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Date : 20190523


Dossier : IMM‑3104‑18

Référence : 2019 CF 718

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 23 mai 2019

En présence de monsieur le juge James W. O'Reilly

ENTRE :

THI THUY DA NGUYEN

demanderesse

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I.  Aperçu

[1]  Mme Thi Thuy Da Nguyen a voulu parrainer son époux, M. Minh Tuan Che, au titre de la catégorie du regroupement familial en vertu du paragraphe 12(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 (la LIPR). Un agent d’immigration a refusé la demande de Mme Nguyen au motif que le mariage visait principalement à permettre à M. Che d’immigrer au Canada et qu’il n’était pas authentique (conformément au paragraphe 4(1) du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés [DORS/2002‑227]).

[2]  Mme Nguyen a interjeté appel de la décision de l’agent devant la Section d’appel de l’immigration (la SAI). La SAI a conclu que Mme Nguyen avait répondu adéquatement à plusieurs des préoccupations ayant mené l’agent à sa conclusion. Elle a néanmoins conclu que le témoignage du couple comportait encore certaines incohérences qui jetaient un doute sur leur crédibilité. Elle a donc rejeté l’appel de Mme Nguyen.   

[3]  Mme Nguyen fait valoir que la conclusion de la SAI était déraisonnable et que ses motifs étaient insuffisants. Plus particulièrement, elle soutient que la SAI s’est concentrée sur des incohérences mineures qui n’auraient pas dû mener à des conclusions défavorables quant à la crédibilité. Subsidiairement, elle affirme que la SAI n’a pas expliqué la manière dont ces incohérences ont mené à un résultat négatif. Mme Nguyen me demande d’annuler la décision de la SAI et d’ordonner à un autre tribunal de réexaminer sa demande.

[4]  Je ne vois aucune raison d’infirmer la décision de la SAI. Cette dernière s’est penchée sur les questions dont elle était saisie, a examiné la preuve de manière juste et a fourni une explication claire de sa conclusion.

[5]  Il y a deux questions en litige :

  1. La décision de la SAI était‑elle déraisonnable?

  2. La SAI a‑t‑elle omis de fournir des motifs suffisants?

II.  Décision de la SAI

[6]  La SAI a conclu que le témoignage du couple avait permis de répondre à plusieurs des questions qui avaient mené l’agent à tirer une conclusion négative, notamment les éléments de preuve concernant leur rencontre, leurs fiançailles, leur mariage, leurs connaissances au sujet de leur passé, leur soutien financier et leurs responsabilités à l’égard de leurs enfants. 

[7]  Cependant, la SAI a conclu qu’il restait plusieurs incohérences, principalement en ce qui a trait aux réponses spontanées données aux questions auxquelles le couple ne s’attendait peut‑être pas. Mme Nguyen a déclaré avoir rencontré M. Che en 2007 à l’occasion d’un mariage au Vietnam. M. Che a affirmé qu’elle était en vacances. Il ne savait pas que Mme Nguyen avait fermé son salon de manucure en 2008 et qu’elle était déménagée en Colombie‑Britannique pour étudier l’autisme, même s’ils se parlaient supposément au moins deux fois par semaine au téléphone. M. Che a affirmé que sa sœur n’était pas mariée, même s’il avait assisté à son mariage trois jours avant le sien. La SAI a souligné que les circonstances du mariage de la sœur de M. Che avaient une ressemblance frappante avec celui de M. Che et Mme Nguyen. 

III.  Première question en litige – La décision de la SAI était‑elle déraisonnable?

[8]  Mme Nguyen fait valoir que la SAI s’est concentrée sur des incohérences relativement futiles de la preuve, et ce, sans tenir compte des nombreux facteurs positifs militant en faveur du couple, dont la durée de leur relation, leur cérémonie de mariage, la présence de membres de la famille et leur contact soutenu.

[9]  Je suis en désaccord.

[10]  La décision de la SAI découle d’une appréciation équilibrée et exhaustive de la preuve, y compris des facteurs positifs à l’appui du parrainage. Cependant, il reste d’importantes incohérences, décrites ci‑dessus, qui ont amené la SAI à douter de la crédibilité du couple. Sa conclusion n’était pas déraisonnable.

IV.  Deuxième question en litige – La SAI a‑t‑elle omis de fournir des motifs suffisants?

[11]  Mme Nguyen fait également valoir que la SAI n’a pas expliqué comment elle en était arrivée à une conclusion négative. Autrement dit, elle n’a pas établi un lien entre le « résultat » (l’issue) et le « pourquoi » (le raisonnement) (voir l’arrêt R c REM, 2008 CSC 51, au paragraphe 17). Plus particulièrement, Mme Nguyen affirme que la SAI a omis d’expliquer la façon dont la preuve liée au mariage de la sœur de M. Che était pertinente à sa conclusion. 

[12]  Encore là, je suis en désaccord.

[13]  La SAI a trouvé étrange que le récit du mariage de M. Che ressemble aussi étroitement à celui de sa sœur. Elle s’est également demandé pourquoi M. Che avait menti au sujet du mariage de sa sœur. Selon moi, la SAI a suffisamment expliqué la manière dont cette preuve a influencé son appréciation de la crédibilité du couple. 

V.  Conclusion et dispositif

[14]  L’analyse de la preuve faite par la Commission n’était pas déraisonnable, et ses motifs étaient suffisants. Je dois donc rejeter la présente demande de contrôle judiciaire. Aucune des parties n’a proposé une question de portée générale à certifier, et aucune question n’est énoncée.


JUGEMENT dans le dossier IMM‑3104‑18

LA COUR STATUE que la demande de contrôle judiciaire est rejetée. Aucune question de portée générale n’est énoncée.

« James W. O'Reilly »

Juge

Traduction certifiée conforme

Ce 3e jour de juin 2019.

Sophie Reid‑Triantafyllos, traductrice


ANNEXE

Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, ch 27

Immigration and Refugee Protection Act, SC 2001, c 27

Sélection des résidents permanents

Selection of Permanent Residents

Regroupement familial

Family reunification

12 (1) La sélection des étrangers de la catégorie « regroupement familial » se fait en fonction de la relation qu’ils ont avec un citoyen canadien ou un résident permanent, à titre d’époux, de conjoint de fait, d’enfant ou de père ou mère ou à titre d’autre membre de la famille prévu par règlement.

12 (1) A foreign national may be selected as a member of the family class on the basis of their relationship as the spouse, common‑law partner, child, parent or other prescribed family member of a Canadian citizen or permanent resident.

Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés (DORS/2002‑227)

Immigration and Refugee Protection Regulations (SOR/2002‑227), s 4(1)

Notion de famille

Family Relationships

Mauvaise foi

Bad Faith

4 (1) Pour l’application du présent règlement, l’étranger n’est pas considéré comme étant l’époux, le conjoint de fait ou le partenaire conjugal d’une personne si le mariage ou la relation des conjoints de fait ou des partenaires conjugaux, selon le cas :

4 (1) For the purposes of these Regulations, a foreign national shall not be considered a spouse, a common‑law partner or a conjugal partner of a person if the marriage, common‑law partnership or conjugal partnership

a) visait principalement l’acquisition d’un statut ou d’un privilège sous le régime de la Loi;

(a) was entered into primarily for the purpose of acquiring any status or privilege under the Act; or

b) n’est pas authentique.

(b) is not genuine.

 


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM‑3104‑18

 

INTITULÉ :

THI THUY DA NGUYEN c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 7 FÉVRIER 2019

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE  O'REILLY

 

DATE DU JUGEMENT ET DES MOTIFS :

LE 23 MAI 2019

 

COMPARUTIONS :

Cemone Morlese

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

Suzanne M. Bruce

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

GRICE & ASSOCIATES

Avocats

Toronto (Ontario)

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

Sous‑procureure générale du Canada

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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