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Date : 20190521


Dossier : IMM‑4412‑18

Référence : 2019 CF 716

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 21 mai 2019

En présence de monsieur le juge James W. O’Reilly

ENTRE :

ALIM LOEM

demanderesse

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

 ET DE L’IMMIGRATON

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I.  Aperçu

[1]  Mme Alim Loem a demandé l’asile au Canada en invoquant sa crainte d’être maltraitée par son ex‑mari, M. Antonio Sarno, un citoyen canadien vivant en Chine. Mme Loem a allégué que, si elle était renvoyée du Canada au Cambodge, M. Sarno serait à ses trousses, et ce, à la fois pour se venger, car la demanderesse avait signalé à la police les mauvais traitements qu’il lui avait fait subir, et pour obtenir la garde de leur fille.

[2]  Un tribunal de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (la Commission) a conclu que les craintes de Mme Loem étaient conjecturales, puisque, dans les derniers temps, M. Sarno ne l’avait pas menacée et n’avait pas fait de démarches pour obtenir la garde de leur fille, et parce que la Chine est un grand pays et que sa proximité géographique du Cambodge n’exposerait pas nécessairement Mme Loem à un risque accru. De plus, la Commission a conclu qu’elle n’avait pas compétence pour trancher la question de savoir si la fille de Mme Loem resterait au Canada ou retournerait avec elle au Cambodge.

[3]  Mme Loem prétend que la décision de la Commission était déraisonnable, parce que cette dernière a commis une erreur en concluant qu’elle n’avait pas compétence pour examiner la question de savoir où vivrait la fille de Mme Loem et parce qu’elle n’a pas tenu compte de la preuve à l’appui de la demande d’asile de Mme Loem. Elle me demande d’annuler la décision de la Commission et d’ordonner à un autre tribunal de réexaminer sa demande.

[4]  Je souscris à la prétention de Mme Loem quant à la question de la compétence. Bien que la Commission n’ait pas le pouvoir de rendre une ordonnance concernant le lieu de résidence de la fille de Mme Loem, elle a la responsabilité d’examiner si Mme Loem pourrait être exposée à un risque accru de préjudice si elle emmenait sa fille avec elle au Cambodge. Pour ce motif, j’accueillerai la demande de contrôle judiciaire. Je n’ai pas besoin d’examiner les autres motifs invoqués par Mme Loem.

II.  La conclusion de la Commission selon laquelle elle n’avait pas compétence pour examiner la question de savoir où vivrait la fille de Mme Loem était‑elle déraisonnable ?  

[5]  Le ministre prétend que la Commission n’avait pas compétence pour examiner la question de l’endroit où allait vivre la fille de Mme Loem, qui est née au Canada. En tant que citoyenne canadienne, la fille n’avait pas droit à une évaluation des risques. Toute préoccupation relative à son intérêt supérieur devrait être traitée dans le contexte d’une demande visant la prise de mesures spéciales fondées sur des motifs d’ordre humanitaire.

[6]  Je ne souscris pas à la prétention du ministre. Le Commission devait tenir compte de la question du lieu probable de résidence de la fille de Mme Loem pour analyser adéquatement les risques auxquels Mme Loem est exposée au Cambodge. Selon la preuve, M. Sarno avait, par le passé, fait de sérieux efforts et proféré des menaces dans le but d’obtenir la garde de la fille de Mme Loem. Par conséquent, si Mme Loem rentrait au Cambodge avec sa fille, elle serait exposée à un risque plus important que si elle voyageait seule. Il s’agissait d’un facteur pertinent dont la Commission devait tenir compte et, en l’absence d’une analyse à cet égard, la conclusion de la Commission était déraisonnable.

III.  Conclusion et décision

[7]  La Commission a déraisonnablement omis d’examiner la question de savoir où vivrait probablement la fille de Mme Loem ; cette question était pertinente pour les besoins de son analyse du risque auquel Mme Loem était exposée. Je dois donc accueillir la demande de contrôle judiciaire et ordonner à un autre tribunal d’examiner la demande d’asile de Mme Loem. Aucune des parties ne m’a proposé une question de portée générale en vue de la certification, et aucune question n’est énoncée.


JUGEMENT dans le dossier no IMM‑4412‑18

LA COUR STATUE que la demande de contrôle judiciaire est accueillie. L’affaire est renvoyée à un autre tribunal pour nouvel examen. Aucune question de portée générale n’est énoncée.

« James W. O’Reilly »

Juge

Traduction certifiée conforme

Ce 23e jour de mai 2019

Maxime Deslippes


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM‑4412‑18

 

INTITULÉ :

ALIM LOEM c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 3 AVRIL 2019

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE O’REILLY

 

DATE DU JUGEMENT ET DES MOTIFS :

LE 21 MAI 2019

 

COMPARUTIONS :

Luke McRae

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

Alex Kam

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Luke McRae

Avocat

Toronto (Ontario)

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

Sous‑procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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