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Date : 20030520

Dossier : T-2094-02

Référence : 2003 CFPI 602

Ottawa (Ontario), le mardi 20 mai 2003

EN PRÉSENCE DE MADAME LE PROTONOTAIRE MIREILLE TABIB

AFFAIRE intéressant l'article 56 de la Loi sur les marques de commerce,

L.R.C. (1985), ch. T-13

ET un appel d'une décision rendue par le registraire des marques de commerce le 16 octobre 2002 en vue de la radiation de l'enregistrement no 368 206 de la marque de commerce WOOLWORTH conformément à l'article 45

ENTRE :

                                     FOOTLOCKER GROUP CANADA INC.

                                 autrefois VENATOR GROUP CANADA INC.

                                                                                                                        demanderesse

                                                                       et

                                                          R. STEINBERG

                                                                       et

                        LE REGISTRAIRE DES MARQUES DE COMMERCE

                                                                                                                              défendeurs


                          MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

[1]                Dans le contexte d'un avis de demande déposé en appel d'une décision du registraire des marques de commerce, la demanderesse sollicite une prorogation du délai dans lequel elle peut déposer son dossier.

[2]                L'affidavit que la demanderesse a soumis à l'appui de la demande a été signifié le 16 janvier 2003. Le défendeur n'a pas déposé d'affidavit et n'a pas contre-interrogé l'auteur de l'affidavit de la demanderesse, de sorte que le dossier de la demanderesse devait être déposé au plus tard le vendredi, 28 mars 2003. Le 3 avril 2003, le défendeur a informé la demanderesse que le délai était expiré. Le 4 avril, la demanderesse a envoyé son dossier de demande et son recueil de jurisprudence par l'entremise d'un service de messagerie, le tout devant être livré au défendeur le lundi 7 avril 2003. La demanderesse a sollicité le consentement du défendeur à l'égard de la prorogation du délai de dépôt du dossier, en lui faisant savoir que le délai n'avait pas été respecté pace que son avocat avait par inadvertance omis d'inscrire la date d'expiration du 28 mars dans son agenda. Le défendeur a non seulement refusé d'accorder son consentement, mais il s'oppose aussi avec véhémence à la requête que la demanderesse a présentée en vue d'obtenir une prorogation de délai.

[3]                Les quatre éléments du critère qui s'applique à une prorogation de délai, tels qu'ils sont énoncés dans l'arrêt Canada (Procureur général) c. Hennelly (1999), 244 N.R. 399 (C.A.F.) sont bien connus :


1.         il existe une intention constante de poursuivre la demande;

2.         la demande est bien fondée;

3.         le défendeur ne subit pas de préjudice en raison du retard; et

4.         il existe une explication raisonnable justifiant le retard.

[4]         Le défendeur affirme que la demanderesse n'a pas satisfait aux deuxième et quatrième éléments du critère.


[5]         La plupart des arguments du défendeur sont axés sur les lacunes d'une requête antérieure que la demanderesse avait présentée en vue d'obtenir une prorogation de délai, le 4 avril 2003. Après que le défendeur eut signifié et déposé un dossier de requête dans lequel il était signalé que la demanderesse n'avait fondamentalement pas traité de ces deux questions, la demanderesse a abandonné sa requête au complet et a déposé le dossier de la requête dont la Cour dispose maintenant. Je conclus que l'argument du défendeur se rapportant à cette requête antérieure n'est pas pertinent et qu'il n'est pas fondé. Cette requête-là comportait peut-être des lacunes, mais elle a été abandonnée sans qu'une décision ait été rendue. À moins qu'il n'existe une contradiction directe entre les faits tels qu'ils étaient énoncés dans la requête antérieure et la requête ici en cause, les lacunes que peut comporter l'ancienne requête n'influent pas sur le bien-fondé de la deuxième requête. Tout grief que le défendeur peut faire valoir par suite du dépôt et de l'abandon subséquent de cette requête-là donne lieu à une réparation en vertu de la disposition relative aux dépens figurant à l'article 402 des Règles.

[6]         Quant au bien-fondé de la requête dont la Cour est ici saisie, le défendeur affirme que la demanderesse ne satisfait pas au deuxième élément applicable à la prorogation de délai parce que l'affidavit qui a été déposé à l'appui de la requête de la demanderesse ne dit rien au sujet de la question de savoir si la demande est dans une certaine mesure fondée. Je ne suis pas d'accord. Dans l'affidavit de Tonia Pedro qui a été déposé à l'appui de la requête, il est fait mention des affidavits de Ronald Stinson, en date du 15 décembre 2000 et du 15 janvier 2003, lesquels sont joints à cet affidavit. Dans les observations écrites, il est fait mention de ces affidavits et il est soutenu qu'ils renferment suffisamment de renseignements montrant que la marque de commerce a été employée pendant la période pertinente, de sorte que la Cour pourrait avec raison accueillir l'appel de la demanderesse. Je conclus que la preuve qui a été soumise au soutien de la requête de la demanderesse et les arguments qui ont été invoqués dans les observations écrites de la demanderesse sont amplement suffisants pour soulever une défense sérieuse et pour satisfaire au deuxième élément du critère énoncé dans l'arrêt Hennelly.


[7]         Quant à l'explication qui a été donnée au sujet du retard, le défendeur demande avec instance à la Cour d'interpréter strictement les décisions qu'elle a rendues dans les affaires Chin c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (1993) A.C.F. no 1033, Canada (Procureur général) c. Hennelly (1995) A.C.F. no 320 et Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) c. Lie (2002) A.C.F. 457 et de statuer que l'inadvertance de l'avocat ne peut jamais constituer une explication raisonnable justifiant le retard. Je ne puis souscrire à cet avis. L'inadvertance peut prendre de nombreuses formes et chacune doit être considérée selon les faits qui lui sont propres. En outre, les circonstances de chaque affaire ont un rôle important lorsque la Cour détermine si une erreur commise par inadvertance peut être excusée. Je note, en particulier, que dans les décisions Hennelly et Lie, l'erreur était celle de la Couronne, qui agissait à l'encontre de particuliers non représentés, un facteur qui semble avoir influé fortement sur l'analyse effectuée par la Cour. Or, c'est tout à fait le contraire qui se produit dans ce cas-ci. Les deux parties sont représentées par des avocats chevronnés qui doivent faire preuve d'un certain degré de courtoisie professionnelle et, fait plus important, chercher à limiter les procédures de la façon qui sert le mieux les intérêts de leurs clients. Je conclus qu'en s'opposant à la requête de la demanderesse pour un léger retard qui s'explique clairement par le fait qu'on a par inadvertance omis d'inscrire la date d'expiration du délai dans l'agenda de l'avocat, le défendeur n'a respecté ni l'une ni l'autre de ces deux considérations.

[8]         Je conclus donc que la demanderesse a satisfait aux éléments du critère applicable à la prorogation du délai de dépôt de son dossier de demande; la requête de la demanderesse sera accueillie.


[9]         Quant à la question des dépens, même si normalement le paragraphe 410(2) des Règles s'applique, je conclus que l'opposition du défendeur n'était pas justifiée et, par conséquent, aucuns dépens ne seront adjugés à l'égard de la requête.

                                                          ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE :

1.         Le délai dans lequel la demanderesse doit signifier et déposer son dossier de demande est prorogé pour une période de sept (7) jours qui commence à courir à la date de la présente ordonnance.

2.         Aucuns dépens ne seront adjugés dans la requête ici en cause.

                              « Mireille Tabib »                         

Protonotaire

Traduction certifiée conforme

Martine Guay, LL.L.


                                           COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                                      SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

                                        AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                                       T-2094-02

INTITULÉ :                                                      FOOTLOCKER GROUP CANADA INC.

c.

R. STEINBERG ET AL.

REQUÊTE JUGÉE SUR DOSSIER SANS COMPARUTION DES PARTIES

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                                    MADAME LE PROTONOTAIRE TABIB

DATE DES MOTIFS :                                    LE 20 MAI 2003

ARGUMENTATION ÉCRITE :

Mme ROSE MARIE PERRY                               POUR LA DEMANDERESSE

M. RICHARD UDITSKY                                  POUR LE DÉFENDEUR, R. STEINBERG

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

GOWLING LAFLEUR HENDERSON s.r.l.      POUR LA DEMANDERESSE

OTTAWA

MENDELSOHN                                                POUR LE DÉFENDEUR, R. STEINBERG

MONTRÉAL


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