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     Date : 19981110

     Dossier : T-2539-97

OTTAWA (Ontario), le 10 novembre 1998

EN PRÉSENCE DE M. le juge Rouleau

Entre :

     HOI NIN DAVID LAM,

     demandeur,

ET :

     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,

     défendeur.

     ORDONNANCE

LE JUGE ROULEAU

     SUR PRÉSENTATION D'UN AVIS DE REQUÊTE INTRODUCTIVE D'INSTANCE en date du 13 novembre 1998, au nom du demandeur Hoi Nin David Lam, par écrit et conformément au paragraphe 18.1(1) de la Loi sur la Cour fédérale, en vue d'obtenir :

a)      le contrôle judiciaire du retard inhabituel et injustifiable de la part de l'agent de la citoyenneté dans la délivrance du certificat de citoyenneté et la convocation à la cérémonie de remise des certificats de citoyenneté au nom du défendeur ;
b)      une ordonnance de la nature d'un bref de mandamus enjoignant au ministre défendeur de faire en sorte que soit délivré au demandeur son certificat de citoyenneté aux termes du paragraphe 12(2) de la Loi sur la citoyenneté et de signifier l'avis indiquant la date de la cérémonie de remise des certificats de citoyenneté sans délai conformément à la décision du juge de la citoyenneté qui a approuvé la demande de citoyenneté canadienne en date du 25 mai 1995 ;
c)      les frais de la demande.

     LA COUR ORDONNE CE QUI SUIT :

[1]      La demande est théorique. Des frais au montant de 1 500 $, comprenant les débours, sont accordés au demandeur.

                         " P. ROULEAU "

                                     JUGE

Traduction certifiée conforme

Laurier Parenteau, LL.L.

     Date : 19981110

     Dossier : T-2539-97

Entre :

     HOI NIN DAVID LAM,

     demandeur,

ET :

     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,

     défendeur.

     MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE ROULEAU

[1]      Il s'agit d'une demande en vue d'obtenir une ordonnance de la nature d'un bref de mandamus enjoignant au ministre défendeur de convoquer le demandeur à la cérémonie de prestation du serment de citoyenneté par suite de la décision du juge de la citoyenneté qui a approuvé la demande de citoyenneté canadienne en date du 25 mai 1995 ; et après la prestation de serment, de délivrer au demandeur un certificat de citoyenneté aux termes du paragraphe 12(2) de la Loi sur la citoyenneté.

[2]      Quand cette affaire a été entendue à Vancouver le 22 octobre 1998, l'avocate du défendeur a confirmé à la Cour qu'une convocation à une cérémonie de prestation du serment avait été envoyée au demandeur et qu'il devait se présenter le 28 octobre 1998, après quoi un certificat de citoyenneté lui serait délivré et que, par conséquent, l'affaire était maintenant théorique.

[3]      L'avocat du demandeur a insisté pour que je traite de la question des dépens. L'avocate du défendeur s'est vivement opposé à cette demande.

[4]      Le demandeur en l'espèce a quitté Hong Kong pour le Canada et, après avoir rempli les conditions requises, a présenté une demande de citoyenneté canadienne en janvier 1994. Il a été entendu par le juge de la citoyenneté le 24 mai 1995 ; sa demande a été approuvée le lendemain. Il a été informé par le juge de la citoyenneté qu'il recevrait une convocation à une cérémonie de prestation du serment de citoyenneté, à l'occasion de laquelle il prêterait le serment voulu et que cet avis lui serait communiqué dans les deux ou trois semaines à venir.

[5]      Cette convocation est essentielle dans la procédure étant donné que le paragraphe 12(3) de la Loi stipule qu'un certificat de citoyenneté ne peut être délivré tant qu'un demandeur ne respecte pas les conditions concernant la prestation du serment.

[6]      Le demandeur devait se présenter à la cérémonie de prestation du serment devant un juge de la citoyenneté le 19 juin 1995. Il ne l'a pas fait. La preuve par affidavit dont je suis saisi laisse entendre qu'il n'a pas reçu l'avis, mais il a néanmoins été admis qu'à cette époque il s'absentait fréquemment de sa résidence, étant donné qu'il avait accepté un emploi en Alberta.

[7]      Voyant qu'il ne recevait pas la convocation à la cérémonie, il a fait plusieurs demandes de renseignements et s'est présenté personnellement au bureau de la citoyenneté à Vancouver dans les mois de juin, juillet et août 1995. Un commis l'a informé qu'un avis lui avait été envoyé en juin et, après d'autres discussions, on l'a référé à une agente du ministère, du nom de " Maggie ", qui l'a informé qu'un autre avis lui serait envoyé sous peu.

[8]      Ne recevant aucune communication, il a adressé au bureau de Vancouver trois autres demandes écrites de renseignements en date du 11 octobre 1995, du 29 novembre 1995 et du 12 février 1996.

[9]      Comme il était toujours sans réponse, il a d'abord retenu les services de l'avocat Lawrence Ho pour s'enquérir de sa situation au niveau de la citoyenneté. Le 6 mai 1996, M. Ho a demandé des renseignements au ministère à Ottawa et il a été informé que le dossier de son client avait été transmis à un préposé aux cas, du nom de Linus Chiasson.

[10]      M. Ho s'est ensuite adressé directement à l'agent le 31 mai, le 25 juin et le 10 juillet 1996. On n'a même pas eu la courtoisie de lui répondre.

[11]      La preuve révèle qu'un télex a ensuite été envoyé à M. Chiasson par le bureau régional de Vancouver en septembre 1996, dans lequel il était indiqué que le [TRADUCTION] " demandeur souhaitait désespérément obtenir des renseignements au sujet de son statut de citoyen ". M. Chiasson a répondu que le demandeur devait être informé que son cas était toujours à l'étude et qu'on communiquerait avec lui sous peu pour mettre fin au traitement de sa demande.

[12]      N'ayant reçu aucun autre avis, le demandeur a ensuite retenu les services d'un autre avocat, du nom de Lawrence Wong, en mai 1997, qui a été informé le 2 juin que le demandeur faisait l'objet d'une enquête de la GRC. C'était la première fois que le demandeur était informé de la tenue de cette enquête.

[13]      M. Wong a communiqué avec la GRC et a pris rendez-vous avec le gendarme Pirritano le 26 juin 1997. Au cours de la réunion, le demandeur a été informé que le ministère avait reçu une lettre anonyme en date du 16 juin 1995, qui indiquait aux autorités que ce demandeur n'avait pas résidé au Canada pendant les trois années requises et qu'il avait utilisé plusieurs passeports de Hong Kong pour dissimuler ses absences du Canada. La lettre anonyme alléguait de plus que le demandeur était membre du groupe Big Circle, de même que d'autres bandes vietnamiennes.

[14]      Toutes les allégations contenues dans la lettre anonyme ont été niées et l'enquêteur a informé le demandeur et M. Wong qu'aucun renseignement négatif n'avait été découvert au cours de l'enquête et qu'il informerait le ministère en conséquence.

[15]      À la mi-septembre 1997, un agent d'immigration a informé M. Wong qu'il n'avait toujours pas reçu le rapport de la GRC.

[16]      Le gendarme Pirritano a envoyé par télécopieur un autre rapport au ministère et les autorités de l'immigration ont confirmé que ce rapport ne contenait aucun renseignement défavorable. Néanmoins, le ministère n'était pas tout à fait satisfait et il a donné instruction à l'enquêteur d'obtenir d'autres renseignements concernant la résidence du demandeur. Par suite de cette enquête, le gendarme Pirritano a téléphoné à l'agent à Ottawa le 22 septembre 1997 et l'a informé que la question de la résidence avait été examinée au cours de l'entrevue du mois de juillet.

[17]      Par suite de cette nouvelle tentative de dissuasion, l'avocat a communiqué avec la superviseure de M. Chiasson qui lui a demandé une semaine pour revoir le dossier du demandeur, lui indiquant qu'elle communiquerait ensuite avec lui.

[18]      La superviseure, Mlle Rose Redden, n'a pas rappelé M. Wong, mais elle a transmis le cas du demandeur à la Division du crime organisé du ministère.

[19]      Selon les affidavits déposés dans la présente procédure, l'enquête de la Division du crime organisé était toujours en cours en décembre 1997, au moment où la présente demande a été déposée.

[20]      J'ai été informé au cours de l'audience que la conclusion négative à laquelle en étaient venus les agents d'immigration de Hong Kong avait été confirmée avec le ministère à Ottawa au début de 1998.

[21]      Il ne fait aucun doute que lorsqu'un demandeur ne se présente pas à une cérémonie de prestation du serment après en avoir été avisé, il doit, dans les 60 jours qui suivent, convaincre un juge de la citoyenneté du bien-fondé des raisons pour lesquelles il ne s'est pas présenté, bien que je sois convaincu que les efforts soutenus du demandeur depuis juin 1995 ont été totalement ignorés ou que les agents du ministère ne se sont tout simplement pas occupés de son cas, et qu'on n'a aucunement donné au demandeur la possibilité d'expliquer son absence en juin 1995.

[22]      Il convient de noter que le juge de la citoyenneté a approuvé cette demande ; aucun permis ministériel n'a été émis qui justifierait le retard à octroyer à ce demandeur la citoyenneté.

[23]      Aux termes de l'article 17 de la Loi, si le ministre souhaite suspendre la procédure d'examen, il peut le faire pour une période qui ne peut dépasser six mois suivant la date de la suspension, pourvu que le demandeur soit informé en conséquence.

[24]      Je suis convaincu qu'il n'y a devant la Cour absolument aucune preuve pouvant justifier les retards en l'espèce. Il est évident qu'il n'y a absolument rien de suspect dans les activités de ce demandeur ; cela est manifestement confirmé par le fait qu'il a maintenant été convoqué à une nouvelle cérémonie au cours de laquelle on lui donnera la possibilité de prêter le serment de citoyenneté.

[25]      Pendant quelque trois ans, ce demandeur a dû retenir à deux reprises les services d'un avocat, il a été blanchi de toute accusation par l'enquête de la GRC ; pendant toute cette procédure, on l'a totalement ignoré et, dans bien des cas, on ne lui a même pas fait la politesse de répondre à ses demandes, et il n'a pas non plus été informé de la lettre anonyme que le ministère a apparemment reçue en juin 1995 et qui a été omise de la preuve déposée à l'appui de la position du défendeur.

[26]      Je suis disposé à exercer mon pouvoir discrétionnaire en faveur du demandeur et à lui attribuer des dépens que je fixe à 1 500 $, incluant les débours, et qui doivent être payés sans délai.

                         " P. ROULEAU "

                                     JUGE

OTTAWA (Ontario)

le 10 novembre 1998

Traduction certifiée conforme

Laurier Parenteau, LL.L.

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

     AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER

NE DU GREFFE :                  T-2539-97

INTITULÉ DE LA CAUSE :          HOI NIN DAVID LAM c.

                         LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

LIEU DE L'AUDIENCE :              Vancouver (C.-B.)

DATE DE L'AUDIENCE :          le 22 octobre 1998

MOTIFS DE L'ORDONNANCE DU JUGE ROULEAU

DATE :                      le 10 novembre 1998

ONT COMPARU :

Lawrence Wong                  pour le demandeur

Esta Resnick                      pour le défendeur

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :

Lawrence Wong & Associates

Vancouver (C.-B.)                  pour le demandeur

Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada          pour le défendeur

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