad Cachemire et du Pakistan. La Commission a également déclaré qu'un premier rapport d'information (PRI) avait été enregistré contre le demandeur et que ce document l'accusait d'exercer des activités antigouvernementales passibles de la peine de mort ou de l'emprisonnement à perpétuité. La Commission a ensuite déclaré que les services policiers du Pakistan arrêtent les personnes qui prônent activement la création d'un Azad Cachemire laïque et indépendant, qui est la position politique de l'UKPNP. La Commission mentionne des documents qui indiquent que les activistes qui prônent l'indépendance du Cachemire sont parfois éliminés à l'occasion de « rencontres avec les policiers » ou avec l'aide de militants propakistanais locaux. La Commission ne l'a pas mentionné expressément mais j'en déduis que ses conclusions concernent uniquement la situation qui règne dans l'Azad Cachemire et non dans le reste du Pakistan.

[3]                 La Commission a jugé que le défendeur avait des motifs de craindre d'être persécuté dans l'Azad Cachemire mais a déclaré qu'il existait une possibilité de refuge intérieur viable au Pakistan. La Commission a déclaré que, compte tenu de la nature locale des activités exercées par le demandeur, le risque que le demandeur soit repéré par les autorités dans une autre région du Pakistan n'était qu'une simple possibilité.

[4]                 La Commission a également pris note du témoignage du demandeur selon lequel il continuerait à défendre l'indépendance séculière de l'Azad Cachemire s'il s'établissait ailleurs au Pakistan. La Commission a toutefois jugé qu'à une exception près, il n'existait aucun élément indiquant que ce genre de personne est ciblée par la police ou les groupes fondamentalistes à l'extérieur de l'Azad Cachemire. Il y avait un document indiquant que le secrétaire général de l'UKPNP avait pu exprimer le point de vue de son parti qui prône la création d'un Cachemire indépendant au cours d'une réunion publique tenue à Islamabad, sans craindre de représailles. La Commission a estimé que les demandeurs pourraient être persécutés à l'extérieur de l'Azad Cachemire mais qu'il ne s'agissait là que d'une simple possibilité.

[5]                 Le principal argument présenté par le demandeur est que la Commission ne pouvait raisonnablement conclure qu'il existait une PRI viable, compte tenu de l'existence d'un PRI officiel dans lequel le demandeur était accusé d'exercer des activités antigouvernementales. Il affirme que le PRI l'empêche d'être inclus dans la catégorie des personnes qui ne font qu'être favorables à un Azad Cachemire laïque et indépendant. Il affirme qu'il courrait un danger n'importe où au Pakistan, à cause du PRI. Le demandeur affirme qu'à cause de sa faible notoriété, il risque davantage d'être persécuté que les partisans de l'UKPNP qui sont plus connus. Enfin, le demandeur soutient qu'il n'était pas raisonnable de s'attendre à ce qu'il cherche un refuge ailleurs au Pakistan, étant donné que les autorités auxquelles il cherche à se soustraire sont la police et l'armée pakistanaises.

[6]                 J'ai examiné avec beaucoup d'attention les arguments que l'avocat des demandeurs a très bien présentés, et en particulier, le fait que le demandeur fait l'objet d'un PRI, dans lequel il est accusé d'exercer des activités antigouvernementales. Je dois néanmoins rappeler qu'il ne m'appartient pas de me substituer à la Commission.


[7]                 Pour ce qui est des motifs préparés par la Commission dans cette affaire, je note, en premier lieu, qu'ils sont détaillés et complets. La Commission a examiné les arguments des demandeurs, de façon détaillée et cohérente. Plus précisément, la Commission a tenu compte du PRI et du fait que l'on pouvait être arrêté du seul fait de l'existence d'un PRI, même en l'absence d'un mandat d'arrestation. La Commission a néanmoins estimé que le PRI n'avait été enregistré qu'à la station de police de Rawalakot et au palais de justice local dans l'Azad Cachemire. La Commission a conclu, en se fondant sur la preuve documentaire, que le système juridique de l'Azad Cachemire était distinct de celui du reste du Pakistan. La Commission a en outre estimé que le demandeur n'était pas connu dans tout le Pakistan et qu'il n'avait exercé ses activités politiques que dans les régions de Rehara et de Rawalakot dans l'Azad Cachemire. C'est pour ces motifs que la Commission a conclu que le demandeur pourrait être repéré par les autorités policières pakistanaises à l'extérieur de l'Azad Cachemire ou être arrêté en raison du PRI déposé contre lui à Rawalakot, mais qu'il ne s'agissait là, tout au plus, que d'une simple possibilité. La Commission a également déclaré qu'étant donné que le demandeur n'avait exercé des activités politiques qu'à un niveau local et qu'il n'était pas connu sur ce plan à l'échelle nationale, il pourrait être repéré par l'armée pakistanaise ou les Renseignements interservices ailleurs au Pakistan, mais qu'il ne s'agissait là, tout au plus, que d'une simple possibilité.

[8]                 Je crains qu'à cause du PRI, le demandeur soit plus vulnérable à l'extérieur de l'Azad Cachemire que s'il n'était qu'un activiste. Cependant, dans ses motifs, la Commission a expressément pris le PRI en considération. Je ne peux affirmer qu'elle n'a pas tenu compte de cet élément, ni qu'elle l'a apprécié de façon déraisonnable.

[9]                 J'ai également examiné le point de savoir s'il est raisonnable de s'attendre à ce que le demandeur cherche refuge dans une autre région du Pakistan, compte tenu du fait que sa crainte d'être persécuté par la police de l'Azad Cachemire est fondée. L'avocat du demandeur a cité l'arrêt Khan c. Canada (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (2000), 6 Imm. L.R. (3d) 119 (C.F. 1re inst.), dans lequel le juge MacKay a déclaré que la Commission avait commis une erreur susceptible d'être révisée parce qu'elle avait omis d'examiner la possibilité qu'une personne soit persécutée par les autorités nationales, alors qu'elle étudiait l'existence d'une possibilité de refuge intérieur. Au paragraphe 7 de l'arrêt Khan, précité, le juge MacKay a cité l'arrêt Sharbdeen c. M.E.I. (1994), 23 Imm. L.R. (2d) 300 (C.A.), dans lequel le juge Mahoney a déclaré :

Il suffit de préciser que nous croyons que le juge de première instance n'a pas commis d'erreur en concluant que, compte tenu de toutes les circonstances de l'espèce, la Section du statut de réfugié avait commis une erreur en concluant qu'il existait une possibilité de refuge dans une autre partie du même pays. Une fois établi le bien-fondé de la crainte du revendicateur d'être persécuté par l'armée nationale dans une partie du pays qu'elle contrôle, il n'était pas raisonnable de s'attendre que l'intimé cherche refuge dans une autre partie du Sri Lanka contrôlée par la même armée. [...]


L'avocat des demandeurs ne soutient pas que les observations du juge Mahoney dans l'arrêt Sharbdeen, précité, énoncent des règles applicables dans tous les cas, ce que je ne pense pas non plus. Il faut toujours tenir compte des circonstances. En fait, dans l'arrêt Khan, précité, le juge MacKay a déclaré que l'erreur de droit venait uniquement du fait que la Commission n'avait pas examiné la possibilité que la personne en question soit persécutée par les autorités nationales.

[10]            En l'espèce, la Commission a expressément abordé ce point. Elle a jugé que l'appareil judiciaire de l'Azad Cachemire était distinct de celui du reste du Pakistan. Elle a déclaré que le demandeur n'était pas connu, à l'échelle nationale, pour ses activités politiques. Elle a déterminé qu'il n'existait pas de preuve documentaire indiquant que les activistes de l'UKPNP ayant un profil semblable à celui du demandeur étaient ciblés par les autorités ou les groupes militants propakistanais à l'extérieur de l'Azad Cachemire.

[11]            La Commission a abordé les aspects se rapportant à la question de l'existence d'une possibilité de refuge intérieur pour les demandeurs. Je ne puis affirmer que ses conclusions ne sont pas raisonnables. Comme je l'ai mentionné plus haut, la Commission a fourni sur ce point des motifs détaillés et elle a abordé tous les aspects soulevés par les demandeurs.

[12]            Malgré l'excellente argumentation de l'avocat des demandeurs, j'estime qu'il y a lieu de rejeter la présente demande de contrôle judiciaire.

    

                                                                              « Marshall Rothstein »             

                                                                                                             Juge                          

  

Ottawa (Ontario)

Le 26 juillet 2002

    

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.


                          COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

                       AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

  

DOSSIER :                  IMM-4127-01

INTITULÉ :                 NAQI MOHD KHAN

KHAJIDA BEGUM KHAN

- et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

  

LIEU DE L'AUDIENCE :                                Calgary (Alberta)

DATE DE L'AUDIENCE :                              Le 8 juillet 2002

MOTIFS DE L'ORDONNANCE :              LE JUGE ROTHSTEIN (ex officio)

DATE DES MOTIFS :                                     Le 26 juillet 2002

  

COMPARUTIONS :

M. G. Michael Sherritt                                        POUR LES DEMANDEURS

M. Kerry A. Franklin                                            POUR LE DÉFENDEUR

  

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Sherritt Greene                                                     POUR LES DEMANDEURS

Calgary (Alberta)

Morris Rosenberg                                                 POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.