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     Date : 20000511

     Dossier : IMM-2303-99


Ottawa (Ontario), le 11 mai 2000

En présence de Monsieur le juge MacKay


Entre

     MOHIUDDIN KHAN

     demandeur

     - et -


     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

     défendeur


     ORDONNANCE


     LA COUR,

     VU le recours en contrôle judiciaire tendant à l'annulation de la décision d'un agent des visas à Hong Kong, notifiée par lettre en date du 11 mars 1999 et portant rejet de la demande de résidence permanente au Canada, faite par le demandeur à titre de parent aidé,

     OUÏ les avocats des deux parties à l'audience tenue le 2 mai 2000 à Toronto, à l'issue de laquelle la Cour a pris l'affaire en délibéré, et vu les conclusions soumises subséquemment,

     DÉBOUTE le demandeur de son recours.

     Signé : W. Andrew MacKay

     __________________________________

     Juge

Traduction certifiée conforme,




Martine Brunet




     Date : 20000511

     Dossier : IMM-2303-99


Entre

     MOHIUDDIN KHAN

     demandeur

     - et -


     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

     défendeur



     MOTIFS DE L'ORDONNANCE


Le juge MacKAY


[1]      Il y a en l'espèce recours en contrôle judiciaire contre la décision défavorable par laquelle un agent des visas en poste au consulat du Canada à Hong Kong a rejeté, au stade de l'instruction préliminaire sur pièces et sans lui avoir accordé une entrevue, la demande de résidence permanente du demandeur par ce motif que celui-ci n'a recueilli que 52 points d'appréciation alors qu'il lui en fallait 55 au moins pour être admissible à titre de parent aidé.

[2]      Ce recours porte au premier chef sur la question de savoir si l'agent des visas a commis une erreur susceptible de contrôle judiciaire en appliquant la Classification nationale des professions (CNP) à l'appréciation des qualifications du demandeur pour le titre de " comptable " qu'il fait valoir. Et, subsidiairement, au cas où l'application des lignes directrices de la CNP ne constituerait pas une erreur, si, par sa décision, l'agent des visas n'a pas dénié l'équité procédurale au demandeur faute de lui avoir donné la possibilité de dissiper une réserve de sa part.

[3]      La demande de visa a fait l'objet d'une instruction préliminaire sur pièces le 4 mars 1999, et la décision défavorable a été notifiée au demandeur par lettre en date du 11 mars 1999 et portant notamment ce qui suit :

     [TRADUCTION]

         J'ai examiné votre cas au regard de la profession envisagée de comptable (CNP 1111.2) et ai conclu que vous ne satisfaites ni aux critères de formation ni aux conditions d'accès à la profession de comptable, telle que la définit la Classification nationale des professions.
         J'ai par conséquent instruit votre demande au regard de la profession de teneur de livres (CNP 1231.0) pour laquelle vous avez les qualifications et l'expérience nécessaires. Vous avez ainsi obtenu les points d'appréciation suivants [lesquels sont indiqués en détail, avec un total de 52 points].

[4]      Le demandeur soutient que l'agent des visas a commis une erreur en tenant pour critères de formation et conditions d'accès à la profession de comptable, telle qu'elle figure dans la CNP, ceux qui y sont spécifiés pour les professions de " comptable agréé ", de " comptable général licencié " et de " comptable en management accrédité ". Si l'agent des visas ne l'a pas indiqué expressément, sa conception des critères de formation pour la profession de " comptable " peut se dégager de ses notes SITCI et de son affidavit.

[5]      Le demandeur soutient aussi que l'agent des visas a mal saisi la formation requise par la CNP pour la profession de comptable, et que sa conception signifierait que tout comptable doit être agréé l'un des trois grands organes d'accréditation de comptables du Canada. À l'audience, l'avocat du ministre défendeur a reconnu que telle était l'interprétation des impératifs de la CNP par l'agent des visas en l'espèce, tout en soutenant qu'elle était appropriée et raisonnable.

[6]      Des extraits de deux documents ont été produits devant la Cour. Le premier est un extrait de la CNP elle-même; il s'agit de la description de la classification générale " 1111 Vérificateurs/trices et comptables ". Le second est un extrait du Guide des carrières, lequel, au dire de l'avocat du défendeur, donne une description plus détaillée des classifications professionnelles spécifiques que la CNP elle-même. Ce dernier extrait porte sur la classification professionnelle " 1111.2 Comptables ", c'est-à-dire celle que le demandeur a l'intention de poursuivre s'il est admis au Canada. L'un et l'autre extraits indiquent que les titres de comptable, de comptable agréé (C.A.), de comptable général licencié (C.G.L.), et de comptable en management accrédité (C.M.A.) peuvent être inclus dans les classifications générales " Vérificateurs/trices et comptables (1111) " et " Comptables (1111.2) ". Les deux notent que " [les] comptables planifient, organisent et administrent des systèmes comptables pour un particulier ou une entreprise. Les stagiaires des firmes de comptabilité sont inclus dans ce groupe ". Les principales fonctions des comptables sont exposées en termes généraux dans l'extrait de la CNP, alors que le Guide donne les principales caractéristiques des professions comprises dans le groupe Comptables. L'un et l'autre documents prescrivent aussi les " Conditions d'accès à la profession ", savoir la formation spécialisée et l'accréditation ou la possession d'un permis pour les comptables agréés (C.A.), les comptables généraux licenciés (C.G.L.), les comptables en management accrédités (C.M.A.), les liquidateurs de faillite, ainsi que les comptables et vérificateurs en comptabilité publique.

[7]      Il n'y a dans la classification 1111 de la CNP ou 1111.2 du Guide des carrières CNP aucune indication sur les impératifs de formation pour les " comptables ", autres que ce qui est requis pour les groupes professionnels spécialisés de C.A., de C.G.L. et de C.M.A. Or " Comptables " est une classification professionnelle distincte à l'intérieur de la description générique contenue dans l'un et l'autre documents. Ainsi que l'a noté la lettre portant rejet, il y a une classification distincte dans la CNP pour les " teneurs de livres ", et c'est au regard de cette classification que le cas du demandeur a été examiné.

[8]      La Cour prend acte de ce que dans notre société, nombre de gens font un travail généralement appelé " comptabilité " mais, à part quelque apprentissage élémentaire, ne sont peut-être pas spécialement formés pour leur travail, sauf par l'expérience. Ces gens sont-ils pour autant des " comptables "? La réponse est non si on se réfère au Nouveau Petit Robert (édition de 1993), où le terme " comptable " a pour définition entre autres : " Personne dont la profession est de tenir des comptes ", et " profession " : " Métier qui a un certain prestige social ou intellectuel ". À la lumière de ces définitions, on ne peut dire que la décision entreprise soit déraisonnable en ce que l'agent des visas a conclu que la classification de " comptable " selon la CNP implique une certaine formation professionnelle spécialisée. Le seul impératif de formation mentionné dans la CNP et dans le Guide des carrières pour les comptables, quels qu'ils soient, est celui prévu pour les C.A., C.G.L. et C.M.A. Dans ce contexte, il n'était pas déraisonnable de la part de l'agent des visas de conclure que les impératifs de formation et conditions d'accès à la profession de comptable, au sens de la CNP, sont ceux spécifiés pour l'un des trois groupes de comptables spécialisés ci-dessus. Par cette conclusion, il n'a fait que respecter la description de la CNP, en l'absence de toute autre indication sur la formation requise pour la profession de comptable. Qu'il faille revoir ou non cette description de la profession de comptable, ce n'est pas là un point litigieux en l'espèce.

[9]      Quand bien même il serait jugé que l'agent des visas a commis une erreur en interprétant les impératifs de formation pour les titres professionnels spécifiés comme étant essentiels pour la profession de comptable, rien dans le dossier de la demande de visa n'indique que le demandeur ait eu une formation ou des études professionnelles spécialisées plus poussées qu'un programme de deux ans en commerce, dont l'agent des visas a expressément, et à juste titre à mon avis, indiqué qu'il n'était pas équivalent à un diplôme universitaire typique au Canada. Qui plus est, on ne pourrait guère considérer un programme mineur comme une formation ou des études professionnelles spécialisées. Il s'ensuit que la conclusion par l'agent des visas que le demandeur ne satisfaisait pas aux impératifs de formation et conditions d'accès à la profession de comptable n'est pas en soi déraisonnable, quand bien même elle serait fondée sur la croyance erronée qu'une formation professionnelle particulière est requise pour cette profession générique.

[10]      J'en viens maintenant à l'argument subsidiaire proposé par le demandeur, savoir qu'il s'est vu dénier l'équité procédurale par la conclusion de l'agent des visas qu'il ne serait pas agréé par un organe d'accréditation professionnelle, en ce qu'il ne s'est pas vu donner la possibilité de produire d'autres renseignements ou de demander lui-même aux organes d'accréditation d'évaluer ses titres de compétence. Je ne suis pas convaincu que la conclusion de l'agent des visas représente un déni d'équité procédurale, puisque le demandeur n'a produit aucune preuve d'études ou de formation professionnelles spécialisées dans sa demande de visa.

[11]      Dans les cas où, comme en l'espèce, en réponse à l'obligation, indiquée sur la formule de demande, de produire la preuve des programmes d'études ou de formation professionnelle suivis, le demandeur n'a fourni aucun renseignement quant à quelque programme de formation spécialisée pour la profession de comptable, l'agent des visas n'est nullement tenu, avant d'instruire la demande, de faire part de ses réserves vu l'absence de preuve.

[12]      Il s'ensuit, même si on devait conclure que l'agent des visas a commis une erreur en interprétant les qualifications prescrites par la CNP comme exigeant la formation professionnelle spécifique pour l'une des trois désignations spécialisées de C.A., de C.G.L. ou de C.M.A., à titre de formation essentielle pour un " comptable " (CNP 1111.2), je ne suis pas convaincu qu'il ait commis une erreur en jugeant que le demandeur n'avait pas la formation professionnelle nécessaire pour cette profession, puisque celui-ci n'a produit aucune preuve d'études ou de formation professionnelles dans le domaine.

[13]      J'estime qu'il n'y a pas lieu pour la Cour d'intervenir en l'espèce pour annuler la décision entreprise puisque, à mon avis, la décision au fond de l'agent des visas n'était pas déraisonnable en l'absence de toute preuve produite par le demandeur d'études ou de formation professionnelles, propres à l'exercice des fonctions de comptable telles qu'elles figurent dans la CNP.

[14]      Par ces motifs, le recours en contrôle judiciaire est rejeté.

[15]      Aucune question n'a été soumise pour certification sous le régime du paragraphe 83(1) à l'intention de la Cour d'appel; aucune ne sera donc certifiée.

     Signé : W. Andrew MacKay

     __________________________________

     Juge

Ottawa (Ontario),

le 11 mai 2000


Traduction certifiée conforme,




Martine Brunet


     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

     AVOCATS ET AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER



DOSSIER No :              IMM-2303-99

INTITULÉ DE LA CAUSE :      Mohiuddin Khan c. M.C.I.


LIEU DE L'AUDIENCE :          Toronto (Ontario)


DATE DE L'AUDIENCE :          2 mai 2000

MOTIFS DE L'ORDONNANCE PRONONCÉS PAR LE JUGE MacKAY


LE :                      11 mai 2000



ONT COMPARU :


M. Ian Wong                      pour le demandeur

Mme Cheryl Mitchell                  pour le défendeur



AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :


M. Ian Wong                      pour le demandeur

M. Morris Rosenberg                  pour le défendeur

Sous-procureur général du Canada

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