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Date : 20190603


Dossier : IMM-2318-18

Référence : 2019 CF 779

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

St. John’s (Terre-Neuve-et-Labrador), le 3 juin 2019

En présence de madame la juge Heneghan

ENTRE :

MOHAMED HASSAN MOHAMED ZAQOUT,

TAMARA ZUHAIR IBRAHIM ALSHARAIRI,

HASSAN MOHAMED HASSAN ZAQOUT,

RASHA MOHAMED HASSAN ZAQOUT,

OMAR MOHAMED HASSAN ZAQOUT,

SALMA MOHAMED HASSAN ZAQOUT

demandeurs

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1]  Monsieur Mohamed Hassan Mohamed Zaqout (le demandeur principal), son épouse, madame Tamara Zuhair Ibrahim Alsharairi, et leurs enfants mineurs, Hassan Mohamed Hassan Zaqout, Rasha Mohamed Hassan Zaqout, Omar Mohamed Hassan Zaqout et Salma Mohamed Hassan Zaqout (collectivement, les demandeurs) sollicitent le contrôle judiciaire de la décision datée du 25 avril 2018 rendue par la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (la Commission).

[2]  Dans sa décision, la Commission a statué que les demandeurs n’avaient ni la qualité de réfugiés au sens de la Convention ni celle de personnes à protéger, au sens de l’article 96 et du paragraphe 97(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 (la Loi).

[3]  Le demandeur principal a demandé l’asile au motif qu’il craint d’être persécuté du fait de son appartenance à un groupe social : celui des apatrides palestiniens en Arabie saoudite. Sa demande d’asile et celles de ses enfants ont été examinées en lien avec l’Arabie saoudite, le pays dans lequel ils avaient leur résidence habituelle.

[4]  La demande d’asile de madame Ibrahim Alsharairi a été examinée en lien avec la Jordanie, son pays d’origine. Elle a fondé sa demande d’asile sur des pratiques discriminatoires qui, selon elle, équivalent à de la persécution, notamment une loi qui prive les femmes du droit de transférer la citoyenneté ou de parrainer un conjoint ou des enfants.

[5]  Le demandeur principal et ses enfants sont des apatrides palestiniens. Mme Alsharairi est une Jordanienne. Le demandeur principal possède un document de voyage délivré par le gouvernement égyptien, et selon ce document, son fils Hassan Mohamed Hassan Zaqout était autorisé à voyager. Les autres enfants possèdent des documents de voyage délivrés par les autorités palestiniennes et égyptiennes.

[6]  La Commission a fait référence aux renseignements contenus dans le Dossier certifié du tribunal (le DCT), dont il ressort que la possession d’un passeport délivré par les autorités palestiniennes ou d’un document de voyage égyptien entraîne la perte de la citoyenneté jordanienne et du droit d’acquérir cette citoyenneté.

[7]  Mme Alsharairi a voyagé avec un passeport jordanien.

[8]  La Commission a tiré des conclusions défavorables quant à la crédibilité du demandeur principal, et, a autrement conclu que la discrimination à laquelle il a été exposé en Arabie saoudite n’équivalait pas à de la persécution. Elle a aussi conclu que le demandeur principal n’avait pas établi, selon la prépondérance des probabilités, que s’il était renvoyé en Arabie saoudite, il serait exposé à l’un des risques énoncés au paragraphe 97(1).

[9]  La Commission a examiné la question de savoir si les difficultés subies par le demandeur principal en Arabie saoudite, notamment le harcèlement, les mauvais traitements et les difficultés à obtenir un travail constituaient, cumulativement, de la persécution, et elle a conclu que ce n’était pas le cas.

[10]  La Commission a aussi examiné le statut du demandeur principal en tant qu’apatride palestinien. Elle a conclu que même si ce statut a pu être la source d’un traitement discriminatoire, celui‑ci n’équivalait pas à de la persécution. La Commission a fait observer que l’apatridie ne constitue pas, en soi, un motif justifiant l’octroi de l’asile à titre de réfugié au sens de la Convention.

[11]  La Commission a reconnu que Mme Alsharairi avait été victime de discrimination, en raison de l’application de la loi jordanienne, mais elle a décidé qu’un tel traitement n’équivalait pas à une preuve de persécution.

[12]  Les demandeurs font maintenant valoir que la décision de la Commission est déraisonnable, et qu’elle est entachée d’une crainte raisonnable de partialité. Ils prétendent, à l’appui de cet argument que la Commission aurait posé des questions déraisonnables, et que la transcription de leur audience contiendrait des commentaires sarcastiques.

[13]  La première question à régler est celle de la norme de contrôle applicable.

[14]  La prétention de partialité soulève une question d’équité procédurale. Les questions d’équité procédurale sont contrôlées selon la norme de la décision correcte; voir l’arrêt Canada (Citoyenneté et Immigration) c Khosa, [2009] 1 RCS 339.

[15]  Le bien‑fondé de la décision, sur le plan de l’évaluation de la preuve à l’égard du critère légal, est susceptible de contrôle selon la norme de la décision raisonnable; Canada (Commission canadienne des droits de la personne) c Canada (Procureur général), [2018] 2 RCS 230.

[16]  Selon l’arrêt Dunsmuir c Nouveau‑Brunswick, [2008] 1 RCS 190, la norme de la décision raisonnable exige que la décision soit transparente, justifiable et intelligible, et qu’elle appartienne aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit.

[17]  J’examinerai d’abord les arguments concernant la partialité.

[18]  Le critère utilisé pour qu’il puisse être conclu qu’il y a eu partialité a été énoncé par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Committee for Justice and Liberty c Canada (L’Office national de l’énergie), [1978] 1 RCS 369, à la page 394, de la manière suivante :

[…] la crainte de partialité doit être raisonnable et le fait d’une personne sensée et raisonnable qui se poserait elle‑même la question et prendrait les renseignements nécessaires à ce sujet. Selon les termes de la Cour d’appel, ce critère consiste à se demander «à quelle conclusion en arriverait une personne bien renseignée qui étudierait la question en profondeur, de façon réaliste et pratique. Croirait‑elle que, selon toute vraisemblance, [le décideur], consciemment ou non, ne rendra pas une décision juste?»

[19]  J’ai examiné l’ensemble de la transcription de l’instance à la Commission.

[20]  Je n’ai relevé aucune question ou aucun commentaire inapproprié pouvant étayer l’argument de la partialité. Il n’y a aucun fondement à l’intervention de la Cour pour ce motif.

[21]  Je me penche maintenant sur les observations faites relativement au caractère déraisonnable de la décision de la Commission.

[22]  L’élément crucial avancé par le demandeur principal et ses enfants dans leurs demandes d’asile est leur statut d’apatrides palestiniens.

[23]  L’apatridie, en soi, ne constitue pas un motif justifiant l’octroi du statut de réfugié au sens de la Convention ou celui de personne à protéger au sens de la Loi; voir la décision Thabet c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1998] 4 CF 21.

[24]  À mon avis, la Commission a examiné de façon raisonnable la preuve présentée. Les conclusions sont clairement formulées et satisfont à la norme de la décision raisonnable énoncée dans l’arrêt Dunsmuir, précité.

[25]  Il n’est pas nécessaire que j’examine les arguments des demandeurs portant sur l’inconstitutionnalité de l’alinéa 110(2)d) de la Loi, lequel a trait à la possibilité d’interjeter appel à la Section d’appel des réfugiés. La question a été tranchée dans la décision Kreishan c Canada (Citoyenneté et Immigration) (2018), 60 Imm LR (4th) 257. Aucune décision comportant un résultat différent n’a encore été rendue par la Cour d’appel fédérale.

[26]  Par conséquent, la présente demande de contrôle judiciaire est rejetée. Il n’y a aucune question à certifier.


JUGEMENT dans le dossier IMM‑2318‑18

LA COUR STATUE que la présente demande de contrôle judiciaire est rejetée. Il n’y a aucune question à certifier.

« E. Heneghan »

Juge

Traduction certifiée conforme

Ce 6e jour de juin 2019.

L. Endale, traductrice


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM‑2318‑18

 

INTITULÉ :

MOHAMED HASSAN MOHAMED ZAQOUT, TAMARA ZUHAIR IBRAHIM ALSHARAIRI, HASSAN MOHAMED HASSAN ZAQOUT, RASHA MOHAMED HASSAN ZAQOUT, OMAR MOHAMED HASSAN ZAQOUT, SALMA MOHAMED HASSAN ZAQOUT c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 5 décembre 2018

Jugement et motifS :

La juge HENEGHAN

 

DATE DU JUGEMENT ET DES MOTIFS :

Le 3 juin 2019

 

COMPARUTIONS :

Wennie Lee

Pour les demandeurs

Maria Burgos

Pour le défendeur

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Lee & Company

Avocats

Toronto (Ontario)

 

Pour les demandeurs

 

Procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

Pour le défendeur

 

 

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