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                                                                                                                      Date : 20050331

                                                                                                           Dossier : IMM-4720-04

                                                                                                         Référence : 2005 CF 432

ENTRE :

                                             PONNIAH SIVAGURUNATHAN

                                       THEVARATNAM SIVAGURUNATHAN

                                                                                                                              demandeurs

                                                                       et

                   LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                 défendeur

                          MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

LE JUGE EN CHEF LUTFY

[1]                Les demandeurs Ponniah Sivagurunathan et Thevaratnam Sivagurunathan sont mari et femme. Ils sont tous les deux âgés d'un peu plus de soixante-dix ans et ils sont des citoyens tamouls du Sri Lanka. Pendant plus d'une vingtaine d'années, Ponniah Sivagurunathan a servi au sein de l'armée de l'air de son pays. En 1975, il a terminé son service avec le rang de sergent. Depuis une trentaine d'années, ce couple craint d'être harcelé par les autorités gouvernementales et par des militants tamouls dans le cadre de la guerre civile qui fait rage au Sri Lanka.

[2]                Les Sivagurunathans revendiquent le statut de réfugiés au sens de la Convention principalement en tant que victimes d'extorsion. Le 20 février 2003, les Tigres de libération de l'Eelam tamoul ont réclamé 100 000 roupies aux demandeurs mais se sont contentés de la moitié. Au moment des faits, M. Sivagurunathan était, selon ses dires, un pensionné.

[3]                En juillet 2003, les demandeurs sont entrés au Canada munis de visas pour visiter leur fille. Peu de temps après, ils ont présenté une demande d'asile.

[4]                La Section de protection des réfugiés a qualifié le témoignage de M. Sivagurunathan de franc et de sincère et a ajouté que son histoire ne semblait pas avoir été embellie ou comporter d'incohérences. Le tribunal a toutefois estimé que la crainte de persécution des demandeurs n'était pas fondée :

Les demandeurs ne sont pas de jeunes Tamouls. Personne ne les considère comme étant des activistes. Ils ne sont pas considérés comme étant liés aux terroristes tamouls. Il incombait au demandeur de démontrer qu'il ferait face à des demandes continues qui constitueraient de la persécution. Le tribunal considère que la crainte de persécution des demandeurs d'asile n'est pas fondée.

Le tribunal a examiné les trois motifs de protection conformément à l'article 96 et au paragraphe 97(1) de la Loi et conclut qu'il n'y a aucune possibilité sérieuse que les demandeurs d'asile subissent un préjudice au Sri Lanka, sans égard au fait que le prétendu préjudice puisse équivaloir à de la persécution, à une menace à la vie, au risque de traitements ou peines cruels et inusités ou au risque d'être soumis à la torture.                                                                [Non souligné dans l'original.]

L'avocat a signalé en passant la similitude qui existe entre la formulation utilisée par le tribunal et les mots employés par la juge Simpson dans une autre affaire d'extorsion sri-lankaise : Krishnapillai c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1996] A.C.F. 1024 (C.F. 1re inst.) (QL) au paragraphe 9.


[5]    En réponse au premier moyen invoqué par les demandeurs dans la présente demande de contrôle judiciaire de la décision défavorable de la Section de la protection des réfugiés, je ne suis pas persuadé que l'emploi par le tribunal du conditionnel dans l'extrait cité au paragraphe précédent permette de penser qu'il s'est mépris sur le critère juridique applicable. À mon avis, si on lit l'extrait dans son ensemble, on constate que le tribunal décrivait le genre de « demandes continues » dont les demandeurs devaient faire la preuve et non le fardeau de preuve qui leur incombait (Nilani c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2004 CF 1041, au paragraphe 7). Le second paragraphe de l'extrait démontre que le tribunal a bien compris que le critère minimal était celui de la « possibilité sérieuse » de persécution.

[6]    De même, le dossier permettait au tribunal de conclure que les L.T.E.E. infligeaient des sanctions équivalant à de la persécution aux pensionnés qui refusent de se plier aux exigences de ceux qui cherchent à leur extorquer de l'argent. Les demandeurs ont vécu au Sri Lanka pendant sept mois après l'extorsion de février 2003. Personne n'a laissé entendre qu'on avait de nouveau tenté de leur extorquer de l'argent après ce premier incident. L'avocat des demandeurs soutient que le tribunal n'a tenu aucun compte d'éléments de preuve documentaire. J'ai examiné les passages invoqués par l'avocat et je suis convaincu qu'on peut aisément établir une distinction avec la situation des demandeurs en l'espèce.

[7]    Les faits entourant les cas d'extorsion dans les affaires Vygthilingham c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2004 CF 796, Packiam c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2004 CF 649 et Nadarajah c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2004 CF 500, diffèrent de ceux de la présente instance. Malgré ces précédents, il était loisible au tribunal en l'espèce de rendre sa décision défavorable au vu du dossier dont il disposait.

[8]    Enfin, les demandeurs soutiennent que, si le tribunal n'a pas commis d'erreur justifiant l'infirmation de sa décision dans son analyse de l'article 96, la Cour devrait quand même intervenir compte tenu du défaut du tribunal d'analyser à fond les demandes à la lumière de l'article 97. Je ne suis pas de cet avis. Vu les faits de la présente affaire, il était loisible au tribunal de trancher comme il l'a fait les questions relatives à l'article 97.

[9]    Pour rejeter la présente demande de contrôle judiciaire, je signale qu'aucun des trois enfants des demandeurs ne vit au Sri Lanka et que les demandeurs ont une fille qui vit au Canada. Il se peut fort bien que le défendeur veuille déterminer le statut final des demandeurs au Canada sur le fondement de raisons d'ordre humanitaire.

[10]                        Aucune des parties n'a suggéré la certification d'une question grave de portée générale dans la présente instance. Aucune ne sera donc certifiée.

                                                     


                                   O R D O N N A N C E

La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

« Allan Lutfy »

                                            

       Juge

OTTAWA

Traduction certifiée conforme

Richard Jacques, LL.L.


                                     COUR FÉDÉRALE

                      AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                IMM-4720-04

INTITULÉ :

PONNIAH SIVAGURUNATHAN

THEVARATNAM SIVAGURUNATHAN

                                                                                          demandeurs

                                                     et

MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                             défendeur

LIEU DE L'AUDIENCE :                              TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :                            LE 24 MARS 2005

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE:                                   LE JUGE EN CHEF

DATE DES MOTIFS :                                   LE 31 MARS 2005

COMPARUTIONS:

Michael Crane                                                   POUR LES DEMANDEURS

Stephen H. Gold                                                POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:

Michael Crane

Avocat

Toronto (Ontario)                                              POUR LES DEMANDEURS

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada                    POUR LE DÉFENDEUR


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