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     T-2153-91

OTTAWA (ONTARIO), VENDREDI LE 13 JUIN 1997

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE RICHARD

ENTRE :

     RON HOPKINSON, EDWARD R. RING et THOMAS VIRANY,

     demandeurs,

     - et -

     LE COMMISSAIRE AUX BREVETS et

     SA MAJESTÉ LA REINE,

     défendeurs.

     J U G E M E N T

         Vu l'action intentée par les demandeurs contre les défendeurs en vue d'obtenir une mesure de redressement déclaratoire :

         IL EST DÉCLARÉ, d'après la preuve et les arguments des parties, que :

     1.      Le Bureau des brevets satisfait les exigences de l'article 3 de la Loi sur les brevets;
     2.      Pour que des examinateurs de brevets agissent légalement lorsqu'ils déterminent si des demandes de brevet peuvent donner lieu à la délivrance de brevets, il n'est pas nécessaire que le Commissaire leur ait délégué officiellement le pouvoir de le faire en vertu du paragraphe 4(4) de la Loi sur les brevets;
     3.      Le Conseil du Trésor a le pouvoir de recruter des examinateurs de brevets en vue d'examiner les demandes de brevet aux termes de la Loi sur les brevets;
     4.      Les examinateurs de brevets sont des employés de la fonction publique;
     5.      Les employés du Bureau des brevets sont des employés de la fonction publique;
     6.      Le Conseil du Trésor peut prévoir la classification des postes et des employés du Bureau des brevets, y compris les examinateurs de brevets.

         ET LA COUR STATUE QUE la déclaration sollicitée concernant le recrutement de personnel temporaire est refusée.

         ET QUE les dépens sont octroyés aux défendeurs.

                             " J.D. Richard "
                    
                                 JUGE
Traduction certifiée conforme     
                         Martine Guay, LL.L.

     T-2153-91

ENTRE :

     RON HOPKINSON, EDWARD R. RING et THOMAS VIRANY,

     demandeurs,

     - et -

     LE COMMISSAIRE AUX BREVETS et

     SA MAJESTÉ LA REINE,

     défendeurs.

     MOTIFS DU JUGEMENT

LE JUGE RICHARD

Contexte

         La présente action en mesure de redressement déclaratoire a été intentée par voie de déclaration déposée le 20 août 1991 et modifiée le 20 octobre 1994. Les défendeurs ont déposé une défense le 7 novembre 1991, mais pas de défense modifiée. Les avocats des parties ont signé en février 1996 une déclaration relative aux faits et questions non contestés en vue de l'instruction. Les demandeurs ont interrogé au préalable les défendeurs le 5 mars 1996. Le 3 décembre 1996, en vertu de la règle 483(6) des Règles de la Cour fédérale, ils ont demandé à ce que la date et le lieu de l'instruction soient fixés. Le 20 janvier 1997, le juge en chef adjoint a fixé la date et le lieu de l'instruction de la présente action. L'audience a eu lieu à Ottawa le 9 juin 1997.

Questions

         Dans leur déclaration relative aux faits et questions non contestés, les parties ont soumis les questions suivantes à l'instruction.

1.          Pour que des examinateurs de brevets agissent légalement lorsqu'ils déterminent si des demandes de brevet peuvent donner lieu à la délivrance d'un brevet, est-il nécessaire que le Commissaire aux brevets leur délègue officiellement le pouvoir de le faire?

2.          Qui a le pouvoir de recruter des examinateurs de brevets en vue d'examiner les demandes de brevet aux termes de la Loi sur les brevets?

3.          Les examinateurs de brevets sont-ils des employés de la " fonction publique " fédérale?

4.          Les employés du Bureau des brevets sont-ils des employés de la " fonction publique "?

5.          Le Bureau des brevets décrit en l'espèce satisfait-t-il les exigences de l'article 3 de la Loi sur les brevets?

Faits avérés

         En date de juin 1993, le ministère de la Consommation et des Corporations a été intégré au ministère de l'Industrie, des Sciences et de la Technologie, et il n'existe plus en tant que tel. La Loi sur le ministère de l'Industrie, qui crée ce ministère, est entrée en vigueur le 29 mars 1995.

         Dans les années 80, par suite d'une restructuration au sein du ministère de la Consommation et des Corporations, le Bureau des brevets a de fait été intégré à la Direction de la propriété intellectuelle. Le 21 décembre 1992, sur les instructions du sous-ministre de la Consommation et des Corporations, le nouveau nom de " Office de la propriété intellectuelle du Canada ", dont l'abréviation est " OPIC ", a été donné à cette Direction.

         L'OPIC a maintenant le statut d'un organisme de service spécial au sein du ministère de l'Industrie. Cela signifie que l'OPIC est considéré par le gouvernement du Canada comme faisant partie du ministère de l'Industrie mais qu'il dispose d'une plus grande maîtrise de ses finances et de son budget à long terme qu'une direction ordinaire de ce ministère.

         La Loi sur les brevets1 établit un régime en vertu duquel les demandes de brevet peuvent être déposées par de présumés inventeurs ou leurs représentants légaux qui désirent se prévaloir de la protection accordée par un brevet au Canada. Suivant le régime établi par la Loi sur les brevets, ces demandes sont déposées et accompagnées des taxes requises. Elles sont examinées pour déterminer si elles respectent les exigences de la Loi sur les brevets. Les demandes jugées conformes sont acceptées et donnent lieu à la délivrance de brevets.

         Les demandes de brevet sont examinées pour déterminer si elles respectent les exigences de la Loi sur les brevets. Une recherche des brevets antérieurs et d'autres documents est effectuée pour vérifier si la prétendue invention révélée dans la demande est nouvelle et si elle est conforme aux autres exigences de la Loi de sorte qu'un brevet puisse être délivré. L'examen d'un brevet exige une connaissance de la Loi sur les brevets ainsi qu'une connaissance du domaine technique particulier auquel se rapporte l'invention. Les personnes qui procèdent à cet examen sont appelés des examinateurs de brevets.

         Après l'examen, la demande de brevet est rejetée ou un brevet fondé sur celle-ci est délivré.

         Plus de 25 000 demandes de brevet sont déposées au Canada chaque année. Ces demandes sont examinées par des examinateurs de brevets.

         Les demandeurs Ring et Virany exercent les fonctions d'examinateur de brevets. Le demandeur Hopkinson, qui ne travaille plus pour le gouvernement du Canada, exerçait auparavant ces fonctions.

         Le Conseil du Trésor a classifié huit types de poste pour les personnes qui ont pour fonction d'examiner des demandes de brevet. Ces postes sont classifiés auprès de la Division de l'examen des brevets de l'Office de la propriété intellectuelle du Canada. Ces postes sont intitulés SG-PAT-01 à SG-PAT-08 inclusivement. Auparavant, ils étaient intitulés SG-PEM-01 à SG-PEM-08. Il n'existe aucun poste d'examinateur principal, examinateur, examinateur associé ou examinateur adjoint.

         Chacun des demandeurs en l'espèce a suivi la procédure de recrutement de la Commission de la fonction publique et a été affecté à un poste classifié par le Conseil du Trésor dans la catégorie SG-PAT-04 ou SG-PAT-05. Les fonctions des demandeurs consistent à examiner les demandes de brevet. M. Ring a été affecté à un poste classifié SG-PAT-05. M. Virany a été affecté à un poste classifié SG-PAT-04. Avant le 14 juillet 1995, M. Hopkinson avait été affecté à un poste classifié SG-PAT-05. Toutefois, M. Hopkinson n'est plus au service du gouvernement du Canada.

         Vers septembre 1990, à la demande du ministre de la Consommation et des Corporations, le ministre des Approvisionnements et Services a conclu une convention d'offre permanente pour des services d'aide temporaire (contrat nE 66OTT-O-9946/01) avec une société dénommée Personnel Plus Ottawa Inc. en vue de la fourniture de personnel temporaire.

         En décembre 1990, à la demande du ministre de la Consommation et des Corporations, le ministre des Approvisionnements et Services a lancé une demande de propositions à une personne physique (demande nE 508ZF.54474-0-8877).

         Les faits avérés ont été complétés par le témoignage de l'un des demandeurs, M. Edward R. Ring, et par des extraits de l'interrogatoire préalable de M. Peter James Davies, produits pour le compte des défendeurs.

Bureau des brevets

         À l'audience, l'avocat des demandeurs a mis en doute l'existence même du Bureau des brevets étant donné qu'aucune entité ainsi dénommée ne figure sur les organigrammes récents du gouvernement. Il se fonde sur l'article 3 de la Loi sur les brevets, qui dispose :

         Article 3. Bureau des brevets

         Est attaché au ministère de l'Industrie, ou à tout autre ministère fédéral que le gouverneur en conseil peut désigner, un bureau appelé le Bureau des brevets.         

         Le Bureau des brevets a été créé par la loi; personne n'est appelé à le créer. Il existe en vertu de la loi et il ne s'agit pas d'un emplacement réel. Ce qui importe c'est que les fonctions que la loi confie au Bureau des brevets soient exercées. Je suis convaincu que ces fonctions sont exercées sous la direction du Commissaire, peu importe si l'organisme est appelé Bureau des brevets, Bureau de la propriété intellectuelle, Direction de la propriété intellectuelle, Division des brevets ou Office de la propriété intellectuelle du Canada (OPIC). L'article 2 des Règles sur les brevets prévoit que les mots " Bureau des brevets " désignent le Bureau des brevets créé par l'article 3 de la Loi .

Délégation

         L'avocat des demandeurs prétend que, dans les faits, ce sont les examinateurs de brevets qui délivrent les brevets d'invention et que, pour exercer leurs fonctions régulièrement et légalement, il faut que le Commissaire leur délègue des pouvoirs en vertu du paragraphe 4(4) de la Loi sur les brevets, qui dispose :

         Article 4. Commissaire aux brevets         
         ...         
             (4) Délégation. - Le commissaire peut, après consultation avec le ministre, déléguer à toute personne qu'il estime compétente les pouvoirs et fonctions que lui confère la présente loi, sauf le pouvoir de déléguer prévu au présent paragraphe.         

         Cet argument ne tient pas compte de la réalité juridique selon laquelle l'examinateur de brevets ne confère pas de droits. C'est le Commissaire et non l'examinateur de brevets qui délivre les brevets d'invention. Le paragraphe 27(1) de la Loi sur les brevets dispose :

         Article 27. Délivrance de brevet         
             (1) Le commissaire accorde un brevet d'invention à l'inventeur ou à son représentant légal si la demande de brevet est déposée conformément à la présente loi et si les autres conditions de celle-ci sont remplies.         

         De plus, des taxes sont versées au Commissaire en vue de maintenir les demandes. L'article 27.1 de la Loi sur les brevets dispose :

         Article 27.1. Taxes périodiques         
             Le demandeur est tenu de payer au commissaire, afin de maintenir sa demande en état, les taxes réglementaires pour chaque période réglementaire.         

         C'est le Commissaire qui peut refuser une demande. L'article 40 de la Loi sur les brevets dispose :

         Article 40. Le commissaire peut refuser le brevet         
             Chaque fois que le commissaire s'est assuré que le demandeur n'est pas fondé en droit à obtenir la concession d'un brevet, il rejette la demande et, par courrier recommandé adressé au demandeur ou à son agent enregistré, notifie à ce demandeur le rejet de la demande, ainsi que les motifs ou raisons du rejet.         

         C'est aussi le Commissaire qui peut délivrer un brevet nouveau ou rectifié. Le paragraphe 47(1) de la Loi sur les brevets dispose :

         Article 47. Délivrance de brevets nouveaux ou rectifiés         
             (1) Lorsqu'un brevet est jugé défectueux ou inopérant à cause d'une description et spécification insuffisante, ou parce que le breveté a revendiqué plus ou moins qu'il n'avait droit de revendiquer à titre d'invention nouvelle, mais qu'il apparaît en même temps que l'erreur a été commise par inadvertance, accident ou méprise, sans intention de frauder ou de tromper, le commissaire peut, si le breveté abandonne ce brevet dans un délai de quatre ans à compter de la date du brevet, et après acquittement d'une taxe réglementaire additionnelle, faire délivrer au breveté un nouveau brevet, conforme à une description et spécification rectifiée par le breveté, pour la même invention et pour la partie restant alors à couvrir de la période pour laquelle le brevet original a été accordé.         

         La demande de brevet est adressée au Commissaire. Les examinateurs de brevets sont appelés à l'examiner. Si l'examinateur en question juge que l'objet d'une revendication a déjà été révélé ou que l'invention est évidente, ses oppositions sont énoncées dans un rapport appelé " Rapport du Bureau des brevets ". Le demandeur a la possibilité de répondre, ou il peut demander au Commissaire de modifier la demande. Sur réception de la réponse, l'examinateur l'évalue et il prépare une deuxième décision par laquelle le Bureau peut exiger d'autres modifications ou encore donner un " Avis d'acceptation " indiquant qu'un brevet sera délivré. Si l'examinateur fait une opposition finale à la demande, le demandeur a le droit d'interjeter appel au Commissaire et de demander une révision de l'opposition de l'examinateur. C'est la Commission d'appel des brevets qui procède à cette révision. Si le Commissaire rejette l'appel et refuse de délivrer un brevet, le demandeur peut interjeter appel devant la Cour fédérale du Canada.

         L'avocat des demandeurs a prétendu que dans l'arrêt Pioneer2, la Cour suprême du Canada a mentionné que c'était l'examinateur de brevets qui rejetait la demande en cause. Selon l'avocat, la Cour suprême a reconnu qu'il appartient à l'examinateur de brevets d'accorder ou de refuser un brevet. Toutefois, il ressort clairement de cet arrêt qu'après le rejet de sa demande par l'examinateur, le demandeur a soumis au Commissaire une demande de révision de la décision de l'examinateur. Le Commissaire a renvoyé l'affaire à la Commission d'appel des brevets formée par le Commissaire. Dans son rapport, la Commission a confirmé la décision de l'examinateur et jugé que l'invention n'était pas brevetable. La Cour suprême ajoute3 :

         En statuant sur la demande de révision, le commissaire des brevets a souscrit aux recommandations et aux conclusions de la commission d'appel des brevets.         

         Manifestement, la décision de refuser de délivrer un brevet appartenait au Commissaire peu importe le rôle joué par l'examinateur. En conséquence, je déclare que, dans ces circonstances, il n'est pas nécessaire que le Commissaire délègue des pouvoirs à l'examinateur de brevets, aux termes du paragraphe 4(4) de la Loi sur les brevets.

Situation professionnelle

         Voyons maintenant les principales questions soulevées dans le cadre de la présente instance :

1.          Qui a le pouvoir de recruter des examinateurs de brevets?

2.          Font-ils partie de la fonction publique?

La Loi sur l'emploi dans la fonction publique4, prévoit, notamment, ce qui suit :

         2. (1) Les définitions qui suivent s'appliquent à la présente loi.         
         ...
         " fonctionnaire " Personne employée dans la fonction publique et dont la nomination à celle-ci relève exclusivement de la Commission.         
         ...
         " fonction publique " S'entend au sens de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique .         
         ...
         6.(1) La Commission peut autoriser un administrateur général à exercer, selon les modalités qu'elle fixe, tous pouvoirs et fonctions que lui attribue la présente loi, sauf en ce qui concerne ceux prévus aux articles 7.1, 21, 34, 34.4 et 34.5.         
         ...

La Loi sur les relations de travail dans la fonction publique5 prévoit, à l'article 2, ce qui suit :

         " fonction publique " Ensemble des postes qui sont compris dans les ministères ou autres secteurs de l'administration publique fédérale spécifiés à l'annexe I, ou qui en relèvent.         

         En voici la version anglaise :

         " Public service " means the several positions in or under any department or other portion of the public service of Canada specified in Schedule I;         
                 

         La partie I de l'annexe I6 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique traite des " ministères mentionnés à l'annexe I de la Loi sur la gestion des finances publiques ". L'annexe I de la Loi sur la gestion des finances publiques7 énumère, notamment, le ministère de l'Industrie.

         L'article 3 de la Loi sur les brevets, prévoit, notamment, qu'est attaché au ministère de l'Industrie un bureau appelé le Bureau des brevets.

         En termes simples, il s'agi de savoir si le Bureau des brevets est " compris " dans le ministère de l'Industrie ou " en relève " au sens de la définition que donne l'article 2 de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique aux mots " fonction publique ".

         Les mots " compris dans (...) ou en relève " sont descriptifs. Le mot " attaché " signifie faire partie de quelque chose. Le Bureau des brevets fait partie du ministère de l'Industrie. En conséquence, il relève de ce ministère. Je conclus que les examinateurs de brevets sont des employés de la fonction publique et que leur employeur est le Conseil du Trésor.

Classification

         Selon les demandeurs, étant donné que le Conseil du Trésor a établi huit classifications différentes " allant de SG-PAT-01 à SG-PAT-08 " pour les personnes qui examinent les brevets et qu'il ne classifie pas ces postes au moyen des quatre postes mentionnés à l'article 6 de la Loi sur les brevets , aucune personne n'a été nommée conformément à cette disposition.

         Les demandeurs se fondent sur l'interprétation de l'article 6 de la Loi sur les brevets, qui dispose :

         Article 6. Personnel         
             Sont nommés, de la manière autorisée par la loi, les examinateurs principaux, les examinateurs, les examinateurs associés, les examinateurs adjoints et les autres personnes nécessaires à l'application de la présente loi.         

        

        

         Il n'est pas contesté que les fonctions des demandeurs consistent à examiner les demandes de brevet. Les demandeurs sont des examinateurs de brevets. L'article 6 de la Loi sur les brevets impose au Commissaire le devoir de s'assurer que les demandes de brevet sont examinées par des examinateurs de brevets qualifiés et compétents. Il reconnaît qu'il peut y avoir des examinateurs de différents niveaux. Il n'est pas allégué qu'un des examinateurs de brevets, et a fortiori, les demandeurs eux-mêmes, ne sont pas qualifiés ni compétents pour exercer les fonctions d'examinateur de brevets. L'article 6 prévoit aussi la nomination d'autres personnes nécessaires à l'application de la Loi.

         Les articles 7 et 11 de la Loi sur la gestion des finances publiques prévoient, notamment, ce qui suit :

         7.(1) Le Conseil du Trésor peut agir au nom du Conseil privé de la Reine pour le Canada à l'égard des questions suivantes :         
         e) la gestion du personnel de l'administration publique fédérale, notamment la détermination de ses conditions d'emploi;         
         e.1) les conditions d'emploi des personnes nommées par le gouverneur en conseil qui ne sont pas prévues par la présente loi, toute autre loi fédérale, un décret ou tout autre moyen;         

         ...

         11.(1) Les définitions qui suivent s'appliquent au présent article et aux articles 12 et 13,         
         " fonction publique " S'entend au sens de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique , ainsi que de tout secteur de l'administration publique fédérale désigné comme tel par le gouverneur en conseil pour l'application du présent article et des articles 12 et 13.         
         (2) Sous réserve des seules dispositions de tout texte législatif concernant les pouvoirs et fonctions d'un employeur distinct, le Conseil du Trésor peut, dans l'exercice de ses attributions en matière de gestion du personnel, notamment de relations entre employeur et employés dans la fonction publique :         
         a) déterminer les effectifs nécessaires à la fonction publique et assurer leur répartition et leur bonne utilisation;         
         b) déterminer les besoins de formation et de perfectionnement du personnel de la fonction publique et fixer les conditions de mise en oeuvre de cette formation et de ce perfectionnement;         
         c) assurer la classification des postes et des employés au sein de la fonction publique;         

         Manifestement, l'alinéa 11(2)c) de cette Loi permet au Conseil du Trésor de prévoir la classification des postes au sein de la fonction publique, malgré toute autre disposition contenue dans un autre texte. Après avoir déterminé que les examinateurs de brevets sont des employés de la fonction publique au sens du paragraphe 11(1), il s'ensuit que le Conseil du Trésor peut prévoir la classification de leurs postes.

Personnel temporaire

         Au cours de l'instruction, l'avocat des demandeurs a présenté des éléments de preuve concernant le recrutement d'employés temporaires à titre d'examinateurs de brevets. Ces employés provenaient de deux sources. L'une consistait en une convention d'offre à commandes principale régionale (OCPR) conclue avec une entreprise dénommée Personnel Plus et visant à fournir au gouvernement fédéral des services de travail temporaire entre le 1er juillet 1990 et le 30 juin 1991. Il a été admis qu'au cours de cette période, certains examinateurs de brevets qualifiés et compétents ont été appelés à aider à traiter un arriéré de demandes de brevets. Il a aussi été établi que le gouvernement fédéral avait procédé de la sorte pour éviter d'établir une relation continue d'employeur à employés. L'autre source consistait en un contrat de services d'une durée limitée. Les services de deux anciens examinateurs de brevets qualifiés et compétents ont été retenus. Entre le 1er juin 1992 et le 31 mars 1993, ceux-ci ont aussi participé au traitement d'un arriéré de demandes de brevet.

         Les demandeurs prétendent que ces personnes ne répondent pas aux exigences du paragraphe 35(1) de la Loi sur les brevets, qui prévoit que le Commissaire doit faire en sorte qu'une demande de brevet soit examinée par des examinateurs compétents engagés par le Bureau des brevets à cette fin. Il est indubitable que ces personnes étaient compétentes; les demandeurs soutiennent qu'il ne s'agissait pas d'employés du Bureau des brevets.

         Même si les paragraphes 14 et 15 de la déclaration modifiée mentionne l'offre permanente de services de travail temporaire, la question du travail temporaire n'y est pas soulevée comme une question pertinente devant être visée par la plaidoirie à l'instruction. Les éléments de preuve concernant le travail temporaire ont été introduits à l'instruction, sous réserve de l'opposition des défendeurs quant à leur pertinence à l'égard des questions principales soulevées par les parties et quant à leur valeur. Je conclus que ces éléments de preuve ne sont pas pertinents pour l'étude des questions principales soulevées par les parties dans la déclaration relative aux faits et questions non contestés.

         En tout état de cause, la situation de fait sur laquelle les demandeurs se fondent dans le cas de Personnel Plus remonte à 1991. Aucune preuve n'a été présentée sur la situation actuelle. Aucune preuve n'a été présentée non plus sur la question de savoir si cette façon de faire est contraire à une convention collective ni sur celle de savoir si la Cour est l'instance qui convient pour régler cette question. Dans ces circonstances, il ne convient pas d'accorder la mesure de redressement sollicitée.


Conclusion

         Il est déclaré, d'après la preuve et les arguments des parties, que :

     1.      Le Bureau des brevets satisfait les exigences de l'article 3 de la Loi sur les brevets;
     2.      Pour que des examinateurs de brevets agissent légalement lorsqu'ils déterminent si des demandes de brevet peuvent donner lieu à la délivrance de brevets, il n'est pas nécessaire que le Commissaire leur ait délégué officiellement le pouvoir de le faire en vertu du paragraphe 4(4) de la Loi sur les brevets;
     3.      Le Conseil du Trésor a le pouvoir de recruter des examinateurs de brevets pour examiner les demandes de brevet aux termes de la Loi sur les brevets;
     4.      Les examinateurs de brevets sont des employés de la fonction publique;
     5.      Les employés du Bureau des brevets sont des employés de la fonction publique;
     6.      Le Conseil du Trésor peut prévoir la classification des postes et des employés du Bureau des brevets, y compris les examinateurs de brevets.

         La déclaration sollicitée concernant le recrutement de personnel temporaire est refusée. Les dépens sont octroyés aux défendeurs.

                             " J.D. Richard "
                    
                                 JUGE

Ottawa (Ontario)

Le 13 juin 1997

Traduction certifiée conforme     
                         Martine Guay, LL.L.

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER

NE DU GREFFE :                  T-2153-91
INTITULÉ DE LA CAUSE :              Ron Hopkinson, Edward R. Ring et Thomas Virany c.
                         Le Commissaire aux brevets et Sa Majesté la Reine
LIEU DE L'AUDIENCE :              Ottawa (Ontario)
DATE DE L'AUDIENCE :              9 juin 1997

MOTIFS DU JUGEMENT PRONONCÉS PAR MONSIEUR LE JUGE RICHARD

EN DATE DU :                  13 juin 1997

ONT COMPARU :

Me George E. Fisk                  POUR LES DEMANDEURS

Me Terry L. Leier

Me Rick Woyiwada                  POUR LES DÉFENDEURS

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :

Bennett Jones Verchere              POUR LES DEMANDEURS

Ottawa (Ontario)

Me George Thomson                  POUR LES DÉFENDEURS

Sous-procureur général du Canada

__________________

1.      L.R.C. (1985), ch. P-4, modifiée.

2.      Pioneer Hi-Bred Ltd. c. Canada (Commissaire aux brevets), (1989) 25 C.P.R. (3d) 257.

3.      Ibid., à la p. 260.

4.      L.R.C. (1985), ch. P-33.

5.      L.R.C. (1985), ch. P-35.

6.      La partie II de l'annexe I concerne les " Secteurs de l'administration publique fédérale qui sont des employeurs distincts ".

7.      L.R.C. (1985), ch. F-11.

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