Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

    

    

     Date : 19980727

     Dossier : T-950-98

OTTAWA (ONTARIO) LE 27 JUILLET 1998

EN PRÉSENCE DE: MONSIEUR LE JUGE EN CHEF ADJOINT RICHARD

ENTRE :

     SYNDICAT DES POSTIERS DU CANADA,

     Demandeur,

     - et -

     SOCIÉTÉ CANADIENNE DES POSTES,

     Défenderesse.

    

     ORDONNANCE

     VU la demande de contrôle judiciaire sollicitant :

1)      une ordonnance en vertu de l'article 18.1 de la Loi sur la Cour fédérale révoquant monsieur le juge Guy A. Richard en qualité de médiateur-arbitre dans la procédure de médiation/arbitrage sous le régime de la Loi de 1997 sur le maintien des services postaux, L.C. ch. 34, (la Loi) entre le Syndicat des postiers du Canada (le Syndicat) et la Société canadienne des postes (la Société);
2)      subsidiairement, une ordonnance annulant la décision par laquelle monsieur le juge Guy A. Richard a refusé, le 20 avril 1998, de se récuser en qualité de médiateur-arbitre, ainsi qu'une ordonnance interdisant de façon permanente à monsieur le juge Guy A. Richard de participer à la procédure de médiation/arbitrage sous le régime de la Loi;

     LA COUR STATUE que la demande de contrôle judiciaire est rejetée sans dépens.

    

     Juge en chef adjoint

Traduction certifiée conforme

Laurier Parenteau, LL.L.

    

     Date : 19980727

     Dossier : T-950-98

ENTRE :

     SYNDICAT DES POSTIERS DU CANADA,

     Demandeur,

     - et -

     SOCIÉTÉ CANADIENNE DES POSTES,

     Défenderesse.

    

     MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE EN CHEF ADJOINT RICHARD :

Nature de la procédure

[1]      La demande a été présentée par le Syndicat des postiers du Canada (le Syndicat) en vue de faire révoquer monsieur le juge Guy A. Richard de la Cour du Banc de la Reine du Nouveau-Brunswick en qualité de médiateur et d'arbitre relativement à un conflit de travail entre le Syndicat et la défenderesse, la Société canadienne des postes (Postes Canada). Monsieur le juge Guy Richard (le médiateur-arbitre) a été nommé le 13 janvier 1998, par le ministre du Travail en vertu de la Loi de 1997 sur le maintien des services postaux, L.C. ch. 34 (la Loi).

Contexte

[2]      La Loi a été adoptée et est entrée en vigueur le 4 décembre 1997, dans le but de mettre fin à une grève des employés de Postes Canada en leur enjoignant de retourner immédiatement au travail et d'accomplir les tâches liées à leur emploi.

[3]      Conformément aux dispositions de la Loi, le ministre du Travail a renvoyé au médiateur-arbitre toutes les questions qui, au moment de sa nomination, faisaient l'objet d'un différend entre le Syndicat et Postes Canada concernant la conclusion d'une nouvelle convention collective. En vertu de la Loi, le médiateur-arbitre est notamment tenu, dans les quatre-vingt-dix jours suivant sa nomination :

     a)      d'intervenir sur toutes les questions et d'amener les parties à se mettre d'accord;         
     b)      s'il ne peut y arriver, d'entendre les parties et de rendre une décision arbitrale;         
     c)      de faire rapport au ministre lorsque toutes ces questions sont réglées.         

[4]      Immédiatement après sa nomination le 13 janvier 1998, le médiateur-arbitre a entamé la médiation avec le Syndicat et Postes Canada et de nombreuses questions ont été réglées au cours des semaines qui ont suivi. L'arbitrage des questions qui demeuraient irrésolues a débuté le 3 mars 1998, conformément à une procédure établie par le médiateur-arbitre, selon laquelle les parties devaient produire leur preuve et présenter leurs arguments sur chaque question, avant d'exposer leurs conclusions finales.

[5]      En avril 1998, alors que les parties participaient à la procédure de médiation/arbitrage depuis près de trois mois, on a constaté qu'elles auraient besoin de plus de temps. Dans une lettre datée du 13 avril 1998, après la présentation des prétentions des parties quant au délai supplémentaire nécessaire de l'avis de chacune pour terminer la procédure de médiation/arbitrage, le ministre du travail a prolongé le mandat du médiateur-arbitre jusqu'au 31 juillet 1998.

[6]      Le 3 avril 1998, le médiateur-arbitre a pris l'avion pour se rendre d'Ottawa à Toronto. Joe L'Espérance, un membre du Syndicat et conseiller technique de l'équipe de négociation, occupait un siège dans la même rangée que le médiateur-arbitre à bord de l'avion, de sorte qu'il a pu entendre par hasard une conversation entre le médiateur-arbitre et une autre personne (la conversation entendue par hasard) qui a plus tard été identifiée comme M. John Marshall.

[7]      M. Marshall travaille depuis environ 25 ans pour la société d'experts-conseils en ressources humaines William M. Mercer Limited (la société Mercer) et il est conseiller principal pour cette société depuis vingt ans. La spécialité de M. Marshall consiste à conseiller les organisations sur la façon de structurer les régimes collectifs d'assurance-santé et d'avantages sociaux.

[8]      Le 14 avril 1998, l'avocat du Syndicat a communiqué avec Postes Canada pour informer la société de la conversation entendue par hasard. Le même jour, l'avocat du Syndicat a communiqué avec le médiateur-arbitre pour lui demander une audience en présence de Postes Canada afin de discuter de la procédure à suivre pour régler cette question. Le médiateur-arbitre a demandé et obtenu un exemplaire d'un projet de demande de récusation.

[9]      Le 15 avril 1998, le Syndicat a déposé auprès du médiateur-arbitre une demande de récusation du médiateur-arbitre contenant une allégation de crainte raisonnable de la part du Syndicat que le médiateur-arbitre ne soit pas impartial à son égard, en raison de remarques que le médiateur-arbitre aurait formulées au cours de sa conversation avec M. Marshall entendue par hasard à bord du vol d'Air Canada entre Ottawa et Toronto le 3 avril 1998.

[10]      Les parties ont rencontré le médiateur-arbitre le 15 avril 1998 pour discuter de la procédure à suivre pour trancher la demande de récusation du médiateur-arbitre présentée par le Syndicat. Le médiateur-arbitre a demandé au Syndicat de préparer et de produire ses affidavits à l'appui et il a fixé une date pour l'instruction de la demande du Syndicat.

[11]      Au cours de la procédure du 15 avril 1998 qui a été enregistrée, comme cela se fait toujours dans ce genre de procédure, afin qu'une transcription puisse être conservée, le médiateur-arbitre a résumé sa version de la conversation entendue par hasard. Parmi ses remarques, le médiateur-arbitre a affirmé aux parties n'avoir rien révélé à M. Marshall qui n'ait pas été dit lors des audiences. Le médiateur-arbitre a également affirmé n'avoir fait aucune allusion à l'une de ses décisions ou opinions concernant les questions en litige dont il était saisi.

[12]      La procédure du 15 avril 1998 devant le médiateur-arbitre a été ajournée afin de permettre au Syndicat de déposer une preuve par affidavit à l'appui de sa demande de récusation. Le 20 avril 1998, après avoir reçu l'affidavit de M. L'Espérance le 17 avril 1998, le médiateur-arbitre a prononcé une ordonnance ajournant la procédure de médiation/arbitrage dans le but de permettre au Syndicat de demander à la Cour de prononcer un sursis d'instance. Aucun nouvel élément de preuve ni aucun nouvel argument n'ont été présentés à la suite de cette ordonnance et de celles qui ont suivi, de sorte que la procédure de médiation/arbitrage n'a pas encore été complétée.

[13]      Voici le libellé de l'ordonnance datée du 20 avril 1998, qui fait l'objet de la présente demande de contrôle judiciaire :

     [Traduction]

     SYNDICAT DES POSTIERS DU CANADA

     (SPC)

     - et -

     SOCIÉTÉ CANADIENNE DES POSTES

     (la Société)

     ORDONNANCE

Le 14 avril 1998, j'ai reçu une requête non signée du SPC, présentée sans affidavit, me demandant de me récuser en qualité d'arbitre nommé sous le régime de la Loi de 1997 sur le maintien des services postaux (la Loi). Cette requête concernait une conversation que j'ai eue avec M. Marshall au cours d'un vol d'Air Canada entre Ottawa et Toronto le 3 avril 1998.

À l'audition, le 15 avril 1998, j'ai fourni aux parties un compte rendu de ma conversation avec M. Marshall et je leur ai dit que j'étais prêt à poursuivre l'audition.

Le SPC a alors déposé une requête signée. Les parties ont présenté leurs observations quant à la question de savoir quand le SPC devrait présenter ses affidavits à l'appui. La Société a soutenu que les affidavits devraient être produits dans un délai de 24 heures; le SPC a fait valoir que les affidavits devraient être produits avant l'expiration d'une semaine. J'ai demandé au SPC de produire ses affidavits au plus tard à 10 h, le 20 avril 1998. J'ai reçu les affidavits à l'appui le 19 avril 1998.

Il est clair que la question de savoir si l'arbitrage peut se poursuivre doit être tranchée d'urgence. Les parties participent à la procédure de médiation et d'arbitrage devant moi depuis la mi-janvier 1998. De nombreuses conditions de travail de quelque 45 000 membres du SPC, ainsi que de nombreux droits et obligations de la Société en sa qualité d'importante société d'État, régis par la Loi, sont en litige.

L'urgence de la situation est mise en relief par le fait que la Loi prévoit un mandat de trois mois seulement, qui peut être prolongé d'un commun accord par les parties ou par un ordre du ministre du Travail. Le ministre a ordonné la prolongation du mandat jusqu'au 31 juillet 1998.

Même si j'ai compétence pour trancher la requête, j'ai décidé qu'il ne conviendrait pas que je la tranche. De plus, l'avocat du SPC a indiqué à l'audience que son client avait décidé de porter l'affaire devant la Cour fédérale du Canada et de demander un sursis d'instance.

Compte tenu de ce qui précède, j'ajourne la procédure prévue jusqu'au 5 mai 1998, à 10 h, pour permettre au SPC de présenter une requête à la Cour fédérale du Canada en vue d'obtenir le sursis de l'arbitrage.

20/04/98                     

Date                              Guy A. Richard

[14]      L'avis de la demande du Syndicat en vue d'obtenir une ordonnance de récusation du médiateur-arbitre en vertu de l'article 18.1 de la Loi sur la Cour fédérale a été déposée à la Cour le 5 mai 1998.

[15]      Le 13 mai 1998, à la demande des parties, j'ai rendu une ordonnance afin que l'instance soit gérée à titre d'instance à gestion spéciale, en vertu de la règle 384 des Règles de la Cour fédérale (1998). Un juge responsable de la gestion de l'instance a été désigné le 22 mai 1998. Le 25 juin 1998 une ordonnance a fixé l'instruction accélérée au 13 juillet 1998.

Dispositions législatives

[16]      Voici les dispositions pertinentes de la Loi :

     MEDIATOR-ARBITRATOR

8.(1) The Minister shall, after the coming into force of this Act, appoint a mediator-arbitrator and refer to the mediator-arbitrator all matters that, at the time of the appointment, remain in dispute between the parties in relation to the conclusion of a new collective agreement.

     MÉDIATEUR-ARBITRE

8.(1) Après l"entrée en vigueur de la présente loi, le ministre est tenu de nommer un médiateur-arbitre et de lui soumettre toutes les questions qui, au moment de sa nomination, font toujours l"objet d"un différend entre les parties en ce qui concerne la conclusion d"une nouvelle convention collective.


(2) The mediator-arbitrator shall, within ninety days after being appointed,

(a) endeavour to mediate all the matters referred to in subsection (1) and to bring about an agreement between the parties on those matters;

(b) if the mediator-arbitrator is unable to do so, hear the parties on the matter, arbitrate the matter and render a decision;

(c) ensure that any agreement or decision referred to in paragraph (a) or (b) is in appropriate contractual language so as to allow its incorporation into the collective agreement; and

(2) Dans les quatre-vingt-dix jours suivant sa nomination, le médiateur-arbitre est tenu :

a) de s"efforcer d"intervenir sur les questions visées au paragraphe (1) et d"amener les parties à se mettre d"accord;

b) s"il ne peut y arriver, d"entendre les parties et de rendre une décision arbitrale;

c) de veiller à ce que les accords ou les décisions visés aux alinéas a) ou b) soient libellés de façon à pouvoir être incorporés dans la convention collective;

(d) report to the Minister on the resolution of all such matters.

d) de faire rapport au ministre lorsque toutes ces questions sont réglées.


(3) The mediator-arbitrator has, with any modifications that the circumstances require,

(3) Le médiateur-arbitre a, compte tenu des adaptations nécessaires :


(a) for the purposes of the mediation referred to in paragraph (2)(a), all the powers of a conciliation commissioner under section 84 of the Canada Labour Code; and

a) dans le cadre de la médiation visée à l"alinéa (2)a ), les pouvoirs d"un commissaire-conciliateur prévus à l"article 84 du Code canadien du travail ;

(b) for the purposes of the arbitration referred to in paragraph (2)(b), all the powers and duties of an arbitrator under sections 60 and 61 of that Act.

b) dans le cadre de l"arbitrage visé à l"alinéa (2)b ), les pouvoirs d"un arbitre prévus aux articles 60 et 61 de cette loi.


(4) The mediator-arbitrator may, with the approval of the Minister, engage the services of any technical advisers or other experts or assistants that the mediator-arbitrator considers necessary.

(4) Le médiateur-arbitre peut, avec l"approbation du ministre, retenir les services des conseillers techniques et autres experts ou des collaborateurs qu"il estime nécessaires.


(5) The time during which the mediator-arbitrator may perform the duties and exercise the powers under this section may be extended by the Minister or by mutual consent of the employer and the union.

(5) Le délai accordé au médiateur-arbitre pour s"acquitter des obligations prévues par le présent article peut être prorogé par le ministre ou d"un commun accord par l"employeur et le syndicat.


9. The mediator-arbitrator shall be guided by the need for terms and conditions of employment that are consistent with the Canada Post Corporation Act and the viability and financial stability of Canada Post, taking into account

9. Le médiateur-arbitre doit s"inspirer de la nécessité d"avoir des conditions de travail compatibles avec la Loi sur la Société canadienne des postes et la viabilité et la stabilité financière de la Société canadienne des postes, compte tenu de :


(a) that the Canada Post Corporation must, without recourse to undue increases in postal rates,

a) la nécessité pour celle-ci, sans recours à des hausses indues de tarifs postaux :


(i) operate efficiently,

(i) d"être efficace,


(ii) improve productivity, and

(ii) d"accroître sa productivité,


(iii) meet acceptable standards of service; and

(iii) de respecter des normes de service acceptables;


(b) the importance of good labour-management relations between the Canada Post Corporation and the union.

b) l"importance des bonnes relations patronales-syndicales entre la Société canadienne des postes et le syndicat.


10. No order may be made, no process may be entered into and no proceeding may be taken in court

10. Il n"est admis aucun recours ou décision judiciaire visant à :


(a) to question the appointment of the mediator-arbitrator; or

a) soit contester la nomination du médiateur-arbitre;


(b) to review, prohibit or restrain any proceeding or decision of the mediator-arbitrator.

     NEW COLLECTIVE AGREEMENT

b) soit réviser, empêcher ou limiter l"action du médiateur-arbitre, ou une décision de celui-ci.

     NOUVELLE CONVENTION

     COLLECTIVE


11. As of the day that the mediator-arbitrator reports to the Minister under paragraph 8(2)(d), the collective agreement shall be deemed to be amended by the incorporation into it of

11. À compter de la date à laquelle le médiateur-arbitre fait rapport au ministre en application de l"alinéa 8(2)d ), la convention collective est réputée modifiée par l"incorporation :


(a) any agreement resolving the matters in dispute between the employer and the union arrived at before, or pursuant to, mediation; and

a) des accords réglant les différends qui sont intervenus entre l"employeur et le syndicat avant la médiation ou par suite de celle-ci;


(b) any decision of the mediator-arbitrator in respect of any matters that were arbitrated.

b) des décisions que le médiateur-arbitre a rendues sur les questions soumises à l"arbitrage.


12. The collective agreement shall also be deemed to be amended by increasing the rates of pay in effect as of February 1, 1997 and set out in Appendix A to the collective agreement by 1.5% effective February 1, 1998, by another 1.75% effective February 1, 1999 and by another 1.9% effective February 1, 2000.

12. La convention collective est également réputée modifiée par la majoration des taux de salaire énumérés à son annexe A, applicables le 1er février 1997, de 1,5% à compter du 1er février 1998, de 1,75% supplémentaire à compter du 1er février 1999 et de 1,9% supplémentaire à compter du 1er février 2000.

[17]      Voici les dispositions pertinentes du Code canadien du travail :

Powers of Board

16. The Board has, in relation to any proceeding before it, power

(a) to summon and enforce the attendance of witnesses and compel them to give oral or written evidence on oath and to produce such documents and things as the Board deems requisite to the full investigation and consideration of any matter within its jurisdiction that is before the Board in the proceeding;

(b) to administer oaths and solemn affirmations;

(c) to receive and accept such evidence and information on oath, affidavit or otherwise as the Board in its discretion sees fit, whether admissible in a court of law or not;

Pouvoirs du Conseil

16. Le Conseil peut, dans le cadre de toute affaire dont il connaît_:

a) convoquer des témoins et les contraindre à comparaître et à déposer sous serment, oralement ou par écrit, ainsi qu'à produire les documents et pièces qu'il estime nécessaires pour mener à bien ses enquêtes et examens sur les questions de sa compétence;

b) faire prêter serment et recevoir des affirmations solennelles;

c) accepter sous serment, par voie d'affidavit ou sous une autre forme, tous témoignages et renseignements qu'à son appréciation, il juge indiqués, qu'ils soient admissibles ou non en justice;

     [...]

Powers of arbitrator, etc.

60. (1) An arbitrator or arbitration board has

(a) in relation to any proceeding before the arbitrator or arbitration board, the powers conferred on the Board, in relation to any proceeding before the Board, by paragraphs 16(a), (b) and (c); and

(b) power to determine any question as to whether a matter referred to the arbitrator or arbitration board is arbitrable.

Pouvoirs des arbitres

60. (1) L'arbitre ou le conseil d'arbitrage a les pouvoirs suivants_:

a) ceux qui sont conférés au Conseil par les alinéas 16a), b) et c);

b) celui de décider si l'affaire qui lui est soumise est susceptible d'arbitrage.


Procedure

61. An arbitrator or arbitration board shall determine his or its own procedure, but shall give full opportunity to the parties to the proceeding to present evidence and make submissions to the arbitrator or arbitration board. R.S., c. L-1, s. 157; 1972, c. 18, s. 1; 1977-78, c. 27, s. 55.

Procédure

61. L'arbitre ou le conseil d'arbitrage établit sa propre procédure; il est toutefois tenu de donner aux parties toute possibilité de lui présenter des éléments de preuve et leurs arguments.

S.R., ch. L-1, art. 157; 1972, ch. 18, art. 1; 1977-78, ch. 27, art. 55.

Critère de partialité ou de crainte de partialité

[18]      L'énoncé qui fait autorité quant au critère à appliquer a été formulé par monsieur le juge de Grandpré dans l'arrêt The Committee for Justice and Liberty c. Office national de l'énergie, [1978] 1 R.C.S. 369, à la p. 394:

     ... La crainte de partialité doit être raisonnable et le fait d'une personne sensée et raisonnable qui se poserait elle-même la question et prendrait les renseignements nécessaires à ce sujet. Selon les termes de la Cour d'appel, ce critère consiste à se demander " à quelle conclusion en arriverait une personne bien renseignée qui étudierait la question en profondeur, de façon réaliste et pratique.         

[19]      Dans l'arrêt Newfoundland Telephone Co. c. Terre-Neuve (Board of Commissioners of Public Utilities), [1992] 1 R.C.S. 623, à la p. 636, M. le juge Cory a exprimé l'opinion suivante :

     Tout corps administratif, quelle que soit sa fonction, est tenu d'agir équitablement envers les personnes assujetties à la réglementation, sur les intérêts desquelles il est appelé à statuer.         

     [...]

     Bien que tous les corps administratifs soient soumis à l'obligation d'agir équitablement, l'étendue de cette obligation tient à la nature et à la fonction du tribunal en question. Voir Martineau c. Comité de discipline de l'Institution de Matsqui, [1980] 1 R.C.S. 602. L'obligation d'agir équitablement comprend celle d'assurer aux parties l'équité procédurale, qui ne peut tout simplement pas exister s'il y a partialité de la part d'un décideur. Il est évidemment impossible de déterminer exactement l'état d'esprit d'une personne qui a rendu une décision d'une commission administrative. C'est pourquoi les cours de justice ont adopté le point de vue que l'apparence d'impartialité constitue en soi un élément essentiel de l'équité procédurale. Pour assurer l'équité, la conduite des membres des tribunaux administratifs est appréciée par rapport au critère de la crainte raisonnable de partialité. Ce critère consiste à se demander si un observateur relativement bien renseigné pourrait raisonnablement percevoir de la partialité chez un décideur.         

[20]      Il a enchaîné, à la page 638 :

     De toute évidence, il existe une grande diversité de commissions administratives. Celles qui remplissent des fonctions essentiellement juridictionnelles devront respecter la norme applicable aux cours de justice. C'est-à-dire que la conduite des membres de la commission ne doit susciter aucune crainte raisonnable de partialité relativement à leur décision.         

[21]      Puis, il a conclu, à la p. 643 :

     Au stade de l'audience, un membre d'une commission est tenu à une plus grande discrétion. Quoique la norme applicable à un commissaire siégeant lors d'une audience de la Commission ne doit pas nécessairement être aussi stricte et rigide que celle à laquelle est astreinte un juge qui préside un procès, il faut néanmoins assurer l'équité procédurale.         

[22]      Lorsqu'il existe une crainte raisonnable de partialité, il n'est pas pertinent de déterminer s'il y a effectivement partialité.

[23]      La Cour a en outre déclaré qu'il n'est pas possible de remédier au préjudice causé par une crainte de partialité et que l'instruction et toute ordonnance qui en résulte sont nécessairement nulles.

[24]      Dans l'arrêt Beno c. Canada, [1997] 2 C.F. 527, à la p. 540, la Cour d'appel fédérale a noté que le juge Cory avait établi, dans l'arrêt Newfoundland Telephone, une échelle pour l'évaluation des allégations de partialité faites contre les membres de commissions d'enquête ou de commissions administratives.

[25]      La situation de la commission en cause sur cette échelle dépend de sa nature, de son mandat et de sa fonction. En l'espèce, le médiateur-arbitre doit se situer entre les deux extrêmes, soit entre les commissions à vocation juridictionnelle et celles qui exercent des fonctions législatives. Compte tenu des conséquences graves que le rapport du médiateur-arbitre pourrait avoir pour l'employeur et les employés, le critère permissif de " l'esprit fermé " applicable aux organismes à vocation législative ne conviendrait pas. Celui applicable aux organismes qui exercent des fonctions juridictionnelles ne conviendrait pas non plus, compte tenu des différences importantes entre la procédure devant le médiateur-arbitre et les instances civiles ou criminelles.

[26]      Il incombe au demandeur de prouver la crainte raisonnable de partialité en l'espèce.

[27]      Le critère d'appréciation de la crainte raisonnable de partialité est objectif. La question à laquelle il faut répondre est celle de savoir à quelle conclusion en arriverait une personne bien renseignée qui étudierait la question en profondeur, de façon réaliste et pratique1.

[28]      Les personnes investies d'un pouvoir décisionnel doivent se garder de discuter des affaires précises en instance devant elles. Le critère à appliquer ne consiste pas à déterminer si une remarque était imprudente, mais si elle a donné naissance à une crainte raisonnable de partialité. La crainte de partialité doit être raisonnable compte tenu des circonstances.

La notion de partialité

[29]      Pour décider s'il y a partialité dans un cas donné, il faut examiner la définition de la partialité. Les motifs prononcés par le juge Cory dans l'arrêt R. c. S. (R.D.), [1997] 3 R.C.S. 484, à la p. 528, sont très utiles sur ce point. Il a écrit que la partialité dénote un état d'esprit prédisposé de quelque manière à un certain résultat ou fermé sur certaines questions. Le juge Cory cite l'explication que le juge Scalia a donnée de ce concept dans Liteky v. U.S., 114 S.Ct. 1147 (1994), à la p. 1155:

     [Traduction] Les termes [partialité ou préjugé] connotent une disposition ou une opinion favorable ou défavorable qui, pour une raison ou une autre, est erronée ou inappropriée, soit parce qu'elle est injustifiée ou qu'elle repose sur des connaissances que le sujet ne devrait pas posséder (par exemple, dans un procès criminel, le juré qui devient partial ou est de parti pris après avoir reçu des éléments de preuve inadmissibles concernant les activités criminelles antérieures du défendeur), ou parce qu'elle est excessive (par exemple, le juré dans un procès criminel qui est si offusqué par la preuve des activités criminelles antérieures du défendeur, légalement admise, qu'il votera la culpabilité quels que soient les faits). [En italique dans l'original.]         

La conversation entendue par hasard

[30]      MM. L"Espérance et Marshall ont fourni des affidavits exposant, telle qu'ils se la rappellent, la conversation entendue par hasard; ils ont été contre-interrogés relativement à ces affidavits et ils ont témoigné de vive voix à l'instruction de la demande de contrôle judiciaire, à la demande des avocats et avec l'autorisation de la Cour. Ils ont toujours maintenu leur version respective quant au contenu de cette conversation. Le litige ne porte pas sur le fait qu'une conversation a eu lieu entre le médiateur-arbitre et M. Marshall à bord d'un vol d'Air Canada le 3 avril 1998, mais sur le contenu de cette conversation.

[31]      Des extraits de la transcription de la rencontre des parties tenue le 15 avril 1998, qui contiennent les remarques du médiateur-arbitre sur le souvenir qu'il garde de la conversation entendue par hasard, ont été versés au dossier du tribunal; dans la présente procédure, je ne leur ai néanmoins attribué aucun poids pour évaluer la preuve et arrêter ma décision. Le fait que cette conversation a eu lieu, la date et l'endroit où elle a eu lieu et sa durée approximative ne sont pas en litige. Le médiateur-arbitre n'a pas déposé d'affidavit en l'espèce, il n'a pas été appelé à témoigner en personne, et il n'a donc pas pu être contre-interrogé relativement à ses remarques.

[32]      J'ai toutefois examiné la preuve fournie par deux témoins, MM. L"Espérance et Marshall, ainsi que les affidavits à l'appui de Philippe Arbour, l'agent des griefs national du Syndicat, et de Lynn Bue, membre du comité de négociation du Syndicat.

[33]      La conversation entendue par hasard a duré environ 30 minutes au cours d'un vol d'Air Canada entre Ottawa et Toronto le vendredi 3 avril 1998. M. L'espérance occupait le siège 18A, M. Marshall le siège 18B et le médiateur-arbitre le siège 18C (la place du côté de l'allée).

[34]      MM. L"Espérance et Marshall s'entendent pour dire qu'une partie importante de la conversation entendue par hasard portait sur des questions personnelles, tels les projets de vacances et la famille du médiateur-arbitre. Aucun élément de cette conversation ne pourrait fonder une prétention de crainte de partialité.

[35]      MM. L"Espérance et Marshall reconnaissent tous les deux que M. Marshall a lui-même abordé certaines questions et exprimé son opinion. Les remarques et affirmations formulées par M. Marshall et non par le médiateur-arbitre ne peuvent donner lieu à une prétention de crainte de partialité. Elles représentent uniquement le point de vue de M. Marshall. De plus, M. Marshall n'était pas au courant de la procédure de médiation/arbitrage, n'y participait pas, n'avait aucun intérêt dans l'issue de cette procédure et n'était pas au fait des questions précises soumises au médiateur-arbitre ni même de la situation existante à Postes Canada, sauf en ce qui concerne certains renseignements généraux. Je conclus, en me fondant sur la preuve, qu'il n'a pas communiqué au médiateur-arbitre de renseignements que celui-ci n'aurait pu recevoir régulièrement que dans le cadre d'une instruction.

[36]      Le médiateur-arbitre n'a pas, pour sa part, tenté de découvrir des éléments de preuve.

[37]      De nombreux éléments de la conversation entendue par hasard sur lesquels le Syndicat s'appuie pour étayer son allégation de crainte raisonnable de partialité ne lui offrent aucun appui, peu importe la version des événements retenue.

[38]      M. L"Espérance a entendu par hasard le médiateur-arbitre révéler que le ministre avait prorogé de quatre mois le délai de production du rapport. Il semble que cette information n'ait pas été communiquée aux parties avant le 18 avril 1998. Il est clair qu'il s'agit d'une décision prise par le ministre après que les parties lui ont transmis leurs observations et que cette décision n'a pas été prise par le médiateur-arbitre. Bien que la communication de ce renseignement à un étranger, en pareilles circonstances, puisse être considérée comme une indiscrétion, elle ne révèle pas de partialité.

[39]      La même conclusion peut être tirée concernant la partie de la conversation, qu'elle ait eu lieu ou non, pendant laquelle M. l"Espérance soutient que le médiateur-arbitre a acquiescé à l'affirmation de M. Marshall que ce ne serait pas une mince tâche que d'amener les parties à s'entendre. Il en va de même de la prétention selon laquelle le médiateur-arbitre a dit que les deux parties ne se comportaient pas avec courtoisie à l'instruction ou a décrit leurs rapports comme malsains.

[40]      Le fait que le médiateur-arbitre ait pu révéler que de nombreuses questions demeuraient irrésolues et que peu avaient été réglées par la médiation ne peut étayer une allégation de crainte de partialité.

[41]      Les remarques formulées par M. Marshall concernant l'importance de bâtir une relation sur la confiance ne saurait justifier la récusation du médiateur-arbitre. Pas plus que l'allusion qu'il a faite au président du conseil de Postes Canada.

[42]      Peu importe la version des faits retenue, le fait que M. Marshall ait mentionné un article sur les profits réalisés par Postes Canada publié dans une revue de Postes Canada distribuée à tous ses employés et parlé de l'utilisation croissante du courrier électronique ne révèle aucune partialité de la part du médiateur-arbitre.

[43]      De même, quelle que soit la version jugée fidèle aux événements, les remarques formulées par le médiateur-arbitre, selon lesquelles la grève a eu un impact sur les profits de la Société et le volume du courrier de première classe était à la baisse, n'indiquent pas qu'il existe une crainte raisonnable de partialité.

[44]      À mon avis, seules trois affirmations imputées au médiateur-arbitre par M. L"Espérance peuvent être pertinentes à la décision de récuser le médiateur-arbitre en raison d'une crainte raisonnable de partialité, s'il est établi qu'elles sont exactes. Ces affirmations portent sur la rentabilité générale, le courrier électronique en nombre et la paie.

[45]      Selon le témoignage de M. L"espérance, il aurait entendu par hasard les affirmations suivantes qu'il impute au médiateur-arbitre :

     1)      les revenus de Postes Canada ne correspondaient pas à un bon taux de rendement pour la société, il faisait partie de son mandat de s'assurer du rendement du capital investi par la société et le taux de rendement devait se comparer à celui des autres membres de l'industrie (Rentabilité);
     2)      le médiateur-arbitre avait rédigé sa décision concernant le courrier électronique en nombre, décision apparemment favorable à la thèse défendue par Postes Canada (Courrier électronique en nombre);
     3)      les postiers étaient très bien payés pour le travail qu'ils accomplissent (Paie).

[46]      C'est au demandeur qu'il revient de fournir une preuve suffisante pour étayer sa demande de récusation fondée sur une crainte raisonnable de partialité. M. Marshall conteste la version que M. L"Espérance offre de la conversation portant sur ces questions.

[47]      M. Marshall est conseiller principal pour la société d'experts-conseils en ressources humaines William M. Mercer et il travaille principalement dans le domaine des accords bipartites auxquels participent des représentants de groupes de direction et de groupes d'employés qu'il conseille sur le régimes collectifs d'assurance-santé et d'avantages sociaux.

[48]      M. Marshall et le médiateur-arbitre ne s'étaient jamais rencontrés avant de prendre ce vol pour Toronto.

[49]      Selon le témoignage offert par M. Marshall, sa conversation avec le médiateur-arbitre était d'ordre général et ne différait pas pour l'essentiel des conversations qu'il avaient avec d'autres personnes à bord d'un avion. Il a affirmé que le médiateur-arbitre ne lui avait pas fait part de ses opinions concernant Postes Canada.

[50]      Il a aussi affirmé que cette conversation ne lui avait rien appris qui puisse lui laisser croire que le médiateur-arbitre était favorable à une partie ou à l'autre, sur quelque question que ce soit. S'il en avait été autrement, ce vol qu'il a qualifié de quelconque, aurait été mémorable.

[51]      Selon M. Marshall, ni le temps dont ils disposaient, ni les circonstances, ne se prêtaient aux discussions d'affaires précises et détaillées décrites par M. L"Espérance dans son affidavit.

[52]      En ce qui a trait à la question de la rentabilité, M. Marshall a témoigné que cette discussion a été suscitée par les remarques qu'il a formulées au sujet d'un article de revue qu'il avait lu et selon lequel la grève avait eu sur Postes Canada, des conséquences qui l'empêcheraient d'atteindre ses objectifs financiers. M. Marshall a également déclaré avoir commenté et la baisse du volume du courrier de première classe et l'utilisation croissante du courrier électronique, chacun de ces éléments pouvant avoir une incidence sur les profits éventuels de Postes Canada.

[53]      Bien que la question de la rentabilité de Postes Canada ait donc été discutée au cours de la conversation et que le médiateur-arbitre ait fait allusion à deux experts qui avaient fourni des renseignements non contestés sur la rentabilité, le témoignage de M. Marshall porte que le médiateur-arbitre n'a jamais exprimé d'opinion sur la question de savoir s'il relevait de son mandat de s'assurer de la rentabilité de Postes Canada. M. Marshall et le médiateur-arbitre ont simplement convenu que la question de la rentabilité était importante pour toutes les personnes engagées dans la procédure de médiation/arbitrage. Cela n'est pas suffisant pour donner naissance à une crainte raisonnable de partialité.

[54]      Contrairement au témoignage offert par M. L"Espérance, M. Marshall a affirmé que lui et le médiateur-arbitre n'ont jamais discuté du courrier électronique en nombre ou VEM ni de quelque question que ce soit concernant le VEM que le médiateur-arbitre devait trancher. Jusqu'à ce qu'il lise la demande initiale de récusation du médiateur-arbitre, M. Marshall n'avait jamais entendu l'expression " Courrier électronique en nombre " ou " VEM ". M. Marshall et le médiateur-arbitre ont toutefois parlé de l'utilisation accrue du courrier électronique.

[55]      Contrairement au témoignage offert par M. L"Espérance, M. Marshall a affirmé que ni lui, ni le médiateur-arbitre n'ont fait de commentaire sur la question de savoir si les postiers étaient bien payés pour le travail qu'ils accomplissaient. M. Marshall ne possédait aucune information qui lui aurait permis d'en arriver à pareille conclusion2.

[56]      En tenant compte du dossier qui m'a été soumis, je retiens la version de la conversation entendue par hasard donnée par M.Marshall de préférence à celle offerte par M. L"Espérance.

[57]      M. Marshall est totalement étranger à la présente procédure. Il n'a aucun lien avec le processus d'arbitrage et n'a aucun intérêt dans l'instance. L'avocat du demandeur n'a pas laissé entendre dans sa plaidoirie que le témoignage de M. Marshall aurait été teinté par le fait que Mercer a déjà fourni des services à Postes Canada.

[58]      Lorsque les avocats de Postes Canada lui ont demandé pour la première fois ce qu'il se rappelait de la conversation entendue par hasard, ils ne lui ont rien dit et ne lui ont transmis aucun document hormis l'avis de demande de récusation présentée par le Syndicat au médiateur-arbitre.

[59]      Il a décrit sa conversation avec le médiateur-arbitre comme d'ordre général et philosophique, et non comme une conversation d'une nature particulière.

[60]      Bien que M. L"Espérance ait pris des notes sur la conversation entendue par hasard le lendemain, et qu'il ait fait part du souvenir qu'il en avait à Lynn Bue le même jour, et bien qu'on ait demandé à M. Marshall d'enregistrer ce qu'il se rappelait de cette conversation seulement deux semaines plus tard, je n'accorde aucun poids à ce délai de deux semaines. La question qu'il faut trancher n'est pas celle de savoir qui est la personne qui a été la première à prendre des notes sur cette conversation, mais quelle est celle dont on doit retenir la version.

[61]      M. Marshall et le médiateur-arbitre ont pris part à la conversation; ce n'est pas le cas de M. L"Espérance. M. L"Espérance rend compte d'une conversation que deux autres personnes ont eue dans un avion.

[62]      Le témoignage de M. Marshall est plus susceptible d'être fidèle à la réalité que celui de M. L"Espérance qui n'a pas pris part à la conversation. Les passages suivants de la conversation entendue par hasard en témoignent.

1) M. L"Espérance a imputé au médiateur-arbitre les commentaires sur les conséquences de la grève à Postes Canada. Selon le témoignage de M. Marshall, c'est lui et non le médiateur-arbitre qui a fait ces commentaires et le nom de la revue Performance n'a pas été mentionné comme le prétend M. L"Espérance.

2) M. L"Espérance a imputé au médiateur-arbitre le commentaire selon lequel le volume du courrier de première classe était en baisse de 0,1 %. Selon le témoignage de M. Marshall, c'est lui qui a fait allusion au rapport annuel de Postes Canada mentionnant que le volume du courrier de première classe avait diminué de 0,1 % et c'est lui qui a fait remarquer que cette baisse compromettrait la rentabilité de Postes Canada.

[63]      En contre-interrogatoire, M. L"Espérance a insisté pour dire que sa version était exacte, même si, d'après le témoignage de M. Marshall, il faisait erreur sur plusieurs points.

1) Selon le témoignage de M. L"Espérance, M. Marshall a parlé d'un comité dont il a fait partie en Alberta. Selon le témoignage de M. Marshall, celui-ci n'a jamais fait partie d'un comité en Alberta et il a mentionné au médiateur-arbitre qu'il connaissait l'existence d'un comité en Alberta composé de plusieurs juges.

2) Selon le témoignage de M. L"Espérance, M. Marshall a dit travailler pour Justice et pour le Conseil du Trésor. M. Marshall a nié avoir travaillé pour Justice.

3) Selon le témoignage de M. L"Espérance, M. Marshall a mentionné le nom de la revue Performance, ce que nie M. Marshall; il ne se souvenait pas du nom de la revue et ne peut l'avoir mentionné.

4) Selon le témoignage de M. L"Espérance, le médiateur-arbitre a dit que le négociateur en chef du Syndicat lui avait dit que le Syndicat était en charge du " plancher de travail " (work floor ). M. Marshall a déclaré dans son témoignage que la notion de contrôle du " plancher de travail " n'a jamais été abordée au cours de la discussion et que l'expression " plancher de travail " lui était inconnue jusqu'à ce qu'il lise l'avis de demande de récusation. De plus, dans son affidavit, le négociateur en chef du Syndicat a affirmé qu'aucune rencontre de ce genre n'avait eu lieu. Philippe Arbour a déclaré : [Traduction] Plus particulièrement, en ma qualité de négociateur en chef, je n'ai jamais dit au médiateur-arbitre que le SPC était en charge du " plancher de travail ".

5) Selon le témoignage de M. L"Espérance, le médiateur-arbitre a parlé du Courrier électronique en nombre. M. Marshall a déclaré dans son témoignage qu'il ne connaissait pas cette expression avant de lire l'avis de demande de récusation et que la discussion n'avait jamais porté sur le VEM, mais uniquement sur le courrier électronique.

6) Selon le témoignage de M. L"Espérance, le médiateur-arbitre a dit qu'il avait attribué aux avocats qui ont comparu devant lui la qualité d'" officiers de justice " (officers of the court ). M. Marshall a déclaré dans son témoignage qu'il n'avait jamais entendu cette expression et qu'il n'en connaissait pas le sens.

7) M. Marshall a nié avoir demandé au médiateur-arbitre s'il avait l'intention d'utiliser les services postaux d'autre pays à des fins de comparaison; il ne connaissait rien aux services postaux en Nouvelle-Zélande et aux États-Unis.

8) M. Marshall a nié que lui ou le médiateur-arbitre ait dit que les postiers étaient bien payés pour le travail qu'ils accomplissent; il ne possédait aucun renseignement personnel qui aurait justifié une telle conclusion.

[64]      M. L"Espérance a affirmé avec insistance avoir entendu ces commentaires. M. Marshall ne les a pas simplement niés, il a fourni des explications. M. L"Espérance était assis à côté de M. Marshall et non du médiateur-arbitre.

[65]      Si je retenais le témoignage de M. L"Espérance, je devrais reconnaître que le médiateur-arbitre a décrit des événements qui n'ont pas eu lieu, comme la rencontre avec le négociateur en chef du Syndicat, et que M. Marshall a discuté de questions qui lui étaient totalement inconnues.

[66]      En me fondant sur la preuve produite devant moi en l'espèce, je conclus que le demandeur n'a pas présenté une preuve qui puisse étayer son allégation de crainte raisonnable de partialité, selon le sens que le droit attribue à cette expression.

[67]      En conséquence, la demande de contrôle judiciaire est rejetée sans dépens.

    

     Juge en chef adjoint

OTTAWA, Ontario

27 juillet 1998

Traduction certifiée conforme

Laurier Parenteau, LL.L.

COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE


AVOCATS ET AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

NUMÉRO DU GREFFE :              T-950-98

INTITULÉ DE LA CAUSE :          SYNDICAT DES POSTIERS DU CANADA

                         c. SOCIÉTÉ CANADIENNE DES POSTES

LIEU DE L'AUDIENCE :              OTTAWA (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :          13 JUILLET 1998

MOTIFS DU JUGEMENT PRONONCÉS

PAR LE JUGE EN CHEF ADJOINT RICHARD

DATE DES MOTIFS :              27 JUILLET 1998

ONT COMPARU :

Me THOMAS A. McDOUGALL

Me ELAINE G. ASHFIELD          POUR LE DEMANDEUR

Me ROBB C. HEINTZMAN

Me TERRIE-LYNNE DEVONISH      POUR LA DÉFENDERESSE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

PERLEY-ROBERTSON, PANET

HILL & McDOUGALL              POUR LE DEMANDEUR

FRASER & BEATTY              POUR LA DÉFENDERESSE

__________________

1      Voir : Sylvan Lake Golf & Tennis Club Ltd. v. Performance Industries Ltd., [1997] A.J. No. 506 (C.A. Alb.).

2      La seule question que les parties ont abordée concernant la paie touche la demande par le Syndicat d' une indemnité de vie chère étant donné que l'article 12 de la Loi prévoit les taux de salaire en vigueur le 1er février 1997, le 1er février 1998, le 1er février 1999 et le 1er février 2000.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.