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Date : 20190703


Dossier : T-1525-18

Référence : 2019 CF 882

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 3 juillet 2019

En présence de monsieur le juge Barnes

ENTRE :

REUSABLE BAG INDUSTRIES PTY LTD

demandeur

et

MARAT GAISIN

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1]  La Cour est saisie d’un appel interjeté par Reusable Bag Industries Pty Ltd (RBI) en vertu du paragraphe 56(1) de la Loi sur les marques de commerce, LRC 1985, c T‑13 (la Loi) à l’encontre de la décision par laquelle le Registraire des marques de commerce (le registraire) a radié l’enregistrement canadien no LMC791496 (la marque) pour non‑usage. RBI demande également à la Cour d’entendre l’appel au titre du paragraphe 56(1) de la Loi, malgré le fait que celui-ci ait été déposé plus de deux mois après la date où le registraire a expédié l’avis de la décision relative à la radiation.

[2]  Il ressort du dossier que l’examen de l’état de la marque par le registraire découlait d’une demande du défendeur, Marat Gaisin, présentée conformément à l’article 45 de la Loi.

[3]  Monsieur Gaisin n’a déposé aucun élément de preuve dans le cadre du présent appel et ne s’est pas présenté à l’audience. Il a en fait présenté une page d’observations non signée indiquant qu’il n’était [traduction« pas en mesure de participer à l’instance devant la Cour fédérale du Canada ». Dans ces observations M. Gaisin affirme qu’il est propriétaire de la marque en Europe et fait état de ses efforts de faire d’enregistrer la marque au Canada. M. Gaisin reconnaît aussi que RBI est propriétaire de la marque en vue de son emploi au Canada, mais il s’interroge vaguement à savoir si les produits qu’elle couvre sont offerts au pays.

[4]  Les antécédents administratifs de l’espèce sont en apparence plutôt simples. RBI est le successeur du propriétaire initial de la marque. La marque a été enregistrée pour la première fois au Canada le 23 février 2011. Vers la fin de l’année 2017, M. Gaisin a demandé au registraire de donner au propriétaire inscrit un avis lui enjoignant de fournir une preuve de l’emploi de la marque au Canada au cours des trois années précédentes, conformément à l’article 45 de la Loi. Étant donné que RBI n’avait pas mis à jour l’enregistrement de la marque, l’avis du registraire, envoyé le 13 décembre 2017, a été délivré à une ancienne adresse inutilisée. Par conséquent, RBI n’a jamais reçu la demande d’éléments de preuve. Naturellement, l’avis est demeuré sans réponse.

[5]  Le 17 avril 2018, le registraire a expédié un avis indiquant que la marque serait radiée du registre dans un délai de 60 jours à moins qu’un appel ne soit déposé devant la Cour entre‑temps. Encore une fois, l’avis de défaut du registraire a été envoyé à la même adresse inactive, tout comme l’avis de radiation envoyé le 19 juillet 2018.

[6]  Selon l’affidavit du propriétaire de RBI, Mark David‑Tooze, ce n’est que le 20 juin 2018 que lui ou quiconque chez RBI a pris connaissance de la radiation de la marque. Les services d’un avocat canadien ont été retenus en juillet 2018 et le présent appel a débuté le 16 août 2018.

[7]  Conformément à l’article 56 de la Loi, l’appel d’une décision de radiation peut être interjeté dans les deux mois qui suivent la date où le registraire a expédié l’avis ou dans tel délai supplémentaire accordé par le tribunal, soit avant, soit après l’expiration des deux mois.

[8]  On ne sait pas avec certitude quelle date doit être utilisée pour calculer le délai de prescription prévu à l’article 56. Si la décision visée par l’appel avait été prise à compter de l’envoi de l’avis du registraire, le 17 avril 2018, le délai d’appel aurait pris fin à la mi‑juin 2018. Par contre, si le délai a commencé à courir à la date de la décision finale de radiation, soit le 19 juillet 2018, le présent appel n’est pas prescrit. Quoi qu’il en soit, si une prorogation de délai est nécessaire pour examiner le présent appel sur le fond, j’exercerai mon pouvoir discrétionnaire pour l’autoriser. RBI a justifié son défaut de répondre à la demande de renseignements du registraire. L’entreprise n’a pas sciemment laissé l’affaire devenir caduque; elle a plutôt agi promptement dès qu’elle a pris connaissance du problème. À la lumière de la preuve présentée, je conclus que RBI s’est déchargée du fardeau dont elle devait s’acquitter pour obtenir une prorogation, tel qu’il est expliqué dans l’arrêt Canada (Procureur général) c Hennelly [1999] ACF no 846, 89 ACWS (3d) 376 (CAF). En particulier, à partir du moment où RBI a pris connaissance de la décision du registraire, l’entreprise a affiché une intention constante de donner suite à l’affaire, et c’est ce qu’elle a fait. La preuve manifeste et incontestée démontre que l’appel est fondé. Aucun élément de preuve ne confirme que le défendeur ou quiconque a subi un préjudice en raison du délai. De plus, comme mentionné précédemment, RBI a fourni une explication raisonnable pour justifier le délai. La présente instance correspond parfaitement à la situation décrite dans la décision Tint King of California c Canada (Registraire des marques de commerce), 2006 CF 1440, [2006] ACF no 1808, où une prorogation de délai pour interjeter appel avait été accordée.

[9]  En ce qui concerne le bien‑fondé de l’appel, je conclus que la décision du registraire de radier la marque doit être rejetée. La Cour dispose d’affidavits détaillés et non contestés établissant la propriété, le contrôle et l’emploi de la marque par RBI. L’emploi largement répandu de la marque, ainsi que la vente de produits désignés dans la période allant du 13 décembre 2014 au 13 décembre 2017 a été établie dans l’affidavit de Paul McGowan. M. McGowan est le DGE de l’entreprise Betta Brands Inc, le distributeur exclusif des produits ENVIROSAX de RBI au Canada et aux États‑Unis. Selon M. McGowan, Betta Brands Inc a vendu des produits de marque à de nombreux consommateurs canadiens, dans la pratique normale du commerce, pendant la période pertinente. Des copies de factures et des photographies du produit de marque vendu dans le marché canadien pendant cette période sont jointes à l’affidavit de M. McGowan.

[10]  Selon l’affidavit de M. David‑Tooze, la marque est bien connue au Canada puisqu’elle y est utilisée depuis plus d’une décennie. Son affidavit décrit cette utilisation de la façon suivante :

[traduction]

20.  Aujourd’hui, comme pendant la période pertinente, SYT expédie des sacs de marque ENVIROSAX destinés aux marchés canadiens et américains à Betta Brands, le distributeur de RBI aux États-Unis. Pour sa part, Betta Brands distribue ces sacs à des détaillants et aux consommateurs au Canada et aux États‑Unis. Betta brands informe RBI de l’état du marché et avise cette dernière de tout problème de contrôle de la qualité devant être résolu par SYT. Tous les sacs de marque ENVIROSAX vendus au Canada font par conséquent l’objet d’un contrôle de la qualité et sont autorisés par RBI.

[11]  Je conclus que si le registraire avait disposé de la preuve qui m’a été présentée dans le cadre de cet appel, la marque n’aurait pas été radiée. Par conséquent, l’appel est accueilli et la décision du registraire de radier la marque est rejetée. La Cour déclare en outre que la marque doit être réinscrite au registre et y demeurer.

[12]  Le demandeur a sollicité les dépens du présent appel, mais je ne suis pas disposé à les lui accorder. Le présent appel n’aurait pas été nécessaire si RBI avait tenu ses enregistrements canadiens à jour. L’entreprise ne devrait pas maintenant tirer parti d’un problème qu’elle a elle‑même créé.


JUGEMENT dans le dossier T‑1525‑18

LA COUR STATUE que la décision du registraire de radier l’enregistrement canadien no LCM791496 du registre est rejetée.

LA COUR STATUE EN OUTRE que la marque de commerce dont il est question en l’espèce doit être réinscrite au registre.

« R.L. Barnes »

Juge

Traduction certifiée conforme

Ce 1er jour d’août 2019.

Semra Denise Omer, traductrice


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T‑1525‑18

 

INTITULÉ :

REUSABLE BAG INDUSTRIES PTY LTD c MARAT GAISIN

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

TORONTO (ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

le 17 juin 2019

 

jUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE BARNES

 

DATE DES MOTIFS :

le 3 juillet 2019

 

COMPARUTIONS :

Vaclav Graham Honsa

POUR LE DEMANDEUR

 

S/O

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Wilson Lue LLP

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

 

S/O

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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