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Date : 20190522


Dossier : IMM-5272-18

Référence : 2019 CF 727

Montréal (Québec), le 22 mai 2019

En présence de madame la juge Roussel

ENTRE :

GURDISH SINGH

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

Prononcés à l’audience à Montréal (Québec) le 22 mai 2019

(La syntaxe et la grammaire ont été corrigées et des renvois à la jurisprudence

ont été incorporés)

[1]  Le demandeur, Gurdish Singh, sollicite le contrôle judiciaire d’une décision de la Section d’appel des réfugiés [SAR], datée du 4 octobre 2018, rejetant l’appel et confirmant la décision de la Section de la protection des réfugiés [SPR] aux termes du paragraphe 111(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 [LIPR] que le demandeur n’a ni la qualité de réfugié au sens de la Convention ni celle de personne à protéger.

[2]  Le demandeur est citoyen de l’Inde et originaire de la région du Pendjab. Au soutien de sa demande d’asile qu’il a présentée en septembre 2016, le demandeur allègue être un partisan du parti Congrès au Pendjab et qu’il est ciblé par des adhérents du parti opposé, le Shiromani Akali Dal-Badal [SAD].

[3]  Le 12 décembre 2016, la SPR rejette la demande d’asile au motif que le comportement du demandeur n’est pas compatible avec celui d’une personne craignant d’être persécutée et que son témoignage n’est pas crédible. Elle conclut également qu’il existe une possibilité de refuge interne [PRI] ailleurs en Inde.

[4]  Le demandeur porte cette décision en appel devant la SAR. Celle-ci conclut que la SPR a erré relativement à la crédibilité du demandeur, étant d’avis que le demandeur avait fourni des explications suffisantes pendant son audience devant la SPR. La SAR constate également que la SPR a commis quelques erreurs dans son évaluation de la PRI. Néanmoins, pour des motifs différents, elle confirme la conclusion de la SPR selon laquelle le demandeur a une PRI ailleurs dans deux (2) villes en Inde.

[5]  Elle conclut ainsi en soulignant notamment que les élections de février 2017 au Pendjab ont porté au pouvoir le parti Congrès, que le demandeur est un partisan de ce parti depuis plus de vingt (20) ans, que la police du Pendjab travaille maintenant pour le parti Congrès et que même s’il subsiste des affrontements entre les membres du parti Congrès et les partis de l’opposition, ce sont majoritairement les membres du parti Congrès qui visent les membres du parti SAD. Bien qu’elle accepte l’existence d’un système de vérification des locataires obligatoire dans les deux (2) villes où elle juge qu’il y a une PRI et le fait que les forces de l’ordre ont des moyens de communication plus modernes, la SAR estime que la police du Pendjab n’aurait plus l’intérêt, ni les moyens de poursuivre le demandeur partout en Inde, en tenant compte que l’influence du parti SAD est en grande partie limitée à l’État du Pendjab. Quant au deuxième volet de l’analyse d’une PRI, la SAR constate que la SPR n’a commis aucune erreur dans l’évaluation de la raisonnabilité des PRI proposées et que le demandeur n’a soumis aucun argument pour contester l’analyse faite par la SPR.

[6]  Le demandeur soutient que la conclusion de la SAR sur l’existence d’une PRI est déraisonnable et contraire à la preuve. Selon le demandeur, la SAR ne pouvait raisonnablement conclure qu’il ne serait pas retrouvé par le parti SAD dans les deux (2) villes identifiées comme PRI tout en reconnaissant l’efficacité ou l’existence du système d’enregistrement et de vérification de locataires. De plus, il soutient que la preuve documentaire sur laquelle s’appuie la SAR n’établit pas que le parti SAD n’a plus de liens avec la police ni que le parti Congrès contrôle la police au point que le parti SAD ne serait pas en mesure de le retrouver en utilisant le système de vérification des locataires dans les deux (2) villes où il existe une PRI.

[7]  La norme de contrôle applicable à une décision portant sur l’existence d’une PRI est celle de la décision raisonnable (Brahim c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CF 503 au para 13; Verma c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CF 404 au para 14).

[8]  Lorsque la norme du caractère raisonnable s’applique, le rôle de la Cour est de déterminer si la décision appartient aux « issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit ». Si « le processus et l’issue en cause cadrent bien avec les principes de justification, de transparence et d’intelligibilité », il n’appartient pas à cette Cour d’y substituer l’issue qui lui serait préférable (Dunsmuir c Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9 au para 47 [Dunsmuir]; Canada (Citoyenneté et Immigration) c Khosa, 2009 CSC 12 au para 59 [Khosa]).

[9]  Après examen de la preuve documentaire en question, la Cour ne peut souscrire aux arguments du demandeur. Bien que le demandeur ait été invité à commenter spécifiquement sur une PRI dans les deux (2) villes en question et sur les onglets du Cartable national de documentation sur lesquels s’est appuyée la SAR, le demandeur n’a pas démontré de manière satisfaisante que les autorités policières sont toujours contrôlées par le parti SAD. Au contraire, la preuve démontre plutôt que les autorités policières travaillent avec le parti au pouvoir, le parti Congrès, que l’influence du parti SAD se limite dans une large mesure à l’État du Pendjab et que c’est maintenant le parti Congrès qui vise majoritairement les membres du parti SAD. En l’absence d’une preuve contraire, la SAR pouvait raisonnablement conclure que, selon la prépondérance des probabilités, le demandeur ne serait pas persécuté dans les deux (2) villes en question ni qu’il serait une personne d’intérêt pour la police du Pendjab.

[10]  Bien que le demandeur ne soit pas d’accord avec les conclusions de la SAR, il ne revient pas à cette Cour de réévaluer et de soupeser la preuve pour en arriver à une conclusion qui serait favorable au demandeur (Khosa au para 59).

[11]  En conclusion, la Cour est d’avis que la décision de la SAR est raisonnable puisqu’elle appartient « aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit » et qu’elle est justifiée d’une manière qui satisfait aux critères de transparence et d’intelligibilité du processus décisionnel (Dunsmuir au para 47).

[12]  La demande de contrôle judiciaire est rejetée. Aucune question de portée générale n’est certifiée.


JUGEMENT au dossier IMM-5272-18

LA COUR STATUE que :

  1. La demande de contrôle judiciaire est rejetée;

  2. Aucune question de portée générale n’est certifiée.

« Sylvie E. Roussel »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-5272-18

INTITULÉ :

GURDISH SINGH c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

LIEU DE L’AUDIENCE :

Montréal (Québec)

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 22 MAI 2019

JUGEMENT et motifs :

LA JUGE ROUSSEL

DATE DES MOTIFS :

LE 22 MAI 2019

COMPARUTIONS :

Claude Whalen

Pour le demandeur

Lynne Lazaroff

Pour le défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Claude Whalen

Avocat

Montréal (Québec)

Pour le demandeur

Procureur général du Canada

Montréal (Québec)

Pour le défendeur

 

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