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Date : 20190523


Dossier : IMM‑1992‑18

Référence : 2019 CF 543

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 23 mai 2019

En présence de monsieur le juge James W. O’Reilly

ENTRE :

GAMALIEL RAMIREZ VELASCO

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I.  Aperçu

[1]  En 2008, le demandeur, M. Gamaliel Ramirez Velasco, s’est servi d’un faux passeport pour entrer au Canada. Lors du traitement de la demande de parrainage présentée par la femme du demandeur, un agent des visas a conclu que ce dernier était interdit de territoire au Canada en raison d’un crime d’usage de faux. Pour faire écarter la conclusion d’interdiction de territoire tirée à son égard, M. Ramirez a demandé que soit rendue une décision selon laquelle il était réadapté. En 2018, un délégué du ministre a conclu que M. Ramirez n’était pas réadapté et que, par conséquent, il était toujours interdit de territoire au Canada.

[2]  Monsieur Ramirez soutient que la décision du délégué était déraisonnable parce que ce dernier n’a pas tenu compte d’une question importante, soit celle de savoir s’il était susceptible de récidiver. En outre, M. Ramirez affirme que le délégué a conclu à tort qu’il n’éprouvait pas de remords. Il ajoute que le délégué n’a pas tenu compte du fait qu’il craignait pour sa vie au Mexique. Enfin, M. Ramirez allègue que le délégué a commis une erreur de fait à propos de la durée de la période qu’il a passée au Canada après s’être servi du faux passeport. Monsieur Ramirez me demande d’annuler la décision du délégué et de renvoyer l’affaire à un autre délégué pour nouvel examen de sa demande.

[3]  Je conviens avec M. Ramirez que le délégué a négligé de tenir compte de la question principale qu’il devait trancher, à savoir le risque que M. Ramirez commette d’autres infractions. En l’absence de pareille analyse, la décision du délégué était déraisonnable et doit être annulée. Il n’est pas nécessaire que je me penche sur les autres motifs invoqués par M. Ramirez.

II.  La décision du délégué était‑elle déraisonnable?

[4]  Le délégué a évalué tant les facteurs positifs que les facteurs négatifs relatifs à la demande de M. Ramirez. Parmi les facteurs positifs, notons le fait que son mariage était authentique, qu’il n’a pas commis d’autres crimes et qu’il a exprimé des remords pour son crime par l’entremise de son avocat.

[5]  Pour ce qui est des facteurs négatifs, le délégué a conclu que M. Ramirez avait manqué de respect envers les lois canadiennes en matière d’immigration, qu’il n’avait pas exprimé de remords pendant son entrevue, qu’il avait utilisé différents pseudonymes pour dissimuler son identité, et qu’il s’était servi d’une fausse identité pendant de nombreuses années avant que la vérité soit découverte.

[6]  Le délégué n’était pas convaincu que M. Ramirez était réadapté.

[7]  Le ministre prétend que l’analyse du délégué était suffisante parce que l’appréciation des facteurs atténuants et aggravants constituait effectivement un moyen d’évaluer le risque de récidive de M. Ramirez, comme le précise la décision Yu c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2018 CF 1280, au paragraphe 11. Dans cette décision, le juge Alan Diner a souligné qu’une analyse acceptable du risque de récidive devait tenir compte de la nature des antécédents criminels de la personne, de la conduite de celle‑ci pendant la période visée et des indicateurs que la conduite répréhensible se reproduira.

[8]  À mon avis, bien que le délégué ait mentionné un certain nombre de facteurs pertinents, il n’a pas utilisé ces facteurs pour tirer une conclusion sur la probabilité que M. Ramirez commette d’autres crimes — soit la question principale qu’il devait trancher (Tahhan c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2018 CF 1279, au paragraphe 21). Les facteurs négatifs invoqués par le délégué pourraient facilement mener à la conclusion que M. Ramirez a commis une erreur de jugement grave — mais unique — en se créant une fausse identité pour entrer et demeurer au Canada. Cette conclusion ne voudrait pas nécessairement dire qu’il risque de commettre d’autres crimes à l’avenir.

[9]  À mon avis, il n’était pas suffisant de la part du délégué de simplement soupeser les facteurs atténuants et les facteurs aggravants comme on le fait, par exemple, pour une demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire. Dans le cas d’une demande de réadaptation, le délégué doit se fonder sur ces facteurs pour évaluer le risque que le demandeur commette d’autres infractions. En l’espèce, le délégué n’a pas effectué pareille évaluation et, par conséquent, sa conclusion était déraisonnable.

III.  Conclusion et décision

[10]  Le délégué du ministre n’a pas réalisé une évaluation sérieuse du risque que M. Ramirez commette d’autres infractions. Par conséquent, sa conclusion selon laquelle M. Ramirez n’a pas démontré qu’il était réadapté était déraisonnable. La demande de M. Ramirez est donc renvoyée à un autre délégué pour nouvelle décision. Aucune des parties n’a demandé la certification d’une question de portée générale, et aucune n’est énoncée.


JUGEMENT DANS LE DOSSIER IMM‑1992‑18

LA COUR STATUE que la demande de contrôle judiciaire est accueillie. L’affaire est renvoyée à un autre délégué pour nouvelle décision. Aucune question de portée générale n’est énoncée.

« James W. O’Reilly »

Juge

Traduction certifiée conforme

Ce 10e jour de juin 2019.

Karine Lambert, traductrice


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM‑1992‑18

 

INTITULÉ :

GAMALIEL RAMIREZ VELASCO c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 6 FÉVRIER 2019

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE O’REILLY

 

DATE DES MOTIFS :

LE 23 MAI 2019

 

COMPARUTIONS :

D. Clifford Luyt

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Mélissa Mathieu

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

D. Clifford Luyt

Avocat

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Sous‑procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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