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Date :20010823

Dossier : IMM-2503-00

Ottawa (Ontario), le 23 août 2001

En présence de M. le juge Muldoon

Entre :

                                                               XIE HAN BING

demanderesse

- et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

O R D O N N A N C E

VU la demande de contrôle judiciaire et d'ordonnances de certiorari et de mandamus, visant la décision d'une agente des visas à Hong Kong (dossier n ° B 0376 16036 RET) laquelle a été communiquée à la demanderesse le 16 avril 2000, la cause ayant été entendue à Toronto le 10 mai 2001, en présence des avocats des deux parties;

LA COUR ORDONNE que la présente demande de contrôle judiciaire sera, et elle est par la présente, rejetée. Aucune question n'est certifiée.

« F.C. Muldoon »

Juge

Traduction certifiée conforme

Richard Jacques, LL.L.


Date : 20010823

Dossier : IMM-2503-00

Référence neutre : 2001 CFPI 944

Entre :

                                                               XIE HAN BING

demanderesse

- et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

Le juge Muldoon

1. Introduction

[1]         Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire visant la décision rendue le 3 avril 2000 par l'agente des visas Judyanna Ng, attachée au Consulat général du Canada à Hong Kong, rejetant la demande de résidence permanente de la demanderesse.


2. Exposé des faits

[2]         La demanderesse a présenté cette demande, en qualité d'immigrante indépendante, à ce même consulat canadien à Hong Kong, le 12 novembre 1998.

[3]         Le 4 mars 1999, il a été déterminé, après étude de la demande, que l'aptitude de la demanderesse en langue anglaise entrerait en ligne de compte dans la décision la concernant. C'est pourquoi, on a offert à celle-ci l'occasion de subir une épreuve écrite, connue sous le nom de International English Language Testing System (IELTS). Cette épreuve sert à évaluer les connaissances linguistiques des immigrants éventuels et à déterminer s'il est possible de passer outre à une entrevue de sélection.

[4]         Les résultats de l'épreuve ayant été reçus le 29 septembre 1999, la demande a été réexaminée le 7 octobre 1999. L'agent de révision a prié l'intéressée, par lettre datée du 8 octobre 1999, de se présenter à l'entrevue de sélection, ce qu'elle fit le 3 avril 2000.

[5]         En raison des résultats obtenus à l'examen IELTS, l'agente des visas a décidé de ne pas mettre à l'épreuve l'aptitude de la demanderesse à lire et à écrire et lui a accordé deux crédits pour la lecture et deux autres pour la rédaction. En évaluant à l'entrevue l'aptitude de la demanderesse à s'exprimer, l'agente des visas ne lui a accordé aucun crédit en raison de la grande difficulté qu'elle avait à communiquer en anglais. Elle a donc obtenu en tout quatre crédits qui lui donnaient droit à deux points d'appréciation aux termes du paragraphe 3b) du Facteur 8, Annexe 1 du Règlement sur l'immigration, 1978, DORS/78-172, modifié.

[6]         L'agente des visas dit, dans son affidavit, qu'elle a évalué la personnalité de la demanderesse au regard de sa faculté d'adaptation, sa motivation, son esprit d'initiative et son ingéniosité, comme l'exige le Facteur 9 de l'Annexe 1 du Règlement sur l'immigration, 1978, précité.


[7]         Elle a jugé que la demanderesse n'avait pas fait preuve d'une faculté d'adaptation du fait qu'elle avait toujours vécu, étudié et travaillé dans sa localité, à l'exclusion de tout environnement étranger. Une fois diplômée en 1994, l'État l'a affectée à un emploi et elle avait, depuis lors, travaillé pour la même compagnie publique.

[8]         L'agente des visas a considéré que la demanderesse n'avait pas fait preuve d'ingéniosité parce qu'elle n'avait pas exploré les possibilités d'emploi au Canada, pas plus qu'elle n'avait établi une stratégie à ce chapitre. Elle n'avait pas fait des efforts pour réunir des renseignements concernant l'établissement au Canada. Bien qu'elle ait dit à l'agente des visas qu'elle avait effectué des recherches sur Internet, elle n'a pu répondre à des questions d'ordre général sur le Canada, ni fournir des détails sur ses recherches.

[9]         L'agente des visas a estimé que la demanderesse n'avait pas fait preuve d'initiative ni de motivation, parce qu'elle n'avait pas essayé d'améliorer sa connaissance de l'anglais pour se préparer à émigrer au Canada, ni pour passer l'entrevue. La demanderesse contredit cette assertion. Elle déclare, à la page 4 de son affidavit, fondé sur les notes qu'elle avait rédigées après l'entrevue, avoir informé l'agente des visas qu'elle avait engagé un professeur d'anglais et qu'elle suivait des cours de langue anglaise trois fois par semaine. À la page 7 de son affidavit, l'agente des visas nie avoir reçu cette information. Aucun contre-interrogatoire n'a eu lieu sur l'un ou l'autre des affidavits.

[10]       La demanderesse dit encore, à la page 2 de son affidavit, qu'elle ne parvenait pas à très bien saisir les propos de l'agente qui, dit-elle, parlait rapidement et à voix basse. Elle dit encore qu'un guichet les séparait, ce qui rendait la communication difficile. C'est peut-être vrai, mais on a rarement, sinon jamais, reçu une plainte quelconque concernant les bureaux de Hong Kong.


[11]       À la fin de l'entrevue, l'agente des visas a accordé à la demanderesse trois points d'appréciation pour sa personnalité. L'intéressée ayant obtenu 68 points en tout, sa demande d'immigration a été rejetée parce qu'elle n'avait pas obtenu le minimum de 70 points exigé des candidats indépendants.

[12]       Les notes STIDI de l'agente des visas résument les raisons de son appréciation concernant la personnalité de la demanderesse :

[TRADUCTION] La candidate à l'immigration manifeste peu de motivation, d'initiative, d'ingéniosité et d'adaptabilité. Elle n'a guère voyagé hors de Chine. Elle a une vague idée du Canada, dit avoir fait des recherches sur Internet pour obtenir des renseignements sur le pays, mais ne peut fournir des détails. Elle n'a aucune idée du marché du travail canadien, ni un plan pour rechercher l'emploi qu'elle envisage d'occuper. L'examen BELTS [sic - lire IELTS] subi en août 1999, a donné de médiocres résultats quant à l'aptitude de la demanderesse à s'exprimer. Elle n'a pas fait preuve d'initiative pour suivre encore des cours afin d'améliorer sa connaissance de l'anglais soit pour se préparer à l'entrevue, soit pour s'établir plus tard au Canada. Sa faculté d'adaptation est douteuse parce qu'elle n'a qu'une vague idée de la destination envisagée et affirme qu'elle n'a jamais passé une entrevue pour un emploi. Le poste qu'elle occupe actuellement dans un institut gouvernemental lui a été attribué après obtention de son diplôme. Avec le peu d'anglais qu'elle connaît, elle peut avoir de grosses difficultés à s'intégrer au marché du travail canadien dans un futur prévisible. Je ne distingue pas chez elle le niveau d'adaptabilité nécessaire à son établissement réussi au Canada.

[13]       Le 3 avril 2000, la demanderesse a reçu la lettre de refus suivante :

[TRADUCTION] La présente lettre concerne votre demande de résidence permanente au Canada et votre entrevue du 3 avril 2000. J'ai terminé l'évaluation de votre demande et déterminé que vous ne remplissez pas les conditions voulues pour immigrer au Canada dans la catégorie des immigrants indépendants.

Aux termes des paragraphes 8(1) et 9(1) du Règlement sur l'immigration, 1978, modifié, les immigrants indépendants seront appréciés suivant chacun des facteurs énumérés dans la colonne 1 de l'Annexe 1 du Règlement. Ces facteurs sont les suivants : études, études/formation, expérience, facteurs professionnels, emploi réservé ou occupation désignée, facteurs démographiques, âge, connaissance de l'anglais et du français et, suite à une entrevue, personnalité.

Je vous ai évaluée en fonction de la profession d'ingénieur électricien, CNP 2133.0, pour laquelle vous avez obtenu les points d'appréciation suivants :


Âge                                                            10

Facteurs professionnels                      05

Études/formation                   17

Expérience                                                08

Emploi réservé                                        00

Facteurs démographiques                    08

Études                                                       15

Anglais                                    02

Français                                    00

Personnalité                                            03

Total                                                           68

Vous n'avez pas obtenu le nombre minimum de points d'appréciation requis pour être admise comme immigrante indépendante (70).

Comme vous ne répondez pas aux critères de sélection applicables aux immigrants indépendants, vous appartenez à la catégorie des personnes non admissibles au Canada décrite à l'alinéa 19(2)d) de la Loi sur l'immigration et j'ai rejeté votre demande. Vous trouverez ci-joint des copies des dispositions législatives auxquelles la présente lettre renvoie.

La demanderesse a reçu cette lettre le 16 avril 2000.

3. Questions litigieuses

a.         L'agente des visas a-t-elle commis une erreur d'évaluation en ce qui concerne le nombre de tentatives que la demanderesse a faites pour améliorer ses connaissances linguistiques, au titre du facteur personnalité? et

b.        A-t-elle commis une erreur d'évaluation concernant les voyages de la demanderesse, au titre du facteur personnalité?

4. Aptitudes linguistiques


[14]       La demanderesse allègue que les conclusions de l'agente des visas au sujet de ses aptitudes linguistiques sont hors de propos au regard du facteur personnalité. Les notes STIDI de l'agente ainsi que son affidavit indiquent que la connaissance de la langue anglaise de la demanderesse a été évaluée, ou simplement mentionnée, deux fois : une fois au titre du Facteur 8, le facteur langue, et une autre fois, en rapport avec le Facteur 9, celui de la personnalité, ce qui, prétend-elle, constitue un double comptage inadmissible et fautif en droit.

5. Double comptage ?

[15]       Le double comptage est plus facile à alléguer qu'à prouver. Le juge Pinard de cette Cour a correctement traité la question dans la cause Ajmal c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (1998) 44 Imm. L.R. (2d) 26, où il dit ce qui suit :

¶ 8.          Le requérant prétend également que l'agent des visas a calculé en double ses habiletés linguistiques, son niveau de scolarité ainsi que le fait qu'il n'ait aucun parent au Canada lorsqu'il a examiné de nouveau ces facteurs en évaluant ses aptitudes personnelles. L'agent des visas a évalué un certain nombre de facteurs pour n'octroyer qu'une seule unité d'évaluation pour les aptitudes personnelles. Il l'explique de la façon suivante au paragraphe 9 de son affidavit.

9.              En ce qui a trait aux aptitudes personnelles, j'ai noté que le requérant possédait un faible potentiel. Il avait abandonné ses études et était pris en charge par un frère. Il ne semblait pas bien s'établir en Nouvelle-Zélande et ne s'en tirerait probablement pas mieux au Canada où il ne pourrait pas compter sur l'appui de membres de sa parenté. Il répondait aux questions très lentement et semblait manquer de motivation et d'esprit d'initiative.

¶ 9.            Bien que l'agent des visas ait noté que le requérant éprouvait certaines difficultés à parler et à comprendre l'anglais, aucune preuve n'indique qu'il ait pris cela en considération lorsqu'il a évalué les aptitudes personnelles du requérant. La note écrite concernant les aptitudes linguistiques du requérant a simplement été inscrite à la suite des commentaires liés à la motivation et à l'esprit d'initiative du requérant, le tout ayant été noté pendant l'entrevue.

13            Faible potentiel.

A abandonné ses études en NZ. Ne semble pas bien s'établir en NZ + aurait probablement de la difficulté au Cda où pas de parenté.

Très lent à répondre aux questions.

Frère le prenant en charge.

Manque de motivation et d'esprit d'initiative.

14             A suivi des cours d'anglais langue seconde. A de la difficulté à parler + à comprendre.


¶ 10.          J'aborde maintenant la question du double calcul du niveau de scolarité et de l'absence de parents au Canada du requérant. Malgré le principe général selon lequel un agent des visas ne peut faire du double calcul lorsqu'il évalue un requérant sur la base des critères énoncés au paragraphe 8(1) du Règlement, il a été établi par la jurisprudence qu'il était acceptable de prendre en considération, dans l'évaluation des aptitudes personnelles, l'un des autres facteurs énumérés, dans la mesure où il est évalué sous un angle différent. (Voir, par exemple, Stefan c. Canada (M.C.I.) (1995), 35 Imm. L.R. (2d) 21 (C.F. 1re inst.); Parmar c. Canada (M.C.I.) (12 novembre 1997), IMM-3177-96 (C.F. 1re inst.); et Vasilev c. Canada (M.C.I.) (1996), 100 F.T.R. 62). En l'espèce, je ne peux pas accepter l'argument du requérant selon lequel l'agent des visas a fait du double calcul relativement à son niveau de scolarité et à l'absence de parents au Canada. En ce qui concerne le cheminement académique du requérant, je préfère suivre le raisonnement du juge McKay dans l'arrêt Parmar, supra, et conclure que l'agent des visas n'a pas commis une erreur susceptible de contrôle en concluant que le fait que le requérant ait abandonné un programme d'études parce qu'il avait « changé d'idée » était pertinent relativement à la motivation et à l'esprit d'initiative du requérant.

[16]       Il n'y a pas double comptage lorsque l'agent des visas mentionne à deux reprises le même attribut, mais sous un angle différent de celui où il a été signalé et considéré la première fois. Ainsi en a décidé Madame le juge Simpson dans l'affaire Stefan c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), précitée, aux paragraphes 9 et suivants de ses motifs où elle dit :

Études

9.    La requérante a obtenu le maximum de points pour ses études, et il est vrai que l'agent a pris en compte cette catégorie une seconde fois au moment d'apprécier la question de la personnalité. Toutefois, pour ce qui est de cette dernière catégorie, les études ont été considérées sous un angle différent. Au cours de cette appréciation, la question qui se posait était de savoir si la requérante avait la formation voulue pour se servir de ses qualités professionnelles en tant qu'ingénieure civile au Canada.

Langue

11. De la même façon, la requérante a obtenu des points pour ses capacités linguistiques, ou, autrement dit, son niveau de compétence. L'agent a ensuite considéré la formation linguistique de la requérante et a conclu que celle-ci avait de la difficulté à s'adapter facilement à cause de la lenteur de son apprentissage. Là encore, cette analyse n'est entachée d'aucune erreur. Ce qu'il faut voir dans une analyse de la personnalité, c'est une appréciation axée sur les quatre facteurs, et non sur le degré de compétence déjà noté dans d'autres parties de l'appréciation.

12. Si cet objectif est atteint, alors l'arrêt Zeng ne s'applique pas, et le fait que des sujets examinés ailleurs dans l'appréciation soient de nouveau pris en considération, sous un angle différent englobant lesdits facteurs, ne constitue pas une erreur susceptible de contrôle.


Le juge MacKay a fait l'éloge des conclusions ci-dessus dans la décision Parmar c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, précitée, et tout spécialement aux paragraphes ¶ 30 et ¶ 31. L'appréciation d'un facteur déjà pris en compte ne constitue pas une erreur « dans la mesure où il est considéré sous un angle différent de celui adopté pour son appréciation comme facteur indépendant » .

[17]       En outre, il incombe à la demanderesse de présenter des arguments convaincants pour qu'on lui accorde de s'établir au Canada. Elle a eu amplement l'occasion de le faire, mais l'attitude qu'elle a adoptée laisse croire à la Cour que le plus grand obstacle à sa cause provient d'elle-même. Nombre de demandeurs placés dans la même situation réclament, parfois à juste raison, le droit d'être entendus et traités équitablement par l'agent des visas. Toutefois, en matière de redressement par bref de prérogative, cette notion est à double tranchant.

6. Observations de la demanderesse

[18]       L'affidavit que la demanderesse a présenté au soutien de sa demande de mesures discrétionnaires par voie de brefs de certiorari et de mandamus est extrêmement acerbe, sarcastique et geignard, en un mot injuste en l'occurrence envers l'agente des visas. Il est trop long pour être reproduit en entier. Voici quelques observations de la demanderesse extraites de ce document.

                                                                          ***

[TRADUCTION]

2.                    Au bureau des visas [à Hong Kong], mon numéro d'appel était A10; j'ai remis ma convocation au guichet 9 et obtenu le numéro H24.

3.                    Une heure plus tard, on m'a invitée à me rendre à la chambre 11 pour passer l'entrevue.

4.                    L'agente des visas est une dame de Hong Kong dans la vingtaine, maigre et très lourdement fardée.

5.                    Elle était à l'aise aussi bien en anglais qu'en mandarin.


6.                    Elle a dit « Je m'appelle Il [sic]. Je suis chargée de votre demande. Les notes que vous avez obtenues à l'épreuve IELTS montrent que vous savez bien écrire et lire. Au cours de cette entrevue, je vais surtout évaluer votre expression orale. Vous devriez parler autant que possible, puis je jugerai si vous vous exprimez bien ou non.

                                                                          ***

8.                    Q. : « Vous avez obtenu un baccalauréat en génie? »

9.                    R. : « Oui, voici » (je comptais lui remettre tous mes documents, mais le guichet était si étroit que je n'ai pu lui passer que mon diplôme et mon grade universitaire avec les certificats notariés correspondants.)

                                                                          ***

19.              Q. : « Avez-vous passé les examens de génie? »

20.              R. : « Oui, j'ai passé l'examen d'anglais et d'informatique. »

21.              Q. : « Où est votre certificat de réussite? »

22.              R. : « Je l'ai laissé à la maison. »

23.              Q. : « Pouvez-vous le présenter ce matin? »

24.              R. : « Non, je regrette. Je viens de la zone continentale. »

25.              Elle a paru alors irritée et impatiente.

26.              Q. : « Décrivez vos principales fonctions au travail. » (Elle parlait très rapidement et à voix basse qui était difficile à saisir en raison de la fenêtre qui nous séparait.)

27.              R. : « Pardon? »

28.              Q. : Puis elle m'a posé la question suivante (en chinois) « Décrivez les principales fonctions de votre travail quotidien. »

29.              R. : « Je vais décrire mon travail quotidien. J'arrive à mon département à 8 heures du matin. Je vérifie l'état du signal no 7 et du camion. Si je constate un défaut dans l'interrupteur, j'en cherche la raison et règle le problème aussitôt que possible. Puis, je réunis des données sur la circulation aux heures de pointe et analyse le rapport de circulation. »

30.              Q. : « Je sais ce que vous faites. Êtes-vous principalement chargée des réparations? »

31.              R. : « Pardon? » (En fait, j'ai compris ce qu'elle disait, mais je savais que la question est trompeuse et dangereuse pour l'évaluation de mon expérience.)

32.              Q. : « Vous me faites toujours répéter; il y a un sérieux problème avec votre anglais. »

33.              (Elle a alors continué jusqu'à la fin de l'entrevue en chinois.)

                                                                          ***

42.              *** Puis elle a demandé : « Quels préparatifs avez-vous faits pour votre immigration? »

43.              R. : « Une fois arrivée au Canada, je vais d'abord louer une maison puis je trouverai un travail. »

44.              Q. : « Vous n'avez pas compris ce que je disais. »

45.              Q. : « Une fois diplômée, comment avez-vous trouvé votre emploi? Votre compagnie est-elle dirigée par votre gouvernement? »

46.              R. : « J'ai été affectée au bureau des télécommunications de Changchun par mon université. »

47.              Q. : « Je connais la situation en Chine continentale. Mais aujourd'hui, nous devons juger selon les normes canadiennes. »

48.              Q. : « Est-ce que vous continuez à apprendre l'anglais après l'IELTS? »


49.              R. : « Oui, j'ai travaillé très fort pour améliorer mon anglais. J'ai un professeur d'anglais et je suis des cours d'anglais trois fois par semaine qui durent chacun deux heures. »

50.              Q. : « Mais pourquoi restez-vous à ce niveau? »

51.              R. : « Je suis très nerveuse en ce moment. »

52.              Q. : « Vous êtes toujours nerveuse. Vous l'étiez lorsque vous avez passé l'examen IELTS. Et maintenant, vous êtes encore une fois nerveuse. La nervosité n'est pas une raison. Si vous étiez vraiment nerveuse, vous ne devriez même pas comprendre le chinois. »

53.              R. : « Je sais que la nervosité n'est pas une bonne raison. Mais je suis nerveuse. »

54.              Q. : « D'après votre situation, le total des points d'appréciation pour votre immigration est de 68 et vous ne pouvez pas passer. »

55.              R. : « Avant l'entrevue, j'avais déjà 63 points. »

56.              Q. : « Je ne le sais pas. Ce que je sais c'est que je vous accorde 68 points. »

57.              R. : « Peut-être n'ai-je pas expliqué clairement mes études et mon expérience. »

58.              Q. : « Je crois que vous êtes ingénieure et je connais aussi vos acquis scolaires. »

59.              R. : « Pouvez-vous s'il vous plaît m'en donner la raison? J'essaierai de m'améliorer la prochaine fois. »

60.              Q. : (Elle a hoché la tête) « Améliorez d'abord votre anglais, votre anglais est faible. Refaites votre demande une fois que vous aurez fait des progrès. »

61.              R. : « Pouvez-vous, s'il vous plaît, me dire en détail? »

62.              Q. : « Bien sûr que je peux (impatiemment et à voix haute). Vous obtenez les pleines notes en ce qui concerne votre âge et votre travail, le total est 68. »

63.              R. : « Je sais bien lire et écrire et je n'obtiens que 2 points pour les langues? »

64.              (Hochement de tête)

65.              R. : « Ma faculté d'adaptation mérite 3 points seulement. »

66.              (Hochement de la tête) « Trois points seulement. »

67.              R. : « Pourquoi? » (Voilà tout ce que j'avais dit en chinois à l'entrevue. Lorsque j'ai élevé la voix, même l'agent des visas au guichet 10 est venu voir ce qui arrivait.)

                                                                          ***

76.              Q. : « Vous ne pouvez pas prendre trop de temps parce qu'il y a beaucoup de gens qui attendent en ligne. Pour éviter tout malentendu, je vais appeler l'agent de sécurité. »

77.              R. : « C'est injuste à mon égard. »

78.              Q. : « Qu'est-ce qui vous fait dire cela? »

79.              R. : « Je suis une excellente personne. Si je ne peux pas émigrer au Canada, ce n'est pas une perte pour moi, mais pour le Canada. »

80.              Q. : « Vous pouvez avoir vos opinions. Je vais vous écrire et vous donner une explication détaillée dans les 15 jours. Vous devez quitter ce bureau immédiatement, autrement je vais appeler l'agent de sécurité. »

81.              (Elle a tiré le rideau et s'en est allée.)

82.              L'agente d'immigration est extrêmement autocratique et prétentieuse. Elle semblait vouloir dire qu'elle avait la haute main sur le résultat de l'entrevue. J'ignore ce que j'ai fait pour l'offenser.

83.              Quant au total de 68 points, elle m'a accordé 3 points pour la faculté d'adaptation juste pour prouver son autorité puisque les autres facteurs échappent à son contrôle.

84.              Sa « logique » consistait à dire : Je n'ai jamais été à l'étranger, ni au Canada, ce qui signifie que je ne connais rien du Canada, que je n'ai jamais passé une entrevue après que j'ai obtenu mon diplôme et je n'ai jamais changé de travail, ce qui signifie que je ne peux pas trouver un emploi au Canada.

85.              En fait, la vraie raison est que je ne l'ai pas flattée ni ne lui ai accordé une attention spéciale.

86.              La décision de refus m'a été communiquée par écrit le 16 avril 2000.


[19]       La Cour infère de l'affidavit de la demanderesse que, quelles qu'aient été l'impartialité des propos de l'agente des visas ou sa conduite, cette agente n'aurait pas trouvé grâce à ses yeux. Aucun agent des visas qui n'aurait pas flatté la demanderesse selon qu'elle-même l'a suggéré au paragraphe 85 pour l'agente concernée, n'aurait pu réussir à mener à bien une entrevue. La demanderesse s'est conduite comme une enfant gâtée et a porté contre l'agente des visas des accusations injustes.

[20]       Dans cette Cour d'équité, l'impartialité joue dans les deux sens et qui cherche l'équité doit agir à l'avenant. Si l'agente des visas avait tenu à la demanderesse les mêmes propos que celle-ci lui a réservés par écrit, cela aurait soulevé un tollé de protestations. C'est pourquoi, la Cour ne peut considérer la demanderesse avec autant de sérieux que s'il s'agissait d'un candidat (ou d'une candidate) plus modéré(e) et plus équitable.

[21]       En outre, il n'y a pas eu double comptage et la demanderesse elle-même se comporte de façon injuste et inéquitable envers l'agente des visas. Il est presque impossible d'accréditer ses allégations de brusquerie lorsqu'on voit jusqu'à quel point cette agente et le consulat sont allés pour l'aider, comme en font foi les paragraphes 4, 5, 6, 8, 9, 10, 11, 12, 15, 16, 17, 18, 19 et 20 de Mme Ng. Ce point de vue est conforté une nouvelle fois aux paragraphes restants de l'affidavit de Mme Ng lesquels indiquent que le professionnalisme réel de l'agente des visas a principalement eu pour effet celui de mécontenter la demanderesse. Nul doute que cette agente a été maltraitée même pour le bon conseil prodigué à la demanderesse pour qu'elle améliore sa connaissance de l'anglais et présente ultérieurement une nouvelle demande.

7. Argument du défendeur

[22]       L'agente des visas a, entre autres, déclaré sous serment ce qui suit :


[TRADUCTION]

24.              *** J'ai conclu qu'elle avait de la difficulté à s'exprimer, ce qui reflète les résultats obtenus à l'épreuve IELTS. Il serait impossible de mener avec elle une entrevue en anglais, c'est pourquoi, j'ai continué jusqu'à la fin en mandarin.

25.        En ce qui concerne les paragraphes 48 à 52 de l'affidavit de la demanderesse, j'ai demandé à celle-ci, au cours de l'entrevue, si elle a suivi une formation en anglais après les notes insuffisantes qu'elle a obtenues à l'examen IELTS pour l'aptitude à s'exprimer oralement. Elle m'a répondu par la négative. Elle n'a pas fourni les détails auxquels elle fait allusion au paragraphe 49 de son affidavit.

[23]       Un agent des visas n'est pas habilité à revenir sur des facteurs d'ordre personnel dont la valeur est déjà établie à l'Annexe 1, mais il peut en tenir compte une nouvelle fois pour évaluer les qualités personnelles d'un candidat sous un nouvel angle et voir dans quelle mesure ces facteurs prouvent (si tant est qu'ils le puissent) son aptitude à s'établir avec succès, compte tenu des caractéristiques propres au neuvième facteur. L'aptitude de la candidate pour la langue anglaise a été jugée insatisfaisante, mais il fallait l'apprécier sous un angle différent pour savoir de quelle façon la négligence de la demanderesse à améliorer entre-temps ses connaissances à ce chapitre, indiquait un manque d'initiative et de motivation inacceptable, lequel, nonobstant ce niveau d'aptitude médiocre, ferait sûrement obstacle, à lui seul, à son établissement réussi dans la société canadienne. Il n'y a pas eu de double comptage.

[24]       Il se peut que l'attitude généralement négative de la demanderesse entre pour quelque chose dans le manque d'initiative et de motivation qu'elle a manifesté. Elle ne mérite pas une mesure de redressement discrétionnaire de la part de la Cour. L'appréciation de l'agente des visas était correcte.

8. Conclusion


[25]       En résumé, la Cour statue que les demandes de brefs de certiorari et de mandamus de la demanderesse seront rejetées. Aucun des avocats des deux parties à l'audience n'était disposé à formuler une question grave d'importance générale aux fins de certification à l'intention de la Cour d'appel, en vertu de l'article 83 de la Loi. Aucune question n'est donc certifiée.

« F. C. Muldoon »

Juge

Ottawa (Ontario)

le 23 août 2001

Traduction certifiée conforme

Richard Jacques, LL.L.


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                    IMM-2503-00

INTITULÉ DE LA CAUSE :      Xie Han Bing c. Le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration

LIEU DE L'AUDIENCE :          Toronto (Ontario)

DATE DE L'AUDIENCE :         10 mai 2001

MOTIFS DE L'ORDONNANCE PAR MONSIEUR LE JUGE MULDOON

DATE DES MOTIFS :              23 août 2001

ONT COMPARU

Max Chaudhary                                                                 POUR LA DEMANDERESSE

Martin Anderson                                                               POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

Max Chaudhary                                                                 POUR LA DEMANDERESSE

Morris Rosenberg                                                              POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

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