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Date : 20010223

Dossier : IMM-91-00

Référence: 2001 CFPI 109

ENTRE :

Mehdi Rahat VARNOSFADERANI

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

                                                  MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE LEMIEUX

A. HISTORIQUE

[1]         Par cette demande de contrôle judiciaire, Mehdi Rahat Varnosfaderani (le demandeur), qui est citoyen iranien, conteste la décision par laquelle Citoyenneté et Immigration Canada (CIC) a refusé, le 23 juin 1999, la demande qu'il avait présentée en vue d'être reconnu à titre de membre de la catégorie des demandeurs non reconnus du statut de réfugié au Canada (les DNRSRC) parce que cette demande n'avait pas été reçue dans le délai imparti.


[2]         La lettre de refus de CIC est ainsi libellée :

[TRADUCTION]

En vertu du Règlement sur l'immigration, les demandeurs déboutés doivent présenter une demande en vue d'obtenir l'examen de leur cas dans la catégorie des DNRSRC. Le cachet de la poste doit indiquer une date postérieure d'au plus 22 jours à celle de l'avis de la décision de la section du statut.

L'avis de décision de la section du statut était daté du 5 mai 1999. La demande du DNRSRC devait être présentée au plus tard le 27 mai 1999. Étant donné qu'aucune pareille demande n'a été reçue dans le délai imparti, la demande est refusée.

[3]         L'alinéa 11.4(2)b) du Règlement sur l'immigration prévoit que le DNRSRC « doit présenter [...] une demande [...] dans les 15 jours suivant la date où la section du statut l'a avisé de sa décision » [non souligné dans l'original].

[4]         L'alinéa 2(4)b) de la Loi sur l'immigration est une disposition renfermant une présomption de notification. Cette disposition se lit en partie comme suit :

2. (4) Pour l'application de la présente loi, une personne, y compris le ministre, est présumée, en l'absence de preuve contraire, être avisée d'une décision rendue sous le régime de la présente loi, à l'exception de toute décision d'un agent des visas :

[...]

b) le septième jour suivant l'envoi des motifs écrits, lorsqu'elle y a droit ou lorsqu'elle avait droit de les demander et les a effectivement demandés dans le délai imparti [non souligné dans l'original].

2. (4) For the purposes of this Act, a person, including the Minister, shall, in the absence of proof to the contrary, be deemed to have been notified of a decision under this Act, other than a decision of a visa officer.

...

(b) where the person was entitled to written reasons, or was entitled to request, and requested within the time normally ;provided therefor, written reasons, on the day that is seven days after the day on which the written reasons were sent to the person, which notice or written reasons may be sent by mail. [my emphasis]


[5]         Je tiens à ajouter que, dans l'arrêt Adam c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2000] A.C.F. no 1375, la Cour d'appel fédérale a statué qu'un agent d'immigration n'est pas autorisé à proroger le délai de 15 jours en vertu de l'alinéa 11.4(2)b) du Règlement sur l'immigration (le Règlement).

B. AFFIDAVITS DÉPOSÉS DANS LA PRÉSENTE INSTANCE

[6]         Le demandeur a déposé, dans la présente instance, un affidavit indiquant ce qui suit :

(1)         En 1989, le gouvernement allemand a reconnu sa revendication, mais il a été contraint à retourner en Iran, où il a été emprisonné. Après avoir été mis en liberté, il s'est enfui au Canada en 1996, où il a présenté une revendication;

(2)         Le lundi 10 mai 1996, il a reçu la décision de la section du statut l'informant que sa revendication était refusée;

(3)         Le vendredi, 21 mai 1999, il a signé une demande à titre de DNRSRC et il a laissé le formulaire chez son avocat;

(4)         La pièce B jointe à son affidavit est une photocopie de la demande qu'il a signée, le 21 mai 1999, à titre de DNRSRC.

[7]         Marnie Cole, assistante juridique de l'avocat du demandeur, a déclaré ce qui suit :

a)          le 21 mai 1999, le demandeur s'est présenté aux bureaux d'Anthony Norfolk, avocat, pour signer la demande qu'il présentait à titre de DNRSRC;


b)          le 24 mai 1999, elle a envoyé la demande à CIC par l'entremise d'un service de messagerie, comme en fait état le [TRADUCTION] « journal de ramassage par un service de messagerie du cabinet d'avocats » ;

c)          elle croyait que le formulaire de demande avait été livré de la façon appropriée ce jour-là.

[8]         Le défendeur a déposé l'affidavit de Marla Holloway, commis au service du courrier travaillant à la salle du courrier de Travaux publics et Services gouvernementaux Canada, à Vancouver :

(1)         Elle a décrit le système en place aux fins de la réception, de l'apposition du timbre indiquant la date de réception et de la livraison du courrier d'arrivée ainsi qu'en ce qui concerne les livraisons des demandes des DNRSRC par des services de messagerie.

(2)         Elle a noté qu'il semblait que la demande que le demandeur avait présentée à titre de DNRSRC avait été livrée le 30 juin 1999; elle joint à son affidavit, sous la cote « A » , une copie de l'enveloppe originale dans laquelle la demande avait été livrée au bureau de révision des revendications refusées (le BRRR).

[9]         Le défendeur a également déposé l'affidavit de Patricia Tailleur, agente subalterne au BRRR, à Vancouver, qui travaillait à cet endroit aux mois de mai et de juin 1999. Elle a déclaré ce qui suit :

(1)         Elle est chargée d'ouvrir les dossiers et de traiter les demandes des DNRSRC.


(2)         Chaque demande présentée par un DNRSRC doit être soumise au BRRR dans les 22 jours qui suivent la date de l'avis de décision de la CISR, conformément à l'alinéa 11.4(2)b) du Règlement, qui prévoit que la demande doit être livrée au BRRR dans les 15 jours suivant la date où la SSR a avisé l'intéressé de la décision et conformément au paragraphe 2(4) de la Loi sur l'immigration, en vertu duquel l'intéressé est présumé être avisé de la décision le septième jour suivant l'envoi des motifs écrits.

(3)         Elle conserve l'original des enveloppes renfermant chaque demande présentée par un DNRSRC. Si la demande est envoyée par la poste, elle vérifie le cachet de Postes Canada. Elle fait remarquer que dans les cas où l'on fait appel à un service de messagerie, la plupart de ces services ont leur propre système de bordereaux indiquant la date de ramassage. Elle déclare qu'elle n'a pas vu de bordereau d'un service de messagerie attestant la livraison de la demande que le demandeur avait présentée à titre de DNRSRC. Elle joint sous la cote « A » l'enveloppe dans laquelle la demande du demandeur a été livrée au BRRR. Un timbre de réception portant la date du 30 juin 1999 y est apposé.

C. ANALYSE


[10]       À mon avis, cette demande de contrôle judiciaire doit être accueillie parce que CIC a examiné par le mauvais bout de la lorgnette la question de savoir si la demande de DNRSRC du demandeur avait été présentée en dehors des délais. Comme le montrent les affidavits du défendeur, CIC a mis l'accent sur la date à laquelle le ministère avait reçu la demande au lieu de se demander à quelle date le demandeur avait envoyé sa demande.

[11]       La disposition pertinente est l'alinéa 11.4(2)b) du Règlement sur l'immigration, qui prévoit que le demandeur « doit présenter [...] une demande [...] dans les 15 jours suivant la date où la section du statut l'a avisé de sa décision » .

[12]       Le sens ordinaire du mot « présenter » figurant à l'alinéa 11.4(2)b), considéré dans son contexte, signifie « envoyer » ou « soumettre une demande » . Dans son contexte, le mot « présenter » tel qu'il est employé dans cette disposition, ne veut pas dire « recevoir » . Lorsque le législateur a voulu attribuer ce sens, il l'a clairement dit dans la même disposition. L'exemple qui me vient à l'esprit est le paragraphe 11.4(3) du Règlement, qui prévoit que les observations présentées par les DNRSRC doivent parvenir à un agent d'immigration dans un certain délai.

[13]       À mon avis, le DNRSRC doit envoyer sa demande au plus tard 15 jours après avoir été avisé de la décision défavorable de la section du statut, ce qui, en vertu du paragraphe 2(4) de la Loi, est présumé avoir lieu sept (7) jours après la date de l'envoi, à moins que le contraire ne soit démontré.


[14]       En l'espèce, le demandeur a déclaré sous serment avoir reçu la décision de la section du statut le 10 mai 1999. Il devait présenter sa demande au plus tard le 26 mai 1999. Je dispose de la preuve non contestée fournie par Marnie Cole, qui n'a pas été contre-interrogée, disant qu'elle a envoyé à CIC le 24 mai 1999 la demande que le demandeur avait présentée à titre de DNRSRC. Or, ce jour-là, le délai n'était pas encore expiré.

C. DISPOSITIF

[15]       Cette demande de contrôle judiciaire est accueillie et la décision par laquelle CIC a conclu que le demandeur avait présenté sa demande à titre de DNRSRC en dehors du délai imparti est annulée. Par conséquent, CIC doit examiner la demande et le demandeur est autorisé à présenter au BRRR des observations, celles-ci devant être reçues dans les 30 jours suivant la date des présents motifs. Aucune question certifiée ne se pose.

                                                                                                                                (Sign.) F. Lemieux                       

                                                                                                                                                     Juge                                   

Vancouver (C.-B.)

Le 23 février 2001

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, LL.L., Trad. a.


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

No DU DOSSIER :                                        IMM-91-00

INTITULÉ DE LA CAUSE :                         Mehdi Rahat Varnosfaderani c. MCI

LIEU DE L'AUDIENCE :                             Vancouver (C.-B.)

DATE DE L'AUDIENCE :                            le 15 février 2001

MOTIFS DE L'ORDONNANCE DU JUGE LEMIEUX EN DATE DU 23 FÉVRIER 2001.

ONT COMPARU :

Anthony Norfolk                                              pour le demandeur

Emilia Pech                                                       pour le défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Anthony R. Norfolk                                          pour le demandeur

Avocat

Vancouver (C.-B.)

Morris Rosenberg                                             pour le défendeur

Sous-procureur général du Canada

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