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     Date : 19980615

     Dossier : IMM-2551-97

OTTAWA (ONTARIO), LE 15 JUIN 1998

EN PRÉSENCE DE MADAME LE JUGE TREMBLAY-LAMER

ENTRE :

     HUI ZHEN ZHANG,

     Demanderesse,

     - et -

     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,

     Défendeur.

     ORDONNANCE

La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

     " Danièle Tremblay-Lamer "

                                     Juge

Traduction certifiée conforme

Laurier Parenteau, LL.L.

     Date : 19980615

     Dossier : IMM-2551-97

ENTRE :

     HUI ZHEN ZHANG,

     Demanderesse,

     - et -

     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,

     Défendeur.

     MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE TREMBLAY-LAMER

[1]      Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire d'une décision par laquelle Namiji Stocks, une agente d'immigration, a décidé qu'il n'existait pas suffisamment de raisons d'ordre humanitaire au sens du par. 114(2) de la Loi sur l'immigration1 (la Loi) pour justifier que la demande de résidence permanente de la demanderesse soit traitée alors qu'elle a été faite pendant que la demanderesse se trouvait au Canada.

[2]      La demanderesse est arrivée au Canada en septembre 1991. Elle a revendiqué le statut de réfugié, mais sa revendication a été rejetée le 22 avril 1992. La Cour a rejeté sa demande d'autorisation d'appel de la décision de la Commission le 4 septembre 1992.

[3]      En juin 1992, la GRC a avisé les autorités de l'Immigration qu'Interpol avait émis un formulaire rouge contre la demanderesse. Il ressortait des renseignements contenus dans le formulaire que la demanderesse avait commis une fraude informatique en complicité avec son fiancé et son cousin et qu'elle avait ainsi réussi à détourner 1,6 millions de yuans RMB en espèces de la Bank of Communications à Ningpo, en Chine. Le formulaire précisait en outre que la demanderesse était recherchée en vertu d'un mandat d'arrestation lancé le 24 octobre 1990 par les autorités de Ningpo.

[4]      Sur la foi de ces allégations, un rapport a été rédigé sous le régime de l'article 27, indiquant que la demanderesse était inadmissible en application du sous-alinéa 19(1)c.1)(ii) de la Loi.

[5]      Le 7 mai 1994, la demanderesse a épousé un citoyen Canadien, Dany Au Chi-Tin et elle a donné naissance à leur fille le 15 octobre 1994.

[6]      Un mois plus tard, le 14 novembre 1994, elle a présenté une demande de dispense de visa afin de faire trancher sa demande de résidence permanente alors qu'elle se trouvait au pays en invoquant des raisons d'ordre humanitaire en vertu du par. 114(2) de la Loi.

[7]      Elle a été convoquée en entrevue le 27 avril 1995. À ce moment, une entrevue complète concernant son mariage a été menée par Annette DeForge, une agente d'immigration. Elle a demandé à la demanderesse si elle avait déjà été accusée ou déclarée coupable d'une infraction criminelle au Canada ou à l'étranger. La demanderesse a répondu qu'avant de quitter la Chine, elle avait eu des problèmes avec la justice en raison de sa participation à une manifestation en faveur de la démocratie. Aucune décision n'a alors été rendue concernant sa demande parce qu'il se pouvait qu'elle soit inadmissible par application du sous-alinéa 19(1)c.1)(ii) de la Loi.

[8]      Le dossier a été transféré à Namiji Stocks en octobre 1996. Elle a procédé à une nouvelle entrevue de la demanderesse et de son conjoint le 9 janvier 1997 et elle a confronté la demanderesse avec l'allégation selon laquelle elle était recherchée pour détournement de fonds en Chine. La demanderesse a nié avoir participé à quelque activité criminelle que ce soit. Bien que Mme Stocks ait été d'avis que le mariage de la demanderesse avait été contracté de bonne foi, aucune décision définitive n'a été rendue cette fois non plus compte tenu de la possibilité d'inadmissibilité de la demanderesse pour des motifs d'ordre criminel.

[9]      Mme Stocks a alors pris certaines mesures pour enquêter plus à fond sur les allégations contenues dans le formulaire d'Interpol, et plus particulièrement sur le mandat d'arrestation allégué. Le 9 juin 1997, elle a reçu une copie du mandat d'arrestation du bureau de l'immigration à Beijing. Ce mandat portait le même numéro et la même date que le numéro et la date indiqués dans le formulaire d'Interpol. En se fondant sur cette preuve qui confirmait le rapport d'Interpol, Mme Stocks a décidé que la demanderesse était inadmissible pour des motifs d'ordre criminel par application du sous-alinéa 19(1)c.1)(ii) et elle a rejeté sa demande de résidence permanente. La demanderesse a été informée de cette décision le 18 juin 1997.

[10]      La demanderesse demande aujourd'hui l'annulation de la décision rendue par Mme Stocks en soutenant qu'elle a manqué à son obligation d'agir équitablement en n'informant pas la demanderesse de l'existence du mandat d'arrestation qu'elle avait obtenu des autorités chinoises avant de rendre sa décision définitive, de sorte que la demanderesse n'a jamais eu l'occasion de faire valoir son point de vue concernant cet élément de preuve.

[11]      Lorsqu'il rend une décision sous le régime du par. 114(2) de la Loi, l'agent d'immigration a l'obligation d'agir équitablement. Les paramètres de cette obligation d'équité de l'agent d'immigration ont été décrits par la Cour d'appel fédérale dans l'arrêt Shah c. Ministre de l'Emploi et de l'Immigration2. Dans cette cause, le juge Hugessen a statué, au nom de la Cour, que le contenu de l'obligation d'agir équitablement lors de l'examen d'une demande fondée sur des raisons d'ordre humanitaire est minimal, parce que ces décisions relèvent essentiellement du pouvoir discrétionnaire de l'agent d'immigration. La tenue d'une audition et l'énoncé de motifs ne sont pas obligatoires. Toutefois, le juge Hugessen a clairement affirmé : " Si [la personne qui rend une décision] entend se fonder sur des éléments de preuve extrinsèques qui ne lui sont pas fournis par le requérant, elle doit bien sûr lui donner l'occasion d'y répondre "3.

[12]      Dans l'affaire Dasent c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration)4, le juge Rothstein a défini avec plus de précision le sens de l'expression " éléments de preuve extrinsèques qui ne lui sont pas fournis par le requérant ". Il a dit qu'il s'agissait " d'éléments de preuve dont la partie requérante ignore l'existence et que l'agent d'immigration a l'intention d'invoquer pour en arriver à une décision touchant cette partie. "5.

[13]      En l'espèce, même si une copie du mandat d'arrestation n'a pas vraiment été montré à la demanderesse, on l'a questionnée sur les allégations de détournement de fonds en Chine formulées contre elle et on lui a donné l'occasion d'y répondre. De plus, on lui a demandé expressément si elle connaissait les deux personnes mentionnées dans le formulaire d'Interpol et si elle connaissait quelque chose aux ordinateurs. Elle a répondu carrément non à ces deux questions. Elle a aussi nié avoir participé à quelque activité criminelle que ce soit. Le mandat d'arrestation ne contenait aucun nouveau renseignement que la demanderesse ignorait. On ne peut donc pas affirmer que l'agente d'immigration a manqué à son obligation d'agir équitablement.

[14]      En conséquence, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.

[15]      Aucune des avocates n'a proposé la certification d'une question en l'espèce. Aucune question ne sera donc certifiée.

     " Danièle Tremblay-Lamer"

                                         Juge

OTTAWA (ONTARIO)

15 juin 1998

Traduction certifiée conforme

Laurier Parenteau, LL.L.

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

     AVOCATS ET AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

NUMÉRO DU GREFFE :          IMM-2551-97

INTITULÉ DE LA CAUSE :      HUI ZHEN ZHANG c. MCI

LIEU DE L'AUDIENCE :          Toronto (Ontario)

DATE DE L'AUDIENCE :          9 juin 1998

MOTIFS DE L'ORDONNANCE PRONONCÉS PAR MADAME LE JUGE TREMBLAY-LAMER

DATE DES MOTIFS :          15 juin 1998

ONT COMPARU :

Me Shoshanna Green      POUR LA DEMANDERESSE

Me Lori Hendricks      POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Green et Spiegel

Toronto (Ontario)      POUR LA DEMANDERESSE

George Thomson

Sous-procureur général du Canada      POUR LE DÉFENDEUR

__________________

     1      L.R.C. (1985), ch. I-2.

     2      (1995), 170 N.R. 238 (C.A.F.).

     3      Id., à la p. 239. Voir aussi Garcia c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration)I, [1995] 1 C.F. 791 (1re inst.); Lovo et al c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (1996), 102 F.T.R. 211 (1re inst.); Amoateng c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (1995), 90 F.T.R. 51 (1re inst.); Adebayo c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (1996), 104 F.T.R. 148 (1re inst.).

     4      [1995] 1 C.F. 720 (1re inst.), inf. (1996), 107 F.T.R. 80 (C.A.F.). La décision du juge Rothstein a été infirmée en appel au motif que la preuve en cause n'était pas une preuve extrinsèque au sens de l'arrêt Shah. La Cour suprême du Canada a rejeté la demande d'autorisation de pourvoi le 3 octobre 1996.

     5      Id., aux p. 730 et 731.

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