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                                                                                                                                 Date : 20050505

                                                                                                                    Dossier : IMM-3760-04

                                                                                                                  Référence : 2005 CF 629

ENTRE :

LUZ MILIAN RODRIGUEZ RODRIGUEZ

                                                                                                                                    demanderesse

                                                                             et

                     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                           défendeur

                                                  MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE PHELAN

[1]                La demanderesse sollicite le contrôle judiciaire de la deuxième décision par laquelle la Section de la protection des réfugiés (la SPR) de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la CISR) a refusé de rouvrir sa demande de protection. Il est principalement question en l'espèce du fait que la demanderesse aurait notifié son changement d'adresse à la SPR.


LES FAITS

[2]                La demanderesse, citoyenne du Costa Rica, a déposé une demande d'asile parce qu'elle craignait d'être maltraitée par un partenaire violent et que l'État ne lui offrait pas de protection dans son pays.

[3]                Mme Rodriguez a affirmé avoir télécopié une lettre à la SPR pour l'informer de son troisième changement d'adresse.

[4]                Peu après le dépôt de sa demande d'asile, dans laquelle elle avait indiqué sa première adresse, la demanderesse a déménagé, mais n'a pas informé la SPR de sa nouvelle adresse. Un avis de convocation lui a été envoyé à sa première adresse. La demanderesse ne s'est pas présentée à l'audience, et une procédure de désistement a été engagée.

[5]                Quatre (4) audiences de justification étaient prévues au cours de la procédure de désistement. L'avis de convocation aux deux premières a été envoyé à la demanderesse seulement. L'avis convocation aux deux autres audiences a été envoyé à la demanderesse et à l'avocat qui la représentait à ce moment-là.

[6]                Le 19 novembre 2003, la SPR a déposé un avis de désistement parce que la demanderesse ne s'était pas présentée aux deux dernières audiences.


[7]                La demanderesse a déposé sa première demande de réouverture de la décision relative au désistement rendue par la SPR en y joignant ce qu'elle disait être la lettre envoyée par télécopieur à la SPR pour l'informer de son troisième changement d'adresse. La SPR n'a jamais reçu ce document.                

[8]                La SPR a confirmé que les avis pertinents ont été envoyés à la première adresse, la seule qui figurait au dossier. La commissaire a fait remarquer qu'aucun de ces avis n'avait été renvoyé par Postes Canada parce que non distribuable à l'adresse indiquée. Elle a donc estimé qu'il n'y avait pas eu manquement à la justice naturelle et a rejeté la demande de réouverture. La commissaire était celle qui avait signé la décision relative au désistement.

[9]                La demanderesse a ensuite déposé une deuxième demande de réouverture, accompagnée d'un affidavit signé par elle et de plusieurs pièces. L'une de ces pièces était une feuille d'envoi par télécopieur adressée à un numéro de télécopieur de la Commission, mais il n'y avait aucune autre précision quant à ce qui avait été télécopié ni par qui il l'avait été.

[10]            La même commissaire a rejeté cette deuxième demande de réouverture. Elle a fait remarquer que les avis de convocation ont été envoyés à la demanderesse et à son avocat, qui ne se sont pas présentés aux audiences prévues. Elle a rappelé les éléments de preuve produits dans le cadre de la première demande de réouverture.


[11]            La commissaire a ajouté qu'il ne s'agissait pas de nouveaux éléments de preuve ou arguments sur le fond, que la demanderesse affirmait avoir perdu la lettre qu'elle avait envoyée à la SPR, que le télécopieur qu'elle avait utilisé était vieux et que la date indiquée sur la feuille de réception de la transmission par télécopieur était erronée. La commissaire a rappelé que rien dans le système de gestion des cas de la Commission ne permettait de confirmer la réception de la lettre télécopiée. Compte tenu de tous ces éléments, la commissaire a dit :

[traduction] J'estime, compte tenu de la preuve et de la prépondérance des probabilités, que la demanderesse ment lorsqu'elle prétend avoir informé la CISR de sa nouvelle adresse en juillet 2003.

[12]            La demanderesse n'a pas du tout apprécié cette conclusion et elle a contesté la décision en affirmant qu'elle dénotait la partialité ou suscitait une crainte raisonnable de partialité.

MOTIFS

[13]            Les dispositions applicables sont énoncées à l'article 55 des Règles de la Section de la protection des réfugiés.


55. (1) Le demandeur d'asile ou le ministre peut demander à la Section de rouvrir toute demande d'asile qui a fait l'objet d'une décision ou d'un désistement.

[...]

(4) La Section accueille la demande sur preuve du manquement à un principe de justice naturelle.

55. (1) A claimant or the Minister may make an application to the Division to reopen a claim for refugee protection that has been decided or abandoned.

...

(4) The Division must allow the applicant if it is established that there was a failure to observe a principle of natural justice.



[14]            La demanderesse a bénéficié, dans ses rapports avec la Commission, de plus de chances d'agir que n'en ont la plupart des demandeurs. Quatre avis de convocation lui ont été envoyés, dont deux l'ont également été à son avocat; pourtant, même l'avocat ne s'est pas présenté à l'audience. La demanderesse a également pu déposer deux demandes de réouverture, alors qu'elle n'avait droit qu'à une seule. À mon avis, la commissaire aurait pu rejeter la deuxième demande à titre de res judicata et elle aurait été justifiée de le faire.

[15]            La même commissaire a statué sur les deux demandes de réouverture et a signé la décision relative au désistement, mais cela ne constitue pas, en soi, un motif légitime de contester ces décisions. L'arrêt Arthur c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1993] 1 C.F. 94, a confirmé que le seul fait qu'une seconde audience soit tenue devant le même arbitre ne suscite pas, à lui seul, de crainte raisonnable de partialité.

[16]            La signature de la commissaire au bas de la décision relative au désistement est un acte purement administratif qui confirme le fait objectif que ni la demanderesse ni son avocat ne se sont présentés aux dates convenues pour les audiences.

[17]            Rien n'a été dit ou fait dans le cadre de la première demande de réouverture qui empêcherait la commissaire d'entendre la deuxième demande.


[18]            La deuxième demande de réouverture, tout comme la première, porte uniquement sur la question de savoir s'il y a eu manquement à la justice naturelle dans la décision relative au désistement. L'état de santé et les difficultés psychologiques allégués par la demanderesse, dont elle n'a jamais informé la SPR, n'auraient, de toute façon, rien à voir avec la justice naturelle.

[19]            La demanderesse a déposé un affidavit dans lequel elle a affirmé qu'elle avait envoyé une lettre (dont elle n'a pas produit de copie) en utilisant un télécopieur qui avait imprimé une date de transmission erronée. Autrement dit, ce dont la commissaire a été saisie est une simple affirmation, que rien ne vient étayer, au sujet du dépôt d'une lettre. Par contre, tous les autres éléments de preuve donnent à penser que l'intéressée s'est désistée de sa demande d'asile.

[20]            C'est dans ce contexte que la commissaire a tiré une conclusion défavorable à la demanderesse en ce qui a trait à la crédibilité. Il était loisible à la commissaire de tirer une telle conclusion compte tenu de l'ensemble des faits. Il n'y a aucune preuve de partialité pas plus, selon moi, qu'il n'y a de motif valable de croire qu'en raison du fait que la commissaire avait déjà traité ce cas, ses actes ou sa décision ont suscité une crainte raisonnable de partialité.

[21]            Quant à la conclusion de la commissaire qu'il n'y a pas eu manquement à la justice naturelle, la Cour est d'avis qu'elle était correcte.

[22]            La présente demande de contrôle judiciaire sera donc rejetée.


[23]            Il n'y a pas de question à certifier.

              « Michael L. Phelan »            

Juge

Traduction certifiée conforme :

Suzanne Bolduc, LL.B.

                                                                                                                                                           


                                                             COUR FÉDÉRALE

                                                        Avocats inscrits au dossier

DOSSIER :                                                     IMM-3760-04

INTITULÉ :                                                    LUZ MILLIAN RODRIGUEZ RODRIGUEZ

                                                                                                                                       demanderesse

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION                            défendeur

LIEU DE L'AUDIENCE :                              TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :                            LE MARDI 26 AVRIL 2005   

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                                    LE JUGE PHELAN

DATE DES MOTIFS :                                   LE 5 MAI 2005

COMPARUTIONS :                                     

Jeffrey L. Goldman                                            POUR LA DEMANDERESSE

Janet K. Chisholm                                             POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :      

Jeffrey L. Goldman                                            POUR LA DEMANDERESSE

Avocat

425, av. University

Bureau 500

Toronto (Ontario)

M5G 1T6

John H. Sims, c.r.                                              POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada


COUR FÉDÉRALE

                                                         Date : 20050426

                    Dossier : IMM-3760-04

ENTRE :

LUZ MILLIAN RODRIGUEZ RODRIGUEZ

                                                            demanderesse

- et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

                                                                   défendeur

                                                      

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE

                                                       


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