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     Date : 19980908

     Dossier : IMM-3692"97

Ottawa (Ontario), le 8 septembre 1998

EN PRÉSENCE DE : MONSIEUR LE JUGE MULDOON

ENTRE

     ROBERT OSMOND CHARLEY,

     demandeur,

     et

     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,

     défendeur.

     ORDONNANCE

     Le demandeur ayant été désigné d'une façon incorrecte dans l'intitulé de la cause;

     La section d'appel de l'immigration ayant rendu une ordonnance pour assurer la confidentialité des débats conformément au paragraphe 80(3) de la Loi sur l'immigration, et l'audience étant réputée avoir été tenue à huis clos;

     Cette cour ayant, à l'audience, fait droit à la demande que l'avocate du demandeur avait faite pour que le cas de son client soit traité anonymement;

CETTE COUR ORDONNE que le demandeur soit dorénavant désigné, dans l'intitulé de la cause dont cette cour est saisie, non par son nom mais sous le pseudonyme "A.B.Z.", le greffe devant immédiatement ouvrir un nouveau dossier sous le numéro IMM"3692"97 ABZ, aux fins de la consultation par le public, le dossier du greffe, tel qu'il existait avant que la présente ordonnance soit rendue, y compris la présente ordonnance, ne devant dorénavant être communiqué qu'à titre strictement confidentiel au juge et au personnel du greffe de cette cour, ainsi qu'au demandeur, à son avocate, au ministre et à l'avocat dont le ministre aura retenu les services ou que le ministre aura autorisé à agir et à nulle autre personne sans autorisation écrite d'un juge de cette cour.

     F.C. Muldoon

     ________________________________

     Juge

Traduction certifiée conforme

L. Parenteau, LL.L.

     Date : 19980909

     Dossier : IMM-3692"97

Ottawa (Ontario), le 9 septembre 1998

EN PRÉSENCE DE : MONSIEUR LE JUGE MULDOON

ENTRE

     "A.B.Z.",

     demandeur,

     et

     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,

     défendeur.

     ORDONNANCE

     Le demandeur ayant présenté une demande en vue d'obtenir une ordonnance annulant la décision (T"94"07607) par laquelle la section d'appel de l'immigration avait confirmé, le 5 août 1997, la mesure de renvoi prise le 22 novembre 1994, ainsi que d'autres réparations;

     L'affaire ayant été entendue en présence de l'avocate de chaque partie et la Cour ayant réservé sa décision;

CETTE COUR ORDONNE que la demande soit rejetée sans dépens.

     F.C. Muldoon

     Juge

Traduction certifiée conforme

L. Parenteau, LL.L.

     Date : 19980909

     Dossier : IMM-3692"97

ENTRE

     "A.B.Z.",

     demandeur,

     et

     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,

     défendeur.

     MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE MULDOON

[1]      Le demandeur (sous le pseudonyme donné par cette cour) sollicite une ordonnance a) annulant la décision [dossier T94"07607] du 5 août 1997 par laquelle la section d'appel de l'immigration a rejeté l'appel qu'il avait interjeté en confirmant la mesure de renvoi qui avait été prise le 22 novembre 1994, et b) renvoyant l'appel pour réexamen par une formation composée de membres différents de la section d'appel de l'immigration (ci"après parfois appelée la SAI) de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié.

[2]      Le demandeur est de fait dans une situation précaire, car il a offert ses services d'indicateur dans une enquête policière et a été inscrit dans un programme de protection des témoins de façon à ne pas être identifié, ce qui aurait pour effet de compromettre sa sécurité et celle de sa famille. À l'audience, la Cour a promis de donner un pseudonyme au demandeur. La SAI a fait droit à la demande que le demandeur avait présentée en vue d'obtenir la confidentialité.

[3]      Le demandeur est originaire d'un pays des Caraïbes; il est arrivé au Canada en 1984 à l'âge de 12 ans et a effectué ses études secondaires en Ontario; il a terminé sa dixième année en 1989. L'affidavit que le demandeur a déposé à l'appui est ainsi libellé :

         [TRADUCTION]
         5. Ma vie familiale à [une ville de l'Ontario], a été difficile, étant donné que mon [seul parent survivant] nous maltraitait énormément, mes frères et ma soeur et moi"même. La société d'aide à l'enfance a été appelée à plusieurs reprises, et mon frère et moi nous enfuyions souvent de la maison pour éviter d'être maltraités. Mon [seul parent survivant] me conseillait ou me supervisait fort peu. Lorsque je m'enfuyais, je dormais dans les escaliers d'immeubles d'habitation, et parfois chez des amis. J'ai commencé à voler pour pouvoir manger. Nous habitions dans un grand ensemble d'habitation à [nom de la ville en question].         

Le demandeur s'est finalement marié et sa conjointe et lui ont maintenant trois enfants, nés en 1990, 1992 et 1995.

[4]      Les passages pertinents de la déposition du demandeur sont ainsi libellés :

         [TRADUCTION]
         8. De 1989 à 1992, j'ai été mêlé à diverses activités criminelles, principalement parce que j'avais une dépendance envers le crack et parce que j'essayais de survivre dans la rue.         
         9. J'ai été accusé de tentative de vol en 1992. Je me rappelle bien cette accusation, étant donné que j'ai été sous garde pendant douze mois pour cette infraction. Selon l'une des conditions de la sentence, je devais être envoyé à l'Institut correctionnel de l'Ontario (l'ICO) pour suivre un traitement pour toxicomanie pendant que j'étais sous garde. Toutefois, je n'ai pas en fait purgé ma peine à l'ICO, et en fait je n'y suis jamais allé. J'ai purgé ma peine au centre correctionnel [nom du centre]; au mieux de ma connaissance, on n'y offre pas de programme de traitement pour toxicomanie et je n'ai pas été traité pendant que j'étais en prison.         
         10. En 1994, j'ai été arrêté pour vol à l'étalage. J'ai finalement purgé une peine de trois mois au centre correctionnel [nom du centre] pour l'accusation de vol à l'étalage. Environ deux semaines et demi avant mon arrestation, j'avais vu une reprise vidéo d'un vol à main armée et d'un meurtre qui avaient été commis [***] en avril 1994. La police cherchait les individus en cause. J'avais reconnu ces hommes parce que je m'étais déjà tenu avec eux, et que je les avais connus pendant presque tout le temps où j'ai vécu au Canada. Je n'avais pas donné ce renseignement à la police parce que c'était très sérieux et que je craignais qu'il arrive quelque chose à ma famille et à moi"même. Je savais que ces gens étaient dangereux et que leur comportement était imprévisible.         

         11. Lorsque j'ai été arrêté en juin 1994, j'ai décidé de dire la vérité au sujet des gens qui figuraient dans le vidéo et d'aider la police. Étant donné que les individus en cause étaient dangereux et que ma vie serait menacée s'ils découvraient que je les avait identifiés, la police a convenu de me placer ainsi que ma famille dans un programme de protection des témoins tant que le procès ne serait pas terminé. J'ai témoigné à l'enquête préliminaire en 1994; à ma connaissance, le procès ne doit avoir lieu qu'en 1998.         
         12. On nous a d'abord réinstallés à [ici et là, pour des raisons de sécurité et pour des raisons professionnelles].         
         13. Depuis que j'ai été placé dans le programme de protection des témoins, j'ai essayé de refaire ma vie et de subvenir aux besoins de ma famille. Toutefois, il a été difficile d'établir des liens où que ce soit car nous vivions dans la crainte [***] et nous hésitions à participer aux activités des collectivités où nous vivions, de crainte que quelqu'un découvre où nous vivions. Cette incertitude m'a également empêché de me concentrer sur une carrière ou d'obtenir une formation professionnelle. Nous continuons à vivre ainsi parce que nous voulons aider la police [***] dans cette affaire, mais la chose a eu des conséquences, et je suis notamment incapable de me sentir suffisamment en sécurité pour m'établir dans une collectivité et nouer des liens.         
         14. Ce n'est que lorsque je suis arrivé à [***] en 1996 que je me suis senti suffisamment en sécurité pour m'établir dans la collectivité et savoir ce que je voulais faire de ma vie. Étant donné que je n'ai presque pas d'expérience professionnelle, j'ai eu de la difficulté à trouver un emploi permanent. Étant donné que je ne voulais pas rester à la maison sans travailler, j'ai établi ma propre entreprise d'enlèvement de la neige et pendant tout l'hiver 1996, j'ai enlevé la neige. Avec mon revenu et celui que ma conjointe gagnait à travailler à temps partiel dans [un restaurant], nous étions en mesure de subvenir aux besoins de nos enfants et de nous occuper du logement. Lorsque le printemps est arrivé, et que je ne pouvais plus enlever la neige pour gagner un revenu, j'ai obtenu un emploi de chef dans un restaurant. Nous sommes devenus membres d'une église en 1996, et c'est en partie la foi que j'ai en Dieu qui m'a aidé à surmonter les problèmes qui avaient été à l'origine de mon ancien mode de vie.         

     *** *** ***

         16. Ma famille et moi nous sommes établis à [l'endroit où nous vivons à l'heure actuelle]. Nous y sommes à l'aise, nous nous sentons en sécurité et nous croyons pouvoir finalement être en mesure de planifier notre avenir. J'ai toujours voulu être chef et je cherche à atteindre cet objectif. Je n'ai pas été déclaré coupable d'une infraction criminelle depuis 1994. Je crois que le fait d'avoir réussi à surmonter ma toxicomanie, ma croyance en Dieu et le fait que j'ai changé de résidence et de mode de vie ont contribué à apporter des changements favorables dans ma vie depuis 1994. Je n'ai pas effectué ces changements en vue d'éviter d'être expulsé, mais je veux plutôt assurer une meilleure vie à ma famille et à moi"même. Pendant les années où j'abusais des drogues, je ne pouvais pas envisager mon avenir et j'avais de la difficulté à envisager une meilleure vie pour moi"même. Le fait que j'ai collaboré avec la police m'a aidé à changer mon mode de vie.         
         17. Même si j'ai habité [dans un pays des Caraïbes] jusqu'à l'âge de douze ans, je n'y ai pas de proches parents, étant donné que [un parent] et ma grand"mère sont tous les deux décédés. Ma vie, mes trois enfants, mon [parent survivant] et tous mes frères et soeurs vivent au Canada. Si je devais retourner dans [ce pays], je ferais face à d'énormes difficultés, étant donné que je n'y ai absolument aucun lien, et aucun proche parent qui puisse m'aider. De plus, ma vie et celle de ma famille seraient en danger si je retournais dans [ce pays] car je crois que des amis et des parents de l'accusé que j'ai identifié nous harcèleraient et nous menaceraient.         

[5]      D'autres passages de l'affidavit du demandeur constitueraient de bons arguments en vue d'un examen fondé sur les raisons d'ordre humanitaire conformément aux articles 6 et 114 de la Loi sur l'immigration, 1976"77, ch. 52. L'avocate du demandeur déclare que son client n'a pas commis d'infractions depuis 1994 et qu'il sera admissible à un pardon absolu en juin 1999. Si les représentants du ministre savent ce qu'on attend par "humanitaire", il me semble que le cas du demandeur mérite un examen favorable à ce titre, mais il appartient au ministre et non à la Cour de prendre une décision à cet égard. Il s'agit ici d'un contrôle judiciaire visant à permettre de déterminer si la SAI a commis une erreur de droit en statuant sur l'appel interjeté par le demandeur. Le bien"fondé de la mesure de renvoi n'est pas contesté.

[6]      Le principal point litigieux soulevé par l'avocate du demandeur à l'audience se rapportait au casier judiciaire de son client. Le demandeur avait fait appel devant la SAI conformément à l'alinéa 70(1)b) de la Loi, qui est ainsi libellé :

             70. (1) [...] les résidents permanents [...] peuvent faire appel devant la section d'appel d'une mesure de renvoi ou de renvoi conditionnel en invoquant les moyens suivants :         
         a) [...]         
         b) le fait que, eu égard aux circonstances particulières de l'espèce, ils ne devraient pas être renvoyés du Canada.         

Il est tout à fait clair que le législateur voulait que ce soit la SAI et non la Cour qui règle pareil appel.

[7]      C'est une grande tragédie que d'être [TRADUCTION] "stupide, jeune et immature", comme le demandeur l'a dit lorsqu'il a été contre"interrogé devant la SAI (dossier de la formation, p. 144), puis de se rendre compte de son comportement stupide presque trop tard pour éviter des conséquences inévitables qui étaient évidentes, aux yeux de presque tout le monde et nuisibles non seulement à soi"même mais aussi à des êtres chers innocents. Dans ce cas"ci, la Cour aurait pu conclure, à l'aide du témoignage que le demandeur a présenté devant la SAI, que cette expression sincère et spontanée de honte à l'égard de forfaits insensés était un signe réel de remords (dossier de la formation, page 144), dont la SAI doutait énormément (dossier de la formation, page 10). Toutefois, la Cour ne doit pas substituer ses propres conclusions à celles de la SAI, devant laquelle le demandeur a témoigné de vive voix, à cause d'une divergence de vues au sujet d'éléments de preuve susceptibles d'étayer la décision de la SAI.

[8]      Le point que l'avocate du demandeur a soulevé devant la Cour à l'audience au sujet du casier judiciaire de son client se rapportait à la preuve de la déclaration de culpabilité prononcée à l'égard d'une [TRADUCTION] "introduction par effraction dans un dessein criminel, 22"03" 1988 * * * (tribunal pour adolescents). Jugement : Temps passé sous garde plus un jour de garde en milieu fermé et six mois de probation (dossier de la formation, page 59). Le demandeur, sous serment, a catégoriquement nié qu'il avait été déclaré coupable d'[TRADUCTION]"introduction par effraction". Voici la déposition qu'il a faite devant la SAI :

         [TRADUCTION]
         Me LEWIS :      [contre"interrogatoire] Qu'en est"il de l'introduction par effraction dans un dessein criminel, vous rappelez"vous cela?         
         L'APPELANT :      Je ne me suis jamais introduit par effraction où que ce soit.         
         Me LEWIS :      Comprenez"vous que vous avez été déclaré coupable d'introduction par effraction dans un dessein criminel?         
         L'APPELANT :      Je n'ai jamais été déclaré coupable d'introduction par effraction dans un dessein criminel.         
         Me LEWIS :      Eh bien, dans le dossier des déclarations de culpabilité, il y a une inscription, la deuxième inscription, datée du 22 mars 1988, se rapportant à une introduction par effraction dans un dessein criminel, pour laquelle vous avez été condamné au temps passé sous garde et à une journée de garde en milieu fermé ainsi qu'à six mois de probation.         

         L'APPELANT :      Lorsque j'étais présent à l'audience, lorsque j'ai été déclaré coupable, cela n'a jamais été pour une introduction par effraction. Je me rappelle clairement que c'était parce que je m'étais trouvé illégalement dans une maison d'habitation.         

     (dossier de la formation, page 127)

     *** *** ***

         Me LEWIS : Vous comprenez donc que la section d'appel a devant elle la déclaration de culpabilité qui a été prononcée contre vous le 22 mars 1988 concernant une introduction par effraction dans un dessein criminel?         
         L'APPELANT : Je comprends que c'est ce qui est inscrit, mais je ne me suis jamais introduit par effraction où que ce soit.         

     (dossier de la formation, page 128)

[9]      C'est en se fondant sur ce point, qui n'est même pas mentionné dans les motifs de la décision de la formation, que l'avocate du demandeur demande à cette cour d'annuler la décision de la formation. La déclaration de culpabilité qui a été prononcée le 22 mars 1988, lorsque le demandeur était un jeune contrevenant qui n'avait pas encore tout à fait 17 ans, se rapportait, du moins selon le témoignage du demandeur, à l'infraction selon laquelle il s'était illégalement trouvé dans une maison d'habitation, sinon à une infraction d'introduction par effraction.

[10]      En 1988, ces infractions figuraient aux articles 306 et 307 du Code criminel, comme elles figurent maintenant aux articles 348 et 349. Les dispositions actuelles sont libellées en des termes plus généraux, mais les deux versions, à dix années d'écart l'une de l'autre, sont par ailleurs identiques. Les dispositions mêmes en vertu desquelles le demandeur a été déclaré coupable selon le ministre, et en vertu desquelles le demandeur déclare avoir été déclaré coupable, sont ainsi libellées :

         306. (1) Quiconque
         a) s'introduit en un endroit par effraction avec l'intention d'y commettre un acte criminel,         
         b) [...]         
         c) [...]         


         est coupable d'un acte criminel et passible         
         d) de l'emprisonnement à perpétuité, si l'infraction est commise relativement à une maison d'habitation, ou         

     *** *** ***

         307. (1) Est coupable d'un acte criminel et passible d"un emprisonnement de dix ans, quiconque, sans excuse légitime, dont la preuve lui incombe, s'introduit ou se trouve en une maison d'habitation avec l'intention d'y commettre un acte criminel.         

Dans le témoignage qu'il a présenté devant la SAI, le demandeur a en fait affirmé avec insistance qu'il avait été déclaré coupable en vertu de l'article 307, mais non en vertu de l'article 306. L'infraction énoncée à l'alinéa 306(1)d) est la plus grave et, de fait, la peine maximale prévue à cet égard est parmi les plus sévères de celles qui sont prévues au Code. Toutefois, l'infraction énoncée au paragraphe 307(1) que le demandeur admet avoir commise n'est pas non plus considérée à la légère.

[11]      L'avocate du demandeur affirme maintenant que parce que la présumée déclaration de culpabilité prononcée en vertu de l'article 306 ("introduction par effraction [dans une maison d'habitation] avec dessein criminel") n'a pas été établie devant la SAI de la façon prévue à l'article 667 du Code criminel , on ne peut pas en tenir compte. L'avocate du demandeur a également fait remarquer avec raison qu'aucune preuve d'empreintes digitales n'avait été présentée devant la SAI. L'article 667 est long et il suffit d'en citer le début :

         667. (1) Dans toutes procédures :         
         a)      un certificat énonçant de façon raisonnablement détaillée la déclaration de culpabilité, l'absolution en vertu de l'article 730 ou de la déclaration de culpabilité et la peine infligée au Canada à un contrevenant, signé :         
             (i)      soit par la personne qui a prononcé la déclaration de culpabilité ou rendu l'ordonnance d'absolution,         
             (ii)      soit par le greffier du tribunal devant lequel la déclaration de culpabilité a été prononcée ou l'ordonnance d'absolution a été rendue,         
             (iii)      soit par un préposé aux empreintes digitales,         
             sur preuve que l'accusé ou le défendeur est le contrevenant visé dans le certificat fait preuve que l'accusé ou le défendeur a été ainsi déclaré coupable, absous ou déclaré coupable et condamné sans qu'il soit nécessaire de prouver l'authenticité de la signature ou la qualité officielle du signataire;         

Il s'agit d'une disposition de la loi relative à la "preuve".

[12]      L'avocate du demandeur soutient en fait que la Cour devrait interpréter le texte précité comme signifiant [TRADUCTION] "dans toute procédure prévue par la législation du Canada" parce que sa portée n'est pas limitée, comme c'est souvent le cas, par les mots "dans la présente loi" ou "dans la présente partie". L'article 667 figure dans la partie XX du Code , intitulé : "Procédure lors d'un procès devant jury et dispositions générales". Par conséquent, cet argument est à première vue tout à fait vraisemblable, en particulier si aucune autre disposition relative à la "preuve" figurant dans les lois du Canada n'est réputée l'emporter sur l'article 667.

[13]      Or, pareille disposition existe et elle s'applique expressément aux procédures engagées devant la SAI. Il s'agit du paragraphe 69.4(3), qui est ainsi libellé :

         69.4 (3) La section d'appel a, pour la comparution, la prestation de serment et l'interrogatoire des témoins, ainsi que pour la production et l'examen des pièces, l'exécution de ses ordonnances et toute autre question relevant de sa compétence, les attributions d'une cour supérieure d'archives. Elle peut notamment :         
             a) par citation adressée aux personnes ayant connaissance de faits se rapportant à l'affaire dont elle est saisie, leur enjoindre de comparaître comme témoins aux date, heure et lieu indiqués et d'apporter et de produire tous documents, livres ou pièces, utiles à l'affaire, dont elles ont la possession ou la responsabilité;         
             b) faire prêter serment et interroger sous serment;         
             c) recevoir, en cours d'audition, les éléments de preuve supplémentaires qu'elle estime utiles, crédibles et dignes de foi.         

Il semble donc qu'on ne saurait légitimement s'opposer à ce que la SAI n'exige pas l'observation de l'article 667 du Code lorsqu'elle reçoit la preuve des condamnations criminelles passées du demandeur.

[14]      Quoi qu'il en soit, l'avocate du demandeur a reconnu qu'aucune preuve n'est nécessaire si la personne en cause admet les condamnations, ou du moins si elle ne les nie pas. La seule présumée condamnation que le demandeur a niée était celle qui se rapportait à l'"introduction par effraction dans un dessein criminel", qu'il a nié avec véhémence avoir commise. Toutefois, le demandeur a admis sous serment qu'au lieu d'une "introduction par effraction dans un dessein criminel", la condamnation se rapportait en réalité au fait qu'il s'était trouvé "illégalement dans une maison d'habitation" : article 307 du Code criminel . Il s'agit d'un autre acte criminel grave emportant une peine d'emprisonnement maximale de dix ans.

[15]      L'avocate du demandeur affirme qu'une question grave importante devrait être certifiée, car, selon la réponse donnée, le résultat de la décision de la SAI serait certainement différent. L'avocate affirme que la SAI a conclu que le demandeur n'était pas crédible parce qu'il semblait agir d'une façon évasive en prétendant ne pas se rappeler divers points mentionnés dans son dossier de jeune contrevenant et dans son casier judiciaire, ou qu'il a affirmé avoir plaidé coupable aux infractions dont il avait été accusé en vue de purger les peines concurremment, de façon à être libéré plus tôt que cela n'aurait autrement été le cas.

[16]      Toutefois, la SAI n'a jamais rien dit au sujet des infractions liées à l'introduction dans une maison d'habitation. Le demandeur a nié avec véhémence s'être introduit par effraction, mais il a admis qu'il avait été déclaré coupable de s'être trouvé illégalement dans une maison d'habitation. La conclusion que la SAI a tirée au sujet du manque de crédibilité n'était certainement pas fondée sur cette dénégation et sur cet aveu. La réponse à une question certifiée se rapportant à la façon de prouver légitimement une déclaration de culpabilité que le demandeur a niée ne pourrait donc pas entraîner une modification de la décision de la SAI en faveur du demandeur.

[17]      La question que l'avocate du demandeur a demandé à la Cour de certifier est ainsi libellée :

         [TRADUCTION]
         En l'absence d'un aveu ou d'une preuve directe présentée au moyen d'un témoignage oral, le casier judiciaire doit"il être établi conformément aux dispositions du Code criminel?         

L'avocate du défendeur a soutenu que, compte tenu des circonstances, aucune question ne doit être certifiée. Toutefois, elle a formulé une version plus précise de la question, adaptée à la présente affaire, au cas où la Cour serait prête à certifier pareille question.

[18]      Réflexion faite, la Cour refuse de certifier une question en l'espèce, et ce, pour les motifs susmentionnés.

[19]      La Cour refuse de certifier la question que l'avocate du demandeur a proposée pour deux raisons pertinentes : il ne s'agit pas d'une question de droit importante compte tenu de l'alinéa 69.4(3)c) de la Loi sur l'immigration et la réponse n'aurait aucun effet sur la décision rendue par la SAI le 5 août 1997.

[20]      La demande qui a été présentée en vue de faire annuler ladite décision de la SAI doit donc être rejetée, mais sans dépens, et ce, même si l'avocate du ministre a agi d'une façon efficace et professionnelle.

[21]      Je ne serais pas scandalisé si le ministre (encore une fois peut"être) accordait au demandeur un examen sérieux pour des raisons d'ordre humanitaire, malgré la conclusion tirée ci"dessus, qui est de droit strict, et qui relève de la compétence de la Cour, mais qui n'est pas fondée sur des raisons d'ordre humanitaire, puisque la chose relève de la compétence exclusive du ministre.

                                     F.C. Muldoon

                                         Juge

OTTAWA (Ontario)

Le 9 septembre 1988.

Traduction certifiée conforme

L. Parenteau, LL.L.

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

     AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

No DU GREFFE :                      IMM"3692"97
INTITULÉ DE LA CAUSE :              A.B.Z. c. MCI
LIEU DE L'AUDIENCE :                  REGINA (SASKATCHEWAN)
DATE DE L'AUDIENCE :              LE 28 MAI 1998

MOTIFS DE L'ORDONNANCE du juge Muldoon en date du 9 septembre 1998

ONT COMPARU :

RONALD G. GATES                  pour le demandeur
MYRA J. YUZAK                      pour le défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

GATES AND COMPAGNY              pour le demandeur

REGINA (SASKATCHEWAN)

MORRIS ROSENBERG                  pour le défendeur

SOUS"PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

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