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Date : 20190513


Dossier : IMM‑3812‑18

Référence : 2019 CF 632

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 13 mai 2019

En présence de monsieur le juge Favel

ENTRE :

CHITHIRA RASAIAH

demanderesse

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I.  Aperçu

[1]  La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire déposée au titre du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 (la LIPR) à l’encontre de la décision du 18 juillet 2018 de la Section de la protection des réfugiés (la SPR) de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada (la Commission), par laquelle la SPR a conclu que la demanderesse n’était ni une réfugiée au sens de la Convention ni une personne à protéger aux termes des articles 96 et 97 de la LIPR.

[2]  Pour les motifs présentés ci‑dessous, la Cour conclut que la décision de la SPR est déraisonnable et que la demande de contrôle judiciaire est par conséquent accueillie.

II.  Contexte

[3]  La demanderesse est une citoyenne du Sri Lanka d’origine tamoule âgée de 47 ans. Son père est décédé, sa mère et ses deux sœurs habitent à Toronto, tandis que son frère habite au Royaume‑Uni. Elle est divorcée et n’a plus de famille au Sri Lanka.

[4]  Le 17 janvier 2001, l’avocat de la demanderesse a conseillé à sa cliente de quitter le Sri Lanka, et celle‑ci a décidé de déménager en Inde. Elle craint d’être persécutée par les autorités du Sri Lanka en raison de ses antécédents en matière d’arrestation et des liens présumés de son frère avec les Tigres de libération de l’Eelam tamoul (les TLET).

[5]  La demanderesse affirme que sa mère et elle ont été arrêtées en 1993 par la police sri lankaise à la place de son frère, qui avait déjà quitté le pays. Elle soutient avoir été battue par la police et avoir été interrogée sur l’endroit où se trouvait son frère, puis avoir été accusée d’entretenir des liens avec les TLET. La demanderesse et sa mère ont été détenues au commissariat de police et n’ont été libérées sous condition qu’au bout de deux semaines.

[6]  En 2000, les autorités du Sri Lanka ont arrêté la demanderesse pendant une manifestation tamoule tenue à la suite d’un attentat suicide perpétré à Colombo. Elle a une fois encore été accusée d’aider les TLET. Elle affirme avoir été détenue pendant 20 jours au commissariat de police, où elle aurait été torturée et interrogée par des membres des forces policières du Sri Lanka. La demanderesse a été libérée sous caution, à la condition qu’elle se présente au tribunal le 28 février 2001.

[7]  À la suite de son arrestation en 2000, la demanderesse a quitté le Sri Lanka en janvier 2001 et a habité en Inde jusqu’en 2003. Elle s’est ensuite rendue au Royaume-Uni pour y rencontrer l’homme d’origine tamoule qui est devenu son mari dans le cadre d’un mariage arrangé. Cependant, elle s’est rendu compte que son mariage n’était pas authentique et que son répondant vivait avec une autre femme. En 2004, le mari de la demanderesse a demandé le divorce depuis l’Inde, ce qui a eu pour conséquence de faire perdre à celle‑ci son statut au Royaume‑Uni. En 2008, la demanderesse a présenté une demande d’asile au Royaume‑Uni, mais sa demande a été rejetée et elle a été visée par une mesure de renvoi. En 2012, elle a présenté une demande d’asile après qu’elle est arrivée au Canada avec l’aide d’un passeur. Cette demande n’a été examinée qu’en 2013 en raison du nouveau système de traitement des demandes d’asile.

III.  Décision faisant l’objet du contrôle

[8]  Dans sa décision du 16 juillet 2018, la SPR a jugé que la demanderesse n’était ni une réfugiée au sens de la Convention ni une personne à protéger, et elle a par conséquent rejeté la demande au titre du paragraphe 107(1) de la LIPR.

[9]  La demanderesse a présenté plusieurs documents qui ont confirmé, selon la prépondérance des probabilités, qu’elle était une citoyenne du Sri Lanka. Le tribunal a conclu que la demanderesse était crédible parce qu’il n’y avait « [a]ucune omission, incohérence ou divergence importante » entre son témoignage et son Formulaire de renseignements personnels. La question déterminante lors de l’audience était celle de savoir si la demanderesse avait une crainte fondée d’être persécutée au Sri Lanka.

[10]  Lors de l’audience de la SPR, l’avocat de la demanderesse a souligné les éléments suivants du profil de risque de cette dernière afin de démontrer qu’elle craignait d’être persécutée au Sri Lanka parce qu’on la soupçonnait d’avoir des liens avec les TLET :

  • La demandeure d’asile est une femme sri-lankaise célibataire qui ne bénéficie d’aucun soutien familial au Sri Lanka.

  • Elle a fait l’objet d’arrestations dans le passé et a été soupçonnée d’être une partisane des TLET.

  • Il y a une accusation en instance contre elle, ce qui l’amènerait à faire l’objet d’autres interrogatoires et enquêtes.

  • À son retour au Sri Lanka depuis le Canada, ses titres de voyage montreraient qu’elle a vécu depuis 2012 au Canada, un pays où les membres de la diaspora tamoule sont perçus par le gouvernement sri-lankais comme étant des partisans des TLET.

  • En outre, il serait probablement découvert qu’elle a vécu pendant près de neuf ans au Royaume-Uni, un pays où les membres de la diaspora tamoule sont aussi perçus par le gouvernement sri‑lankais comme étant des partisans des TLET.

  • Son frère était recherché pour avoir été un partisan des TLET.

(Dossier certifié du tribunal (DCT), décision de la SPR datée du 18 juillet 2018, page 6)

[11]  Lorsqu’elle a rejeté la demande, la SPR a conclu que la situation au Sri Lanka s’était améliorée depuis la fin de la guerre civile en 2009 et que « ce [n’étaient] pas tous les Tamouls qui [faisaient] l’objet de contrôles » parce qu’ils étaient soupçonnés d’avoir des liens avec les TLET. Cependant, la SPR a reconnu que les éléments de preuve sur la situation au pays en ce qui concerne les Tamouls qu’on soupçonne être des partisans des TLET au Sri Lanka sont contradictoires. D’après une réponse à une demande d’information datée du 11 février 2015 et portant sur le traitement des Tamouls au Sri Lanka, la SPR a cité le directeur général du National Peace Council du Sri Lanka, qui a affirmé que « [l]es arrestations et les détentions [n’étaient] pas courantes, sauf lorsqu’elles [étaient] fondées sur des soupçons raisonnables d’activités criminelles » (DCT, cartable national de documentation sur le Sri Lanka daté du 30 avril 2018, page 120). En revanche, la SPR a conclu que des Tamouls soupçonnés d’être des partisans des TLET étaient toujours détenus au titre de la Prevention of Terrorism Act (loi sur la prévention du terrorisme), selon Amnistie internationale. Après avoir examiné l’ensemble de la preuve relative à la situation au pays, la SPR a souligné l’importance de procéder à l’examen du document produit par le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) et intitulé UNHCR Eligibility Guidelines for Assessing the International Protection Needs of Asylum-Seekers from Sri Lanka (principes directeurs établis par le HCR relativement à l’évaluation des besoins de protection internationale des demandeurs d’asile originaires du Sri Lanka) lors de l’évaluation du profil de risque de la demanderesse.

[12]  L’audition du témoignage de la demanderesse et l’examen des éléments de preuve au dossier n’ont pas convaincu la SPR que les membres de la famille de la demanderesse étaient considérés comme des partisans des TLET. Le tribunal a tenu compte de la « situation propre » à la demanderesse et a souligné que celle‑ci avait été arrêtée à deux reprises au Sri Lanka. La SPR a conclu que la demanderesse « n’a[vait] aucun lien direct avec les TLET […], que ce soit au Sri Lanka ou depuis qu’elle vi[vait] au Canada ». Même si la demanderesse était sous le coup d’une ordonnance judiciaire au Sri Lanka, la SPR était d’avis qu’il était peu probable que, « 17 ans plus tard, les autorités l’arrêt[ent] pour l’infraction relativement mineure qu’elle a[vait] commise ». La SPR a conclu que la demanderesse n’était pas, selon la prépondérance des probabilités, une personne soupçonnée d’être liée aux TLET.

[13]  La SPR a pris en compte la situation personnelle de la demanderesse, soit celle d’une femme tamoule célibataire. Le tribunal s’est penché sur la question de la possibilité de refuge intérieur (la PRI) et a conclu que la demanderesse aurait pu déménager à Colombo, et ce, malgré les défis qu’elle aurait dû surmonter. La SPR a conclu que le « profil [de la demanderesse] [était] très différent de celui des autres Tamoules qui [s’étaient] réinstallées à Colombo » compte tenu de son éducation et de sa capacité à communiquer en anglais. En outre, la demanderesse a habité à Colombo pendant de nombreuses années avant de quitter le Sri Lanka.

IV.  Questions en litige

[14]  Dans ses observations écrites, la demanderesse a soulevé les questions suivantes :

[traduction]

1. L’appréciation de la preuve faite par la Commission était‑elle déraisonnable compte tenu du profil particulier de la demanderesse?

2. La Commission a‑t‑elle ignoré ou mal interprété les éléments de preuve relatifs aux personnes qui ont déjà été accusées d’avoir des liens avec les TLET et qui font l’objet d’accusations connexes?

3. La Commission a‑t‑elle commis une erreur dans son examen de la persécution fondée sur le sexe, et en omettant de dûment prendre en compte ses propres Directives concernant la persécution fondée sur le sexe?

4. La Commission a‑t‑elle commis une erreur dans son appréciation des facteurs survenus après que la demanderesse a quitté le pays, et qui ont donné lieu à une demande sur place?

5. La Commission a‑t‑elle commis une erreur dans son évaluation de la situation au pays en présumant que la situation avait changé, sans toutefois chercher à savoir si les changements étaient « importants, efficaces et durables »?

5. La Commission a‑t‑elle aussi commis une erreur dans son évaluation de la PRI?

(Dossier de la demanderesse, exposé des arguments de la demanderesse, pages 144 et 145.)

[15]  Après avoir attentivement examiné les observations des deux parties, la Cour est d’avis que la question centrale en l’espèce consiste à savoir si la décision de la SPR est raisonnable compte tenu de la preuve au dossier.

V.  Norme de contrôle

[16]  La norme de la décision raisonnable s’applique aux conclusions de fait et aux conclusions mixtes de fait et de droit tirées par la SPR, par exemple en ce qui concerne son examen de la preuve ou ses conclusions sur le profil de risque (Tariq c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 692, au paragraphe 9; Ye c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2014 CF 647, aux paragraphes 17 et 18). Par conséquent, la Cour doit faire preuve de retenue à l’égard des conclusions de la SPR si celles‑ci appartiennent aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit (Dunsmuir c Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9, au paragraphe 47 [Dunsmuir]).

VI.  Analyse

[17]  Pour les motifs présentés ci‑dessous, la demande de contrôle judiciaire est accueillie.

[18]  La Cour est d’avis que la SPR n’a pas apprécié les éléments de preuve au dossier de manière adéquate. La demanderesse a elle‑même clairement exprimé qu’elle craignait d’être persécutée au Sri Lanka en raison de ses antécédents avec les autorités, qui la soupçonnaient d’être une partisane des TLET. À l’appui de sa demande, la demanderesse a présenté plusieurs documents au tribunal, notamment une ordonnance prononcée par un tribunal de Colombo. La Cour souligne que la SPR n’a ni écarté cette ordonnance ni remis son authenticité en question. En 1993, la Cour de Mount Lavinia, dans le district de Colombo, a délivré une ordonnance à l’encontre de la demanderesse et de 22 autres suspects arrêtés afin qu’ils comparaissent en 2001. La Cour reconnaît que la Commission a l’expertise nécessaire pour décider du poids à accorder à chaque élément de preuve, mais elle conclut que le passage suivant de la décision de la SPR pose problème :

Le tribunal estime que, bien qu’il existe probablement un dossier attestant que la demandeure d’asile a omis de comparaître en cour en 2001, aucun élément de preuve n’a été présenté pour démontrer qu’un mandat d’arrestation aurait été lancé contre elle dans le passé ou qu’aujourd’hui, 17 ans plus tard, les autorités l’arrêteraient pour l’infraction relativement mineure qu’elle a commise. Le tribunal estime que, même si la demandeure d’asile pourrait être soumise à un examen plus poussé à son retour au Sri Lanka en raison de son défaut de comparaître en cour en 2001, les activités subséquentes à son départ du Sri Lanka ne permettent pas de penser que les autorités s’intéressent actuellement à elle.

(Décision de la SPR datée du 18 juillet 2018, paragraphe 25.)

[19]  L’histoire personnelle de la demanderesse est celle d’une femme tamoule célibataire qui pourrait être perçue comme une partisane des TLET et qui est, aujourd’hui encore, sous le coup d’une ordonnance judiciaire. La Cour estime que la conclusion de la SPR — selon laquelle les autorités du Sri Lanka n’arrêteraient pas la demanderesse « 17 ans » après la délivrance de l’ordonnance judiciaire — n’est ni fondée ni étayée par des éléments de preuve documentaire.

[20]  Le défendeur soutient que les éléments de preuve relatifs à la situation au pays sont complexes et changeants, et il affirme que la preuve a été prise en compte de manière appropriée, comme on peut le constater à la lecture de l’intégralité de la décision de la SPR. Après avoir réalisé un examen attentif des éléments de preuve objectifs figurant dans le DCT, la Cour relève que, selon ce qui y est précisé, « les autorités du Sri Lanka tiennent à jour une [TRADUCTION] "liste ‘d’exclusion’" qui est consultée à l’aéroport, sur laquelle figurent [sic] le nom de personnes visées par une ordonnance de la cour ou un mandat d’arrestation; les personnes qui figurent sur la liste seront arrêtées et dirigées vers les autorités sri-lankaises » (DCT, réponse à une demande d’information datée du 8 avril 2015, page 155). Ainsi, les arrestations et les détentions antérieures de la demanderesse, conjointement avec l’ordonnance judiciaire, auraient dû attirer l’attention du tribunal sur le fait qu’elle allait vraisemblablement figurer sur cette liste et qu’elle serait exposée à un risque de persécution si elle devait retourner dans son pays.

[21]  La demanderesse a soutenu que la SPR avait commis une erreur dans son examen de la persécution fondée sur le sexe, de même qu’en omettant de dûment prendre en compte les directives du président concernant la persécution fondée sur le sexe. Pour sa part, le défendeur a affirmé que ces directives ne sont pas contraignantes; elles constituent un outil que le tribunal peut utiliser pour évaluer les éléments de preuve lors du traitement des demandes d’asile présentées par des femmes (Kaur c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 1379, au paragraphe 44; Newton c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2000] ACF no 738, au paragraphe 17).

[22]  La Cour rappelle qu’il faut procéder à un examen minutieux des risques auxquels pourraient être exposées les personnes qui ont un profil particulier (Ariprasatham c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CF 16, au paragraphe 22 [Ariprasatham]). Bien que la SPR ait clairement reconnu qu’il était important de tenir compte de la situation personnelle des demandeurs, elle n’a pas pris en compte le profil de la demanderesse à titre de femme tamoule qui craint d’être persécutée au Sri Lanka. Le tribunal a seulement abordé les éléments liés au sexe de la demanderesse dans son évaluation de la PRI. La Cour convient avec le défendeur que les directives concernant la persécution fondée sur le sexe ne sont pas contraignantes. « Toutefois, le fait que la SPR ne les applique pas dans les cas qui le justifient peut constituer une erreur susceptible de contrôle » (décision Ariprasatham, au paragraphe 15; Khon c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CF 143, aux paragraphes 18 à 20). Par conséquent, la Cour conclut que la SPR n’a pas tenu compte de la possibilité que la demanderesse puisse craindre avec raison d’être persécutée au Sri Lanka, non seulement en raison de son origine ethnique, mais aussi de son sexe.

[23]  La Cour conclut que la SPR a commis une erreur dans son analyse de la situation de la demanderesse à titre de demanderesse d’asile déboutée. La SPR a indiqué dans ses motifs qu’il n’y avait pas suffisamment de raisons pour que la demanderesse craigne d’être persécutée en tant que demanderesse d’asile déboutée au Sri Lanka, parce qu’elle avait conclu que celle‑ci ne serait pas considérée comme une personne ayant des liens avec les TLET. Cependant, la SPR ne semble pas aborder dans ses motifs la simple possibilité que le gouvernement du Sri Lanka puisse présumer qu’un individu d’origine tamoule est un membre ou un partisan des TLET en raison de son statut de demandeur d’asile débouté. L’avocat de la demanderesse a également présenté des observations orales lors de l’audience devant la SPR concernant les Tamouls qui vivent à l’étranger pendant plusieurs années dans des pays comme le Royaume-Uni et le Canada. Il a soutenu que les Tamouls qui retournent au Sri Lanka risquent de subir de mauvais traitements aux mains des autorités sri lankaises, simplement parce qu’on considère qu’ils ont des liens avec les TLET :

[L]es demandeurs d’asile déboutés sont plus susceptibles d’être rapidement associés aux TLET, que ce soit parce qu’ils ont demandé l’asile ou parce qu’on présume qu’ils ont participé à des activités de la diaspora tamoule qui - de l’avis du gouvernement du Sri Lanka - appuient les TLET.

(DCT, réponse à une demande d’information datée du 11 février 2015, page 117)

[24]  Le défendeur allègue que la SPR n’a pas commis d’erreur en se penchant sur les liens réels de la demanderesse avec les TLET. Or, la Cour est convaincue par l’argument de la demanderesse selon lequel la SPR s’est concentrée sur la participation de celle‑ci aux activités des TLET et sur les liens réels qu’elle avait avec le groupe, et qu’elle n’a pas pleinement pris en considération la possibilité que les autorités sri lankaises présument que la demanderesse avait des liens avec les TLET.

[25]  La Cour conclut que la SPR était tenue de tenir compte de tous les éléments de preuve dont elle disposait. Car « [l]es agents doivent examiner cumulativement les facteurs de risque avancés par un demandeur (K.S. c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 999, au paragraphe 42); en effet, l’agent ne peut examiner séparément ces risques » (Kailajanathan c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2017 CF 970, au paragraphe 19).

[26]  Pour les motifs exposés ci‑dessus, la Cour conclut que la décision de la SPR est déraisonnable parce qu’elle n’appartient pas « aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit » (Dunsmuir, au paragraphe 47).

[27]  Aucuns dépens ne seront adjugés dans la présente affaire. La demanderesse n’a pas été en mesure de démontrer qu’il existait des raisons spéciales justifiant l’adjudication de dépens en l’espèce. En outre, les erreurs de la Commission ne justifient pas que des dépens soient accordés, comme le précise l’article 22 des Règles des cours fédérales en matière de citoyenneté, d’immigration et de protection des réfugiés, DORS/93‑22.

VII.  Conclusion

[28]  La demande de contrôle judiciaire est accueillie. L’affaire est renvoyée à un tribunal différemment constitué de la SPR pour nouvel examen. Aucune question de portée générale n’est certifiée, et aucuns dépens ne sont adjugés.


JUGEMENT dans le dossier IMM‑3812‑18

LA COUR STATUE que :

  1. La demande de contrôle judiciaire est accueillie.

  2. L’affaire est renvoyée à un tribunal différemment constitué de la Section de la protection des réfugiés pour nouvel examen.

  3. Aucune question de portée générale n’est certifiée.

  4. Aucuns dépens ne sont adjugés.

« Paul Favel »

Juge

Traduction certifiée conforme

Ce 11e jour de juillet 2019.

Karine Lambert, traductrice


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM‑3812‑18

INTITULÉ :

CHITHIRA RASAIAH c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

LIEU DE L’AUDIENCE :

TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 12 MARS 2019

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE FAVEL

DATE DU JUGEMENT ET DES MOTIFS :

LE 13 MAI 2019

COMPARUTIONS :

Timothy Wichert

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

Amina Riaz

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Avocats

Jackman, Nazami & Associates

Toronto (Ontario)

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

Procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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