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Date : 20000609


Dossier : IMM-2818-99


OTTAWA (ONTARIO), LE 9 JUIN 2000

EN PRÉSENCE DE MADAME LE JUGE TREMBLAY-LAMER


ENTRE :


SAMIR CHANDRA RAY, SUMITA RAY,

JOYONTEE RAY



demandeurs


et


LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L"IMMIGRATION


défendeur



O R D O N N A N C E


     La demande de contrôle judiciaire est rejetée.



" Danièle Tremblay-Lamer "

                                         JUGE



Traduction certifiée conforme


Bernard Olivier, B.A., LL.B.





Date : 20000609


Dossier : IMM-2818-99


ENTRE :


SAMIR CHANDRA RAY, SUMITA RAY,

JOYONTEE RAY


demandeurs


et


LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L"IMMIGRATION


défendeur



MOTIFS DE L"ORDONNANCE


LE JUGE TREMBLAY-LAMER


[1]      Il s"agit d"une demande de contrôle judiciaire contre une décision, datée du 17 mai 1999, dans laquelle la Section du statut de réfugié (la SSR) de la Commission de l"immigration et du statut de réfugié a rejeté une requête visant à obtenir que soit fixée une date d"audition de la demande des demandeurs.

[2]      Les demandeurs, des citoyens du Bangladesh, sont arrivés au Canada le 2 septembre 1994 et y ont revendiqué le statut de réfugiés. Le 29 octobre 1994, un commissaire de la SSR a conclu qu"ils étaient effectivement des réfugiés au sens de la Convention.

[3]      Le 15 août 1997, le président de la SSR a accordé au ministre de la Citoyenneté et de l"Immigration l"autorisation de demander à la section du statut de réexaminer la question de la reconnaissance du statut de réfugié au sens de la Convention accordée aux demandeurs et d"annuler cette reconnaissance, conformément au paragraphe 69.2(2) de la Loi sur l"immigration1 (la Loi). Voici le libellé du paragraphe 69.2(2) :

The Minister may, with leave of the Chairperson, make an application to the Refugee Division to reconsider and vacate any determination made under this Act or the regulations that a person is a Convention refugee on the ground that the determination was obtained by fraudulent means or misrepresentation, suppression or concealment of any material fact, whether exercised or made by that person or by any other person.

Avec l"autorisation du président, le ministre peut, par avis, demander à la section du statut de réexaminer la question de la reconnaissance du statut de réfugié au sens de la Convention accordée en application de la présente loi ou de ses règlements et d"annuler cette reconnaissance, au motif qu"elle a été obtenue par des moyens frauduleux, par une fausse indication sur un fait important ou par la suppression ou la dissimulation d"un fait important, même si ces agissements sont le fait d"un tiers.

[4]      Le 7 décembre 1998, conformément au paragraphe 69.3(4)2 de la Loi, une formation de trois membres de la SSR (la formation) a conclu, vu le grand nombre de fausses observations et de contradictions de la revendication des demandeurs, que ces derniers avaient fait de fausses représentations concernant la très grande majorité des faits sur lesquels leurs revendications respectives étaient fondées.

[5]      La formation a également statué qu"aucun élément de preuve crédible ne permettait de conclure que malgré les fausses représentations que les demandeurs ont reconnu avoir faites, il y avait suffisamment d"éléments de preuve susceptibles de fonder une décision de leur accorder le statut de réfugiés au sens de la Convention. Cette décision n"a pas été contestée.

[6]      Le 17 mai 1999, la SSR a rejeté la requête par laquelle les demandeurs cherchaient à obtenir qu"une date d"audition soit fixée afin qu"il soit statué sur le bien-fondé de leurs revendications du statut de réfugiés. La SSR a conclu que la décision du 7 décembre 1998 avait pour effet d"annuler la décision initiale favorable qui avait été rendue à leur égard et que la Commission était dessaisie de leurs revendications.

[7]      Dans l"arrêt Bayat c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l"Immigration)3, les juges majoritaires4 de la Cour d"appel fédérale ont conclu qu"en vertu des paragraphes 69.2(2) et 69.3(4) et (5) de la Loi, le pouvoir de la Section du statut de réfugié ne se limitait pas à la simple " annulation " d"une reconnaissance du statut de réfugié accordée en application de la Loi, et qu"il permettait également de " réexaminer " la question d"une telle reconnaissance.

[8]      Il s"ensuit donc que pour ce qui est d"une demande fondée sur le paragraphe 69.2(2) de la Loi, la Section du statut de réfugié a le pouvoir accessoire de trancher la question de savoir si les demandeurs sont effectivement des réfugiés au sens de la Convention ou non.

[9]      En l"espèce, les demandeurs soutiennent que la Commission a commis une erreur lorsqu"elle a rejeté leur requête visant à obtenir qu"une date d"audition soit fixée, étant donné qu"ils ont droit à une nouvelle audition devant une nouvelle formation, qui déterminera s"ils sont des réfugiés au sens de la Convention ou non. Je ne suis pas d"accord.

[10]      J"estime que la conclusion que la Cour d"appel fédérale a tirée dans l"arrêt Bayat ne vicie pas la détermination de la Commission selon laquelle l"annulation de la reconnaissance du statut de réfugié n"a pour effet ni de créer une nouvelle revendication ou un nouveau renvoi, ni de raviver le renvoi initial.

[11]      À mon avis, la conclusion qui a été tirée dans l"arrêt Bayat porte que la formation qui agit en application du paragraphe 69.2(2) de la Loi a compétence pour déterminer si une personne est réfugiée ou non. C"est à ce moment-là que la Section du statut de réfugié a le pouvoir de faire une telle détermination. L"arrêt Bayat ne prévoit pas qu"un demandeur a droit à une nouvelle audition à laquelle il pourrait produire de nouveaux éléments de preuve. À mon avis, le principe que mon collègue le juge Rothstein a établi dans Guruge c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l"Immigration)5 s"applique toujours vu qu"en faisant une telle détermination, la Section du statut de réfugié ne doit considérer que la preuve dont il avait été tenu compte à l"audition initiale. Le " réexamen " prévu au paragraphe 69.2(2) ne saurait être dissocié du libellé du paragraphe 69.3(5). Comme l"a souligné le juge Rothstein :

Le texte de ce paragraphe est très clair et on peut facilement en comprendre le but. Les mots
pertinents sont "il reste suffisamment d'éléments justifiant la reconnaissance du statut". L'expression "il reste" indique que la preuve en question est celle dont était saisi le tribunal qui avait rendu la décision initiale.

[12]      En l"espèce, la formation a conclu qu"aucun élément de preuve crédible ne permettait de conclure que malgré les fausses observations, il y avait suffisamment de preuve pour accorder aux demandeurs le statut de réfugiés.

[13]      Bien qu"il ne reste aucun élément de preuve crédible permettant à une formation de conclure qu"une personne est une réfugiée au sens de la Convention, on peut certainement déduire qu"un demandeur n"est pas un réfugié au sens de la Convention.

[14]      La prétention des demandeurs selon laquelle ils ont droit à une nouvelle audition n"est pas compatible avec le régime que la Loi établit. Le revendicateur débouté qui a dit la vérité n"a pas droit à une nouvelle audition. Il est clair que la Loi ne vise pas à accorder plus de droits à une partie qui a fait de fausses déclarations sur des faits importants.

[15]      Les demandeurs font également valoir qu"ils n"ont pas eu l"occasion d"exposer tous leurs arguments vu que leur requête visant à obtenir qu"une date d"audition soit fixée a été traitée sur documents, alors qu"ils ont expressément demandé la tenue d"une audition orale.

[16]      Il ressort d"un examen des lettres que les parties se sont échangées, et particulièrement de la réponse datée du 3 mai 1999, que les demandeurs n"ont pas contesté le fait qu"une audition orale n"a pas été tenue; au contraire, ils ont souligné leur intention d"exposer leurs arguments par écrit. Dans les circonstances, j"estime qu"ils ont renoncé à leurs droits de soulever une objection aujourd"hui.

[17]      Je suis donc d"avis que la SSR n"a pas commis d"erreur lorsqu"elle a rejeté la requête que les demandeurs ont présentée en vue d"obtenir qu"une date d"audition soit fixée afin qu"il soit statué sur le bien-fondé de leurs revendications du statut de réfugiés. C"est à bon droit que la formation a conclu qu"elle était dessaisie de ces revendications.

[18]      En conséquence, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.

[19]      L"avocat des demandeurs a invité la Cour à certifier la question suivante :

Comme la Section d"appel de la Cour n"a pas décrit la nature du " réexamen ", prévu au par. 69.2(2), par lequel une formation de la SSR peut statuer qu"une personne n"est pas une réfugiée au sens de la Convention :
-      l"annulation de la reconnaissance du statut de réfugié ou
-      le refus d"exercer les pouvoirs prévus au par. 69.3(5)
constitue-t-il un " réexamen " et une conclusion que les revendicateurs ne sont pas des réfugiés au sens de la Convention?

[20]      La Cour n"est pas convaincue qu"il s"agit d"une question grave de portée générale. En conséquence, la Cour ne certifiera pas la question.



" Danièle Tremblay-Lamer "

                                         JUGE


OTTAWA (ONTARIO)

Le 9 juin 2000.












Traduction certifiée conforme


Bernard Olivier, B.A., LL.B.

COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE


AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER



NO DU GREFFE :              IMM-2818-99

INTITULÉ DE LA CAUSE :          SAMIR CHANDRA RAY et autres c. MCI


LIEU DE L"AUDIENCE :          MONTRÉAL (QUÉBEC)

DATE DE L"AUDIENCE :          LE 31 MAI 2000

MOTIFS D"ORDONNANCE EXPOSÉS PAR MADAME LE JUGE TREMBLAY-LAMER

EN DATE DU :              9 JUIN 2000



ONT COMPARU :


Me JEAN-MICHEL MONTBRIAND              POUR LE DEMANDEUR

Me MICHEL SYNNOTT                      POUR LE DÉFENDEUR


AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :


Me JEAN-MICHEL MONTBRIAND              POUR LE DEMANDEUR


M. MORRIS ROSENBERG                      POUR LE DÉFENDEUR

SOUS-PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

__________________

1      L.R.C. (1985), ch. I-2.

2      Voici le libellé du paragraphe 69.3(4) :
La section du statut accepte ou rejette la demande le plus tôt possible après l'audience et notifie sa décision, par écrit, au ministre et à l'intéressé.

3      [1999] 4 C.F. 343.

4      Le juge Robertson, J.C.A., a exposé des motifs dissidents.

5      (1998) 160 F.T.R. 297.

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