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     Date: 19991105

     Dossier: IMM-6302-98


Ottawa (Ontario), ce 5e jour de novembre 1999

En présence de l'honorable juge Pinard


Entre :

     MOHAMED AZZEDIN TIGHRINE,

     Demandeur

     - et -


     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

     ET DE L'IMMIGRATION,

     Défendeur



     ORDONNANCE


     La demande de contrôle judiciaire est accordée. La décision rendue le 29 septembre 1998, statuant que le demandeur n'est pas un réfugié au sens de la Convention, est cassée et l'affaire est renvoyée devant la Section du statut de réfugié différemment constituée pour nouvelle audition.



                            

                             JUGE




     Date: 19991105

     Dossier: IMM-6302-98


Entre :

     MOHAMED AZZEDIN TIGHRINE,

     Demandeur

     - et -


     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

     ET DE L'IMMIGRATION,

     Défendeur



     MOTIFS DE L'ORDONNANCE


LE JUGE PINARD :

[1]      La demande de contrôle judiciaire vise une décision rendue le 29 septembre 1998 par la Section du statut de réfugié statuant que le demandeur n'est pas un réfugié au sens de la Convention, tel que défini au paragraphe 2(1) de la Loi sur l'immigration.

[2]      Le tribunal a conclu que la preuve n'était pas suffisante pour établir que le demandeur a une crainte bien fondée de persécution en raison d'opinions politiques imputées et ce, pour les raisons suivantes: l'absence de plausibilité et l'absence de crainte subjective de la part du demandeur.

[3]      Tel qu'il appert de l'extrait suivant de la décision, ce sont trois inférences négatives qui ont amené le tribunal à douter de la crédibilité du demandeur et à ne pas croire son histoire:

         . . . Le tribunal a du mal à croire à l'histoire. Tout d'abord, le reven-dicateur allègue avoir été persécuté en 1980, déporté, interné, détenu. Or, il ne pense à quitter qu'en 1993.
             Le tribunal trouve invraisemblable aussi la manière dont le revendicateur a appris que son voisin est arrêté et qu'il cite le nom du revendicateur sous l'effet de la torture. Cet événement, selon le témoignage du revendicateur, se serait passé le 30 mai et comme par hasard, son beau-frère qui normalement habite dans une autre ville se serait trouvé là et aurait, le 31 mai ou le 1er juin, prévenu le revendicateur que son nom a été mentionné et que des autorités policières le recherchaient. Le tribunal trouve déraisonnable les explications reçues du demandeur et ne croit pas aux allégations du demandeur.
             En outre, dans le document au point d'entrée [renvoi omis] et dans le Formulaire de renseignements personnels (FRP) [renvoi omis], les informations concernant l'itinéraire du revendicateur ne correspondent pas complètement. Dans le FRP, le revendicateur ne parle que de trois pays par lesquels il serait passé notamment la Grèce, l'Italie et les États-Unis. Or, dans le document au point d'entrée, le revendicateur mentionne qu'il est aussi passé par la France, l'Allemagne, la Hollande avant d'arriver aux États-Unis et enfin au Canada. Cette autre omission, non expliquée, nous amène à douter de la crédibilité du demandeur.


[4]      Une inférence tirée par semblable tribunal doit être soutenue par la preuve, ce qui n'est pas le cas en regard de deux des trois inférences négatives en question.

[5]      En effet, le tribunal a souligné l'omission de la mention de la France, de l'Allemagne et de la Hollande dans le FRP du demandeur. Or, la preuve démontre que ce dernier n'est jamais allé en Allemagne et n'a fait que transiter par la France et la Hollande. La différence entre la réponse du demandeur sur le FRP et celle sur le document au point d'entrée s'explique simplement par la différence des questions: le FRP demande une énumération des pays où le revendicateur a "résidé" et le document au point d'entrée demande l'itinéraire précis suivi en route vers le Canada.

[6]      Quant à l'inférence négative reliée à "la manière dont le revendicateur a appris que son voisin est arrêté et qu'il cite le nom du revendicateur sous l'effet de la torture", elle n'est pas davantage supportée par la preuve. Au contraire, le revendicateur, dans son témoignage, a expliqué que son beau-frère était un commandant faisant partie de l'appareil policier et que, bien que résidant dans une autre ville, il venait souvent à Alger où il habitait chez sa soeur. Dans les circonstances, je ne vois rien de déraisonnable dans ses explications et rien d'invraisemblable dans la façon dont le demandeur a été prévenu par son beau-frère.

[7]      Ainsi, deux des trois inférences négatives tirées par le tribunal pour écarter le récit du demandeur n'étant pas supportées par la preuve, je considère la décision minée dans sa totalité et me sens donc justifié d'intervenir.

[8]      En conséquence, la demande de contrôle judiciaire est accordée, la décision qu'elle vise est cassée et l'affaire, renvoyée devant la Section du statut de réfugié différemment constituée pour nouvelle audition.


                            

                                     JUGE

OTTAWA (ONTARIO)

Le 5 novembre 1999

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