Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision



Date : 19991115


Dossier : IMM-5860-98


ENTRE :


HONG UNG CHAE


demandeur


- et -


LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION


défendeur


MOTIFS DE L'ORDONNANCE


LE JUGE NADON


[1]      Le demandeur, un citoyen de la Corée, cherche à faire annuler la décision en date du 14 octobre 1998 par laquelle l'agente des visas, Julie Stock, a rejeté sa demande de résidence permanente.


[2]      Comme l'affirme le défendeur dans son exposé des faits et du droit, la seule question litigieuse soulevée en l'espèce est de savoir si l'agente des visas a commis une erreur de droit en ne considérant pas l'expérience que le demandeur a acquise avant d'obtenir le niveau d'instruction requis pour exercer la profession d'agent du personnel, conformément à la Classification nationale des professions (CNP).


[3]      Le demandeur a demandé la résidence permanente au Canada dans la catégorie des travailleurs compétents indépendants prévue dans la Loi et le Règlement sur l'immigration, à titre d'agent du personnel et recruteur (CNP 1223). Les fonctions principales d'un agent du personnel et recruteur et les conditions d'accès à cette profession sont expliquées comme suit dans la CNP :


Fonctions principales


Les agents du personnel et les recruteurs remplissent une partie ou l'ensemble des fonctions suivantes :


.      déterminer les vacances actuelles et éventuelles, afficher les avis et les annonces et recueillir et passer au crible les demandes d'emploi;
.      informer les postulants des critères d'emploi;
.      examiner les répertoires des candidats et communiquer avec les candidats éventuels pour fixer une date d'entrevue;
.      recruter des diplômés de collèges, d'universités et autres établissements d'enseignement;
.      coordonner les activités des comités d'examen ou de sélection et faire partie de ces comités;
.      informer les candidats des résultats des concours;
.      renseigner les cadres et les employés sur les politiques et les procédures de dotation;
.      superviser, au besoin, les commis du service du personnel chargés du classement, de la dactylographie et de la tenue des dossiers.

Conditions d'accès à la profession


.      Un diplôme d'études universitaires ou collégiales dans un domaine relié à la gestion du personnel tel que l'administration des affaires, les relations industrielles, le commerce ou la psychologie
     ou
     un programme de perfectionnement professionnel en gestion du personnel sont habituellement exigés.

.      Une certaine expérience dans un poste administratif ou de travail de bureau relié à l'administration peut être exigé.



[4]      Le demandeur a obtenu un diplôme en administration publique de la Korea National Open University en février 1998. Il satisfait donc aux exigences scolaires relatives à la profession qu'il envisage d'exercer au Canada. En conséquence, la seule question à trancher est de savoir si l'agente des visas aurait dû examiner l'expérience qu'a acquise le demandeur avant l'obtention de son diplôme.


[5]      En l'espèce, l'agente des visas était d'avis que toute l'expérience acquise par le demandeur avant l'obtention de son diplôme ne comptait pas. Au paragraphe 7 de son affidavit, elle affirme :


         [TRADUCTION]                 
         Comme je l'ai indiqué dans les notes CAIPS (page 3 du dossier de la Cour), le demandeur a affirmé dans sa demande qu'il avait obtenu un diplôme universitaire en février 1998, ce qui signifie qu'il exerce depuis moins d'un an, avec son diplôme universitaire, la profession qu'il envisage d'exercer au Canada. Je n'accorde aucun point d'appréciation au titre du facteur de l'expérience.                 


[6]      À mon avis, l'agente des visas a commis une erreur en tirant cette conclusion. Aux paragraphes 15 et 16 de son exposé des faits et du droit, l'avocat du demandeur fait valoir les arguments suivants :

        

         [TRADUCTION]                                                          
         L'agente des visas a par erreur présumé que la seule expérience de travail pertinente est celle que le demandeur a acquise après avoir satisfait aux exigences scolaires de la CNP. Cette présomption n'a aucun fondement ni en droit ni en principe. Le niveau d'instruction qu'un agent du personnel doit posséder aux termes de la CNP indique que, dans la plupart des cas, les membres de cette profession dans la population active canadienne possèdent un niveau d'instruction particulier (un baccalauréat). Même au Canada, il se peut que les agents du personnel n'aient pas tous ce niveau de scolarité. Cela reflète le fait qu'il y a toutes sortes de personnes dans la population active canadienne; certaines d'entre elles y sont entrées récemment et d'autres travaillent depuis 20 ou 30 ans (quand les exigences scolaires pouvaient être moins élevées). Le ministère de l'Immigration a décidé que cette formation constituait une norme minimale pour entrer au Canada.                 

         La CNP est silencieuse quant au niveau de scolarité nécessaire pour exercer une profession particulière dans d'autres pays. Cela peut uniquement être déterminé eu égard aux conditions locales. Pour déterminer si l'expérience de travail d'un demandeur donné dans son propre pays satisfait aux exigences de la CNP, il faut comparer l'expérience de travail alléguée avec les « fonctions principales » énoncées dans la CNP. Rien ne prouve que l'agente des visas a effectué l'une ou l'autre de ces évaluations. Il s'agit d'une erreur.                 



[7]      Je suis d'accord avec les observations de l'avocat selon lesquelles le point de vue adopté par l'agente des visas n'a aucun fondement. Ayant décidé que le demandeur satisfaisait aux exigences d'emploi, l'agente des visas aurait dû ensuite examiner l'expérience du demandeur. Comme elle ne l'a pas fait, sa décision doit être annulée. L'affaire sera donc renvoyée à un autre agent des visas afin qu'il rende une nouvelle décision conformément aux présents motifs.


[8]      En terminant, je devrais ajouter que j'ai examiné attentivement l'affidavit de l'agente des visas daté du 17 février 1999 et, en particulier, le paragraphe 5 de celui-ci, qui se lit comme suit :


         [TRADUCTION]                                                          
         J'ai examiné la demande de résidence permanente et noté que M. Chae envisage d'exercer la profession d'agent du personnel et recruteur. Je me suis référée à la Classification nationale des professions (CNP) et j'ai examiné les « Fonctions principales » et les « Conditions d'accès à la profession » . J'ai noté que M. Chae avait une lettre d'emploi de la caserne de pompiers Jongro ( « une copie de celle-ci se trouve à la page 11 du dossier de la Cour » ) indiquant qu'il occupait un poste et un niveau d' « employé auprès de la section locale de lutte contre les incendies » depuis le 25 octobre 1982, soit depuis 15 ans et 11 mois. Sa profession n'était pas précisée dans son livret de travail. Dans sa demande, il est indiqué qu'il a commencé à travailler en 1982 pour la caserne de pompiers. Il était absolument impossible de vérifier s'il avait exercé les fonctions principales de la profession envisagée étant donné qu'aucun curriculum vitae ou liste de responsabilités n'accompagnait la demande.                 


[9]      Tel qu'il ressort clairement de ce qui précède, l'agente des visas était d'avis qu'elle ne pouvait pas vérifier si le demandeur avait exercé les fonctions principales de la profession envisagée. L'avocat du défendeur a essayé de soulever cette question devant moi, mais je ne lui ai pas permis de le faire parce que le défendeur n'avait pas soulevé la question dans son exposé des faits et du droit. De toute évidence, quand un autre agent des visas sera saisi de l'affaire, celui-ci vérifiera et devrait vérifier si l'expérience que le demandeur prétend avoir acquise constitue en fait une expérience pertinente quant à la profession qu'il envisage d'exercer au Canada.


[10]      Pour ces motifs, la présente demande de contrôle judiciaire est accueillie.



                                     (s.) « M. Nadon »
                                         Juge

Le 15 novembre1999

Vancouver (Colombie-Britannique)


Traduction certifiée conforme



Julie Boulanger, LL.M.

COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE L'IMMIGRATION


AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER



NO DU GREFFE :              IMM-5860-98

INTITULÉ DE LA CAUSE :      Hong Ung Chae
                     - c -
                     MCI

LIEU DE L'AUDIENCE :          Vancouver (Colombie-Britannique)

DATE DE L'AUDIENCE :          le 12 novembre 1999

MOTIFS DE L'ORDONNANCE :      le juge Nadon

DATE DES MOTIFS :          le 15 novembre 1999


ONT COMPARU :


M. Alex Dantzer                          pour le demandeur

M. Garth Smith                          pour le défendeur


AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :


H.A. Dantzer

Avocat

Vancouver (C.-B.)                          pour le demandeur

Morris Rosenberg

Sous-procureur

général du Canada                          pour le défendeur
 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.