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Date : 20040506

Dossier : IMM-6479-02

Référence : 2004 CF 662

ENTRE :

                                                    SOPHIA LAVERNE WILLIAMS

                                                                                                                                       demanderesse

                                                                             et

                            MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                             défendeur

                                                  MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE PHELAN

Résumé

[1]                Il s'agit encore une fois d'une demande de contrôle judiciaire à l'égard de la délicate question de l'application de l'article 196 de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la LIPR).

[2]                La question précise du présent contrôle judiciaire est celle de savoir si l'article 196 s'applique aux appels interjetés à l'égard du parrainage d'une demande d'établissement et si, par conséquent, il est mis fin à de tels appels lorsque la personne parrainée est interdite de territoire pour raison de grande criminalité et lorsqu'elle ne fait pas l'objet d'un sursis.


[3]                Pour les motifs énoncés, je conclus que l'article 196 s'applique effectivement à de tels appels et qu'il a été mis fin à l'appel. Le présent contrôle judiciaire est rejeté.

Les faits

[4]                La demanderesse, Sophie Laverne Williams, a déposé un appel à l'égard du refus du parrainage d'une demande de résidence permanente présentée par son époux, Errol George Williams. Cet appel a été déposé auprès de la Section d'appel de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié le 6 novembre 2001 suivant le paragraphe 77(3) de l'ancienne Loi sur l'immigration, L.R.C. 1985, ch. I-2 (l'ancienne loi).

[5]                La personne parrainée, M. Williams, est un citoyen de la Jamaïque qui est entré au Canada en tant que visiteur en 1977.

[6]                M. et Mme Williams se sont mariés en 1986 et ils ont trois enfants qui sont tous citoyens canadiens.

[7]                Vers la fin de 1987, M. Williams a présenté une demande d'établissement de l'intérieur du Canada, demande qui était parrainée par son épouse. Il a reçu un permis ministériel un an plus tard.


[8]                M. Williams avait été déclaré coupable de méfaits publics en 1982. En octobre 1997, alors qu'il était en voie d'obtenir une réhabilitation afin de favoriser sa demande d'établissement parrainée, M. Williams a été accusé d'une infraction de complot en vue de faire le trafic d'une substance désignée.

[9]                Le 2 novembre 1999, M. Williams a été déclaré coupable de complot en vue de faire le trafic d'héroïne. Il a été condamné à six ans de prison de même qu'à six mois de détention avant procès.

[10]            Compte tenu de sa déclaration de culpabilité, M. Williams était une personne non admissible à l'obtention du statut de résident permanent suivant l'alinéa 19(1)a) de l'ancienne loi. Le 24 octobre 2001, un agent des visas a rejeté la demande de parrainage.

[11]            Bien que M. Williams n'ait aucun droit d'appel, Mme Williams avait effectivement un droit, suivant l'article 77 de l'ancienne loi, d'interjeter appel de la décision rendue à l'égard de la demande de parrainage. Son appel a été déposé auprès de la SAI le 6 novembre 2001.

[12]            Le 30 avril 2002, M. Williams a fait l'objet d'une mesure de renvoi. Étant donné qu'il ne s'était jamais établi au Canada en tant que résident permanent, il n'avait aucun droit d'interjeter un appel suivant l'article 70 de l'ancienne loi.


[13]            Son expulsion a immédiatement été ordonnée et était prévue pour le 22 mai 2002. La veille de l'expulsion, Mme la juge Hansen, en vertu de la Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. 1985, ch. F-7, a ordonné un sursis à l'exécution de la mesure de renvoi jusqu'à ce que la Section d'appel de l'immigration (la SAI) tranche l'appel déposé par la répondante (Mme Williams).

[14]            Immédiatement après qu'eut été rendue l'ordonnance de sursis de la juge Hansen, il y a eu entre les avocats un échange de lettres dont l'essence était que l'avocat du défendeur informait la demanderesse que, compte tenu de l'ordonnance de la juge Hansen, le ministère n'avait pas l'intention de renvoyer M. Williams jusqu'à ce que soit tranché l'appel déposé par sa répondante auprès de la SAI.

[15]            Le 2 août 2002, le défendeur a envoyé à la demanderesse et à la SAI un Avis de désistement afin que, suivant l'article 196 de la LIPR, il soit mis fin à l'appel déposé par la demanderesse.

[16]            La LIPR est entrée en vigueur le 28 juin 2002. La disposition fondamentale qui est entrée en vigueur à l'égard de la présente affaire est l'article 196 qui prévoit ce qui suit :


Malgré l'article 192, il est mis fin à l'affaire portée en appel devant la Section d'appel de l'immigration si l'intéressé est, alors qu'il ne fait pas l'objet d'un sursis au titre de l'ancienne loi, visé par la restriction du droit d'appel prévue par l'article 64 de la présente loi.

Despite section 192, an appeal made to the Immigration Appeal Division before the coming into force of this section shall be discontinued if the appellant has not been granted a stay under the former Act and the appeal could not have been made because of section 64 of this Act.


[17]            Une audience a eu lieu afin de déterminer si la SAI avait compétence pour poursuivre l'appel. Le 29 novembre 2002, la SAI a accepté la prétention du défendeur selon laquelle il avait été mis fin à l'appel.

[18]            La SAI a statué que selon le libellé de l'article 196, l'esprit de la LIPR, l'objectif qu'avait le législateur en adoptant la LIPR et l'article 196 en particulier, il était évident que l'article 196 s'appliquait aux appels présentés à l'égard des parrainages.

[19]            La SAI a statué que les deux conditions préalables à l'application de l'article 196 et à la fin de l'appel avaient été remplies, à savoir : (1) l'intéressé n'avait pas fait l'objet d'un sursis au titre de l'ancienne loi et (2) il était visé par la restriction du droit d'appel prévue par l'article 64 de la LIPR étant donné que l'infraction commise par M. Williams était punie au Canada par un emprisonnement de plus de deux ans.

[20]            La SAI a de plus conclu que la demanderesse avait eu la possibilité pleine et entière d'exercer ses droits d'appel avant le 28 juin 2002 et qu'elle aurait pu présenter une demande en vue d'obtenir une date d'audience avant le 28 juin 2002.

[21]            Devant la Cour, la demanderesse a prétendu principalement deux choses, à savoir :


1.          Que l'article 196 de la LIPR ne s'appliquait pas aux appels à l'égard des parrainages parce qu'un répondant ne pouvait pas obtenir un sursis au titre de l'ancienne loi. La prétention est fondée sur la prémisse selon laquelle le législateur n'aurait pas créé une condition (obtenir un sursis) qui ne peut pas être remplie lorsque les circonstances l'exigent. Mme Williams n'aurait jamais pu obtenir un sursis aux termes de la loi.                                              

2.          Subsidiairement, que l'ordonnance de la juge Hansen constituait un sursis étant donné que le défendeur dans ce dossier était dans l'impossibilité d'obtenir un sursis.

Analyse

[22]            Depuis la tenue de l'audience du présent contrôle judiciaire, la Cour d'appel fédérale a rendu l'arrêt Medovarski c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2004 CAF 85.

[23]            Bien que l'arrêt de la Cour d'appel fédérale ne soit pas déterminant quant aux questions en litige dans la présente affaire, ce que la Cour a déclaré à l'égard du sens de l'expression « objet d'un sursis » établit de façon significative l'étendue et la raison d'être de cette portion de la disposition. Les observations faites tant par les juges formant la majorité que par le juge minoritaire indiquent de façon significative l'interprétation qu'il faut donner à l'article 196 et l'application qui doit en être faite.

[24]            Selon mon interprétation de l'arrêt Medovarski, précité, le mot « sursis » renvoie seulement aux sursis qui résultent automatiquement d'une disposition dans un texte de loi et, par conséquent, n'inclut pas les sursis « discrétionnaires » obtenus à la suite d'une demande.

La norme de contrôle

[25]            Les parties ont reconnu, et je suis d'accord avec elles, qu'étant donné que la question en l'espèce est une question de compétence et une question de droit, la norme de contrôle appropriée est celle de la décision correcte.

Les principes d'interprétation

[26]            La Cour suprême du Canada dans l'arrêt Rizzo & Rizzo Shoes Ltd. (Re), [1998] A.C.S. no 2, a adopté la conclusion de Driedger à l'égard de la méthode appropriée d'interprétation des lois.

[Traduction] Aujourd'hui il n'y a qu'un seul principe ou solution : il faut lire les termes d'une loi dans leur contexte global en suivant le sens ordinaire et grammatical qui s'harmonise avec l'esprit de la loi, l'objet de la loi et l'intention du législateur.

Le sens ordinaire


[27]            La présente demande peut être tranchée en examinant le sens ordinaire des mots de l'article 196 comme l'a clarifié l'arrêt Medovarski, précité. Mme Williams est une personne qui interjette un appel, elle n'a pas le droit d'obtenir automatiquement un sursis et, par conséquent, elle « ne fait pas l'objet d'un sursis au titre de l'ancienne loi » .

[28]            Quant à la deuxième partie de l'article 196, « la restriction du droit d'appel prévue par l'article 64 de la présente loi » , M. Williams par son comportement, selon les faits de la présente affaire, est tout à fait visé par l'article 64. À ce titre, il y a un effet sur lui et sur les droits d'appel de Mme Williams.

[29]            L'article 64, qui fait partie de la section 7 « Droit d'appel » , est rédigé comme suit :


Restriction du droit d'appel

64. (1) L'appel ne peut être interjeté par le résident permanent ou l'étranger qui est interdit de territoire pour raison de sécurité ou pour atteinte aux droits humains ou internationaux, grande criminalité ou criminalité organisée, ni par dans le cas de l'étranger, son répondant.

64(2) Grande criminalité

(2) L'interdiction de territoire pour grande criminalité vise l'infraction punie au Canada par un emprisonnement d'au moins deux ans.

64(3) [...]

No appeal for inadmissibility

64. (1) No appeal may be made to the Immigration Appeal Division by a foreign national or their sponsor or by a permanent resident if the foreign national or permanent resident has been found to be inadmissible on grounds of security, violating human or international rights, serious criminality or organized criminality.

64(2) Serious criminality

(2) For the purpose of subsection (1), serious criminality must be with respect to a crime that was punished in Canada by a term of imprisonment of at least two years.

64(3) ...


[30]            M. Williams est un étranger et Mme Williams est sa répondante. Il a été jugé qu'il est interdit de territoire pour raison de grande criminalité compte tenu de l'infraction commise qui est punie par un emprisonnement de plus de deux ans.

[31]            Il n'existe pas de question grave à l'égard de l'article 64 de la LIPR. Mme Williams ne pouvait pas interjeter appel.

[32]            Selon cette méthode, Mme Williams, en tant que personne qui interjette un appel, est tout à fait visée par les deux conditions qui doivent être remplies afin qu'il soit mis fin à l'appel.

Le contexte

[33]            L'article 196 de la LIPR doit être examiné dans son contexte selon l'esprit de la loi. La Cour d'appel fédérale a traité dans une certaine mesure de l'article 196 lorsqu'elle a traité des dispositions transitoires d'un texte législatif complexe par rapport à un autre texte législatif complexe.

[34]            La disposition fondamentale à l'égard de la transition est l'article 190 qui exige que les instances en cours suivant l'ancienne loi soient traitées suivant les dispositions de la LIPR.


La présente loi s'applique, dès l'entrée en vigueur du présent article, aux demandes et procédures présentées ou instruites, ainsi qu'aux autres questions soulevées, dans le cadre de l'ancienne loi avant son entrée en vigueur et pour lesquelles aucune décision n'a été prise.

Every application, proceeding or matter under the former Act that is pending or in progress immediately before the coming into force of this section shall be governed by this Act on that coming into force.


[35]            Si le législateur avait voulu que les droits qui existaient, quels qu'ils puissent être, soient conservés malgré la nouvelle loi, il aurait simplement pu l'énoncer. Il est significatif lorsqu'on examine l'article 196 que le législateur ne l'ait pas fait.     


[36]            Les seules circonstances suivant lesquelles le législateur était disposé à s'écarter de ce concept de base selon lequel l'impact de la LIPR est immédiat se trouvent à l'article 191 (qui n'est pas pertinent aux fins des présentes) et à l'article 192. L'article 192 prévoit que tous les appels déposés suivant l'ancienne loi sont continués sauf quant à deux exceptions.

[37]            Les deux exceptions à l'application de l'article 192 sont l'article 196 (en cause dans la présente demande) et l'article 197. Ces deux articles commencent par les mots « [m]algré l'article 192 » qui signifient selon moi « en dépit de » ou « indépendamment » .

[38]            Le législateur a prévu que ces questions régies par les articles 196 et 197 fassent partie de l'idée générale selon laquelle les affaires en cours suivant l'ancienne loi doivent être régies par la nouvelle LIPR. Les conséquences naturelles de cet esprit de la loi sont qu'il peut y avoir un impact sur les droits qui existent, même un impact défavorable. Mais, c'est là l'intention claire du législateur.

[39]            Les deux articles 196 et 197 renvoient en particulier à l'article 64. L'article 64 renvoie précisément au « répondant » . Par conséquent, les articles 196 et 197 avaient pour objet d'avoir un impact sur les droits des répondants, comme Mme Williams, qui interjettent un appel.

[40]            Il ne devrait avoir rien de nouveau dans la notion selon laquelle les appels, même les appels à l'égard des parrainages, sont grandement affectés par le fait que la personne parrainée a un passé criminel. De la même façon, le paragraphe 77(3.01) de l'ancienne loi ne permettait pas qu'un répondant interjette appel dans les cas de grande criminalité (infraction criminelle punie par deux ans d'emprisonnement).                                                      

[41]            L'interprétation de l'article 196 qui résulte du sens ordinaire des mots lus dans leur contexte et en association avec l'esprit de la loi ne rend pas quelque peu vain l'article 196 ou ne lui donne pas moins de sens.

[42]            Les alinéas 49(1)a) et b) sont des dispositions qui prévoient des sursis automatiques à l'égard de certaines mesures de renvoi. La Cour dans la décision Estaban c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2003 CF 930, a traité d'une situation dans laquelle il a été statué que l'article 196 ne s'appliquait pas et, par conséquent, il n'a pas été mis fin à l'appel.

[43]            M. Esteban était un résident permanent qui avait été déclaré coupable d'infractions criminelles graves et, par conséquent, ne pouvait pas interjeter appel en raison de l'application de l'article 64 de la LIPR. Cependant, il avait obtenu un sursis automatique et, par conséquent, il n'avait pas été mis fin à son appel.

[44]            Par conséquent, il existe des situations, bien que leur nombre soit limité, dans lesquelles l'article 196 s'appliquera afin d'empêcher qu'il soit mis fin à des appels déposés suivant l'ancienne loi.

Les objets et l'intention

[45]            L'interprétation de l'article 196 doit de plus être cohérente avec les objets de la loi et l'intention du législateur.

[46]            En liant l'article 196 si directement à l'article 64 de la LIPR qui prévoit les appels par des répondants, je conclus que le législateur voulait que les répondants qui interjettent appel soient soumis aux conséquences de l'article 196.

[47]            Il est cohérent et logique que le législateur n'ait pas voulu que les répondants aient plus d'avantages qu'en ont les demandeurs de résidence permanente parrainés. On ne peut pas oublier que les avantages de la résidence permanente profitent autant, sinon plus, au résident permanent qu'à son répondant. Les avantages du statut de résident peuvent survivre bien au-delà de la relation qui a donné lieu au parrainage. Le législateur n'a fait que s'assurer que ce qui ne peut pas être fait directement ne puisse pas être fait indirectement.                       


[48]            Lors de l'analyse de la question de savoir si cette interprétation est cohérente avec les objets de la loi, il faut prendre en compte l'article 3 de la LIPR qui énonce de nombreux objets à l'égard de l'immigration. Deux de ces objets sont particulièrement importants aux fins de cette analyse, à savoir :


d) de veiller à la réunification des familles au Canada;

h) de protéger la santé des Canadiens et de garantir leur sécurité;

(d) to see that families are reunited in Canada;

(h) to protect the health and safety of Canadians and to maintain the security of Canadian society;


[49]            Ce n'est pas toutes les dispositions de la loi qui traitent de chacun des objets énoncés au paragraphe 3(1), pas plus que lorsque deux objets ou plus sont pertinents la même importance leur est accordée.

[50]            L'article 64, bien qu'il renvoie aux répondants et aux résidents permanents, n'a pas pour objet principal la réunification de la famille.

[51]            L'article 64 est conçu de façon à limiter la possibilité d'admission au Canada des personnes qui y ont été déclarées coupables d'infractions et qui ont été emprisonnées pendant au moins deux ans. Cet objectif doit être atteint que la personne interdite de territoire interjette appel directement elle-même ou que son répondant le fasse.

[52]            L'article 64 met l'accent principalement, si ce n'est exclusivement, sur l'objectif de la sécurité des Canadiens et de la société canadienne.


[53]            Par le lien si étroit fait entre l'article 64 et l'article 196, je conclus que cet article 196 a également pour but l'atteinte de cet objectif. L'article 196, évidemment, est conçu de façon à soumettre les personnes qui interjettent appel, y compris les répondants, aux dispositions de la nouvelle loi et à limiter, si ce n'est carrément éliminer, la possibilité de poursuivre les appels déposés suivant l'ancienne loi.

[54]            Le sens ordinaire de l'article, comme cela a été énoncé précédemment, est par conséquent cohérent avec les buts et les objets de la nouvelle loi. L'article 196 est une disposition de redressement par sa nature et cette interprétation est cohérente avec les objectifs de redressement qui consistent à limiter les avantages que peuvent obtenir les personnes qui sont déclarées coupables de grande criminalité.

[55]            Comme la Cour d'appel fédérale a conclu dans l'arrêt Medovarski, précité, aux paragraphes 48 et 52, le législateur ne voulait pas conserver le droit d'appel existant. M. le juge Pelletier, dissident pour d'autres motifs, appuie également et confirme la raison d'être de l'exclusion des avantages de l'article 192 des appels à l'égard des parrainages qui se rapportent à des cas de grande criminalité (voir l'arrêt Medovarski, précité, aux paragraphes 89 à 91).

[56]            Je suis conscient que le résultat de cette interprétation est que, pour certaines familles, il y aura vraisemblablement de la peine, des bouleversements et un démembrement familial éventuel. La cause profonde de ces conséquences est le comportement de la personne parrainée. De façon regrettable, de nombreuses familles sont exposées à des conséquences similaires lorsqu'un époux ou un parent se livre à des activités criminelles.


[57]            Le législateur a fait un choix au plan de la politique à établir quant à la façon selon laquelle ces situations doivent être traitées. Il l'a fait dans des termes clairs et rationnels. Il n'appartient pas à la Cour de mettre en doute le choix au plan de la politique à établir.

Ordonnance de sursis/Préclusion

[58]            En dernier lieu, je traite de la question de l'ordonnance de sursis et de la préclusion ou des attentes légitimes.

[59]            L'ordonnance rendue par la juge Hansen a été rendue suivant la Loi sur la Cour fédérale, non suivant l'ancienne Loi sur l'immigration. En outre, de façon compatible avec la conclusion de l'arrêt Medovarski, précité, il ne s'agissait pas d'un sursis automatique et, par conséquent, ce n'était pas le sursis requis par l'article 196.

[60]            À l'égard des attentes légitimes et de la préclusion, selon les faits de la présente affaire, dans la mesure où les principes s'appliquent, la demanderesse ne peut avoir gain de cause.

[61]            Le principe des attentes légitimes, qui est l'expression la plus appropriée dans cette situation d'attente de ce que fait le gouvernement, est un droit en matière de procédure, non un droit fondamental.

[62]            Pour avoir gain de cause sur ces motifs, il doit y avoir au moins une décision à l'égard d'un fait pertinent à la question faisant l'objet de la demande pour lequel un acte a été posé en sachant ou en s'attendant à ce qu'il soit posé au détriment d'un autre.

[63]            La lettre du 23 mai 2002 ne fait pas de représentations, sur la question de la continuation des droits d'appel, qui auraient incité ou qui ont incité la demanderesse à retarder l'exercice de ses droits d'appel ou à ne pas y procéder de façon expéditive.

[64]            Le fait que les parties puissent, et je dis puissent parce qu'il ne s'agit que d'une hypothèse à cet égard, avoir agi suivant une mauvaise compréhension réciproque de la loi ne crée pas une préclusion qui vicierait la fin de l'appel. Rien n'empêchait que la loi ne soit pas suivie ou n'incitait la demanderesse à le penser ou à penser qu'il n'était pas nécessaire de tenir l'audience rapidement. Il était de la même façon raisonnable de penser que la demanderesse pouvait dormir en paix parce qu'un sursis à la mesure de renvoi avait été ordonné.


[65]            Pour tous les motifs énoncés, la présente demande de contrôle judiciaire sera rejetée. Avant que l'ordonnance soit rendue, conformément à la directive de la Cour lors de l'audience, les parties auront sept (7) jours à compter de la date des présents motifs pour présenter des observations à l'égard d'une question certifiée. Bien que le défendeur ait déjà présenté une observation sur ce point, compte tenu des récents jugements, il aura la possibilité de présenter de nouvelles observations.

« Michael L. Phelan »

Juge

Ottawa (Ontario)

Le 6 mai 2004

Traduction certifiée conforme

Danièle Laberge, LL.L.


                         COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                    SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

                      AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                IMM-6479-02

INTITULÉ :               SOPHIE LAVERNE WILLIAMS

c.

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET

DE L'IMMIGRATION

                                                     

LIEU DE L'AUDIENCE :                              TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :                            LE 7 JANVIER 2004

MOTIFS DE L'ORDONNANCE : LE JUGE PHELAN

DATE DES MOTIFS :                                   LE 6 MAI 2004

COMPARUTIONS :

Isak Grushka                                                    

POUR LA DEMANDERESSE

Ann Margaret Oberst                                       

POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Isak Grushka

Toronto (Ontario)

POUR LA DEMANDERESSE

Morris Rosenberg, c.r.

Sous-procureur général du Canada                   

POUR LE DÉFENDEUR


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