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Date : 20051027

Dossier : T-11-04

Référence : 2005 CF 1461

Ottawa (Ontario), le 27 octobre 2005

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE von FINCKENSTEIN

                                                                             

ENTRE :

                                                     AVENTIS PHARMA INC. et

AVENTIS PHARMA DEUTSCHLAND GmbH

                                                                                                                                  demanderesses

                                                                             et

                                     APOTEX INC. et LE MINISTRE DE LA SANTÉ

                                                                                                                                          défendeurs

                                MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

Contexte

[1]                 La Cour est saisie d'une demande présentée par Aventis Pharma Inc. (Aventis), en vertu du Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité), DORS/93-133 (le Règlement), en vue d'obtenir une ordonnance interdisant au ministre de la Santé (le ministre) de délivrer un avis de conformité (AC) à la défenderesse, Apotex Inc. (Apotex), à l'égard des capsules de 1,25, 2,5, 5 et 10 mg de ramipril pour administration par voie orale, avant l'expiration du brevet canadien 2,023,089 (le brevet 089).

[2]                Le ramipril est un médicament utilisé, entre autres, pour traiter a) l'hypertrophie et l'hyperplasie cardiaques et vasculaires (hypertrophie) et b) l'hypertension. Dans le Stedman's Medical Dictionary (27e éd., Baltimore, Lippincott Williams & Wilkins, 2000), ces termes sont définis de la façon suivante :

[traduction]

hypertrophie :                Augmentation générale du volume d'un tissu ou d'un organe non causée par la formation d'une tumeur. La signification du terme peut être limitée à une augmentation de volume associée à un accroissement de la taille de cellules ou d'autres tissus particuliers, mais non de leur nombre.

hyperplasie :                 Augmentation du nombre de cellules normales dans un tissu ou un organe, non associée à un processus tumoral, qui peut se traduire par une augmentation du volume du tissu ou de l'organe.

hypertension : Pression artérielle supérieure à la normale; élévation transitoire ou continue de la pression artérielle générale, qui atteint un niveau susceptible de causer une atteinte cardiovasculaire ou d'autres effets indésirables.


[3]                Aventis vend le ramipril sous la marque de fabrique Altace. Aventis a reçu un AC afin de fabriquer, de construire, d'utiliser ou de vendre Altace pour le traitement de l'hypertension. Aventis Pharma Deutschland GmbH, partie à la présente instance, est titulaire du brevet 089, brevet concernant le traitement de l'hypertrophie et de l'hyperplasie cardiaques et vasculaires. Aventis n'a pas reçu d'AC lui permettant de vendre Altace pour l'usage breveté, à savoir le traitement de l'hypertrophie.

[4]                 Apotex a mis au point une version bioéquivalente d'Altace, qui sera baptisée apo-ramipril. Elle tente d'obtenir un AC pour l'utilisation d'apo-ramipril dans le traitement de l'hypertension.

[5]                Apotex a envoyé à Aventis un avis d'allégation (AA) le 17 novembre 2003, soutenant ce qui suit :

[TRADUCTION] Nous ne contreferons pas ce brevet, car nos capsules seront fabriquées, construites, utilisées et vendues uniquement pour le traitement de l'hypertension. Nous ne fabriquerons, ne construirons, n'utiliserons ni ne vendrons nos capsules pour le traitement de l'hypertrophie et de l'hyperplasie cardiaques et/ou vasculaires.

En particulier, nous garantissons que, dans notre monographie de produit délivrée par le ministre avec l'avis de conformité, la seule indication mentionnée sera le traitement de l'hypertension, et il n'y aura aucune mention du traitement de l'hypertrophie et de l'hyperplasie cardiaques et/ou vasculaires.

Avec notre avis d'allégation daté du 20 août 2003, nous avons joint l'ébauche de notre monographie de produit qui est actuellement incluse dans notre PADN. Bien qu'à notre avis, il ne fasse aucun doute que les indications proposées sont limitées à l'hypertension et n'incluent pas le traitement de l'hypertrophie et de l'hyperplasie cardiaques et/ou vasculaires, si pour une raison ou une autre vous n'êtes pas d'accord, veuillez nous en aviser rapidement et nous examinerons toute révision proposée qui pourrait vous convaincre qu'il n'y a pas contrefaçon.

[6]                En réponse à l'AA, Aventis a présenté une demande le 5 janvier 2004 par laquelle elle sollicite une ordonnance d'interdiction, affirmant que :

a)         l'AA est incomplet;

b)          l'allégation d'absence de contrefaçon par Apotex n'est pas justifiée;


c)         Apotex est liée par la monographie de produit originale datée du 25 juillet 2003 (la MP originale) et ne peut invoquer la monographie de produit datée du 26 mai 2004 (la MP révisée).

[7]                Seul l'AA d'Apotex faisait état de la MP originale datée du 25 juillet 2003, mais celle­-ci était jointe àun AA différent daté du 20 août 2003. En réponse à la demande d'Aventis, Apotex a déposé une MP révisée de laquelle a été supprimée la première référence, à savoir Benetos A, Vasmant D, Thiéry P et coll. « Effects of Ramipril on Arterial Hemodynamics » , Journal of Cardiovascular Pharmacology, (1991) 18 (suppl. 2), p. S153-S156 (l'article de Benetos). Aventis s'oppose à la MP révisée et affirme qu'Apotex est liée par la MP originale.

Nature de la procédure et fardeau de la preuve

[8]                La nature de la présente procédure a été résumée par la juge Layden-Stevenson dans Fournier Pharma Inc. c. Canada (Ministre de la Santé) (2004), 38 C.P.R. (4th) 297, 2004 CF 1718, comme suit :

6     Comme je l'ai déjà signalé, le recours à l'origine de la présente instance a été introduit en application du Règlement. Plusieurs arrêts de la Cour d'appel fédérale traitent de l'historique de ce règlement et du régime qu'il établit, de sorte qu'il n'est pas nécessaire de reprendre ces propos ici. Voir : Merck Frosst Canada Inc. c. Canada (Ministre de la Santé nationale et du Bien-être social) (1994), 55 C.P.R. (3d) 302 (C.A.F.) [¼] Essentiellement, les questions de non-contrefaçon et de validité intéressant le titulaire d'un brevet (la première personne) et la personne sollicitant un AC du ministre (la deuxième personne) sont d'abord soulevées dans un avis d'allégation - que la seconde personne signifie à la première personne - dans lequel la seconde personne fait ses allégations et fournit un énoncé du droit et des faits invoqués à l'appui de celles-ci. La première personne peut s'opposer et demander au tribunal de rendre une ordonnance interdisant au ministre de délivrer un AC à la seconde personne avant l'expiration du brevet.                             


[¼]

8    Le recours prévu à l'article 6 du Règlement n'est pas assimilable à une action par laquelle le tribunal est appelé à décider de la validité d'un brevet et à se prononcer sur la contrefaçon. Il s'agit d'une procédure de contrôle judiciaire expéditive, qui vise à faire déterminer s'il est loisible au ministre de délivrer l'avis de conformité demandé. Elle ne sert que des fins administratives : Apotex Inc. c. Canada (Ministre de la Santé nationale et du Bien-être social) (1997), 76 C.P.R. (3d) 1 (C.A.F.). Le tribunal doit déterminer si les allégations de la seconde personne sont suffisamment étayées pour justifier une conclusion, à des fins administratives (la délivrance d'un avis de conformité), portant que le brevet du demandeur ne serait pas contrefait si le produit de la seconde personne est commercialisé : Pharmacia Inc. c. Canada (Ministre de la Santé nationale et du Bien-être social) (1994), 58 C.P.R. (3d) 209 (C.A.F.).

9     Du simple fait qu'il exerce le recours prévu à l'article 6, le demandeur peut obtenir l'équivalent d'une injonction interlocutoire sans avoir à satisfaire à l'un ou l'autre des critères qu'un tribunal appliquerait en temps normal avant d'interdire la délivrance d'un avis de conformité : Merck Frosst Canada Inc. c. Canada (Ministre de la Santé nationale et du Bien-être social) (1998), 80 C.P.R. (3d) 368 (C.S.C.); Bristol-Myers Squibb Canada Inc. c. Canada (Procureur général) (2001), 11 C.P.R. (4th) 539 (C.A.F.). Le Règlement autorise le tribunal à décider sommairement, sur le fondement de la preuve produite, si les allégations sont fondées. Le recours prévu à l'article 6 ne fait pas appel à la fonction juridictionnelle et la décision qui en résulte n'a pas l'autorité de la chose jugée. Le breveté n'est aucunement privé des recours qui lui sont normalement ouverts en vue de faire respecter ses droits. Si un examen au fond des questions de validité ou de contrefaçon est nécessaire, il pourra procéder suivant la voie ordinaire en introduisant une action : Pfizer Canada Inc. c. Apotex Inc. (2001), 11 C.P.R. (4th) 245 (C.A.F.) [¼]      

Fardeau de la preuve

[9]                En ce qui a trait à la question du fardeau de la preuve, je serai guidé par les principes élaborés par le juge Stone dans Hoffman-La Roche Ltée. c. Canada (Ministre de la Santé nationale et du Bien-être social) (1996), 205 N.R. 331, 70 C.P.R. (3d) 206 :

À mon avis, les grands principes de ces décisions, dans la mesure où ils s'appliquent à la présente affaire, peuvent être résumés comme suit :                

1.      Les demandes présentées en application du paragraphe 6(1) du Règlement sont régies par les règles de procédure énoncées à la partie V.1 des Règles de la Cour fédérale - « Règles concernant les demandes de contrôle judiciaire » . Bayer AG, précité, le juge Mahoney, à la page 336;


2.      C'est la partie qui se pourvoit en justice en application de l'article 6 qui, assumant la conduite de l'instance, a « la charge initiale de la preuve » . C'est une charge difficile, « puisqu'il s'agit de réfuter certaines ou l'ensemble des allégations de l'avis d'allégation, allégations qui, si elles n'étaient pas contestées, permettraient au ministre de délivrer l'avis de conformité » . Merck Frosst, précité, le juge Hugessen, à la page 319;

3.      Cette charge, appelée dans les poursuites civiles le « fardeau de persuasion » , oblige le poursuivant à prouver sa cause selon la norme de preuve en matière civile. En revanche, le « fardeau de présentation de la preuve » désigne l'obligation de soulever une question et signifie que la partie doit s'assurer qu'il y a au dossier suffisamment d'éléments de preuve de l'existence ou de l'inexistence d'un fait ou d'une question pour satisfaire au critère préliminaire au sujet de ce fait ou de cette question. Nu-Pharm, précité, le juge Stone, à la page 33;

4.      Lorsque l'avis de conformité d'une deuxième personne allègue la non-contrefaçon, la Cour devrait présumer que « les allégations de fait contenues dans l'avis d'allégation sont avérées sauf dans la mesure [où] la partie requérante prouve le contraire » . Merck Frosst, précité, le juge Hugessen, à la page 319;

5.      Pour décider si les allégations sont « fondées » , « la Cour doit examiner si, à la lumière de ces faits tels qu'ils sont présumés ou prouvés, ces allégations engageraient en droit à conclure que le brevet en litige ne serait pas contrefait par la partie intimée » . Merck Frosst, précité, le juge Hugessen, à la page 319;

6.      La décision du ministre quant à la délivrance d'un avis de conformité doit être axée sur la question de savoir si les allégations de la deuxième personne sont « suffisamment bien fondées pour appuyer la conclusion, tirée à des fins administratives, que la mise en marché du produit générique ne violerait pas le brevet du requérant » . Pharmacia (no de greffe A-332-94), précité, le juge Strayer, à la page 216;         

7.      Lorsque la deuxième personne omet de déposer un avis d'allégation ou qu'elle dépose un avis incomplet, elle doit en supporter « les conséquences lorsque, dans le cadre d'une demande de prohibition déposée devant la Cour, quelqu'un invoque les lacunes de ces allégations » . Bayer AG (no de greffe A-669-93), précité, le juge Strayer, à la page 134;

8.      Par l'alinéa 5(3)a) du Règlement, qui oblige la deuxième personne à fournir un énoncé détaillée, « il semble que le législateur ait voulu que le breveté soit parfaitement au courant des motifs sur lesquels le requérant se fonde pour prétendre que la délivrance d'un avis de conformité ne donnera pas lieu à la contrefaçon du brevet avant que le breveté décide de présenter ou non une demande au tribunal pour obtenir une décision. Une telle divulgation permettrait de cerner le débat très tôt » . Bayer AG (no de greffe A-389-93), précité, le juge Mahoney, aux pages 337 et 338;

9.      Une vague déclaration de non-contrefaçon dans un énoncé détaillé sans assertion factuelle au soutien de cette déclaration ne respecte pas les exigences du sous-alinéa 5(1)b)(iv) du Règlement. Nu-Pharm, précité, le juge Stone, aux pages 41 et 42 [pages 19 et 20];


10.      La présomption de common law selon laquelle le procédé d'une deuxième personne constitue une contrefaçon du brevet s'applique lorsque cette personne n'a invoqué aucun fait à l'appui de son allégation de non-contrefaçon, que cette personne est pertinemment au courant des éléments de preuve concernant cette absence de contrefaçon, qu'elle n'a présenté aucun élément de preuve à ce sujet et que la première personne n'a à sa portée aucun autre moyen de prendre connaissance de ces éléments de preuve. Nu-Pharm, précité, le juge Stone, à la page 45 [p. 20].

Conclusions nécessaires

[10]            En ce qui a trait aux conclusions que la Cour doit tirer, elles ont été énoncées succinctement par le juge Harrington dans Biovail Pharmaceuticals Inc. c. Canada (Ministre de la Santé nationale et du Bien-être social), 2005 CF 9, au paragraphe 10 :

La seule question qui se pose est de savoir si la Cour devrait rendre une ordonnance interdisant au ministre de délivrer un AC à Novopharm avant l'expiration de l'un ou des deux brevets en cause. Sous réserve du commentaire que j'ai formulé précédemment en ce qui concerne la portée restreinte du recours, la Cour doit nécessairement, pour rendre une ordonnance d'interdiction, arriver à la conclusion que les allégations de Novopharm ne sont pas fondées ou, autrement dit, conclure que les brevets sont valides et que Novopharm les contreferait. La Cour doit statuer sur ces deux points. À l'inverse, pour refuser de rendre une ordonnance d'interdiction, la Cour doit arriver à la conclusion que Novopharm ne contreferait pas les brevets ou que ceux-ci ne sont pas valides. Dans ce cas, il n'est pas nécessaire qu'elle statue sur les deux points.

[11]            Par conséquent, en l'espèce, Aventis doit prouver que l'allégation de non-contrefaçon par Apotex n'est pas justifiée.

QUESTIONS EN LITIGE

Question 1 : L'AA d'Apotex est-il incomplet?

[12]            Aventis allègue que l'AA est incomplet pour les raisons suivantes :


a)         il ne constitue rien de plus qu'une simple allégation d'absence de contrefaçon. Elle invoque à l'appui de sa position la décision de la juge Snider dans Aventis Pharma In. c. Pharmascience In. (2005), 38 C.P.R. (4th) 441, 2005 CF 340;

b)         il n'explique pas comment la mise en marché du produit (qui sera une version bioéquivalente d'Altace) ne donnera pas lieu à la contrefaçon du brevet 089 par les patients.

[13]            Les articles 5 et 6 du Règlement prévoient ce qui suit :



5. (1) Lorsqu'une personne dépose ou a déposé une demande d'avis de conformité pour une drogue et la compare, ou fait référence, à une autre drogue pour en démontrer la bioéquivalence d'après les caractéristiques pharmaceutiques et, le cas échéant, les caractéristiques en matière de biodisponibilité, cette autre drogue ayant été commercialisée au Canada aux termes d'un avis de conformité délivré à la première personne et à l'égard de laquelle une liste de brevets a été soumise, elle doit inclure dans la demande, à l'égard de chaque brevet inscrit au registre qui se rapporte à cette autre drogue :

a)         soit une déclaration portant qu'elle accepte que l'avis de conformité ne sera pas délivré avant l'expiration du brevet;

b)         soit une allégation portant que, selon le cas :

(i)         la déclaration faite par la première personne aux termes de l'alinéa 4(2)c) est fausse,

(ii)        le brevet est expiré,

(iii)       le brevet n'est pas valide,

(iv)       aucune revendication pour le médicament en soi ni aucune revendication pour l'utilisation du médicament ne seraient contrefaites advenant l'utilisation, la fabrication, la construction ou la vente par elle de la drogue faisant l'objet de la demande d'avis de conformité.

6. (1) La première personne peut, dans les 45 jours après avoir reçu signification d'un avis d'allégation aux termes des alinéas 5(3)b) ou c), demander au tribunal de rendre une ordonnance interdisant au ministre de délivrer un avis de conformité avant l'expiration du brevet visé par l'allégation.

5. (1) Where a person files or has filed a submission for a notice of compliance in respect of a drug and compares that drug with, or makes reference to, another drug for the purpose of demonstrating bioequivalence on the basis of pharmaceutical and, where applicable, bioavailability characteristics and that other drug has been marketed in Canada pursuant to a notice of compliance issued to a first person and in respect of which a patent list has been submitted, the person shall, in the submission, with respect to each patent on the register in respect of the other drug,

(a)        state that the person accepts that the notice of compliance will not issue until the patent expires; or

(b)                allege that

(i)         the statement made by the first person pursuant to paragraph 4(2)(c) is false,

(ii)        the patent has expired,

(iii)       the patent is not valid, or

(iv)       no claim for the medicine itself and no claim for the use of the medicine would be infringed by the making, constructing, using or selling by that person of the drug for which the submission for the notice of compliance is filed.

6.(1) A first person may, within 45 days after being served with a notice of an allegation pursuant to paragraph 5(3)(b) or (c), apply to a court for an order prohibiting the Minister from issuing a notice of compliance until after the expiration of a patent that is the subject of the allegation.


[14]            À propos de ces conditions, le juge Stone a formulé les observations suivantes dans AB Hassle c. Canada (Ministre de la Santénationale et du Bien-être social) (2000), 7 C.P.R. (4th) 272, 256 N.R. 172, aux paragraphes 20 et 21 :


Bien que lnoncé détaillé ne soit pas déposé dans l'instance relative à la demande visée à l'article 6, son influence est néanmoins prédominante dans cette procédure. En effet, c'est par rapport au contenu de cet énoncé que le titulaire du brevet doit décider s'il introduit une telle instance et évaluer ses chances de succès. Pour ce faire, l'allégation et lnoncé détaillé sont une aide importante pour définir les questions et les faits qu'il faut établir dans une instance relative à la demande visée à l'article 6 car pour obtenir l'interdiction, le titulaire du brevet doit démontrer que, contrairement à ce qui est indiqué dans lnoncé détaillé, le droit attaché à son brevet sera enfreint si un AC est délivré pour la drogue avant l'expiration du brevet inscrit sur la liste.

À mon avis, tout ce qui précède donne à penser que la seconde personne doit satisfaire aux exigences de l'alinéa 5(3)a), c'est-à-dire établir dans lnoncé détaillé « le droit et les faits sur lesquels elle fonde » les allégations de l'alinéa 5(1)b) et le faire d'une manière suffisamment complète pour permettre au titulaire du brevet dvaluer ses recours en réponse à l'allégation [¼]

[15]            La jurisprudence sur le caractère suffisant de l'AA est assez élaborée. Après avoir pris connaissance de cette jurisprudence (SmithKline Beecham Inc. c. Apotex Inc. (2001), 10 C.P.R. (4th) 338, 267 N.R. 101; AB Hassle c. Canada (Ministre de la Santé nationale et du Bien-être social), [2002] 3 C.F. 221, 2001 CFPI 1264, conf. par (2002), 22 C.P.R. (4th) 1, 2002 CAF 421; AstraZeneca AB c. Apotex Inc. et al (2004), 33 C.P.R. (4th) 125, 2004 CF 44, conf. par (2005), 335 N.R. 1, 2005 CAF 1283; AstraZeneca AB c. Apotex Inc. (2004), 33 C.P.R. (4th) 97, 2004 CF 313; AB Hassle c. Apotex Inc. (2004), 34 C.P.R. (4th) 65, 2004 CF 379; AstraZeneca Canada Inc. c. Apotex Inc. (2004), 34 C.P.R. (4th) 450, 2004 CF 647, conf. par (2005), 40 C.P.R. (4th) 449, 2005 CAF 216; Pfizer Canada Inc. c. Novopharm Ltd., 2005 CAF 270), je constate qu'il est possible d'établir la synthèse suivante :

1.         L'AA doit être complet :

(i)        pour que le demandeur comprennent entièrement les motifs qu'avance le défendeur relativement à l'absence de contrefaçon,

(ii)       pour permettre au demandeur dvaluer ses recours en réponse à l'allégation d'absence de contrefaçon.

2.         Si le demandeur a des doutes sur une partie de l'AA, il devrait déposer un affidavit en ce sens.


3.        Le défendeur n'a pas besoin de répondre aux moyens de défense spéculatifs du demandeur.

            4.         La décision quant au caractère suffisant d'un AA doit être prise compte tenu de l'ensemble du contexte des allégations.

[16]            En l'espèce, l'AA est assez clair et n'est pas incomplet.

[17]            Premièrement, il précise que la monographie de produit ne mentionnerait pas que l'apo-ramipril peut être utilisé pour le traitement de l'hypertrophie. Il ne s'agit pas seulement d'une simple assertion. Il renvoie précisément Aventis à la monographie de produit comme preuve que l'apo-ramipril ne sera pas commercialisé pour le traitement de l'hypertrophie. Si l'assertion n'est pas exacte, il appartient à Aventis de préciser quelle partie de la monographie de produit peut amener un lecteur averti à conclure que l'apo-ramipril peut être utilisé pour le traitement de l'hypertrophie.

[18]            Deuxièmement, Apotex a offert de supprimer toute mention relative à l'insuffisance cardiaque qu'Aventis pourrait signaler. Aventis n'a pas saisi cette occasion mais elle a plutôt engagé la présente action.


[19]            Troisièmement, Aventis n'a produit aucune preuve par affidavit exposant les motifs pour lesquels elle n'est pas en mesure de prendre une décision éclairée au sujet de l'AA. Apotex n'a été mise au courant des préoccupations d'Aventis qu'au moment où Aventis a introduit la présente demande d'interdiction.

[20]            Finalement, les actions d'Aventis parlent d'elles-mêmes. Aventis a produit quatre témoins et présenté des éléments de preuve sur le principal point de désaccord, à savoir si des éléments de la MP originale de l'apo-ramipril pouvaient servir à commercialiser ou à faire la promotion de ce dernier dans le traitement de l'hypertrophie. Il est difficile de concevoir quels sont les autres renseignements dont Aventis avait besoin pour répondre à l'AA. Aventis déclare au paragraphe 56 de ses observations écrites :

[traduction] [¼] il [l'AA] n'explique pas comment la mise en marché de son produit (qui est une version bioéquivalente de la marque ALTACE et qui, par conséquent, agira de la même façon) ne donnera pas lieu à la contrefaçon du brevet 089 par les patients.                                             

Toutefois, cela équivaut en fait à demander à Apotex de faire une preuve négative, ce qui est logiquement impossible.

[21]            Par conséquent, pour ces motifs, la Cour n'est pas en mesure de conclure que l'AA était incomplet.

Question 2 :    L'allégation d'absence de contrefaçon est-elle justifiée?


[22]            Dans une affaire d'allégation de contrefaçon, la première étape se rapporte à l'interprétation du brevet en cause. En l'espèce, le brevet en cause est le brevet canadien 2,023,089 qui a été délivré le 10 août 1990 et qui comporte une date de priorité fixée au 11 août 1989. Le brevet s'intitule « Méthode de traitement de l'hypertrophie et de l'hyperplasie cardiaque et vasculaire » .

[23]            La revendication pertinente est la revendication 6, qui fait référence à la revendication 1. Ces deux revendications sont présentées à l'annexe A des présents motifs.

[24]            Les parties s'entendent sur les points suivants :

a)         la revendication 1 vise un inhibiteur de l'enzyme de conversion de l'angiotensine (ECA) de la formule décrite à la revendication 1 ou un de ses sels physiologiquement tolérés pour administration comme agent de traitement de l'hypertrophie;

b)        la revendication 6 vise la même indication mais à l'aide d'un inhibiteur de l'ECA différent décrit par une formule présentée à la revendication 6. Il s'agit du médicament communément appelé ramipril.

[25]            En conséquence, la revendication 6 revendique l'utilisation du ramipril pour traiter l'hypertrophie. Vu que la revendication est claire à première vue et qu'il n'y a aucun désaccord entre les parties, il n'est pas nécessaire de passer plus de temps sur l'interprétation du brevet.


[26]            Aventis allègue qu'il existe une pratique suivant laquelle des médicaments sont prescrits pour un usage non indiqué sur leur étiquette, et Apotex ne le conteste pas. Le témoin d'Aventis, le Dr Levine, l'a définie de façon assez succincte comme étant une pratique observée [traduction] « [¼] lorsque les médecins prescrivent un médicament pour une indication à l'égard de laquelle l'organisme de réglementation n'a pas autorisé la commercialisation du médicament par le fabricant » . En l'espèce, cela signifie que même si l'hypertrophie n'est pas un usage autorisé d'Altace, en raison de l'existence de la pratique de l'ordonnance pour usage non indiqué sur l'étiquette, il est en fait prescrit pour cette indication. De la même manière, si la vente de l'apo-ramipril est autorisée, même si ce médicament n'est autorisé que pour l'hypertension, les médecins le prescriront pour l'hypertrophie, les pharmaciens le distribueront pour l'hypertrophie et les patients le consommeront pour soigner l'hypertrophie.

[27]            Dans ses observations écrites, Aventis allègue essentiellement trois points :

1.         Il y aura contrefaçon par les patients et les médecins en raison de la pratique de l'ordonnance pour usage non indiqué sur l'étiquette.

2.         La monographie de produit servira à faire la promotion de l'apo-ramipril. Comme la MP originale renvoie à l'article de Benetos qui fait mention de l'hypertrophie, elle pourra être et sera utilisée pour faire la promotion de la prescription de l'apo-ramipril pour le traitement de l'hypertrophie ou pour l'inciter.

3.         Apotex est liée par sa MP originale et elle ne peut la modifier pour s'appuyer sur une MP révisée une fois que la procédure d'interdiction est engagée.


[28]            À l'audience, Apotex a reconnu que l'apo-ramipril pourra être prescrit pour un usage non indiqué sur l'étiquette lorsque l'avis de conformité sera délivré. Par conséquent, Aventis était d'avis que, compte tenu de cet aveu, aucune autre preuve reliant cette contrefaçon indirecte à Apotex n'était nécessaire. Selon Aventis, les allégations d'absence de contrefaçon d'Apotex ont donc été réfutées.

[29]            À l'appui de sa position, Aventis invoque Genpharm Inc. c. Ministre de la Santé et al., [2003] 1 C.F. 402, 2002 CAF 290, dans lequel le juge Rothstein affirme ce qui suit aux paragraphes 48 et 49 :

L'objet du Règlement semble manifeste. Si un fabricant de génériques vend un produit et que cela a pour effet la contrefaçon d'un brevet par quiconque utilise le produit, c'est la contrefaçon que le Règlement vise à empêcher. Rien n'exige que le fabricant de génériques ait incité ou amené des patients ou d'autres personnes à contrefaire le brevet.

Pour ce motif, j'estime que, dans le cas de revendications pour l'utilisation, il n'est pas nécessaire que le titulaire d'un brevet établisse que, par ses actions, le fabricant de génériques incitera ou amènera des patients ou d'autres personnes à contrefaire le brevet. Dans la mesure où le fabricant de génériques ne peut établir qu'aucune revendication pour l'utilisation du médicament ne serait contrefaite par des patients ou d'autres personnes par la vente de son produit, il ne satisfera pas au critère du bien-fondé de l'allégation énoncé au paragraphe 6(2) du Règlement et une ordonnance d'interdiction doit être rendue.    [Non souligné dans l'original.]

[30]            Toutefois, dans une cause subséquente, AB Hassle c. Canada (Ministre de la Santé nationale et du Bien-être social) (2002), 22 C.P.R. (4th) 1, 2002 CAF 421, le juge Sexton a modifié cette affirmation catégorique de la façon suivante :

56      Les appelantes se sont fondées sur l'extrait suivant de l'arrêt Genpharm, aux paragraphes 47 à 50, pour soutenir que Genpharm devrait s'appliquer au présent appel :        

[47] [¼] Le fait est que les revendications pour l'utilisation visées au sous-alinéa 5(1)b)(iv) envisagent l'utilisation, non seulement par le fabricant de génériques, mais aussi par les patients, et qu'il en résultera la contrefaçon par les patients qui utilisent un médicament vendu par un fabricant de génériques, même sans incitation de la part de ce fabricant.


[48]       L'objet du Règlement semble manifeste. Si un fabricant de génériques vend un produit et que cela a pour effet la contrefaçon d'un brevet par quiconque utilise le produit, c'est la contrefaçon que le Règlement vise à empêcher. Rien n'exige que le fabricant de génériques ait incité ou amené des patients ou d'autres personnes à contrefaire le brevet.

[49]      Pour ce motif, j'estime que, dans le cas de revendications pour l'utilisation, il n'est pas nécessaire que le titulaire d'un brevet établisse que, par ses actions, le fabricant de génériques incitera ou amènera des patients ou d'autres personnes à contrefaire le brevet. Dans la mesure où le fabricant de génériques ne peut établir qu'aucune revendication pour l'utilisation du médicament ne serait contrefaite par des patients ou d'autres personnes par la vente de son produit, il ne satisfera pas au critère du bien-fondé de l'allégation énoncé au paragraphe 6(2) du Règlement et une ordonnance d'interdiction doit être rendue.

[50]     En l'espèce, si un patient utilise le produit de Genpharm pour l'ostéoporose, les revendications pour l'utilisation que comporte le brevet 376 de P & G seraient contrefaites. C'est la vente de son produit par Genpharm qui aurait pour effet la contrefaçon. La preuve établit de façon écrasante qu'il est non seulement probable mais inévitable que le produit Gen-étidronate de Genpharm soit, en cas de délivrance des avis de conformité, utilisé pour le traitement de l'ostéoporose selon le schéma posologique cyclique qui constitue l'invention suivant le brevet 376.

Il faut souligner, toutefois, que la Cour a fait ces déclarations après avoir conclu que la preuve dans l'affaire Genpharm établissait de façon écrasante que les actes et les intentions de Genpharm mèneraient inévitablement à la contrefaçon. En l'espèce, aucune conclusion de cette nature n'a pu être établie, ce qui distingue le présent appel de l'arrêt Genpharm. Je ne considère pas que l'arrêt Genpharm établisse que la simple vente par le fabricant d'un générique, sans plus, d'un médicament faisant l'objet d'un brevet d'utilisation suffit à constituer une contrefaçon aux termes du sous-alinéa 5(1)b)(iv).

57      Par conséquent, Apotex ne peut être empêchée d'obtenir un avis de conformité pour le seul motif qu'elle vendra de l'oméprazole. Affirmer le contraire soulèverait de graves questions de politique. S'il y avait une quelconque possibilité qu'un patient consomme un produit générique pour une utilisation brevetée, alors le produit générique ne serait pas approuvé. Cela empêcherait l'autorisation de nouvelles utilisations de médicaments existants, car il est toujours possible que quelqu'un, quelque part, utilise le médicament pour l'objet breveté et interdit. Cette position mènerait à une véritable injustice : comme la société qui fabrique des génériques ne peut raisonnablement contrôler comment chacun dans le monde utilise son produit, empêcher le fabricant de génériques de commercialiser son produit contribuerait à conforter et élargir davantage le monopole des titulaires de brevet. Les titulaires de brevet se trouveraient de ce fait à contrôler effectivement non seulement les nouvelles utilisations d'un composé existant, mais le composé lui-même, même si celui-ci n'est pas protégé par le brevet de départ. Les titulaires de brevet auraient ainsi un avantage qu'ils ne devraient pas avoir. En fin de compte, la société serait privée de l'avantage des nouveaux modes d'utilisation des produits pharmaceutiques existants, disponibles à un coût inférieur.


58      De plus, Apotex ne peut être tenue responsable à l'égard de poursuites en contrefaçon intentées en vertu de la Loi sur les brevets si, contrairement à la preuve présentée à l'audience sur l'avis de conformité, des tiers commettent des actes de contrefaçon après la délivrance de l'avis de conformité, à moins qu'Apotex soit elle-même impliquée dans ces actes, par exemple en incitant ou amenant les tiers à les commettre. L'arrêt Genpharm ne s'applique pas à la responsabilité du fabricant de génériques aux termes de la Loi sur les brevets à l'égard de toute contrefaçon de brevet par un tiers qui surviendrait après la délivrance de l'avis de conformité.

59      Les appelantes n'ont pas établi que, dans le cas où un avis de conformité serait délivré à Apotex et où elle vendrait de l'oméprazole, les patients ou d'autres tiers contreferaient le brevet d'utilisation des appelantes. Dans une procédure d'interdiction, si la première personne ne parvient pas à établir que des contrefaçons se produiront si l'avis de conformité est délivré, elle ne peut obtenir l'interdiction en se fondant sur le sous-alinéa 5(1)b)(iv), quelle que soit la définition du lien nécessaire entre le fabricant de génériques et la contrefaçon.

[Non souligné dans l'original.]

[31]            Il est évident que la Cour d'appel fédérale veut éviter l'injustice décrite au paragraphe 57, ainsi que l'application d'une norme qui serait plus sévère dans une procédure d'avis de conformité que dans une action en contrefaçon. La décision Genpharm, précitée, doit donc être interprétée à la lumière de ses propres faits, comme l'a fait le juge Sexton, et elle n'étaye pas la thèse d'Aventis, suivant laquelle une simple contrefaçon suffit. Il n'est pas surprenant de constater, à la lecture des décisions qui ont suivi, que celles-ci ont toutes adhéré à l'interprétation du juge Sexton dans AB Hassle, précité. (Voir H. Lundbeck A/S c. Canada (Ministre de la Santé) (2003), 30 C.P.R. (4th) 97, 2003 CF 1145, le juge Blais; H. Lundbeck A/S c. Canada (Ministre de la Santé) (2003), 30 C.P.R. (4th) 198, 2003 CF 1334, le juge Martineau; AB Hassle c. Apotex Inc. (2004), 34 C.P.R. (4th) 65, 2004 CF 379, le juge Lemieux; Axcan Pharma Inc. c. Pharmascience Inc., 2005 CF 1231, le juge Beaudry.)

[32]          Il m'apparaît évident que la reconnaissance par Apotex de la prescription par les médecins, la distribution par les pharmaciens et la consommation subséquente par les patients de médicaments pour un usage non indiqué sur l'étiquette ne satisfait pas au critère du « quelque chose de plus » établi par le juge Sexton dans AB Hassle, précité. La question de savoir si ce « quelque chose de plus » consiste en l'incitation, la commercialisation ou tout autre lien dépendra des faits de chaque cas d'espèce. Toutefois, il doit exister un lien. Une simple reconnaissance passive que des médicaments seront prescrits et consommés pour usage non indiqué n'équivaut pas à un « quelque chose de plus » . (Voir également Pfizer Canada Inc. c. Apotex Inc. 2005 CF 1421, au paragraphe 167.)

[33]            En l'espèce, qu'est-ce qui équivaut à un « quelque chose de plus » ? Aventis avance deux propositions :

a)         le manque d'avertissement dans les monographies de produit d'Apotex,

b)         la première référence annexée à la MP originale ou l'article de Benetos.


[34]            En ce qui a trait à l'avertissement, Aventis soutient que son utilité a été mentionnée par le juge Rothstein dans Genpharm Inc. c. Canada (Ministre de la Santé), [2003] 1 C.F. 402, 2002 CAF 290, au paragraphe 34, et par la juge Layden-Stevenson dans AB Hassle c. Genpharm Inc. (2003), 243 F.T.R. 6, 2003 CF 1443, au paragraphe 156. Même si ces décisions font état effectivement d'un manque d'avertissement, elles n'ont pas été tranchées sur ce point. Cet avertissement pourrait être un élément utile pour aider à nier une idée d'intention de la personne à qui la contrefaçon est reprochée. Toutefois, l'absence d'avertissement ne peut servir en soi à inférer une intention de contrefaçon par le biais de l'incitation, de la commercialisation ou de tout autre lien.

[35]            En ce qui a trait à l'article de Benetos, sur lequel Aventis [traduction] « mise » , pour reprendre le terme employé par son avocat, je ne crois pas qu'il réponde au critère du « quelque chose de plus » pour les motifs suivants :

a)        Il n'en est pas fait mention dans le corps de la monographie de produit ni dans les notes en bas de page. Il est simplement cité en tête d'une liste de 18 références.

b)         Il ne porte pas sur l'hypertrophie, mais comme son introduction le précise :

[traduction] le but de la présente étude visait à déterminer les effets de l'inhibiteur d'ECA ramipril sur la circulation artérielle par rapport à son action antihypertensive aiguë et chronique.

c)         Le mot « hypertrophy » (hypertrophie) n'apparaît qu'une fois; le mot « hyperplasia » (hyperplasie) n'est pas mentionné du tout.

d)         La phrase contenant le mot « hypertrophy » (hypertrophie) se trouve dans la partie introductive de l'article et elle renvoie à un autre article. Cette phrase est rédigée comme suit :

[traduction] Il a été signalé que les inhibiteurs de l'enzyme de conversion de l'angiotensine (ECA) diminuent la pression artérielle, corrigent l'hypertrophie cardiaque (3) et améliorent la compliance des artères principales (4) .

Si l'on se reporte ensuite à la note (3) en bas de page de l'article de Benetos, on peut lire la référence suivante :

Asmar R, Journot H, Lacolley P, Santoni JP, Billaud E, Safar M. Treatment for one year with perindopril: effect on cardiac mass and arterial compliance in essential hypertension. J Hypertens 1988; 6 (suppl 3): S33-40.


[Non souligné dans l'original.]

Il n'est pas contesté que le « perindopril » est un inhibiteur de l'ECA, mais il n'est également pas contesté que ce n'est pas du ramipril.

e)         Rien dans la preuve ne démontre que la référence à l'article de Benetos aura une incidence sur le comportement des médecins ou des pharmaciens. Le témoin expert vedette d'Aventis, le Dr Dagenais, dont les compétences ne sont pas mises en doute par Apotex, a simplement affirmé ce qui suit dans son affidavit :

[traduction] 20.     La liste des références, à la page 45 de l'ébauche de la monographie de produit, comprend un article qui porte sur l'utilisation des inhibiteurs de l'ECA dans le traitement de l'hypertrophie cardiaque. Dans la première référence, intitulée « Effects of Ramipril on Arterial Hemodynamics » , publiée en 1991, les auteurs soulignent, à la page S153, que :

Il a été signalé que les inhibiteurs de l'enzyme de conversion de l'angiotensine (ECA) diminuent la pression artérielle, corrigent l'hypertrophie cardiaque et améliorent la compliance des artères principales.

Une copie de la référence est jointe à l'annexe B.

Ni le Dr Dagenais ni les autres témoins experts n'ont présenté de preuve censée démontrer comment l'article de Benetos est lié à la contrefaçon par les médecins, les pharmaciens ou les patients.


[36]            Bref, Aventis voudrait établir un lien entre Apotex et les personnes qui font de la contrefaçon indirecte, non pas à partir d'un élément contenu dans le corps de la MP originale, mais bien à partir d'une simple note en bas de page contenue dans une référence annexée à la MP originale. Cependant, comme l'analyse précédente le démontre, à l'exception d'une seule occurrence du mot « hypertrophy » (hypertrophie) dans le paragraphe introductif de la référence annexée (avec un renvoi à une étude sur le périndopril), il n'existe aucun lien, quel qu'il soit, entre l'article de Benetos et l'hypertrophie. Je ne vois pas comment le simple emploi de ce mot dans un article de référence qui ne traite pas de l'hypertrophie peut être interprété de manière à établir un lien (à savoir satisfaire au critère du « quelque chose de plus » établi par le juge Sexton dans AB Hassle c. Ministre de la Santé nationale et du Bien-être social, précité).


Question : 3 Apotex peut-elle s'appuyer sur la MP révisée du 26 mai 2004?

[37]          Compte tenu de la conclusion à laquelle je suis parvenu à l'égard de la question 2, il n'est pas nécessaire d'examiner cette dernière question. Toutefois, je souligne, sans exprimer aucune opinion sur ce point, que la question a déjà été examinée par la juge Simpson dans Aventis Pharma Inc. c. Apotex, 2005 CF 1381, aux paragraphes 12 et 13.

Conclusion

[38]            Pour les motifs exposés précédemment, je conclus qu'Aventis n'a pas réussi à réfuter l'allégation d'absence de contrefaçon d'Apotex. Par conséquent, la présente demande d'ordonnance d'interdiction ne peut être accueillie.


                                        ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE que la présente demande soit rejetée avec dépens en faveur de la défenderesse.    

« Konrad W. von Finckenstein »

Juge

Traduction certifiée conforme

Michèle Ali


Annexe A

[TRADUCTION]

1.          Inhibiteur de l'enzyme de conversion de l'angiotensine de formule I ou un sel physiologiquement toléré de celui-ci pour administration comme agent de traitement de l'hypertrophie ou de l'hyperplasie cardiaque et vasculaire, la formule I étant la suivante :


où :

n                       est égal à 1 ou 2;

R                       est un atome d'hydrogène, un alkyle comptant 1 à 8 atomes de carbone, un alcényle comptant 2 à 6 atomes de carbone, un cycloalkyle comptant 3 à 9 atomes de carbone, un aryle comptant 6 à 12 atomes de carbone et pouvant être mono-, di- ou trisubstitué avec un alkyle en C1 à C4, un alkoxy en C1 à C4, un hydroxyle, un halogène, un groupement nitro, un groupement amine, un groupement méthylamine, une alkylamine en C1 à C4, une dialkylamine en C1 à C4, une alcanoylamine en C1 à C4, un groupement méthylènedioxy, un carboxyle, un groupement cyano et/ou sulfamoyle, un alkoxy comptant 1 à 4 atomes de carbone, un aryloxy comptant 6 à 12 atomes de carbone et pouvant être substitué de la façon décrite ci-dessus pour l'aryle, un hétérooxyaryle mono-ou bicyclique comptant 5 à 7 ou 8 à 10 atomes dans le cycle, dont 1 ou 2 sont des atomes de soufre ou d'oxygène et/ou 1 à 4 sont des atomes d'azote, et pouvant être substitué de la façon décrite pour l'aryle, une alkylamine en C1 à C4, un groupement alcanoylaminoalkyle (chaîne alkyle et alcanoyle en C1 à C4), un groupement aroylaminoalkyle (chaîne alkyle en C1 à C4 et groupe aroyle en C7 à C13), un groupement alkoxycarbonylaminoalkyle (chaîne alkyle et alkoxycarbonyle en C1 à C4), un groupement arylalkoxycarbonylaminoalkyle (groupe aryle en C6 à C12, et alkoxycarbonyle et chaîne alkyle en C1 à C4), un groupement arylalkylaminoalkyle (groupe aryle en C6 à C12, alkylamine et alkyle en C1 à C4), un groupement alkylaminoalkyle (chaînes alkyles en C1 à C4), un groupement dialkylaminoalkyle (chaînes alkyles en C1 à C4), un groupement alkylguanidine en C1 à C4, un imidazolyle, un indolyle, un groupement thioalkyle en C1 à C4, un groupement alkylthioalkyle (chaînes alkyles en C1 à C4), un groupement arylthioalkyle (groupe aryle en C6 à C12 et chaîne alkyle en C1 à C4) pouvant être substitué de la façon décrite ci-dessus pour l'aryle, un groupement arylthioalkyle (groupe aryle en C6 à C12 et chaîne alkyle en C1 à C4), pouvant être substitué de la façon décrite ci-dessus pour l'aryle, un groupement carboxyalkyle en C1 à C4, un carboxyle, un carbamoyle, un alkylcarbamoyle (chaîne alkyle en C1 à C4), un alkoxycarbonylalkyle (chaînes alkoxy et alkyle en C1 à C4), un


aryloxyalkyle (aryloxy en C6 à C12, chaîne alkyle en C1 à C4) dont le groupe aryle peut être substitué de la façon décrite ci-dessus dans le cas de l'aryle, ou alkoxyaryle (groupe aryle en C6 à C12 et chaîne alkoxy en C1 à C4) dont le groupe aryle peut être substitué de la façon décrite ci-dessus pour l'aryle;

R1                      est un atome d'hydrogène, un groupement alkyle comptant 1 à 6 atomes de carbone, un alcényle comptant 2 à 6 atomes de carbone, un alcynyle comptant 2 à 6 atomes de carbone, un cycloalkyle comptant 3 à 9 atomes de carbone, un cycloalcényle comptant 5 à 9 atomes de carbone, un alkylcycloalkyle (cycloalkyle en C3 à C7 et chaîne alkyle en C1 à C4), un alkylcycloalcényle (cycloalcényle en C5 à C7 et chaîne alkyle en C1 à C4) pouvant être un aryle partiellement hydrogéné comptant 6 à 12 atomes de carbone, potentiellement substitué de la façon décrite ci-dessus pour R, un arylalkyle (groupe aryle en C6 à C12 et chaîne alkyle en C1 à C4) ou un aroylalkyle (groupe aroyle en C7 à C13 et chaîne alkyle en C1 ou C2), tous deux pouvant être substitués de la façon décrite ci-dessus pour l'aryle, un

hétéroaryle mono- ou bicyclique pouvant être partiellement hydrogéné, comptant 5 à 7 ou 8 à 10 atomes dans le cycle, dont 1 ou 2 sont des atomes de soufre ou d'oxygène et/ou 1 à 4 sont des atomes d'azote, et pouvant être substitué de la façon décrite ci-dessus pour l'aryle, ou encore être la chaîne latérale protégée d'un acide α-aminé naturel de formule R1-CH(NH2)-COOH;

R2 et R3             sont identiques ou différents; il s'agit d'un atome d'hydrogène, d'un groupement alkyle comptant 1 à 6 atomes de carbone, d'un groupement alcényle comptant 2 à 6 atomes de carbone, d'un groupement dialkylaminoalkyle (chaînes alkyles en C1 à C4), d'un groupement alcanoyloxyalkyle (groupe alcanoyloxy en C1 à C5 et chaîne alkyle en C1 à C4), d'un groupement alkoxycarbonyloxyalkyle (groupe alkoxycarbonyl en C1 à C4 et chaîne alkyle en C1 à C4), d'un groupement aroyloxyalkyle (groupe aroyloxy en C7 à C13 et chaîne alkyle en C1 à C4), d'un groupement aroyloxyalkyle (groupe aroyle en C7 à C13 et chaîne alkyle en C1 à C4), d'un groupement aryloxycarbonyloxyalkyle (groupe aryloxycarbonyloxy en C6 à C12 et chaîne alkyle en C1 à C4), d'un aryle comptant 6 à 12 atomes de carbone, d'un arylalkyle (groupe aryle en C6 à C12 et chaîne alkyle en C1 à C4), d'un groupement cycloalkyle en C3 à C9 ou d'un alkylcycloalkyle (cycloalkyle en C3 à C9, chaîne alkyle en C1 à C4);


R4 et R5 et les atomes qui les portent sont un système pouvant être substitué, appartenant

à la série comprenant la tétrahydroisoquinoléine, la décahydroisoquinoléine, l'octahydroindole, l'octahydrocyclopenta[b]pyrrole, le 2-azaspiro[4.5]décane, le 2-azaspiro[4.4]nonane, la spiro[(bicyclo[2.2.1]heptane)-2,3'-pyrrolidine], la spiro[(bicyclo[2.2.2]octane)-2,3'-pyrrolidine], le 2-azatricyclo[4,3,0,1,6,9]décane        , le décahydrocyclohepta[b]pyrrole, l'octahydroisoindole, l'octahydrocyclopenta[c]pyrrole, le 2,3,3a,4,5,7a-hexahydroindole et le 2-azabicyclo[3.1.0]hexane.

2.          L'inhibiteur de l'enzyme de conversion visé par la revendication 1, où l'inhibiteur de l'enzyme est l'acide (S,S,S,S,S)-N-(1-carbéthoxy-3-phénylpropyl)alanyloctahydroindole-2-carboxylique ou ses acides dicarboxyliques correspondants.

3.          L'inhibiteur de l'enzyme de conversion visé par la revendication 1, où l'inhibiteur de l'enzyme est l'acide N-[1-(S)-carbéthoxy-3-phénylpropyl-( S)-alanyl]-(2S,3aR,7aS)-octahydroindole-2-carboxylique            

4.          L'inhibiteur de l'enzyme de conversion visé par la revendication 1, où l'inhibiteur de l'enzyme est l'acide (S,S,S,S,S)-N-[(1-carbéthoxy-3-phénylpropyl)alanyl]décahydroisoquinoléine-3-carboxylique ou ses acides dicarboxyliques correspondants.

5.          L'inhibiteur de l'enzyme de conversion visé par la revendication 1, où l'inhibiteur de l'enzyme est l'acide (S,S,S)-N-[(1-carbéthoxy-3-phénylpropyl)alanyl]tétrahydroisoquinoléine-3-carboxylique ou ses acides dicarboxyliques correspondants.

6.          L'inhibiteur de l'enzyme de conversion visé par la revendication 1, où l'inhibiteur de l'enzyme est l'acide (S,S,S,S,S)-N-(1-carbéthoxy-3-phénylpropyl)alanyl-2-azabicyclo[3.3.0]octane-3-carboxylique ou ses acides dicarboxyliques correspondants.


COUR FÉDÉRALE

                      AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                                                 T-11-04

INTITULÉ :                                                                AVENTIS PHARMA INC. et

AVENTIS PHARMA DEUTSCHLAND                                                                     GmbH

c.

APOTEX INC. et LE MINISTRE DE LA                                                                    SANTÉ

                                                                                                           

LIEU DE L'AUDIENCE :                                         TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :                                        LES 11 ET 12 OCTOBRE 2005

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                                                LE JUGE von FINCKENSTEIN

DATE DES MOTIFS :                                               LE 27 OCTOBRE 2005

COMPARUTIONS :


Gunars Gaikis

Yoon Kang

POUR LES DEMANDERESSES



Andrew Brodkin

Harry Radomski

POUR LA DÉFENDERESSE


AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :


Gunars Gaikis

Yoon Kang

Smart & Biggar LLP

Toronto (Ontario)

POUR LES DEMANDERESSES



Andrew Brodkin

Harry Radomski

Goodmans LLP

Toronto (Ontario)

POUR LA DÉFENDERESSE



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