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Date : 19990721


Dossier : IMM-5119-98

Toronto (Ontario), le mercredi 21 juillet 1999

EN PRÉSENCE DE :      Mme le juge Reed

ENTRE :


MIROSLAV HORVATH

VERA HORVATHOVA

TOMAS HORVATH

VERA HORVATHOVA,


demandeurs,


et


LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,


défendeur.


ORDONNANCE

     La décision faisant l'objet du contrôle judiciaire est annulée. La revendication des demandeurs est renvoyée pour examen par un tribunal différent de la Section du statut de réfugié, Commission de l'immigration et du statut de réfugié.


B. Reed

JUGE


Traduction certifiée conforme


Pierre St-Laurent




Date : 19990721


Dossier : IMM-5119-98

ENTRE :


MIROSLAV HORVATH

VERA HORVATHOVA

TOMAS HORVATH

VERA HORVATHOVA,


demandeurs,


et


LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,


défendeur.


MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE REED

[1]      Les demandeurs cherchent à obtenir l'annulation d'une décision de la Section du statut de réfugié de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié, qui a refusé de leur accorder le statut de réfugié au sens de la Convention. Les demandeurs sont des gitans Romas, citoyens de la République tchèque. La Commission a conclu qu'ils pouvaient obtenir une protection appropriée de l'État dans leur pays, face au traitement auquel on les avait soumis en tant que membres du groupe social et ethnique Roma.
[2]      L'analyse de la disponibilité de la protection de l'État faite par la Commission se fonde, comme il se doit naturellement, sur une analyse de la preuve présentée par les demandeurs quant à leur situation particulière, ainsi que de la preuve documentaire qui traite de la situation générale des Romas en République tchèque. Il est admis, que dans son analyse du témoignage des demandeurs, la Commission a mal interprété celui de l'homme. Celui-ci a témoigné avoir fait l'objet d'une attaque par des skinheads, suite à quoi il s'était plaint aux forces policières, qui avaient refusé de s'occuper de l'affaire. La Commission a conclu qu'il n'avait pu leur fournir l'identité de ses agresseurs. Par contre, la transcription de son témoignage devant la Commission fait ressortir qu'il avait fourni l'identité de ses agresseurs aux forces policières, car il les connaissait puisqu'ils vivaient dans son quartier. C'est là une erreur significative.
[3]      L'avocate du défendeur soutient que cette erreur quant à l'interprétation de la preuve est sans importance, puisqu'on trouve au dossier une preuve adéquate de l'existence de la capacité de l'État à protéger les intéressés. La preuve à laquelle la Commission renvoie pour appuyer cette conclusion consiste en des déclarations condamnant le racisme par le président de la République, le Premier ministre et le ministre de la Justice. L'avocat des demandeurs soutient que cela ne suffit pas à fonder une conclusion qu'il existait une protection de la part de l'État. (Dans Ali Ahmed c. Le ministre de l'Emploi et de l'Immigration (A-89-92, le 14 juillet 1993), la Cour d'appel fédérale a jugé que les simples déclarations de dirigeants gouvernementaux ne suffisaient pas à étayer une conclusion de changement de circonstances.) L'avocat des demandeurs soutient qu'en s'appuyant sur les déclarations des dirigeants gouvernementaux, la Commission ne s'est pas livrée à " l'analyse minutieuse " de la preuve à laquelle elle est tenue : voir Sagharichi c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (A-169-91, le 5 août 1993, C.A.F.) et Toledo c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (A-205-91, le 1er mars 1993, C.A.F.). Je me range à ce point de vue.
[4]      L'avocate du défendeur a examiné la preuve documentaire de façon assez détaillée, soutenant qu'elle appuie la conclusion que l'État était en mesure d'assurer une protection. Toutefois, la Commission n'a pas mentionné cette preuve. Je partage l'avis de l'avocat des demandeurs voulant qu'il me faudrait réécrire la décision de la Commission pour pouvoir accepter cet argument de l'avocate du défendeur. Une telle façon de faire ne serait pas appropriée. De plus, il existe des décisions d'autres tribunaux de la Commission qui ont accordé le statut de réfugié au sens de la Convention à des Romas de la République tchèque, au motif que l'État ne pouvait pas les protéger. La question n'est donc pas aussi claire qu'on pourrait le croire au vu de l'argumentation du défendeur. Quant aux autres décisions, je conviens que chaque affaire doit être décidée selon ses mérites. Par contre, je reconnais aussi qu'il y a de grandes ressemblances de preuve dans ces affaires, puisque les différents tribunaux de la Commission utilisent les mêmes sources documentaires. De toute façon, il y a clairement ici une question de fait qui exige une analyse minutieuse.
[5]      En plus des motifs précités, la Commission s'est fondée sur une renonciation que les demandeurs adultes avaient déposée après l'audience devant la Commission, comme preuve à l'appui de sa conclusion que les demandeurs n'étaient pas des réfugiés au sens de la Convention :
             Après la rédaction de la décision, mais avant sa signature, nous avons reçu des revendicateurs une renonciation datée du 21 mai 1998. Nous avons décidé de passer outre à cette renonciation, qui, à notre avis, constitue une preuve supplémentaire que les revendicateurs ne sont pas des réfugiés.

[6]      Les demandeurs soutiennent qu'ils ont retiré leur renonciation par la suite. On ne trouve aucune trace de ce retrait au dossier, mais les deux parties conviennent que la chose n'a aucune importance puisque la Commission a décidé de toute façon de passer outre à la renonciation. L'avocat des demandeurs soutient que la Commission ne pouvait s'appuyer sur la renonciation pour tirer sa conclusion, sans donner à ces derniers l'occasion d'expliquer pourquoi ils l'avaient déposée. Le demandeur a témoigné que la renonciation avait été déposée après l'audience, alors que les demandeurs étaient convaincus que la décision à leur égard serait négative. L'avocate du défendeur soutient que les remarques de la Commission sur la renonciation n'ont rien à voir avec sa décision, puisque celle-ci avait été prise avant même que l'avis de renonciation ne soit déposé, et qu'elles n'étaient qu'un ajout sans conséquence.
[7]      Je ne suis pas convaincu que l'erreur consistant à s'appuyer sur l'avis de renonciation comme preuve que la revendication des demandeurs n'était pas fondée soit une erreur sans importance. C'est une erreur fondamentale que de déclarer que la renonciation à une revendication indique un manque de sincérité, dès lors que les personnes en cause n'ont pas eu l'occasion d'expliquer pourquoi elles ont déposé cette renonciation. De toute façon, le cumul des erreurs dans la décision de la Commission fait que celle-ci doit être annulée, même si chacune des erreurs n'aurait pas en soi justifié un tel résultat. Une ordonnance sera donc délivrée en conséquence.


B. Reed

JUGE

TORONTO (ONTARIO)

le 21 juillet 1999




Traduction certifiée conforme


Pierre St-Laurent

COUR FÉDÉRALE DU CANADA


Noms des avocats inscrits au dossier


No DU GREFFE :      IMM-5119-98

INTITULÉ DE LA CAUSE :      MIROSLAV HORVATH

     VERA HORVATHOVA

     TOMAS HORVATH

     VERA HORVATHOVA,

     et

     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION.

DATE DE L'AUDIENCE :      LE MARDI 20 JUILLET 1999

LIEU DE L'AUDIENCE :      TORONTO (ONTARIO)

MOTIFS DE L'ORDONNANCE DE MADAME LE JUGE REED

EN DATE DU :      MERCREDI 21 JUILLET 1999

ONT COMPARU :      M. Michael Crane

          pour les demandeurs

     Mme Diane Dagenais

         pour le défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :      M. Michael T. Crane

     200-166, rue Pearl

     Toronto (Ontario)

     M5H 1L3

         pour les demandeurs

     Morris Rosenberg

     Sous-procureur général

     du Canada

         pour le défendeur

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA


Date : 19990721


Dossier : IMM-5119-98


     Entre :

     MIROSLAV HORVATH

     VERA HORVATHOVA

     TOMAS HORVATH

     VERA HORVATHOVA,


demandeurs,

     et



     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,

défendeur.


    


     MOTIFS DE L'ORDONNANCE


    

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