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Date : 20010404

Dossier : IMM-1842-00

Référence neutre : 2001 CFPI 293

Ottawa (Ontario), le mercredi 4 avril 2001

EN PRÉSENCE DE MADAME LE JUGE DAWSON

ENTRE :

MANUEL ONOFRE

demandeur

- et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

                                   MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

LE JUGE DAWSON


[1]                La présente demande réclame une ordonnance obligeant le ministre à se conformer au paragraphe 77(5) de la Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), ch. I-2 (la Loi), à poursuivre le traitement de la demande parrainée de résidence permanente au Canada présentée au nom de M. Onofre et à [TRADUCTION] « approuver cette demande si "le répondant et le parent satisfont aux exigences de la [...] Loi et ses règlements, autres que celles sur lesquelles la section d'appel a rendu sa décision" » .

LES FAITS

[2]                La chronologie des événements pertinents est la suivante :

(i)          le 9 avril 1991, il a été statué que M. Onofre n'était pas admissible en vertu du sous-alinéa 19(1)a)(ii) de la Loi au motif qu'il souffrait « d'aliénation mentale » et que son admission entraînerait ou risquerait d'entraîner un fardeau excessif pour les services sociaux ou de santé au Canada;

(ii)         le 9 mai 1996, un appel de cette décision a été accueilli sur un point de droit par la section d'appel de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié au motif que [TRADUCTION] « l'avis médical des médecins est en soi, au moment où il a été donné, manifestement déraisonnable » ;

(iii)        le dossier de M. Onofre a été rouvert et une nouvelle demande, de nouveaux documents à l'appui et de nouveaux examens médicaux ont été exigés et fournis après un certain retard qui n'est pas important pour la présente demande;

(iv)        le 10 février 2000, l'ambassade qui traitait la demande de M. Onofre a reçu l'avis des médecins selon lequel l'admission de M. Onofre au Canada était susceptible d'entraîner un fardeau excessif pour les services sociaux canadiens;


(v)         le 7 mars 2000, un agent des visas a écrit à M. Onofre pour lui faire part de l'avis des médecins et l'informer que son répondant ou lui-même devrait fournir d'autres renseignements sur la question de son inadmissibilité pour des raisons médicales;

(vi)        le 28 juin 2000, l'agent des visas a de nouveau écrit à M. Onofre pour l'informer qu'il avait été statué qu'il n'était pas admissible au motif qu'il souffrait d'une [TRADUCTION] « aliénation mentale - moyenne » et que son admission entraînerait ou risquerait d'entraîner un fardeau excessif pour les services sociaux ou de santé.

LA QUESTION EN LITIGE

[3]                M. Onofre affirme que la question de son inadmissibilité fondée sur le sous-alinéa 19(1)a)(ii) de la Loi, au motif qu'il souffre d'une aliénation mentale, a été décidée par la section d'appel et que le fait d'exiger que le répondant de M. Onofre ou lui-même réfute, en tant que motif d'inadmissibilité, un avis d'inadmissibilité qui a déjà été rejeté en appel, constitue un abus de procédure.

ANALYSE


[4]                Le ministre prétend que, dans le cadre de la présente demande, la Cour ne peut ni se prononcer sur le caractère raisonnable de la décision du 28 juin 2000 concernant l'inadmissibilité parce que cette décision n'est pas en cause et ne peut être soulevée dans une instance engagée avant que cette décision n'ait été prise, ni rendre une ordonnance de mandamus parce que le traitement de la demande de M. Onofre est terminé. Après mûre réflexion, j'ai conclu que l'argument du ministre est bien fondé et que la présente Cour ne peut accorder aucun redressement dans la présente instance.

[5]                M. Onofre concède qu'en raison de l'écoulement du temps un nouvel examen médical s'imposait. Le fond de sa plainte, et la source de ses frustrations, reposent sur son affirmation selon laquelle l'examen le plus récent ne traitait aucunement des observations de la section d'appel concernant le fait qu'il était nécessaire de faire enquête pour savoir sur quelle aide M. Onofre pouvait compter au Canada en dehors de celle des services sociaux, et que ce n'est qu'une fois connue la réponse à cette question que la question de la probabilité du fardeau excessif serait traitée.

[6]                Je ne ferai aucune observation sur le bien-fondé de cette affirmation concernant l'examen le plus récent.

[7]                Toutefois, je suis convaincue qu'il s'agit d'une question qui, si elle doit être traitée, doit l'être soit dans le cadre d'un contrôle judiciaire de la décision du 28 juin 2000, soit dans le cadre d'un autre appel à la section d'appel concernant cette décision.


[8]                La faiblesse de l'argument de M. Onofre concernant l'abus de procédure dans la présente instance vient de ce que cet argument ne tient pas compte du fait que, même si l'avis antérieur concernant son admissibilité a été infirmé par la section d'appel, cette question n'est pas définitivement réglée. La section d'appel n'a pas décidé que M. Onofre était, du point de vue médical, admissible au Canada. La décision de la section d'appel a simplement eu pour effet de replacer M. Onofre dans la même position que celle dans laquelle il se trouvait avant que cet avis invalide ne soit donné. M. Onofre reste en tout temps tenu d'établir que son admission au Canada ne serait pas contraire à l'article 19 de la Loi : King c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (1996), 115 F.T.R. 306 (C.F. 1re inst.) à la page 309 etWong et al. c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) et al. (1992), 146 N.R. 319 (C.A.F.).

[9]                Par conséquent, j'ai conclu que la présente demande de contrôle judiciaire devait être rejetée.

[10]            Le demandeur souhaite que les questions suivantes soient certifiées :

[TRADUCTION]


1.              Quand la Commission d'appel de l'immigration renvoie une demande de droit d'établissement à un agent des visas pour en poursuivre le traitement après un appel, aux termes du paragraphe 77(5), avec des instructions concernant la preuve de l'inadmissibilité sur le plan médical fondée sur le sous-alinéa 19(1)a)(ii) de la Loi sur l'immigration, et qu'en raison de l'écoulement du temps le demandeur doit subir un nouvel examen médical, la doctrine de la chose jugée (res    judicata) empêche-t-elle l'agent des visas de conclure que le demandeur est inadmissible une deuxième fois en se fondant sur le même diagnostic, les mêmes observations et les mêmes motifs que la CAI a déjà jugé insuffisants pour appuyer la conclusion selon laquelle l'admission du demandeur « entraînerait un fardeau excessif pour les services sociaux ou de santé » au sens du sous-alinéa 19(1)a)(ii)?

2.              Une telle décision concernant la doctrine de la chose jugée (res judicata) est-elle à bon droit soumise à la Section de première instance de la Cour fédérale

a)              lorsque l'agent des visas n'a pas rendu de décision finale concernant la demande, mais a simplement indiqué son intention d'en arriver à une conclusion d'inadmissibilité, ou

b)             lorsque l'agent des visas a pris sa décision finale, et que le répondant et le demandeur ont un recours devant la Commission d'appel de l'immigration pour contester la décision finale de l'agent des visas?

[11]            Le ministre s'est opposé à la certification de ces questions.

[12]            Pour ce qui est de la première question, son objection était fondée sur le fait que la question ne découlait pas d'une preuve dont était saisie la Cour, parce qu'on ne sait pas si l'agent des visas a statué que le demandeur était inadmissible une deuxième fois en se fondant sur le même diagnostic, les mêmes observations et les mêmes raisons que la section d'appel a déjà jugé insuffisants pour appuyer la conclusion. J'estime que cette objection est valable parce que ce n'est que dans le cadre d'une demande de contrôle judiciaire de la décision de l'agent des visas du 28 juin 2000 qu'il sera possible de déterminer si la prémisse de la question proposée est exacte ou non.


[13]            L'objection concernant la deuxième question s'appuie sur le fait que, pour ce qui concerne la première partie de la question, l'agent des visas n'a pas exprimé son intention d'en arriver à une conclusion d'inadmissibilité, mais simplement avisé le demandeur du fait qu'un médecin avait trouvé des motifs qui le rendrait inadmissible et l'a invité à fournir d'autres observations sur ce point. Le défendeur s'oppose à la deuxième partie de la question parce qu'il soutient qu'il ne s'agit pas d'une question grave de portée générale, compte tenu de la jurisprudence type concernant les conditions relatives à la res judicata. À mon avis, aucune des deux parties de la question proposée ne peut être soulevée dans le cadre du dossier dont est saisie la Cour. L'agent des visas n'avait pas indiqué son intention de conclure à l'inadmissibilité du demandeur, et il n'avait pas non plus pris de décision finale au moment où la présente demande a été déposée.

[14]            Par conséquent, aucune question ne sera certifiée.

JUGEMENT

[15]            LA COUR ORDONNE :

La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

« Eleanor R. Dawson »

Juge

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, LL. L., trad. a.


                                           COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

No du GREFFE :                                                           IMM-1842-00

INTITULÉ DE LA CAUSE :                                        MANUEL ONOFRE

c.

M.C.I.

LIEU DE L'AUDIENCE :                                             TORONTO

DATE DE L'AUDIENCE :                                           LE 22 MARS 2001

MOTIFS DE L'ORDONNANCE PAR :                      MADAME LE JUGE DAWSON

DATE DES MOTIFS :                                                  LE 4 AVRIL 2001

ONT COMPARU :

E. Ann McRae                                                              POUR LE DEMANDEUR

Cheryl D. Mitchell                                                         POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Clinique d'aide juridique de Rexdale                              POUR LE DEMANDEUR

Toronto (Ontario)

Morris Rosenberg                                                          POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

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