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Date : 20050401

Dossier : IMM-2260-04

Référence : 2005 CF 430

Ottawa (Ontario), le vendredi 1er avril 2005

En présence de Madame la juge Dawson

ENTRE :

                                    K.B.M. ABDUR RAHMAN, NASRIN RAHMAN,

NOURIN RAHMAN, REDUANUR RAHMAN et

RAIHANUR RAHMAN

demandeurs

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉET DE L'IMMIGRATION

défendeur

                                MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

LA JUGE DAWSON


[1]                Le paragraphe 168(1) de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la « Loi » ) confère à toute section de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié le pouvoir de prononcer le désistement d'une affaire dont elle est saisie, si la section est d'avis que le demandeur omet de poursuivre l'affaire. L'article 58 des Règles de la Section de la protection des réfugiés, DORS/2002-228 (les Règles) s'applique à l'exercice de ce pouvoir par la Section de la protection des réfugiés (la Section). Le paragraphe 58(3) des Règles définit les facteurs que la Section doit prendre en compte lorsqu'elle exerce ce pouvoir. Cette disposition précise ce qui suit :

58(3) Pour décider si elle prononce le désistement, la Section prend en considération les explications données par le demandeur d'asile à l'audience et tout autre élément pertinent, notamment le fait que le demandeur d'asile est prêt à commencer ou à poursuivre l'affaire.

58(3) The Division must consider, in deciding if the claim should be declared abandoned, the explanations given by the claimant at the hearing and any other relevant information, including the fact that the claimant is ready to start or continue the proceedings.

[2]                Dans des décisions antérieures, la Cour a déjà précisé que le fait d'exiger du demandeur qu'il prouve l'existence de « circonstances exceptionnelles » pour l'autoriser à poursuivre l'affaire (et ne pas prononcer le désistement) constitue une erreur de droit car ce critère est plus strict que la norme définie dans la disposition des Règles applicable. Voir : Ahmed c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (2004), 248 F.T.R. 157, et Anjum c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (2004), 250 F.T.R. 311.

[3]                Dans la présente demande de contrôle judiciaire, la question qui se pose est la suivante : la Section a-t-elle appliqué, à tort, le critère des « circonstances exceptionnelles » en prononçant le désistement de la revendication des demandeurs? La détermination du critère que doit appliquer la Section est une question de droit et la norme de contrôle applicable est celle de la décision correcte.

[4]                Malgré l'éloquent plaidoyer du procureur du ministre, j'estime que la Section a commis une erreur de droit en appliquant un critère inapproprié et en exigeant que les demandeurs démontrent l'existence de circonstances exceptionnelles les ayant empêchés de déposer leur formulaire de renseignements personnels dans le délai prescrit de 28 jours.

[5]                Voici l'essentiel des motifs de la Section :

[Traduction] Comme il est mentionné dans l'affaire Barrientos, B A R R I E N T O S, une personne dont la sécurité est menacée dans son pays d'origine et qui recherche la protection d'un pays d'accueil doit nécessairement respecter le cadre juridique établi à cet égard et le système ne tolère aucun laxisme. Le délai de 28 jours, de l'avis du tribunal, est un délai raisonnable qui respecte les principes de l'équité. De fait, le tribunal fait remarquer que la grande majorité des revendicateurs sont en mesure de respecter ce délai; à Toronto, par exemple, plus de 90 % des revendicateurs respectent ce délai. Toutefois, il peut arriver que des circonstances exceptionnelles fassent en sorte qu'il devienne impossible et pratique [sic] pour un revendicateur de respecter ce délai. Les revendicateurs ont-ils démontré l'existence de circonstances exceptionnelles qui permettraient au tribunal d'exercer son pouvoir discrétionnaire en l'espèce? Le tribunal ne le pense pas. [C'est nous qui soulignons.]

[6]                Le ministre fait valoir que dans ses conclusions, la Section indique qu'elle n'est pas convaincue d'avoir obtenu une explication raisonnable, ce qui démontre, selon le ministre, que la Section connaissait parfaitement le critère qu'elle devait appliquer. Toutefois, puisque la Section précise que l'exception à la règle des 28 jours est l'existence de « circonstances exceptionnelles » , qu'elle a mentionné des occasions où le respect de cette règle était « impossible » et qu'elle s'est ensuite demandée si les revendicateurs avaient démontré l'existence de « circonstances exceptionnelles » , avant de répondre à cette question, je conclus que la Section n'a pas appliqué le critère approprié.

[7]                La demande de contrôle judiciaire sera donc accueillie. Les avocats n'ont proposé aucune question à certifier et aucune question n'a été soulevée dans ce dossier.

                                        ORDONNANCE

[8]                LA COUR ORDONNE :

1.          La demande de contrôle judiciaire est accueillie et la décision de la Section est annulée.

2.          L'affaire est renvoyée à la Section pour un nouvel examen par un tribunal différemment constitué.

                                                                         « Eleanor R. Dawson »                

                                                                                                     Juge                           

Traduction certifiée conforme

Richard Jacques, LL.L.


                                     COUR FÉDÉRALE

                      AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                         IMM-2260-04

INTITULÉ :                                        K.B.M. Abdur Rahman et al. c.

Le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration

LIEU DE L'AUDIENCE :                  Toronto (Ontario)

DATE DE L'AUDIENCE :                Le 24 mars 2005

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                        LA JUGE DAWSON

DATE DES MOTIFS :                       Le 1er avril 2005

COMPARUTIONS :

Avi J. Sirlin                                            POUR LES DEMANDEURS

Bernard Assan                           POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Avi J. Sirlin

Avocat

Toronto (Ontario)                                  POUR LES DEMANDEURS

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada        POUR LE DÉFENDEUR


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