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Date: 20010306


Dossier: IMM-424-00


Référence neutre: 2001 CFPI 144



ENTRE:

     PHUNG SAM BUI

     Demandeur

     - et -

     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

     ET DE L'IMMIGRATION

     Défendeur


     MOTIFS D'ORDONNANCE


LE JUGE LEMIEUX


A.      INTRODUCTION

[1]      Par cette demande de contrôle judiciaire, Pung Sam Bui, ( ci-après le « demandeur » ) résident permanent du Canada depuis le 24 avril 1993, recherche l'annulation de la décision de la Section d'appel de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (ci-après le « tribunal » ) en date du 10 janvier 2000, qui rejetait, pour défaut de compétence, l'appel interjeté par celui-ci en vertu de l'article 77 de la Loi sur l'immigration ( ci-après la « Loi » ) à l'encontre du refus en date du 30 décembre 1998 par Nipha Kietniyom du Consulat canadien à Bangkok (ci-après « l'agent d'immigration » ) d'homologuer la demande parrainée d'établissement de son épouse.
B.      LES FAITS
[2]      Le 4 janvier 1997, lors d'un voyage au Vietnam, son pays d'origine, le demandeur fait la connaissance de Mlle Pham Thi My Duyen alors âgée de 21 ans. Le 27 janvier, 1997, ils se marient selon les traditions vietnamiennes. Le 12 février 1997, le demandeur retourne au Canada afin de poursuivre son travail.
[3]      Par la suite, le demandeur visite son épouse au Vietnam du 20 juin 1997 au 11 août 1997. Le 15 septembre 1997, il dépose une demande de parrainage d'un parent pour son épouse.
[4]      Cette dernière est convoquée à Ho Chi Mihn City, Vietnam, pour une entrevue avec l'agent d'immigration, ce qui a lieu le 10 décembre 1998.

[5]      Le demandeur visite son épouse au Vietnam du 12 décembre au 26 février 1999 et c'est durant cette période que leur fils est conçu. Son épouse donne naissance le 29 septembre 1999.
[6]      Par une lettre en date du 30 décembre 1998, l'épouse apprend que sa demande de parrainage est refusée. L'agent d'immigration énonce les motifs suivants:
After a thorough review of the documents that you submitted in support of your application and the information that you provided at interview, I have determined that you have married primarily for the purpose of immigrating to Canada and not with the intention of residing permanently with your sponsor.
You stated on the questionnaire form that you were introduced to your sponsor by his sister. On the contrary, you told me at the interview that you met him when he came to your barber shop.
You said that you never knew your sponsor before you met him on 4 January 1997 when he came to your barber shop. You claimed that even though you did not go out much because you were busy working, you decided to marry him a few days later for the simple reason that you liked the way he talked.
During the interview, I asked when he proposed for marriage, you stopped to think but you still could not remember the date. You also did not remember the date of his departure after you were married.
Your sponsor claimed that forty calls were made within four months but only four calls were made to you as shown on the telephone bills. You stated on the questionnaire form that you often communicated by letters and telephones but there were only five letters (four written in 1997 and one in 1998). The telephone bills presented were not in the sponsor's name nor his mother's with whom he is residing. You claimed that telephone number belonged to the sponsor's brother. Yet since this brother has moved out, telephone bills were still not in the sponsor's name nor in his mother's.
You also stated on the questionnaire form that you went outing together but you did not have sufficient supporting photos as proof either before or after the marriage. Although you presented some wedding pictures, there were too few of them to show that the real marriage ceremony took place. You provided me with a contradictory story. I am not convinced there is a bona fide relationship between you and your sponsor. [je souligne]
[7]      Cette décision est communiquée au demandeur par l'entremise d'une lettre en date du 4 février 1999, dans laquelle l'agent d'immigration lui fait part de son droit d'appel prévu en vertu du paragraphe 77(3) de la Loi.
[8]      Le demandeur fait appel au tribunal. Le tribunal maintient la décision de l'agent d'immigration et s'appuit sur les conclusions suivantes:
     Le 4 janvier 1997, lors d'un voyage au Vietnam, son pays d'origine, l'appelant s'est rendu chez le coiffeur, accompagné de sa soeur. C'est là qu'il a rencontré la requérante qui y travaillait en qualité de coiffeuse.
     Le 9 janvier l'appelant rencontre de nouveau la requérante et le lendemain il demande à sa soeur (à lui) de faire les démarches nécessaires auprès de la grand-mère de la requérante pour obtenir sa main.
     Le 27 janvier le mariage est célébré selon les traditions vietnamiennes alors que l'appelant se rend chez la requérante pour la cérémonie de « l'accueil » et la cérémonie devant l'autel des ancêtres puis le cortège se rend chez le « grand-frère » de l'appelant où une fête a lieu en compagnie de plus ou moins 200 personnes.
     Le 12 février 1997 l'appelant est revenu au Canada. Depuis il est retourné visiter son épouse au Vietnam en juin 1997 et en décembre 1998.
     Un fils, Bui Duy Tan, est né de cette union le 28 septembre 1999 et l'appelant a planifié retourner retrouver sa famille pour Noël 1999.

     . . .

     Lorsque contre-interrogé par le représentant du ministre, l'appelant a quelque peu modifié sa version des faits.
     Ainsi ce ne serait pas le 10 janvier mais le 5 janvier 1997, le lendemain de son arrivée, qu'il aurait demandé à sa grande soeur de faire les démarches pour obtenir la main de la requérante et ce serait le 9 janvier que sa grande soeur se serait rendue chez la grand-mère adoptive de la requérante pour s'enquérir des possibilités de mariage.
     De plus ce serait le soir même de son arrivée au Vietnam, le 4 janvier 1997, après avoir fait la connaissance de la requérante à son salon de coiffure, que l'appelant se serait rendu chez la grand-mère de la requérante où il aurait fait plus ample connaissance (conversé) pendant deux heures et non le 9 janvier tel qu'il l'avait déclaré plus tôt dans son témoignage.

     ...

     La requérante, lors de son entrevue avec l'agente des visas le 10 décembre 1998, n'a fait aucune mention de la présence de la grande soeur de l'appelant le 4 janvier 1997 ni de sa conversation d'une durée de deux heures chez sa grand-mère le même soir et encore moins de l'intervention de la grande soeur de l'appelant dans la demande de mariage. La requérante déclare seulement avoir connu l'appelant le 4 janvier au salon de barbier qu'elle possède, ne pas être sortie beaucoup avec lui parce qu'elle devait travailler et elle précise que c'est lui, l'appelant, qui a proposé le mariage le 7 janvier, alors que la mère de l'appelant serait intervenue pour « arranger » le mariage.
     Le témoignage de l'appelant quant au mariage même fut plus que laborieux. Ainsi il a d'abord évalué le nombre d'invités à quelques 200 personnes et il a précisé que plus de 200 photographies avaient alors été prises et quelques vidéos. Puis le nombre d'invités a été modifié de 200 à 100 puis d'un nombre entre 100 et 200, de 100 à 110 personnes et finalement à plus ou moins 150 convives. La requérante a déclaré que le mariage lui-même (formal marriage) avait eu lieu chez elle alors que l'appelant a dit que le mariage s'était déroulé chez son grand-frère et que la cérémonie de l'accueil et celle devant l'autel des ancêtres avaient eu lieu chez la requérante.
     Curieusement la requérante, dans une lettre qu'elle a adressée à la « Canadian High Commission » en date du 21 décembre 1998, soit après son entrevue avec l'agente des visas, déclare avoir été présentée à l'appelant par sa soeur (à lui) et que la cérémonie de leur mariage a été célébrée en présence de 70 personnes chez son conjoint.
     Il est évident pour le tribunal que cette lettre post-entrevue est une tentative de corriger les déclarations antérieures de la requérante pour les rendre plus conformes à celles de l'appelant, contenues et/ou accompagnant ses procédures de parrainage.
     Finalement la preuve documentaire présentée par l'appelant à l'audition de son appel ne vient pas combler les lacunes de celle présentée à l'agente des visas. Certaines lettres qui lui ont été remises ou transmises ne portaient pas de dates, certaines enveloppes étaient vides et une lettre était datée de 1989, bien que la relation entre l'appelant et la requérante n'existait que depuis janvier 1997.
     Or les lettres produites par l'appelant constituent, à toutes fins pratiques, un flot de reproches et de récriminations de la part de la requérante à l'égard de l'appelant.
     La lettre A-2 est datée du 5 juillet 1998 et est adressée par la requérante à l'appelant. Or la preuve établit que l'appelant était au Vietnam du 2 juillet 1998 au 11 août 1998. L'appelant n'a même pas tenté d'expliquer cette coïncidence pour le moins improbable voire irrationnelle.
     Quant aux photos du mariage, celles produites à l'agente des visas n'ont pas réussi à la convaincre de la bonne foi du mariage. Il en est ainsi des photos présentées à l'audition de l'appel par l'appelant. [je souligne]
     Les comptes téléphoniques présentés par l'appelant ne démontrent aucun lien entre le propriétaire du numéro de téléphone (514) 272-7107 et l'appelant qui, le 15 septembre 1997, déclarait que son numéro de téléphone était le (514) 270-8157 à la maison et le (514) 495-3546 au travail
     L'appelant avait le fardeau de prouver que la requérante n'est pas une personne visée à l'article 4(3) du Règlement. Non seulement n'a-t-il pas expliqué sur une balance des probabilités les contradictions et/ou incohérences soulevées par l'agente des visas mais encore sa version des faits n'a que contribué à semer encore plus de confusion et de contradictions.
     La requérante s'est contredite lorsque l'on compare la version des faits qu'elle a donnée à l'agente des visas le 10 décembre 1998 et la lettre qu'elle a envoyée à la « Canadian High Commission » le 21 décembre 1998. L'appelant, sans avoir justifié ou expliqué ces contradictions et/ou incohérences, s'est lui-même contredit à l'occasion et il a également infirmé la première version des faits de la requérante.
     Il est clair pour le tribunal que tant la requérante que l'appelant ont tenté de tomper l'agente des visas et que l'appelant a essayé de le leurrer (le tribunal). Les deux ne sont ni crédibles, ni dignes de foi.
     La preuve ne permet pas au tribunal de conclure à ce que la requérante avait l'intention de demeurer en permanence avec son conjoint.
     L'appel est rejeté pour défaut de compétence. [je souligne]

M. Bui visite son épouse au Vietnam du 12 décembre 1998 au 26 février 1999 et c'est durant cette période que leur fils est conçu. Son épouse donne naissance le 29 septembre 1999.

[9]      C'est de cette décision que le demandeur réclame le contrôle judiciaire.

C. LÉGISLATION


[10]      Dans son affidavit au soutien de sa demande de contrôle judiciaire, M. Bui affirme:22. Le tribunal a déclaré que j'avais tenté de tromper l'agente des visas;23. Pourtant le seul document que j'ai reçu de l'agent des visas ce fût la décision négative;24. Je n'ai eu de communication personnelle ni aucun contact direct avec elle avant cette décision;25. Bien que j'aie pu me tromper je n'ai nullement essayé de leurrer le tribunal26. Je me suis marié de bonne foi et ce mariage est authentique et fait selon la loi et les coutumes de mon pays;27. J'ai eu des relations de conjoint avec mon épouse dès notre mariage qui a été célébré le 27 janvier 1997;28. Un enfant est né de notre union le 28 septembre 1999 suite au voyage que j'ai effectué au Vietnam du 12 décembre 1998 au 26 février 1999;29. J'ai déposé une preuve de naissance quant à cette naissance;30. Aucune preuve ne m'a été présentée laissant croire que ma femme n'avait pas l'intention de vivre avec moi;31. Au contraire l'ensemble des lettres qu'elle m'a envoyées montrent qu'elle se préoccupe de ma santé et qu'elle est contente que j'aie surpassé mon problème de tabac et d'alcool;32. J'ai exprimé au tribunal que ses récriminations étaient faites dans mon bien et qu'elles étaient normales dans le contexte vietnamien;Les dispositions pertinentes sont les suivantes. L'article 77 de la Loi se lit en partie comme suit:

77. (1) L'agent d'immigration ou l'agent des visas, selon le cas, peut rejeter une demande parrainée d'établissement présentée par un parent pour l'un ou l'autre des motifs suivants -- dont doit être alors informé le répondant_:

a) le répondant ne remplit pas les conditions fixées par les règlements;

b) le parent ne remplit pas les conditions fixées par la présente loi et ses règlements.

     . . .

77(3) Appel interjeté par un répondant

(3) S'il est citoyen canadien ou résident permanent, le répondant peut, sous réserve des paragraphes (3.01) et (3.1), en appeler devant la section d'appel en invoquant les moyens suivants_:

a) question de droit, de fait ou mixte;

b) raisons d'ordre humanitaire justifiant l'octroi d'une mesure spéciale. [je souligne]



77. (1) Where a person has sponsored an application for landing made by a member of the family class, an immigration officer or a visa officer, as the case may be, may refuse to approve the application on the grounds that

(a) the person who sponsored the application does not meet the requirements of the regulations respecting persons who sponsor applications for landing, or

(b) the member of the family class does not meet the requirements of this Act or the regulations,

and the person who sponsored the application shall be informed of the reasons for the refusal.

     . . .

77(3) Appeals by sponsors

(3) Subject to subsections (3.01) and (3.1), a Canadian citizen or permanent resident who has sponsored an application for landing that is refused pursuant to subsection (1) may appeal to the Appeal Division on either or both of the following grounds:

(a) on any ground of appeal that involves a question of law or fact, or mixed law and fact; and

(b) on the ground that there exist compassionate or humanitarian considerations that warrant the granting of special relief.

[11]      Le paragraphe 4(3) du Règlement sur l'immigration, 1978 (ci-après le « Règlement » ) se lit comme suit:

(3) La catégorie des parents ne comprend pas le conjoint qui s'est marié principalement dans le but d'obtenir l'admission au Canada à titre de parent et non dans l'intention de vivre en permanence avec son conjoint.

    

(3) The family class does not include a spouse who entered into the marriage primarily for the purpose of gaining admission to Canada as a member of the family class and not with the intention of residing permanently with the other spouse.

D.      LES MOTIFS DE CASSATION INVOQUÉS PAR LE DEMANDEUR
[12]      Le demandeur plaide que le tribunal s'est mépris sur le fardeau qu'il devait rencontrer en l'obligeant à faire une preuve inverse. Sur ce premier point, le demandeur prétend que la Loi n'exige pas de faire une preuve inverse. Plutôt, la Loi stipule uniquement que l'appel peut être accueilli sur une question de droit, de fait, ou une question mixte et que si l'appel est accueilli, alors le ministre fait poursuivre l'examen de la demande par un agent d'immigration qui déterminera s'il est établi que le répondant et le parent satisfont aux exigences de la Loi. Le demandeur soutient qu'en exigeant qu'il fasse preuve que la requérante n'est pas visée par le paragraphe 4(3) du Règlement, le tribunal fait peser sur lui un fardeau plus important que celui prévu à la Loi. L'absence de son épouse devant le tribunal le met dans une situation impossible car il ne peut répondre aux questions du tribunal sur le déroulement de l'entrevue entre l'agent et son épouse à Ho Chi Mihn City.
[13]      Deuxièmement, il plaide un manquement à l'équité procédurale en ce qui a trait à la conclusion du tribunal que les photos présentées à l'audition de l'appel n'étaient pas convaincantes d'un mariage de bonne foi.
[14]      Le demandeur prétend que ces remontrances du tribunal sont injustes puisque lui-même, durant l'audience, avait offert au tribunal de produire des photos additionnelles et un vidéo démontrant bien qu'une cérémonie de mariage a eu lieu le 27 janvier 1997, mais que le tribunal a refusé cette preuve additionnelle.
[15]      Le demandeur prétend de plus, que le tribunal a mal interprété la preuve sur un point majeur minant à sa crédibilité. Il se réfère au fait que le tribunal a conclu qu'il n'avait pas essayé d'expliquer certaines contradictions relatives à un voyage au Vietnam qui se serait passé en juillet 1998.
[16]      Le demandeur déclare que le tribunal s'est trompé. Il a lui-même témoigné qu'il avait visité le Vietnam entre le 2 juillet 1997 et le 11 août 1997 et non entre le 2 juillet 1998 et le 11 août 1998. L'agent d'immigration en était venu à la même conclusion après avoir examiné ses billets d'avion. De plus, le tribunal lui avait posé plusieurs questions à ce sujet se penchant sur une déclaration de son épouse qui avait indiqué une deuxième visite entre le 2 juillet 1998 et le 11 août 1998. Confronté par le membre audiencier du tribunal qui lui dit « que ça serait une erreur d'année si je comprends bien » , le demandeur répond que « quelques fois lorsqu'elle [son épouse] est nerveuse, elle peut se tromper. »
[17]      En dernier lieu, le demandeur prétend que le tribunal a refusé d'exercer sa compétence en décidant qu'il ne pouvait pas entreprendre une considération du deuxième volet du paragraphe 77(3) c'est à dire de tenir compte de raisons d'ordre humanitaire, s'il en venait à la conclusion que le demandeur et son épouse étaient visés par le paragraphe 4(3) du Règlement.
[18]      Le demandeur appuie cette allégation en se référant au fait que son procureur avait demandé au tribunal d'accorder l'appel en droit et en équité et que la transcription révèle ce commentaire de la part du tribunal:
R.      Vous savez maître que je ne peux que l'accueillir en droit, puisque si je déterminais qu'ils ne sont pas mari et femme, j'ai pas juridiction en équité.
--      C'est la question qu'il y a un bébé, né de ce mariage et ...
R.      Non, c'est un élément factuel qui peut venir en aide si on veut, à faire la preuve du mariage de bonne foi. [je souligne]



E.      ANALYSE
         (i)      Appel de novo
[19]      L'audience devant le tribunal est un appel de novo. Cela signifie que le demandeur peut amener une nouvelle preuve devant le tribunal, et que ce dernier n'est pas tenu de simplement revoir la décision de l'agent d'immigration mais doit tenir compte de nouvelles preuves. Le juge Heald, au nom d'un banc unanime de la Cour fédérale d'appel, dans l'affaire Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) c. Gill (H.K.) (1991), 137 N.R. 373 (C.A.F.), énonce ce qui suit à la page 377:
[9] ... It is noteworthy to observe that the jurisprudence of this Court has established that a hearing of this nature is a hearing de novo in a broad sense [See Kahlon v. M.E.I. 97 N.R. 349], and at such a hearing the Board is entitled to consider contemporary matters which necessarily involve a consideration of changed circumstances when exercising its equitable jurisdiction. [je souligne]
[20]      Dans l'affaire Rattan c. (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (1994), 73 F.T.R. 195, Madame la juge Reed conclut à la page 198:
[6]      The Appeal Division treated the appeal under section 77 as more than just a review of the immigration officer's decision on the basis of the evidence before him. The Appeal Division heard additional evidence, from the applicant, which was not before the immigration officer who made the initial refusal. It addressed its reasons to the evidence before it and decided the issues on that basis.
[7]      An appeal under section 77 is not a judicial review where only the correctness of the immigration officer's decision on the basis of the material before him or her is under consideration. This is clear from subsection 77(3) which allows for appeals on questions of fact and from the procedure followed which allows the sponsor, in Canada, to call witnesses and other evidence. The Appeal Division's role is not to determine whether the immigration officer's decision was correctly taken, but to determine if the sponsoree is in fact a member of the class of persons excluded by s. 4(3) of the Regulations : Mohammed v. Canada (Minister of Employment and Immigration), [1986] 3 F.C. 90 (C.A.) per Thurlow C.J. For that purpose the sponsor's evidence, and the immigration officer's decision must be reviewed in coming to the decision. If the sponsor can satisfy the panel that the immigration officer's conclusions were incorrect, an appeal is allowed. [je souligne]
[21]      Dans l'affaire Kahlon c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (1989), 97 N.R. 349 (C.A.F.), le juge Mahoney a affirmé:
[5] The effect of that decision is, in my opinion, that the hearing of an appeal by the Immigration Appeal Board is a hearing de novo in a broad sense. [je souligne]

[22]      Il ressort de la jurisprudence que le tribunal doit tenir compte de nouvelles preuves ainsi que de changements de circonstances.

         (ii)      Fardeau de la preuve

[23]      Le test à deux étapes pour exclure un époux parrainé de la classe familiale a été développé par le juge Strayer dans l'affaire Horbas c. Ministre de l'Emploi et de l'Immigration et Secrétaire d'État aux Affaires extérieures, [1985] 2 C.F. 359 à la page 365 et à la page 369:
[Traduction] Il faut d'abord souligner qu'il s'agit d'un critère à deux volets. Ainsi, aux termes du paragraphe 4(3), le conjoint n'est exclu que s'il s'est marié principalement dans le but d'obtenir l'admissibilité au Canada et non avec l'intention de vivre en permanence avec son conjoint.

     ...

[Traduction] Il ne faut pas perdre de vue que ce paragraphe ne peut servir de fondement au rejet d'une telle demande que si le conjoint parrainé s'est marié principalement dans le but d'immigrer et s'il n'a pas l'intention de vivre en permanence avec son conjoint.
[24]      Donc, afin de déterminer si un époux est exclu en vertu du paragraphe 4(3), il faut faire l'analyse mandatée par l'affaire Horbas. Toutefois, malgré le fait que c'est l'intention du parent parrainé qui prime, il revient au demandeur de présenter de la preuve pour attaquer la conclusion de l'agent d'immigration que le mariage n'est pas un mariage de bonne foi, puisque le droit d'appel est celui du parrain.
[25]      Dans l'affaire Rattan, précitée, Mme la juge Reed le dit à la page 198:

[7] ... If the sponsor can satisfy the panel that the immigration officer's conclusions were incorrect, an appeal is allowed.
[26]      Dans l'affaire Quao c. Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, [2000] F.C.J. No. 1283, le juge Blais l'a aussi énoncé:
[30]      The applicant had to prove to the Appeal Division that the visa officer erred in refusing to grant a permanent residence visa to his wife.
[27]      Ce qui ressort de la jurisprudence, est une obligation de la part du demandeur de démontrer, sur une balance de probabilité, que l'époux parrainé ne s'est pas marié dans le seul but d'immigrer au Canada et qu'il a l'intention de vivre en permanence avec lui. Donc malgré le fait que c'est l'intention du parent parrainé qui prime, il revient au demandeur de présenter de la preuve pour attaquer la conclusion de l'agent d'immigration que le mariage n'est pas un mariage de bonne foi, puisque le droit d'appel est celui du parrain.
[28]      Le demandeur prétend que le fait de lui demander de répondre à des questions sur le déroulement de l'entrevue le met dans une situation impossible puisqu'il n'était pas présent à l'entrevue et que sa femme n'était pas présente devant le tribunal. Je ne suis pas d'accord.
[29]      En l'espèce, je ne crois pas que le tribunal a fait peser sur lui un fardeau plus lourd que celui que prévoit la Loi. Le rôle du demandeur lors de son appel devant le tribunal était de convaincre ce dernier que le mariage en était un de bonne foi.
[30]      Le fardeau n'était pas insurmontable. Par exemple, dans l'affaire Meelu c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2000] 3 Imm.L.R. (3d) 193, l'épouse du demandeur avait témoigné par conférence téléphonique:
[13] . . .The applicant's spouse's own testimony before the Tribunal, given by long distance telephone and recorded in the transcript, indicates that she did not speak English although in other evidence in the Tribunal Record, the applicant's spouse claimed to read and write English "well" and speak it "with difficulty".
[31]      Dans l'affaire Brar c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (1995), 29 Imm.L.R. (2d) 186 (Immigration and Refugee Board (Appeal Division)), l'appelante avait soumis un affidavit de son époux et ce dernier a témoigné par conférence téléphonique. De plus, son père et sa soeur ont témoigné et ont soumis des affidavits:
[13]      Both the appellant and the applicant testified, the latter from India by teleconference through an interpreter. Counsel for the appellant did not elicit any evidence from the applicant in direct examination. In cross-examination, counsel for the respondent spent considerable time questioning the applicant about the circumstances in which he swore an affidavit found as Item 4, Exhibit A-1.

     ...

[19] . . .Both the appellant and the applicant were credible witnesses and the Appeal Division finds they gave reliable and trustworthy evidence. The appellant's father and sister, Harjit, also testified and were credible witnesses. The applicant's father supplied affidavit evidence which was adduced as Item 3, Exhibit A-1, and the Appeal Division finds this evidence reliable and trustworthy.

        

     (iii)      Compétence

[32]      Lorsque le tribunal conclut qu'un époux n'est pas un « parent » au sens de la Loi, c'est à bon droit qu'il refuse d'entreprendre une considération du deuxième volet du paragraphe 77(3). En effet, le tribunal peut seulement statuer en équité lorsque le refus est d'ordre non juridictionnel, par exemple pour des raisons d'ordre médical. Toutefois, lorsque le refus est d'ordre juridictionnel il doit rejeter l'appel pour défaut de compétence et n'est donc pas compétent pour octroyer une mesure spéciale en équité.
[33]      Ce principe est bien établi dans la jurisprudence. D'ailleurs, Le juge Gibson l'énonce dans l'affaire Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) c. Singh (1996) (C.F.), 121 F.T.R. 196:
[7]      The tribunal having concluded, as it did, that the rejection of Surinder Kaur's application for landing was valid in law, and that rejection having been based on a conclusion that Surinder Kaur was not a member of the family class, the Tribunal lacked jurisdiction under s. 77 of the Immigration Act to consider the respondent's appeal. Thus the tribunal was without jurisdiction under s. 77 to allow the respondent's appeal on the basis of humanitarian and compassionate considerations. [je souligne]

[34]      Madame la juge Reed le réitère dans l'affaire Chow c. Canada (Ministre

    

de la Citoyenneté et de l'Immigration) (1998), 153 F.T.R. 236 (C.F.) à la page 237:

[3] Unfortunately, as the Immigration Appeal Divison stated, it does not have jurisdiction to hear her appeal because the son (her brother) is not a member of the applicant's family class as defined in section 2 of the Immigration Regulations. A Court of Appeal decision that confirms this to be the law is Bailon v. The Minister of Employment and Immigration, [1986] F.C.J. No. 386.
[35]      Récemment, dans l'affaire Samra c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, [2000] F.C.J. No. 1491 (C.F.), M. le juge Muldoon l'a résumé de la façon suivante:
[2] The appellant sponsor allegedly adopted the applicants, Baljhit Singh Samra and Mandeep Kaur Samra, (his biological niece and nephew) in 1995, with the consent of their natural parents who remain alive and in contact with the applicants. Both the immigration officer and the Appeal Division refused the applications for permanent residence on the grounds that the applicants had not been adopted in accordance with the Immigration Regulations, 1978 SOR/78-172, as amended and Indian law and, thus, did not constitute members of the family class. Therefore the Appeal Division found that the applicants are not members of the " family class " and dismissed this appeal "for lack of jurisdiction".

     . . .

[8]      Recent case-law suggests that where an applicant falls outside the definition of "family class", the tribunal is correct in holding that it does not have the jurisdiction to make a determination regarding the application for landing.      ...
[11] Once a determination as to membership in family class has been made, a jurisdictional issue of the Immigration Appeal Division must be considered. As the Appeal Division only can hear those family class appeals where the applicants are found to be within the provided definition, if the applicant is determined to be outside that category, the Appeal Division has no jurisdiction to make a determination regarding the application for landing. With regards to the specifics of the matter, the appeal was dismissed as the applicants were found not to be members of the family class. Based on this determination. The Appeal Division lacks the requisite jurisdiction to make a determination on the application. [je souligne]
[36]      Dans l'affaire Bailon c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1986] F.C.J No. 386, le juge Hugessen affirme à la page 3:
     In our opinion the Board rightly declined jurisdiction to hear the appeal. The application for landing made by the appellant's mother, the only member of the family class to apply, was not refused; what was refused was the application for landing of the appellant's half-brother as a dependant of his mother. Section 79 of the Act makes it quite clear that a sponsor only has a right of appeal from the refusal of an application by a member of the family class, not from the refusal to include an alleged dependant of such a member. [je souligne]

(Voir aussi Chattat c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1999] F.C.J. No. 813 (C.F.).)

[37]      Par conséquent, puisque le tribunal la section d'appel a conclu que la requérante était une personne visée par le paragraphe 4(3) du Règlement Mme_________ n'était pas un parent au sens de la Loi, elle, il n'était pas en mesure de tenir compte de motifs humanitaires justifiant l'octroi d'une mesureet possiblement d'accorder une mesure spéciale.

Il ressort de la jurisprudence que le fardeau de la preuve, lors d'un appel en vertu de l'article 77 de la Loi, retombe sur l'appelant. Dans l'affaire Rattan c. Canada (Ministre de l'emploi et de l'immigration) 294 F.C.J. No. 32, Mme la juge Reed conclut que: If the sponsor can satisy the panel that the immigration officer's conclusions were incorrect, an appeal is allowed.     

         (iv)      Norme de contrôle     

[38]      La Section d'appel de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié est un tribunal spécialisé, experte en matière d'évaluation des faits. À ce titre, ses conclusions ne devraient pas être contrariées à moins d'être déraisonnables, tel que l'énonce le juge Décary dans l'arrêt Aguebor c. M.E.I. (1993), 160 N.R. 315 (C.A.F.) à la page 316:
[4]      Il ne fait pas de doute que le tribunal spécialisé qu'est la section du statut de réfugié a pleine compétence pour apprécier la plausibilité d'un témoignage. Qui, en effet, mieux que lui, est en mesure de jauger la crédibilité d'un récit et de tirer les inférences qui s'imposent? Dans la mesure où les inférences que le tribunal tire ne sont pas déraisonnables au point d'attirer notre intervention, ses conclusions sont à l'abri du contrôle judiciaire. Dans Giron, la Cour n'a fait que constater que dans le domaine de la plausibilité, le caractère déraisonnable d'une décision peut être davantage palpable, donc plus facilement identifiable, puisque le récit apparaît à la face même du dossier. Giron, à notre avis, ne diminue en rien le fardeau d'un appelant de démontrer que les inférences tirées par le tribunal ne pouvaient pas raisonnablement l'être. L'appelant, en l'espèce, ne s'est pas déchargé de ce fardeau.
[39]      En l'espèce, tel qu'il appert de la décision du tribunal, l'appel a été rejeté parce que le tribunal a jugé que le demandeur n'était pas crédible. Le tribunal donne comme exemples que le demandeur n'a pas tenté d'expliquer certaines contradictions et n'a amené aucune preuve pouvant démontrer un mariage de bonne foi.

     (v)      Interprétation de la preuve

         a) photos

[40]      Le tribunal décrète que les photos présentées n'étaient pas suffisantes pour convaincre qu'une cérémonie de mariage avait réellement eu lieu. Cette conclusion du tribunal est erronée compte tenu du fait qu'il savait que les photos soumises à l'agent des visas n'étaient pas convaincantes et a refusé d'en recevoir d'autres.
[41]      Il était déraisonnable pour le tribunal de refuser les photos additionnelles de la cérémonie du mariage offertes par le demandeur. Il ne fait pas de doute, qu'il revient au tribunal de déterminer la valeur probante de toute preuve. Toutefois, il ne s'agit pas ici d'une situation où on remet en question la valeur probante accordée à la preuve. Il s'agit plutôt du refus du tribunal de recevoir la preuve. À cause de ce refus, le demandeur n'a pas présenté de photos additionnelles. Puisque l'audience devant la section d'appel est un appel de novo , le tribunal se devait d'examiner toute la preuve. Il s'agit en l'espèce d'un manquement à l'équité procédurale ouvrant droit au contrôle.

         b)      déclarations contradictoires

[42]      Le demandeur avait le fardeau de convaincre le tribunal de la bonne foi du mariage. Afin de rencontrer son fardeau il pouvait clarifier les déclarations contradictoires de son épouse. Le tribunal donne comme un exemple de déclaration contradictoire, ce qui suit:
     La lettre A-2 est datée du 5 juillet 1998 et est adressée par la requérante à l'appelant. Or la preuve établit que l'appelant était au Vietnam du 2 juillet 1998 au 11 août 1998. L'appelant n'a même pas tenté d'expliquer cette coïncidence pour le moins improbable voire irrationnelle. [je souligne]
[43]      Pourtant, la transcription démontre que le demandeur a témoigné à ce sujet:
Q.      La deuxième fois, vous avez quitté le 2 juillet 98 et vous être revenu le 11 août 98, c'est exact?

     ...

R.      Dans le billet d'avion la deuxième fois la deuxième fois, c'est le 30 juin, 30 juin 97 jusqu'au 11 août 97 je suis retourné au Canada. Et puis une autre fois, une autre fois le 12 décembre 98 puis je suis retourné le 26 février 99.
-      Merci
-      Voyez-vous au document pièce 9, qui a été signé par votre épouse, elle dit que vous êtes retourné du 2 juillet 98 au 11 août 98.
R.      Oui
Q.      Alors, ce serait une erreur d'année si je comprends bien?
R.      Des fois quand elle est nerveuse, oui elle peut se tromper.
-      D'accord.
[44]      Il est manifeste à la lecture de cet extrait, que le tribunal a mal saisi la preuve. Contrairement à ce que le tribunal prétend, la preuve démontre que le demandeur avait expliqué la contradiction. Le tribunal a tout simplement choisi d'ignorer cette explication. Il s'agit en l'espèce d'une appréciation erronée des faits.
[45]      Une autre prétendue contradiction à laquelle fait allusion le tribunal est par rapport à la première rencontre entre le demandeur et son épouse. Cette dernière avait inscrit sur sa demande de parrainage que la soeur du demandeur les avait présentés. Toutefois, lors de son entrevue, elle a dit qu'elle a rencontré le demandeur lorsqu'il est venu à son salon de coiffure. Devant le tribunal, le demandeur a témoigné avoir rencontré son épouse au salon de coiffure lorsqu'il était accompagné de sa soeur. Il n'y a là aucune contradiction puisque les deux sont compatibles puisque l'une des situations n'exclut pas l'autre. En l'espèce, le demandeur n'a pas contredit son épouse.
[46]      Le tribunal affirme que le demandeur s'est contredit, quant à la date à laquelle le demandeur a demandé à sa soeur d'entreprendre les démarches pour obtenir la main de son épouse. Pourtant, à la lecture du procès verbal il appert que le tribunal a encore une fois, mal interprété la preuve. Le tribunal déclare que:
Lorsque contre-interrogé par le représentant du ministre, l'appelant a quelque peu modifié sa version des faits.
Ainsi ce ne serait pas le 10 janvier mais le 5 janvier 1997, le lendemain de son arrivée, qu'il aurait demandé à sa grande soeur de faire les démarches pour obtenir la main de la requérante et ce serait le 9 janvier que sa grande soeur se serait rendue chez la grand-mère adoptive de la requérante pour s'enquérir des possibilités de mariage.
[47]      Pourtant, le procès verbal indique que:
Q. Donc c'est le 9 que votre soeur a commencé les démarches pour le mariage?
R. Oui
- Ok
[48]      Cet extrait révèle que le tribunal a encore mal interprété la preuve en affirmant que le demandeur avait changé son témoignage en contre-interrogatoire pour dire qu'il avait demandé à sa soeur d'entreprendre les démarches le 5 janvier.
[49]      Le tribunal a tiré une autre conclusion erronée de la preuve au sujet d'une conversation de deux heures qui se serait passée entre le demandeur et son épouse. Le tribunal conclut que cette conversation a eu lieu le 4 janvier et non le 9 janvier tel qu'en avait témoigné le demandeur. À la lecture du procès-verbal, il appert que le demandeur n'a pas témoigné avoir eu la conversation le 9 janvier mais bien le 4 janvier.
[50]      Quant aux lettres entre le demandeur et son épouse, le tribunal les a caractérisées de reproches et de récriminations. Il appert à la lecture du dossier que le tribunal a mal interprété la teneur des lettres parce qu'il a négligé de les interpréter dans leur contexte.
[51]      De plus, le tribunal fait référence à une lettre qui prédate (1989) la rencontre du demandeur et de son épouse comme élément minant la crédibilité du demandeur puisqu'il a témoigné avoir rencontré son épouse en 1997. Pourtant, une lecture du dossier certifié ne révèle aucune lettre en date de 1989.
[52]      La lecture du procès-verbal démontre cependant que le tribunal s'est bien appuyé sur la preuve pour tirer des conclusions sur (1) la confusion au sujet du nombre d'invités à la cérémonie, (2) les imprécisions relatives au déroulement de la cérémonie et (3) les comptes téléphoniques.
[53]      Règle générale, les conclusions de crédibilité du tribunal sont à l'abri du contrôle judiciaire. Cependant, il appert clairement que le tribunal a soit mal interprété la preuve ou l'a ignorée sur des éléments majeurs minant la crédibilité du demandeur. Dans ces circonstances, on doit accueillir la demande de contrôle.
         c)      Naissance de l'enfant
[54]      En l'espèce, il appert que le tribunal s'est fié sur les conclusions de l'agent plutôt que sur la preuve soumise par le demandeur afin de rendre une décision. L'exemple le plus flagrant de cette omission est le fait que le tribunal n'a pas traité de la question de la naissance de l'enfant.
[55]      Une lecture de la décision du tribunal ne révèle aucun traitement de la naissance du fils du demandeur comme élément pouvant prouver un mariage de bonne foi. Pourtant, le demandeur a produit un certificat de naissance et le tribunal n'a pas mis en doute la paternité du demandeur. À mon avis, cette omission révèle que le tribunal n'a pas fait une évaluation complète de la preuve et par conséquent a commis une erreur ouvrant droit à la révision telle que l'énonce le juge Heald dans l'affaire Toro c. Ministre de l'Emploi et de l'Immigration, [1981] 1 F.C. 652 (C.A.F.) à la page 652:
Par conséquent, il appert que la Commission, au moment de prendre sa décision, n'a pas tenu compte de la totalité de la preuve produite régulièrement devant elle.
La Commission a donc commis une erreur de droit.
[56]      Dans l'affaire Pabla c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2000] F.C.J. No. 2054, le juge Blais énonce que:     
Given that an appeal to the Board is considered a de novo proceeding, the Board is open to considering issues which were not before the visa officer.
[57]      En l'espèce, il est manifeste que le tribunal n'a pas considéré toute la preuve, puisqu'il a conclu que le demandeur n'a présenté aucune preuve pour établir un mariage de bonne foi.


F.      QUESTION CERTIFIÉE
[58]      Le demandeur a demandé que soit certifiée la question suivante:
Lorsque la validité du mariage n'est pas contestée, mais que l'épouse de l'appelant est visée par les dispositions du paragraphe 4(3) du Règlement, ces faits peuvent-ils fonder une restriction ou un défaut de compétence de la section d'appel quant à la considération de raisons d'ordre humanitaire justifiant l'octroi d'une mesure spéciale?
[59]      Puisque la jurisprudence s'est déjà prononcée à cet égard, il n'y a aucune question grave de portée générale à certifier en application du paragraphe 83(1) de la Loi.

G.      DISPOSITIF

[60]      Cette demande de contrôle judiciaire est accueillie. La décision du tribunal est cassée et ce dossier est renvoyé au tribunal, devant d'autres membres audienciers en vue d'une nouvelle détermination.

     "François Lemieux"

    

     J U G E

Ottawa, (Ontario)

le 6 mars 2001


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