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Recueil des arrêts de la Cour fédérale
Zündel c. Canada (Commission des droits de la personne) [1999] 3 C.F. 58

Date : 19990323


Dossier : T-992-98

ENTRE


ERNST ZÜNDEL,


demandeur,


et


LA COMMISSION CANADIENNE DES DROITS DE LA PERSONNE,

LE CONGRÈS JUIF CANADIEN, LA LIGUE DES DROITS DE LA PERSONNE DE B"NAI BRITH CANADA, LE SIMON WIESENTHAL CENTRE, LA CANADIAN HOLOCAUST REMEMBRANCE ASSOCIATION, SABINA CITRON, LA CANADIAN ASSOCIATION OF FREE EXPRESSION ET LE TORONTO MAYOR"S COMMITTEE ON COMMUNITY AND RACE RELATIONS,


défendeurs.


MOTIFS DE L"ORDONNANCE

LE JUGE REED

[1]      La présente demande découle de la décision qui a été rendue dans l"affaire Bell Canada c. Association canadienne des employés de téléphone et autres (1998), 143 F.T.R. 241, le 23 mars 1998. Dans cette décision, le juge McGillis a statué que Bell, qui faisait l"objet d"une plainte déposée devant un tribunal canadien des droits de la personne, avait une crainte raisonnable de partialité en raison de certains éléments structurels se rapportant

à la composition et au fonctionnement du tribunal et de la relation que celui-ci avait avec la Commission canadienne des droits de la personne, qui agissait à titre de " poursuivant " devant le tribunal.

[2]      Le paragraphe 44(3) et l"article 49 de la Loi canadienne sur les droits de la personne , L.R.C. (1985), ch. H-6, tels qu"ils ont été modifiés par les articles 64 et 66 de L.R.C. (1985) (1er suppl.), ch. 31, prévoient que le président du Comité du tribunal des droits de la personne, sur demande de la Commission canadienne des droits de la personne, constitue un tribunal composé d"au plus trois membres chargé d"examiner la plainte. Les membres du tribunal sont choisis au sein d"un comité appelé le Comité du tribunal des droits de la personne, qui est composé de membres nommés par le gouverneur en conseil conformément à l"article 48.1.

[3]      Au moment où la décision Bell a été rendue, un tribunal (ci-après parfois appelé le " tribunal Zündel ") tenait une audience au sujet de deux plaintes déposées contre Ernst Zündel. Ces plaintes avaient été déposées conformément au paragraphe 13(1) de la Loi canadienne sur les droits de la personne ; il était allégué que M. Zündel était responsable de la diffusion de messages affichés dans un site Web de la Californie et que les messages étaient susceptibles d"exposer des personnes à la haine et au mépris. Le tribunal Zündel a été constitué le 29 novembre 1996 et les audiences ont commencé les 26 et 27 mai 1997. Elles se sont poursuivies les 14, 15, 16 et 17 octobre ainsi que les 11, 12, 15, 16, 17, 18 et 19 décembre 1997. Au 23 mars 1998, il y avait eu 13 jours d"audience pendant lesquels quatre personnes avaient témoigné pour le compte de la Commission et avaient été contre-interrogées.

[4]      Après que la décision Bell eut été rendue, M. Zündel a présenté une requête, le 6 avril 1998, visant à faire annuler l"instance devant le tribunal parce qu"elle était viciée de la même façon que l"instance devant le tribunal qui avait été constitué dans l"affaire Bell (ci-après le " tribunal Bell "). Le tribunal Zündel a rejeté cette requête. C"est cette décision, par laquelle la requête de M. Zündel a été rejetée, qui est ici en cause. Il s"agit essentiellement de savoir si, par son omission de s"opposer à la poursuite de l"instance à un stade antérieur en se fondant sur l"existence d"une crainte raisonnable de partialité, M. Zündel a renoncé au droit qu"il avait de le faire.

[5]      J"examinerai maintenant la décision du juge McGillis. Si je comprends bien, cette décision est la suivante : l"indépendance d"un organisme décideur et son impartialité (ou la crainte de partialité) sont des concepts différents, mais qui se chevauchent; le degré d"indépendance et d"impartialité qu"un tribunal doit avoir varie selon la nature de l"organisme décideur; les tribunaux constitués en vertu de la Loi canadienne sur les droits de la personne , en raison de la nature des décisions qu"ils rendent, doivent avoir un degré élevé d"indépendance; le mandat des membres du Comité parmi lesquels les membres du tribunal sont choisis et la relation qui existe entre les tribunaux et la Commission permettent de conclure au manque d"indépendance institutionnelle, qui peut donner lieu à une crainte raisonnable de partialité dans l"esprit d"une personne qui fait l"objet d"une plainte devant le tribunal. Les facteurs qui mènent à cette conclusion sont les suivants : (1) la brève durée du mandat des membres du Comité au sein duquel les membres des tribunaux sont choisis et l"absence de disposition permettant aux membres de continuer à exercer leurs fonctions après l"expiration de leur mandat afin de mener à bonne fin l"audition d"une affaire, d"où la nécessité de donner un nouveau mandat aux membres au milieu de l"audience1; (2) le taux de rémunération quotidien à verser aux membres du tribunal ainsi que le montant à payer pour les frais de déplacement et de séjour sont fixés par un règlement administratif de la Commission approuvé par le Conseil du Trésor2. Les éléments structurels mentionnés en (1) ci-dessus ont été jugés comme n'accordant pas aux membres du tribunal une inamovibilité adéquate; les éléments qui sont mentionnés en (2) ci-dessus ont été jugés comme n'accordant pas une sécurité financière suffisante.

[6]      Dans l"arrêt Valente c. La Reine , [1985] 2 R.C.S. 673, la Cour suprême a jugé que trois éléments étaient pertinents lorsqu"il s"agit de déterminer si une cour ou un tribunal est indépendant. Dans la décision Bell , il a été conclu qu"en ce qui concerne les tribunaux constitués en vertu de la Loi canadienne sur les droits de la personne , deux de ces éléments n"étaient pas présents; comme il en a ci-dessus été fait mention, il s"agissait de l"inamovibilité et de la sécurité financière. De plus, dans la décision Bell , il a été conclu que le pouvoir que possède la Commission de prendre des ordonnances qui lient la Commission et les tribunaux en vertu des paragraphes 27(2) et (3) de la Loi allait à l"encontre de l"exigence relative à l"impartialité.

[7]      La décision qui a été rendue dans l"affaire Bell était limitée aux audiences particulières qui avaient eu lieu devant le tribunal Bell et ne constituait pas une déclaration selon laquelle tous les tribunaux étaient entachés des mêmes vices, mais la décision s"applique en bonne partie d"une façon générale.

[8]      Comme je l'ai mentionné, le tribunal Zündel a rejeté la requête lui demandant de mettre fin à ses audiences pour les motifs énoncés dans la décision Bell. Il a été statué que la décision Bell se rapportait uniquement aux circonstances qui lui étaient propres. Il a été statué que M. Zündel avait renoncé au droit qu"il avait de faire objection, en ne soulevant pas plus tôt la question, alors que tous les faits de l"affaire Bell étaient notoires.

[9]      L"une des circonstances que le tribunal Zündel considérait comme différente des circonstances qui existaient devant le tribunal Bell était que dans l"affaire Bell , le mandat d"un des membres avait pris fin au cours de l"audience. L"examen de l"affaire montre que cela ne semble pas être un facteur distinctif. Le tribunal Zündel a été constitué le 26 novembre 1996; les audiences ont commencé le 26 mai 1997 et ne sont pas encore terminées. Le mandat de deux des membres du tribunal, Mme Devins et M. Pensa, avait pris fin en 1997 et ces deux membres ont reçu un nouveau mandat en septembre 1997. Les membres étaient nommés pour un nouveau mandat d"un an et ces mandats ont donc pris fin non seulement une fois, mais aussi une seconde fois au cours des audiences. Mme Devins et M. Pensa ont de nouveau été nommés, le 30 juin 1998, cette fois-ci pour une période de trois ans.

[10]      Une distinction qui existe entre les deux situations est qu"aucune ordonnance pertinente n"a été prise conformément aux paragraphes 27(2) et (3) de la Loi en ce qui concerne l"instance dont le tribunal Zündel est saisi. Or, dans l"affaire Bell , une ordonnance avait été prise. Une seconde distinction, même si je ne suis pas convaincue qu"elle soit pertinente, est que les modifications apportées à la Loi canadienne sur les droits de la personne ont été édictées le 30 juin 1998 et que les dispositions irrégulières de la Loi ont été modifiées de façon à remédier aux problèmes soulevés dans l"affaire Bell . (Les dispositions de la Loi pertinentes figurent dans l"appendice joint aux présents motifs.) Toutefois, ce sont les dispositions de la Loi telles qu"elles s"appliquaient à la date de la décision du tribunal Zündel qui sont ici pertinentes.

[11]      Il semble y avoir peut-être eu des incohérences dans la façon dont différents tribunaux ont réagi devant la décision Bell. Ainsi, le tribunal qui a entendu l"affaire John Mills, plaignant et Via Rail Canada Inc., intimée , à la suite d"une requête présentée par l"intimée, a suspendu l"instance et renvoyé à la Cour fédérale, conformément au paragraphe 18.3(1) de la Loi sur la Cour fédérale , la question de l"effet de la décision Bell . J"ai été informée que lorsqu"il a été mis au courant de l"incohérence apparente entre cette procédure et la décision que le tribunal Zündel avait prise de poursuivre l"instance, l"avocat de la Commission a soulevé la question auprès des membres du tribunal Via Rail et, après que les parties en cause eurent présenté des observations, le tribunal s"est désisté de ses fonctions et le renvoi à la Cour fédérale a été retiré. L"avocat de la Commission affirme qu"aucun élément de preuve n"avait été présenté lors de l'audition de l"affaire Via Rail et que cette affaire-là était donc différente de la présente espèce.

[12]      J"examinerai maintenant la question de la renonciation. La décision rendue dans l"affaire In re tribunal des droits de la personne et Énergie atomique du Canada Limitée , [1986] 1 C.F. 103 (C.A.) (l"affaire EACL ), est à mon avis déterminante. EACL cherchait à faire annuler une procédure engagée devant le tribunal qui entendait une plainte déposée contre elle, parce que, dans une décision qu"elle venait de rendre, MacBain c. Lederman , [1985] 1 C.F. 856, la Cour d"appel fédérale avait conclu qu"il existait une crainte raisonnable de partialité par suite de la méthode alors utilisée pour choisir les membres du tribunal. La Commission participait à la sélection. Les trois juges de la Cour d"appel fédérale avaient conclu qu"EACL ne pouvait pas se fonder sur la décision MacBain . Si je comprends bien, dans ces trois décisions l"accent est mis sur des questions légèrement différentes, mais dans chacune d"elles il a été jugé que le facteur crucial était qu"EACL n"avait pas soulevé la question d"une crainte raisonnable de partialité au début de l"audience. La Cour a conclu qu"EACL disposait de tous les faits pertinents à ce moment-là : les fait qui servaient de fondement à la décision MacBain étaient énoncés dans la loi elle-même. Il a été jugé que, dans ces conditions, EACL avait implicitement renoncé au droit qu"elle avait de s"opposer à la décision du tribunal en se fondant sur le fait qu"il existait une crainte raisonnable de partialité. Je cite une partie des motifs prononcés par le juge MacGuigan, aux pages 112 et 113 :

              Contrairement à l"appelant/requérant dans l"arrêt MacBain , qui a engagé des procédures en alléguant la partialité même avant la première audition de la plainte portée contre lui par le tribunal et qui s"est en fait retiré de l"audience, EACL selon mon interprétation des faits, a, de manière expresse et implicite, renoncé à son droit de contester la compétence du Tribunal en l"espèce. EACL disposait de tous les faits pertinents qui constituaient le fondement de l"arrêt MacBain de cette Cour avant la première audience publique de cette affaire en décembre 1984. [...]         
         [...]         
         [...] toute la manière d"agir d"EACL devant le Tribunal constituait une renonciation implicite de toute affirmation d"une crainte raisonnable de partialité de la part du Tribunal. La seule manière d"agir raisonnable pour une partie qui éprouve une crainte raisonnable de partialité serait d"alléguer la violation d"un principe de justice naturelle à la première occasion. En l"espèce, EACL a cité des témoins, a contre-interrogé les témoins cités par la Commission, a présenté un grand nombre d"arguments au Tribunal et a engagé des procédures devant la Division de première instance et cette Cour sans contester l"indépendance de la Commission. Bref, elle a participé d"une manière complète à l"audience et, par conséquent, on doit tenir pour acquis qu"elle a implicitement renoncé à son droit de s"opposer.         

[13]      L"avocat du demandeur soutient que la décision EACL ne s"applique plus compte tenu des arrêts rendus dans les affaires Newfoundland Telephone Co. c. Terre-Neuve (Board of Commissioners of Public Utilities) , [1992] 1 R.C.S. 623, et R. c. Curragh Inc., [1997] 1 R.C.S. 537. De plus, il soutient que le demandeur dans ce cas-ci n"a pas renoncé au droit qu"il avait de faire opposition pour le motif qu"il existait une crainte raisonnable de partialité parce que, tant que la décision Bell n"avait pas été rendue, il n"était pas au courant de tous les faits pertinents; il n"était certainement pas au courant des effets juridiques qui en découlaient.

[14]      En ce qui concerne les arrêts Newfoundland Telephone et Curragh, je ne suis pas convaincue qu'ils aient eu pour effet de modifier le droit. Je n"interprète pas les passages auxquels on m"a référée, aux pages 645 et 646 dans le premier arrêt et aux pages 543 à 545 dans le dernier arrêt, comme établissant qu"une crainte raisonnable de partialité, compte tenu d"une renonciation, rend les procédures nulles, et non annulables, et prive le décideur de toute compétence. Si c"était le cas, il ne serait jamais possible de consentir à une audience dans des circonstances où il existe un facteur susceptible de donner lieu à une crainte raisonnable de partialité. Dans l"affaire Newfoundland Telephone , la Cour suprême faisait face à une situation dans laquelle l"appelante avait soulevé une objection, en invoquant l"existence d"une crainte raisonnable de partialité, au début de l"audience qui était tenue devant la Commission dont la décision était contestée, mais la Commission avait refusé de se récuser et avait procédé à l"audition de l"affaire. Dans ce contexte, la décision subséquente de la Commission était nulle et il a été statué que le tribunal n'avait pas compétence par suite de l"objection valide qui avait été faite.

[15]      Dans l"arrêt Curragh , le ministère public s"opposait à ce que le juge présidant l"audience continue à entendre l"affaire, à cause de la mesure qu"il avait prise lorsqu"il avait essayé de faire en sorte que le substitut du procureur général se voit retirer le dossier. La décision était similaire à celle qui avait été rendue dans l"affaire Newfoundland Telephone ; la cour n"avait pas compétence parce qu"une objection valide avait été faite aussitôt que possible. Ni l"une ni l"autre de ces affaires ne se rapporte au cas dans lequel il y a renonciation. De fait, dans l"arrêt Curragh , la Cour suprême a fait remarquer que les objections fondées sur l"existence d"une crainte raisonnable de partialité doivent être faites en temps opportun et que dans l"affaire Curragh , c"est ce qui s"était produit.

[16]      L"avocat du demandeur soutient qu"en l"espèce, ce n"est pas simplement une crainte raisonnable de partialité qui est en cause, mais le fait même qu"il y a partialité. Il soutient qu"une renonciation est impossible lorsqu"il y a partialité et que cela rend la procédure nulle, comme l"a expliqué le juge Marceau dans la décision qu"il a rendue dans l"affaire EACL . Je ne dispose d"aucun élément de preuve qui démontre l"existence d"une partialité réelle.

[17]      L"avocat du demandeur soutient qu"il ne pouvait pas y avoir renonciation parce que son client et lui ne connaissaient pas tous les faits pertinents avant que la décision Bell ait été rendue et qu"ils ne savaient pas quelles conclusions de droit en découleraient. Les facteurs sur lesquels la décision Bell est fondée font partie du domaine public; il s"agit de dispositions de la Loi canadienne sur les droits de la personne . Les dates auxquelles des membres du Comité ont été nommés et nommés à nouveau font également partie du domaine public (C.P. 1994-1053, C.P. 1995-1442, C.P. 1997-1408; C.P. 1997-1410, C.P. 1998-1198), comme d"ailleurs l"existence ou l"inexistence d'ordonnances prises conformément au paragraphe 27(2). Le demandeur, son avocat et de nombreuses autres personnes ne se sont pas rendu compte des conséquences juridiques de ces faits, mais il est de droit constant qu"une connaissance insuffisante du droit ne justifie pas le fait qu"on a tardé à déposer une plainte.

[18]      Je devrais également faire remarquer qu"en plus de l"affaire EACL , l"avocat de la Commission a cité une série d"affaires auxquelles la Régie des permis d"alcool du Québec était partie. En 1996, la Cour suprême du Canada a statué qu"il y avait confusion de fonctions chez les avocats au sein de la Régie, de sorte que l"avocat poursuivant était en mesure de participer au processus décisionnel. Il a été statué que cette circonstance donnait lieu à une crainte raisonnable de partialité (2747-3174 Québec Inc. c. Québec (Régie des permis d"alcool), [1996] 3 R.C.S. 919). À la suite de cette décision, une société différente qui s"était vu imposer des sanctions par la Régie a demandé le contrôle judiciaire de la décision de cette dernière pour le motif qu"elle n"était pas indépendante ou impartiale sur le plan institutionnel (2433-6877 Québec Inc. c. Québec (Régie des alcools, des courses et des jeux), [1997] A.Q. no 2039 (QL). La Cour supérieure du Québec, aux paragraphes 25 et 28, a rejeté la demande que la demanderesse avait présentée en disant qu"il est bien établi en droit que les arguments par lesquels on conteste l"indépendance et l"impartialité structurelles d"un tribunal doivent être soulevés au début de l"instance et qu"en omettant de le faire, on renonce à la possibilité de contester la compétence du tribunal pour ces motifs :

         [...] On sait qu"un argument sur l"impartialité de l"organisme devant qui on se présente doit toujours être invoqué en début d"instance.         
         [...]         
         Ce principe est donc clairement établi et le Tribunal doit conclure que la requérante ayant renoncé à invoquer la question d"impartialité structurelle en première instance, elle ne peut le faire dans le cadre d"une demande de révision judiciaire. On se trouve alors à " sauter " une étape, ce que l"on ne peut faire. C"est devant la Régie que l"argument devait être présenté et comme il ne l"a pas été, on ne peut le faire dans le cadre de la présente instance.         

[19]      Les arguments que les défenderesses Sabina Citron et la Canadian Holocaust Remembrance Association ne m"ont pas convaincue qu"il s"agit ici d"une affaire dans laquelle, si je concluais à l"existence d"une crainte raisonnable de partialité, il faudrait malgré tout que le tribunal poursuive l"audience. Je ne vois pas pourquoi un autre tribunal ne pourrait pas être constitué en vertu de la nouvelle législation.

[20]      À mon avis, l"argument avancé par l"avocat du demandeur, à savoir que la décision Askov étaye sa position, n"est pas convaincant. La décision Askov se rapportait à une exigence constitutionnelle, soit le droit d"être jugé dans un délai raisonnable, et je ne dispose de toute façon d"aucun élément de preuve tendant à montrer pourquoi et dans quelles circonstances la décision a été appliquée. Je n"estime pas valide l"argument selon lequel l"objection que M. Zündel a faite au début de l"audience au sujet de la compétence du tribunal était fondée sur l"existence d"une crainte raisonnable de partialité. Cette objection était fondée sur la partialité de la Commission et non sur celle du tribunal ainsi que sur le fait que le tribunal n"avait pas compétence parce que le site Web était situé en Californie plutôt qu"au Canada. Le demandeur n"a pas contesté la compétence du tribunal en se fondant sur le fait que le mandat de ses membres, le mécanisme par lequel leur rémunération est fixée et la capacité de la Commission de prendre des ordonnances d'exécution obligatoire donnaient lieu dans son esprit à une crainte raisonnable de partialité.


[21]      Compte tenu de la décision rendue dans l"affaire EACL , je dois rejeter la demande de contrôle judiciaire.

                     B. Reed

                                     Juge

TORONTO (ONTARIO)

Le 23 mars 1999

Traduction certifiée conforme

Jacques Deschênes


A P P E N D I C E


Loi canadienne sur les droits de la personne, telle qu"elle était libellée avant la décision Bell

27(2) Dans un cas ou une catégorie de cas donnés, la Commission peut, sur demande ou de sa propre initiative, décider de préciser, par ordonnance, les limites et les modalités de l"application de la présente loi.

Loi canadienne sur les droits de la personne, telle qu"elle était libellée après la décision Bell (modifications de 1998)

27(2) Dans une catégorie de cas donnés, la Commission peut, sur demande ou de sa propre initiative, décider de préciser, par ordonnance, les limites et les modalités de l"application de la présente loi.

(3) Les ordonnances prises en vertu du paragraphe (2) lient, jusqu"à ce qu"elles soient abrogées ou modifiées, la Commission, les tribunaux des droits de la personne constitués en vertu du paragraphe 49(1) et les tribunaux d"appel constitués en vertu du paragraphe 56(1) lors du règlement des plaintes déposées conformément à la partie III.

(3) Les ordonnances prises en vertu du paragraphe (2) lient, jusqu"à ce qu"elles soient abrogées ou modifiées, la Commission et le membre instructeur désigné en vertu du paragraphe 49(2) lors du règlement des plaintes déposées conformément à la partie III.

37(1) La Commission peut, par règlement administratif [...] prévoir :

e) le barème de rémunération des commissaires à temps partiel, des membres des tribunaux des droits de la personne et des personnes visées au paragraphe 32(2)

f) le barème des frais de déplacement et de séjour payables aux commissaires, aux membres des tribunaux des droits de la personne et aux personnes visées au paragraphe 32(2).

37(1) La Commission peut, par règlement administratif [...] prévoir :

e) le barème de rémunération des commissaires à temps partiel et des personnes visées au paragraphe 32(2)

f) le barème des frais de déplacement et de séjour payables aux commissaires et aux personnes visées au paragraphe 32(2).

48.1 Est constitué le Comité du tribunal des droits de la personne composé du président et des membres nommés par le gouverneur en conseil.

48.1 Est constitué le Tribunal canadien des droits de la personne composé, sous réserve du paragraphe (6), d"au plus quinze membres, dont le président et le vice-président, nommés par le gouverneur en conseil.

(6) Le gouverneur en conseil peut nommer des vacataires pour un mandat maximal de trois ans lorsqu"il estime que la charge de travail du Tribunal le justifie.

48.2 Le président du Comité est nommé à titre inamovible pour un mandat de trois ans et les autres membres sont nommés à titre inamovible pour un mandat maximal de cinq ans, sous réserve de révocation motivée par le gouverneur en conseil. [Non souligné dans l'original.]

48.2(2) Le membre dont le mandat est échu peut, avec l"agrément du président, terminer les affaires dont il est saisi. Il est alors réputé être un membre à temps partiel pour l"application des articles 48.3, 48.6, 50 et 52 à 58.

48.6(1) Les membres du Tribunal reçoivent la rémunération que fixe le gouverneur en conseil.

(2) Ils ont droit aux frais de déplacement et de subsistance entraînés par l"accomplissement, hors du lieu de leur résidence habituelle, des fonctions qui leur sont confiées en application de la présente loi, sous réserve des montants maximaux que les instructions du Conseil du Trésor fixent en semblable matière pour les fonctionnaires du gouvernement du Canada . [Non souligné dans l'original.]

COUR FÉDÉRALE DU CANADA

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

No DU DOSSIER :              T-992-98
INTITULÉ DE LA CAUSE :      ERNST ZÜNDEL

                     et

                     LA COMMISSION CANADIENNE DES DROITS DE LA PERSONNE, LE CONGRÈS JUIF CANADIEN, LA LIGUE DES DROITS DE LA PERSONNE DE B"NAI BRITH CANADA, LE SIMON WIESENTHAL CENTRE, LA CANADIAN HOLOCAUST REMEMBRANCE ASSOCIATION, SABINA CITRON, LA CANADIAN ASSOCIATION OF FREE EXPRESSION ET LE TORONTO MAYOR"S COMMITTEE ON COMMUNITY AND RACE RELATIONS
LIEU DE L"AUDIENCE :          TORONTO (ONTARIO)
DATE DE L"AUDIENCE :          LE MARDI, 9 MARS 1999

MOTIFS DE L"ORDONNANCE DU JUGE REED EN DATE DU 23 MARS 1999.

ONT COMPARU :

Doug Christie                  pour le demandeur

Barbara Kulaszka

René Duval                      pour la CCDP, défenderesse
Wendy Matheson                  pour Sabina Citron et autres, défendeurs

Andrew Weretelnyk                  pour le Toronto Mayor"s Committee on Race Relations, défendeur
Judy Chan                      pour le Congrès juif canadien, défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Doug Christie                  pour le demandeur

Avocat

810, rue Courtney

Victoria (C.-B.)

V8W 1C4

Commission canadienne des droits          pour la CCDP, défenderesse

de la personne

320, rue Queen

13e étage, Tour A

Ottawa (Ontario)

K1A 1E1

Tory Tory Deslauriers et Binnington      pour Sabina Citron et autres, défendeurs

Avocats

Bureau 3000, Tour Aetna

C.P. 270

Succ. Toronto Dominion

Toronto (Ontario)

M5K 1N2

Contentieux de la ville de Toronto          pour le Toronto Mayor"s Committee on Race
Hôtel de ville                      Relations, défendeur

100 ouest, rue Queen

Toronto (Ontario)

M5H 2N2

Karam, Greenspoon                  pour le Congrès juif canadien, défendeur

Avocats

1112-180, rue MacLaren

Ottawa (Ontario)

K2P 0L3


                                         COUR FÉDÉRALE DU CANADA
                                         Date : 19990323
                                         Dossier : T-992-98
                                         ENTRE
                                         ERNST ZÜNDEL,
                                         demandeur,
                                         et
                                         LA COMMISSION CANADIENNE DES DROITS DE LA PERSONNE, LE CONGRÈS JUIF CANADIEN, LA LIGUE DES DROITS DE LA PERSONNE DE B"NAI BRITH CANADA, LE SIMON WIESENTHAL CENTRE, LA CANADIAN HOLOCAUST REMEMBRANCE ASSOCIATION, SABINA CITRON, LA CANADIAN ASSOCIATION OF FREE EXPRESSION ET LE TORONTO MAYOR"S COMMITTEE ON COMMUNITY AND RACE RELATIONS,
                                         défendeurs.


MOTIFS DE L"ORDONNANCE


__________________

1      L.R.C. (1985), ch. H-6, modifiée par L.R.C. (1985) (1er suppl.), ch. 31, art. 65 et 48.1 à 48.4.

2      L.R.C. (1985), ch. H-6, art. 30, 32(2), 37(1)e )f), 37(2).

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