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Date : 20010912

Dossier : IMM-663-01

Référence neutre : 2001 CFPI 1007

ENTRE :

MARIA CONCEPCION TARROJA

demanderesse

- et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

                                  MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

LE JUGE LEMIEUX

A.      CONTEXTE

[1]                 Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire présentée par Maria Conception Tarroja (la demanderesse), citoyenne des Philippines, concernant la lettre de refus qu'elle a reçue le 31 janvier 2001. Cette lettre faisait suite à son entrevue avec une agente des visas portant sur sa demande de résidence permanente au Canada datée du 24 août 1998 au titre de la catégorie des immigrants indépendants, sa profession envisagée désignée étant celle d' « analyste financière ou d'analyste en placements » .


[2]                 Sa demande de résidence permanente a été envoyée à l'ambassade canadienne aux Philippines par des consultants en immigration de Calgary le 29 août 1998. Dans leur lettre d'accompagnement, les consultants en immigration mentionnent la CNP 1112.0 « analyste financière ou analyste en placements » , mais ajoutent [traduction] « que d'autres professions correspondent à son expérience de travail et à ses compétences, soit les CNP 1111.2 "comptable" et CNP 0111 "directrice financière" » .

[3]                 La lettre de refus de l'agente des visas précise que la demanderesse a été appréciée comme agente de programmes (CNP 4164) et énumère les unités qui lui ont été accordées pour cette profession. L'agente des visas a attribué 68 unités, soit deux de moins que les 70 unités requises.

[4]                 L'agente des visas mentionne en outre dans sa lettre de refus que la demanderesse a aussi été évaluée au regard de la profession d'analyste financière (CNP 1112.0). Voici ce qu'écrit l'agente des visas au sujet de cette demande :

[traduction] Il m'est impossible d'approuver votre demande sur cette base parce que je ne suis pas convaincue que vos fonctions correspondent à celles énumérées dans la CNP.

[5]                 La lettre de l'agente des visas ne précise pas le nombre d'unités accordées pour chaque facteur au titre de cette profession réclamée.


B.       MOTIFS DE LA CONTESTATION

[6]                 La contestation de la demanderesse comporte trois volets :

          (1)       S'appuyant sur la décision Khalaque c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 9 Imm. L.R. (3d) 53, rendue par Monsieur le juge Campbell, la demanderesse fait valoir qu'elle n'a pas, dans les faits, été appréciée comme analyste financière;

          (2)       L'agente des visas n'aurait pas dû apprécier la demanderesse à titre d'agente de programmes (CNP 2.4164) puisqu'il ne s'agit pas d'une profession de rechange appropriée découlant de son niveau d'études et de son expérience de travail véritable ou inhérente à ceux-ci. La demanderesse invoque la décision Moksud c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (2001),12 Imm. L.R. (3d) 151, de Monsieur le juge Rouleau à cet égard. Elle affirme que la classification plus appropriée était celle d'agente de développement économique (CNP 4163);

          (3)       La demanderesse se fonde sur la décision B'Ghiel c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (1998), 45 Imm. L.R. (2d) 198, de Monsieur le juge Hugessen pour affirmer que l'agente des visas a fait un double comptage du facteur de la personnalité et de celui de la profession.


C.       PREUVE FAITE DANS LE CADRE DU PRÉSENT CONTRÔLE JUDICIAIRE

[7]                 La demanderesse et l'agente des visas ont toutes deux déposé des affidavits, mais aucun contre-interrogatoire n'a eu lieu.

[8]                 L'affidavit de la demanderesse insiste sur sa formation scolaire et son expérience de travail : (1) en 1974, elle a obtenu un baccalauréat en administration des affaires avec une majeure en comptabilité et plusieurs cours de spécialisation; (2) elle a travaillé à titre de spécialiste financière au Philippine Invention Development Institute de 1979 à 1983; à titre d'agente de développement des opérations, après avoir débuté comme analyste financière, chez KKK - responsables du centre de traitement relevant du bureau de l'administration du programme national relatif aux conducteurs, de 1983 à 1986, et à titre de chargée de compte et de chef de division III, groupe d'intermédiation financière, à la Livelihood Corporation, société appartenant au gouvernement des Philippines, où elle a agi comme gestionnaire des opérations liées à cinq projets notamment en préparant des études sur la faisabilité de projets et en assurant la mise en oeuvre et la gestion de projets, de 1986 à avril 1996; (3) elle soutient au paragraphe 5 qu'elle aurait dû être appréciée comme directrice financière (CNP 0111).

[9]                 Elle renvoie en outre à une lettre datée du 24 janvier 2001 qu'elle a adressée à l'agente des visas après les entrevues et dans laquelle elle fait à nouveau état de son expérience à titre d'analyste financière.


[10]            Dans son affidavit, l'agente des visas fait valoir ce qui suit :

(1)        Elle confirme ses notes du CAIPS et sa lettre de refus voulant que la demanderesse ne puisse être approuvée comme analyste financière (CNP 1112.0) parce qu'elle n'a pas réussi à la convaincre qu'elle avait exercé les fonctions requises énoncées dans la CNP. La demanderesse n'avait pas recueilli des données financières et de placements touchant les entreprises, les actions et les obligations et autres investissements en consultant les rapports quotidiens sur les actions et les obligations, les prévisions économiques, les volumes d'échanges, etc., ni examiné et analysé de l'information financière et de placement, notamment des profils d'entreprises.

(2)        La demanderesse a convenu avec elle que la description de la profession d'analyste financier qui se trouve dans la CNP et qu'on lui a lue à voix haute ne reflétait pas son expérience.

(3)        Elle a informé la demanderesse du fait qu'elle serait appréciée comme agente de programmes au titre de la CNP 4164.1 et la demanderesse a convenu avec elle que les fonctions qu'elle avait exercées reflétaient celles des agents de programmes, lesquelles englobent la réalisation de recherches et la mise en oeuvre ou l'administration de programmes dans divers domaines, comme le développement international.


(4)        Quant à la question de savoir pourquoi la demanderesse n'a obtenu que 3 points au titre de la personnalité, l'agente des visas signale que la demanderesse a elle-même déclaré qu'elle n'avait fait aucune demande de renseignements au sujet des possibilités d'emploi au Canada dans sa profession envisagée ou dans n'importe quelle autre profession. Elle n'a pu expliquer comment elle tenterait de trouver un emploi; elle se fiait entièrement aux membres de sa famille pour obtenir des renseignements, des fonds et des instructions. L'agente des visas ajoute qu'elle a demandé à la demanderesse comment elle pensait pouvoir utiliser ses compétences au Canada. La demanderesse a répondu qu'elle ne le savait pas et qu'elle était plutôt perdue parce qu'elle ne connaissait rien au marché du travail canadien.

CONCLUSION

[11]            Je ne vois pas comment la Cour peut intervenir dans le cadre de la présente demande de contrôle judiciaire compte tenu des affirmations catégoriques faites par l'agente des visas dans son affidavit, lesquelles n'ont ni été contredites par la demanderesse, ni fait l'objet d'un contre-interrogatoire.


[12]            L'agente des visas a déclaré qu'au cours de l'entrevue, elle et la demanderesse avaient examiné l'expérience de travail de celle-ci dans sa profession désignée d'analyste financière et que la demanderesse avait reconnu que son expérience de travail ne correspondait pas à celle d'un analyste financier selon la CNP.

[13]            En ce qui a trait aux professions de rechange, l'agente des visas a mentionné que la demanderesse était d'accord avec elle sur le fait que la description de la profession d'agente de programmes donnée dans la CNP correspond aux fonctions qu'elle a exercées sur le marché du travail.

[14]            Ces faits fondamentaux sont singuliers et particuliers à la demande de résidence permanente présentée par la demanderesse. À ce titre, ils constituent des circonstances particulières qui permettent de faire une distinction avec les situations visées dans les affaires Khalaque et Moksud, précitées.

[15]            Quant au dernier argument relatif au double comptage fondé sur la décision B'Ghiel, précitée, je conviens avec l'avocate de la défenderesse qu'aucun élément de preuve n'établit un double comptage et que la présente affaire respecte les limites admissibles énoncées par Monsieur le juge Pinard dans la décision Abbasi c. Canada (M.C.I.) (1999), 167 F.T.R. 154.


DISPOSITIF

[16]            Pour toutes ces raisons, la présente demande de contrôle judiciaire est rejetée. Aucune question susceptible de certification n'est soulevée.

                                                                                                                   

                                                                                 « François Lemieux »                  

                                                                                                             Juge                                 

OTTAWA (ONTARIO)

Le 12 septembre 2001

Traduction certifiée conforme

Martine Guay, LL. L.


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

NUMÉRO DU GREFFE :                               IMM-663-01

INTITULÉ DE LA CAUSE :                          MARIA CONCEPCION TARROJA c. Le Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration

LIEU DE L'AUDIENCE :                                Calgary (Alberta)

DATE DE L'AUDIENCE :                              Le 15 août 2001

MOTIFS DE L'ORDONNANCE :              Monsieur le juge Lemieux

DATE DES MOTIFS :                                     Le 12 septembre 2001

COMPARUTIONS:

Richard T. Tumanon                                                          POUR LA DEMANDERESSE

Tracy King                                                                         POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:

Richard T. Tumanon                                                          POUR LA DEMANDERESSE

Calgary (Alberta)

Morris Rosenberg                                                             POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

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