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     Date : 20000210

     T-1521-99

E n t r e :

     MARK ANTHONY PROPERTIES LTD.,

     MARK ANTHONY CELLARS LTD. et

     MARK ANTHONY BRANDS LTD.

     demanderesses

     - et -

     VICTOR INTERNATIONAL INC.

     défenderesse


     MOTIFS DE L"ORDONNANCE


LE JUGE McGILLIS

[1]      Les demanderesses ont présenté une requête en vue d"obtenir le prononcé d"une ordonnance de confidentialité dans la présente action en contrefaçon et en imitation frauduleuse de marque de commerce. L"avocate de la défenderesse s"oppose à l"inclusion de l"alinéa 9d) et de l"article 11 dans l"ordonnance de confidentialité proposée.

[2]      L"alinéa 9d ) dispose :

         [TRADUCTION]
         9.      Sous réserve du paragraphe 10, faute d"autorisation écrite de la partie intéressée, les renseignements confidentiels ne doivent être divulgués à personne sauf à la Cour, au personnel de la Cour, aux sténographes judiciaires et aux techniciens vidéo qui participent à la présente instance ainsi qu"aux personnes morales et personnes physiques suivantes :

     [...]

             d.      jusqu"à trois (3) personnes physiques ne travaillant pour aucune des parties ou concurrent direct de l"une ou l"autre des parties à la présente instance que l"une ou l"autre des parties peut engager comme expert extérieur ; [...]

[3]      En ce qui concerne l"alinéa 9d), l"avocate de la défenderesse affirme notamment qu"il n"existe aucun motif en droit de limiter, à l"étape des plaidoiries, le nombre d"experts à qui des renseignements confidentiels peuvent être divulgués aux termes d"une ordonnance de confidentialité. Elle ajoute que l"expression " concurrent direct " n"est pas définie et qu"elle pourrait éventuellement obliger une partie à divulguer à l"avance l"identité de son expert ou courir le risque de violer l"ordonnance de confidentialité. J"abonde dans le sens de l"avocate. À mon avis, ces passages de l"alinéa 9d) devraient être supprimés de l"ordonnance de confidentialité.

[4]      L"avocat de la défenderesse ajoute qu"en principe, le paragraphe 11 de l"ordonnance de confidentialité devrait être supprimé au motif qu"il élargit sans justification l"engagement implicite. En réponse, l"avocat des demanderesses soutient que cette disposition est " courante " et qu"elle vise à s"assurer que l"engagement implicite s"applique.

[5]      Voici le texte du paragraphe 11 et de ses dispositions connexes :

         [TRADUCTION]
         11.      Sous réserve des paragraphes 17 et 18, les renseignements confidentiels désignés doivent être utilisés uniquement aux fins de la présente action et ils ne peuvent servir à quelque autre fin que ce soit.

     [...]

         17.      Une partie peut renoncer par écrit en tout ou en partie à son droit sur les renseignements confidentiels désignés dont il est question dans la présente ordonnance.
         18.      Chaque partie a le droit de demander à la Cour de modifier ou d"annuler les restrictions à la divulgation imposées par la présente ordonnance relativement à un ou plusieurs éléments déterminés des renseignements confidentiels désignés. Ce droit ne peut être nié par une autre disposition de la présente ordonnance.

L"expression " renseignements confidentiels " est définie comme suit au paragraphe 1 :

         [TRADUCTION]
         1.      " Renseignements confidentiels " Tout document ou chose, y compris tout interrogatoire ou autre élément d"information communiqué par les demanderesses ou la défenderesse ou pour leur compte (les parties) en vue de la présente instance et qui renferme des renseignements privés, confidentiels ou exclusifs qu"ils soient personnels ou commerciaux.


Le paragraphe 14 précise la définition de l"expression " renseignements confidentiels " en prévoyant notamment ce qui suit :

         [TRADUCTION]
         14.      Ne font pas partie des renseignements confidentiels :

     [...]

             b.      les renseignements obtenus indépendamment de toute divulgation prévue aux présentes ;

     [...]

             d.      les renseignements qui tombent dans le domaine public non pas en raison d"un acte non autorisé ou d"une omission de la part du destinataire des renseignements confidentiels désignés dont il est question dans la présente ordonnance.

     ...

Le paragraphe 2 précise que, par " renseignements confidentiels désignés ", il faut entendre les renseignements désignés comme tels par l"avocat. Voici un extrait du paragraphe 2 :



         [TRADUCTION]
         2.      La partie qui croit pour des motifs raisonnables qu"elle a divulgué ou qu"elle divulguera des renseignements confidentiels a le droit, par l"intermédiaire de son avocat, de désigner les renseignements en question comme des renseignements confidentiels, auquel cas les renseignements confidentiels désignés (les renseignements confidentiels désignés) seront à compter de cette désignation régis par les modalités de l"ordonnance, sous réserve du droit de la défenderesse de contester cette désignation (les renseignements contestés).

[6]      Pour décider si le paragraphe 11 devrait être inséré dans l"ordonnance de confidentialité, il faut examiner la nature de l"engagement implicite. Dans l"arrêt Eli Lilly and Co. c. Interpharm Inc. (1993), 50 C.P.R. (3d), 208, à la page 213 (C.A.F.), le juge McDonald, qui écrivait au nom de la Cour, a expliqué dans les termes suivants l"engagement implicite, à la page 213 :

             Je fais miens les motifs du juge Reed dans l"affaire Canada c. Ichi, précitée, où elle dit à la fin de son jugement [à la page 126] :
             La défenderesse apprendra, à la lecture des présents motifs, l"existence d"un engagement implicite automatique, de telle sorte que l"information obtenue lors de l"interrogatoire ne pourra être utilisée qu"aux seules fins du litige pour lequel elle a été obtenue. Bien entendu, cela ne limite pas l"utilisation d"informations qui, subséquemment, feront partie du dossier public. Cette décision n"affecte pas non plus l"utilisation d"informations obtenues lors de l"interrogatoire préalable qui auraient pu être obtenues d"une autre source. L"engagement implicite ne peut porter sur des documents et des informations obtenus d"une source étrangère à l"interrogatoire préalable, sous prétexte qu"ils ont été obtenus pendant l"enquête préalable. De plus, l"engagement implicite n"empêche pas une partie de demander, dans le contexte d"une instance connexe, d"être relevée de cet engagement implicite, afin que les informations obtenues lors de l"interrogatoire préalable puissent être utilisées dans cette autre instance.
             En dehors de cette citation, les avocats ne nous ont mentionné aucune autre décision où l"on avait ordonné l"exécution d"un engagement qui concernait des renseignements obtenus d"une autre source que l"interrogatoire préalable.
             J"estime qu"il ne devrait exister aucun engagement implicite dans le cas de documents déposés volontairement devant la Cour par voie d"affidavits ou dans des exposés des faits et du droit.

[7]      Un examen des principes énoncés dans l"arrêt Eli Lilly and Co. confirme l"existence d"un engagement implicite automatique qui protège les renseignements divulgués au cours de l"enquête préalable, à l"exception de deux catégories de renseignements communiqués lors de l"enquête préalable, à savoir les renseignements qui deviennent ensuite publics et les renseignements qui auraient pu être obtenus autrement que dans le cadre de l"enquête préalable. Il y a engagement implicite que les parties aient conclu ou non une entente de non-divulgation. L"application de l"engagement implicite ne dépend pas en soi de l"existence d"une ordonnance de confidentialité. Cependant, pour une foule de raisons, les avocats concluent des ententes de non-divulgation qui sont sanctionnées par le tribunal, spécialement au cours des premières étapes du procès, pour garantir la protection et le caractère confidentiel des renseignements au fur et à mesure que le procès se déroule. Ces ordonnances de confidentialité visent un but différent de celui de l"engagement implicite. D"ailleurs, il arrive souvent qu"un litige soit réglé sur la base de renseignements que les parties se sont communiquées en conformité avec une ordonnance de confidentialité sans même qu"une enquête préalable ait lieu. En pareil cas, il se peut qu"il n"y ait pas d"engagement implicite. En conséquence, une disposition comme le paragraphe 11 de l"ordonnance de confidentialité proposée est nécessaire pour déterminer l"utilisation ultérieure qui peut être faite des renseignements confidentiels. Il s"ensuit que l"inclusion d"une disposition comme le paragraphe 11 dans une ordonnance de confidentialité n"a rien de répréhensible et qu"elle peut même s"avérer nécessaire, selon la façon dont se déroule le procès, pour s"assurer que les parties ne se servent pas des renseignements divulgués aux termes de l"ordonnance à d"autres fins que celles de l"instance, sous réserve des droits conférés aux parties en vertu des paragraphes 17 et 18. Une disposition comme le paragraphe 11 peut également être nécessaire, lorsque, comme c"est le cas dans l"ordonnance de confidentialité proposée, l"expression " renseignements confidentiels "est définie de façon très large et qu"elle ne se limite pas aux renseignements divulgués au cours de l"enquête préalable. Le paragraphe 11 ne sera donc pas retranché de l"ordonnance de confidentialité proposée.

[8]      La requête présentée par les demanderesses en vue d"obtenir le prononcé d"une ordonnance de confidentialité est accueillie en partie. Une ordonnance de confidentialité conforme aux présents

motifs d"ordonnance sera donc prononcée. Compte tenu du fait que chacune des parties obtient en partie gain de cause, il n"y a pas d"adjudication de dépens.





                             D. McGillis
                        
                                 Juge

OTTAWA

Le 10 février 2000


Traduction certifiée conforme


Martine Guay, LL.L.



Date: 20000210


T-1521-99

OTTAWA (ONTARIO), LE JEUDI 10 FÉVRIER 2000

EN PRÉSENCE DE MADAME LE JUGE McGILLIS

E n t r e :

     MARK ANTHONY PROPERTIES LTD.,

     MARK ANTHONY CELLARS LTD. et

     MARK ANTHONY BRANDS LTD.

     demanderesses

     - et -

     VICTOR INTERNATIONAL INC.

     défenderesse

     O R D O N N A N C E

     La requête présentée par les demanderesses en vue d"obtenir le prononcé d"une ordonnance de confidentialité est accueillie en partie. Une ordonnance de confidentialité conforme aux présents motifs d"ordonnance sera donc prononcée. Compte tenu du fait que chacune des parties obtient en partie gain de cause, il n"y a pas d"adjudication de dépens.


                             D. McGillis
                        
                                 Juge

OTTAWA

Le 10 février 2000


Traduction certifiée conforme

Martine Guay, LL.L.

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

     AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER


No DU GREFFE :              T-1521-99

INTITULÉ DE LA CAUSE :      Mark Anthony Properties Ltd. et autres c. Victor International Inc.

LIEU DE L"AUDIENCE :          Ottawa (Ontario)

DATE DE L"AUDIENCE :          Le 8 février 2000


MOTIFS DU JUGEMENT prononcés par le juge McGillis le 10 février 2000



ONT COMPARU :


Me Stéphane Caron                          pour les demanderesses

Me Daniela Bassan                          pour la défenderesse


PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :


Gowling, Strathy & Henderson                  pour les demanderesses

Ottawa (Ontario)

Goodman, Phillips & Vineberg                  pour la défenderesse

Toronto (Ontario)

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