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Date : 20190508


Dossier : T-1530-18

Référence : 2019 CF 629

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Toronto (Ontario), le 8 mai 2019

En présence de monsieur le juge Campbell

ENTRE :

QIN JIANG

demanderesse

et

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1]  La présente demande de contrôle judiciaire porte sur la décision par laquelle l’Agence du revenu du Canada (l’ARC) rejetait la demande de la demanderesse visant l’allègement de l’impôt des non-résidents et de l’impôt sur les excédents relativement à des cotisations versées dans son compte d’épargne libre d’impôt (CELI).

[2]  Le 15 juillet 2009, la demanderesse a ouvert un compte CELI par l’entremise de la Banque CIBC (CIBC). Entre 2009 et 2016, elle a versé des cotisations dans ce compte. Elle n’était plus résidente du Canada durant cette période.

[3]  La Loi de l’impôt sur le revenu, LRC 1985, c 1 (5e suppl.) (la Loi) limite le montant des cotisations qui peuvent être versées dans un CELI. Un impôt sur les cotisations excédentaires est un impôt sur les cotisations supérieures au plafond de cotisation du contribuable. L’impôt des non-résidents est un impôt sur une cotisation versée par un particulier alors qu’il n’est pas résident du Canada.

[4]  Le 26 octobre 2011, l’ARC a écrit à la demanderesse pour l’informer qu’elle pourrait devoir payer de l’impôt sur les cotisations à son CELI qu’elle avait faites alors qu’elle n’était pas résidente du Canada, ainsi que sur les cotisations excédentaires à son CELI. Dans la lettre, trois options lui étaient proposées pour régler cet impôt dû. L’ARC a envoyé des lettres semblables pour les années d’imposition 2010, 2011 et 2012. L’ARC a envoyé toutes ces lettres à l’adresse canadienne que la demanderesse avait fournie dans sa déclaration T1 de 2009.

[5]  Malheureusement, en 2011, la demanderesse ne pouvait plus recevoir de courrier à cette adresse. Par conséquent, elle n’a pas reçu ces lettres. Elle n’a pris connaissance de la question de l’impôt excédentaire qu’après le 30 juin 2017, lorsqu’elle a été informée par la CIBC que son compte était détenu par l’ARC. 

[6]  La demanderesse a présenté une demande d’allègement de l’impôt sur les cotisations excédentaires et de l’impôt des non-résidents au moyen de lettres datées du 20 juillet 2017, du 20 août 2017 et de septembre 2017. L’ARC a rejeté cette demande dans une lettre datée du 2 février 2018. La demanderesse a sollicité un deuxième examen. L’ARC a aussi rejeté cette demande dans une lettre datée du 10 juillet 2018. C’est le deuxième refus qui fait l’objet de la présente demande de contrôle judiciaire.

[7]  Le paragraphe 207.06(1) de la LIR confère au ministre le pouvoir discrétionnaire de renoncer à l’impôt sur les cotisations au CELI dont un particulier serait redevable, ou de l’annuler si :

a) le particulier convainc le ministre que l’obligation de payer l’impôt fait suite à une erreur raisonnable;

b) sont effectuées sans délai sur un compte d’épargne libre d’impôt dont le particulier est titulaire une ou plusieurs distributions dont le total est au moins égal au total des sommes suivantes :

(i) la somme sur laquelle le particulier serait par ailleurs redevable de l’impôt,

(ii) le revenu, y compris le gain en capital, qu’il est raisonnable d’attribuer, directement ou indirectement, à la somme visée au sous-alinéa (i).

[8]  La demanderesse a demandé un allègement fiscal pour deux raisons principales. Premièrement, elle a déclaré avoir reçu de mauvais conseils d’un représentant de la CIBC, qui ne lui avait pas expliqué les exigences en matière de résidence pour le compte. Deuxièmement, elle a déclaré que, bien que l’ARC lui ait envoyé des avis au sujet des cotisations excédentaires, elle n’avait pris connaissance du problème qu’en juin et juillet 2017. Dès qu’elle en a pris connaissance, elle a agi sans tarder pour fermer le CELI.

[9]  Dans la décision faisant l’objet du contrôle, l’ARC a fourni les motifs suivants pour rejeter la demande d’allègement fiscal de la demanderesse :

[traduction]

Dans votre lettre, vous dites que vous n’avez pas été avisée des cotisations excédentaires et des cotisations de non-résidents versées en 2009 et que la première fois que votre [sic] a été informée des cotisations excédentaires et des cotisations de non‑résidents, c’était par votre institution financière le 30 juin 2017.

Un examen de votre situation et de nos dossiers montre que l’Agence du revenu du Canada vous a informé, par la poste en 2011, des cotisations excédentaires et des cotisations de non-résident qui se sont produites en 2009. Vous avez également reçu des avis en 2012, 2013, 2014 et 2015 pour les années d’imposition 2010, 2011, 2012, 2013 et 2014. Nos dossiers indiquent que vous avez continué de verser des cotisations en 2015 et en 2016, et que vous n’avez pas éliminé les cotisations excédentaires et les cotisations de non-résidents dans les meilleurs délais. Nous devons confirmer qu’après avoir examiné les documents que vous nous avez envoyés et les renseignements à notre disposition, aucune circonstance ne justifie l’annulation de l’impôt sur vos cotisations excédentaires au CELI.

[10]  La demanderesse soutient que l’ARC a commis une erreur en supposant qu’elle avait reçu les avis qu’elle lui avait envoyés, en l’absence d’une preuve en ce sens. De plus, elle soutient que l’ARC n’a pas tenu compte de l’erreur de la CIBC.

[11]  En réponse, le défendeur soutient que l’ARC n’est pas tenue de démontrer qu’un contribuable a reçu du courrier; elle n’a qu’à démontrer que ce courrier a été envoyé. La Cour d’appel fédérale a conclu, dans l’arrêt Bowen c Ministre du Revenu national, [1991] ACF no 1054, 1991 CarswellNat 520, au paragraphe 8, qu’« on ne peut certes pas […] imputer la responsabilité au Ministre » le fait qu’un contribuable n’a pas mis à jour son adresse auprès de l’ARC.

[12]  De plus, le défendeur soutient que le manuel de politique interne concernant les renonciations au titre du paragraphe 207.06(1) de la LIR prévoit que le fait d’obtenir de mauvais conseils des institutions financières ou de mal interpréter les avis de l’ARC ne sauraient, à eux seuls, constituer une erreur raisonnable. Le défendeur s’appuie en ce sens sur le principe selon lequel il incombe au contribuable de comprendre la loi (Kapil c Agence du revenu du Canada, 2011 CF 1373, au paragraphe 24).

[13]  J’accepte les arguments du défendeur. Compte tenu de la jurisprudence actuelle et du manuel de politique interne, la décision de l’ARC de ne pas renoncer à l’impôt était raisonnable.

[14]  Je tiens à féliciter la demanderesse pour la présentation compétente de ses arguments à l’audience relative au présent contrôle judiciaire. Toutefois, je ne peux accueillir la demande, et ce, pour les motifs énoncés ci-dessus.


JUGEMENT DANS LE DOSSIER T-1530-18

LA COUR STATUE que la présente demande de contrôle judiciaire est rejetée.

« Douglas R. Campbell »

Juge

Traduction certifiée conforme

Ce 4e jour de juin 2019

Maxime Deslippes


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


Dossier :

T-1530-18

 

INTITULÉ :

QIN JIANG c PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

DATE DE L’AUDIENCE :

6 MAI 2019

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE CAMPBELL

DATE DES MOTIFS :

8 MAI 2019

COMPARUTIONS :

Qin Jiang

 

La demanderesse (pour son propre compte)

Cherylyn Dickson

 

Pour le défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

Pour le défendeur

 

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