Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20040304

Dossier : T-363-01

Référence : 2004 CF 346

ENTRE :

                                          PETER G. WHITE MANAGEMENT LTD.

                                                                                                                                    demanderesse

                                                                             et

                                                        SA MAJESTÉ LA REINE

DU CHEF DU CANADA,

REPRÉSENTÉE PAR

LE MINISTRE DU PATRIMOINE CANADIEN, SHEILA COPPS,

ET LEDIT MINISTRE DU PATRIMOINE CANADIEN,

L'AGENCE PARCS CANADA,

REPRÉSENTÉE PAR SON DIRECTEUR GÉNÉRAL TOM LEE,

ET LEDIT TOM LEE,

LE DIRECTEUR D'UNITÉ DE GESTION DU PARC NATIONAL BANFF,

WILLIAM FISHER, CHARLES ZINKAN

ET LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

                                                                                                                                          défendeurs

                                                  MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE PROTONOTAIRE HARGRAVE

CONTEXTE


[1]                Les présents motifs concernent deux requêtes, la première visant à faire radier tous les défendeurs sauf Sa Majesté la reine et l'Agence Parcs Canada et la seconde à faire radier l'action de la demanderesse, qui est en vertu d'une cession intervenue le 2 août 1995, cessionnaire d'un bail relatif à des terres de la Couronne situées dans le Parc national Banff, bail conclu le 21 mai 1993 et que j'appelle également le « bail Norquay » ; la demanderesse exploite une télécabine sur les terrains loués.

[2]                Le 31 août 2000, la demanderesse a présenté à la Couronne une demande de permis d'exploitation de la télécabine en dehors de la saison de ski, une utilisation approuvée par le bail. Dans une lettre du 6 septembre 2000, la Couronne, représentée par le défendeur, William Fisher, directeur d'unité de gestion du Parc national Banff, a refusé d'accorder à la demanderesse un permis pour l'exploitation hors saison de cette télécabine en raison du Plan de gestion du Parc national Banff de 1997, qui représente le fruit d'une évolution à long terme d'une vision écologique destinée à guider la direction du parc et qui a été promulgué par la Couronne. Le Plan de gestion interdit expressément l'utilisation estivale de la télécabine de la demanderesse au mont Norquay. Pour être juste, je dois noter que le détenteur initial du bail Norquay avait volontairement renoncé à l'exploitation estivale de la télécabine dans le but d'obtenir des concessions qui lui permettaient d'étendre ses activités pendant la saison de ski hivernale. La demanderesse était au courant de cette renonciation avant qu'elle ne reprenne le bail Norquay.


[3]                Auparavant, le 18 juin 1996, la demanderesse avait demandé un permis d'exploitation de la télécabine en vue d'organiser des visites touristiques, et ce permis lui a été refusé par une décision du 2 juillet 1996 du ministre du Patrimoine canadien. D'où la présente demande de contrôle judiciaire, l'instance T-1776-96, qui a débouché sur les motifs du 28 mai 1997, dans lesquels le juge Campbell a déclaré que le bail Norquay n'attribuait qu'un droit restreint quant à l'exploitation d'un commerce sur les terrains loués, que le pouvoir discrétionnaire des autorités avait été exercé correctement et que, par conséquent, le refus de délivrer un permis d'exploitation d'une entreprise était fondé.

[4]                La présente instance découle du refus, daté du 6 septembre 2000, d'accorder un permis commercial à la demanderesse en vue de l'exploitation de la télécabine pendant l'été. Les défendeurs comprennent la Couronne, l'Agence Parcs Canada, le ministre du Patrimoine canadien, à la fois en qualité de ministre et personnellement, pour entrave délictuelle aux activités commerciales de la demanderesse et abus de fonctions publiques. La demanderesse poursuit également personnellement divers employés de la Couronne qui travaillent pour l'Agence Parcs Canada ou qui sont ou, étaient, des directeurs du Parc national Banff ainsi que le procureur général du Canada. La réclamation, de nature à la fois délictuelle et contractuelle, porte sur un montant de 17,5 millions de dollars. Il convient toutefois de rappeler que les décisions qu'a prises l'Agence Parcs Canada en 1996 et en 2000 ont la même origine et qu'à part le fait qu'elles ont été prises à quatre ans d'intervalle ne sont pas différentes l'une de l'autre.


[5]                Les défendeurs sont tous représentés par le procureur général du Canada. Comme je l'ai indiqué, le procureur général a présenté, pour le compte de Sa Majesté la reine, une requête visant à faire radier intégralement la déclaration pour un motif basé sur l'exception de chose jugée (issue estoppel). Avec l'autre requête, le procureur général demande que soient radiés tous les défendeurs, à l'exception de la Reine et l'Agence Parcs Canada (Parcs Canada), pour défaut de compétence et pour le motif que la demanderesse a assigné inutilement des défendeurs et ce, de façon répétitive.

[6]                La présente instance semble découler de deux causes d'action. La première est fondée sur le Plan de gestion du Parc national Banff d'avril 1997 qui a été promulgué par Mme Sheila Copps, en qualité de ministre de la Couronne, avec l'approbation du défendeur M. Tom Lee (sous-ministre adjoint de Parcs Canada Inc.) et le défendeur M. Charles Zinkan (directeur d'unité de gestion du Parc national Banff), tel qu'en font foi leurs signatures. Un des objectifs du Plan de gestion de 1997 était d'interdire l'exploitation de la télécabine Norquay pendant l'été : sur ce point, il ne diffère pas du Plan environnemental à long terme qui était en vigueur au moment où le permis d'exploitation d'un commerce l'été a été refusé en 1996. La seconde cause d'action est la décision de rejet, prise en septembre 2000, à l'égard d'une demande d'exploitation de la télécabine pendant la période estivale.

ANALYSE

[7]                J'ai examiné le but général recherché par les défendeurs, à savoir faire radier l'action contre les défendeurs, à l'exception de la Couronne et de Parcs Canada, pour défaut de compétence à l'égard de divers défendeurs et à cause du caractère redondant de leur assignation. Cette requête pourrait faciliter pour la deuxième requête, la présentation d'un argument basé sur l'exception de chose jugée, qui exige que l'instance de 1996 et l'instance actuelle opposent les mêmes parties ou ayants droit.


Les défendeurs appropriés

[8]                Les demandeurs ont parfois tendance à multiplier les défendeurs, ce qui a pour résultat que des personnes, qui pourraient fort bien être appelées à témoigner mais ne devraient pas être des parties, se trouvent assignées à titre de défendeurs. Il arrive non seulement que ces défendeurs ne relèvent pas de la compétence de la Cour fédérale mais entre-temps, en attendant que leur statut soit tranché, cette pratique nuit à tout le monde, parce qu'elle complique la procédure, augmente les dépenses, aggrave les retards et gaspille des ressources limitées, dans ce cas-ci l'argent des contribuables et la capacité de la Cour d'entendre des litiges.

[9]                L'intitulé nomme à titre de défenderesse la Reine « représentée par le ministre du Patrimoine canadien pour le Canada, Sheila Copps, et ledit ministre du Patrimoine canadien pour le Canada, ... » , ce qui revient à nommer le ministre, à la fois en qualité de représentant et en sa qualité personnelle. La déclaration contient certes des allégations relatives à une incitation à rupture de contrat, à un comportement délictuel et abusif de la part du ministre, mais elle n'allègue pas, d'après moi, que Mme Copps ait agi en sa capacité personnelle; la déclaration porte sur la promulgation d'un plan de gestion pour le parc et sur la décision de refuser à la demanderesse un permis d'exploitation d'une entreprise pendant la saison estivale, à savoir la télécabine du mont Norquay.


[10]            Le principe général est qu'un ministre de la Couronne ne peut être poursuivi en sa capacité de représentant, ni en sa capacité personnelle, s'il n'a pas posé de gestes à titre personnel. C'est ce qui est clairement énoncé dans Cairns c. Farm Credit Corp. (1991), 49 F.T.R. 308 (C.F. 1re inst.) à la page 310 :

Les demandeurs ont désigné l'honorable William McKnight comme défendeur dans cette action. Un ministre de la Couronne ne peut être poursuivi en sa qualité de représentant, pas plus qu'en sa qualité personnelle, à moins que les allégations portées contre lui se rapportent à des gestes qu'il aurait posés en sa qualité personnelle (Re Air India (1987), 62 O.R. (2d) 130; 44 D.L.R. (4th) 317 (H.C. Ont.)). Les demandeurs n'ayant rien allégué contre le ministre au sujet de gestes qu'il aurait posés en sa qualité personnelle, l'honorable William McKnight doit être rayé de la liste des parties à l'action.

Malgré la double capacité, personnelle et à titre de représentant, des défendeurs mentionnés dans l'intitulé, qui semble indiquer que les réclamations visent le ministre du Patrimoine canadien et le ministre, Mme Sheila Copps, ainsi que le surintendant Fisher, le surintendant de gestion Zinkan et le directeur général de l'Agence Parcs Canada, Tom Lee, la déclaration ne contient aucune allégation d'actes posés par ces personnes à titre personnel : il y est plutôt affirmé que ces représentants officiels du gouvernement ont incité certaines personnes à rompre un contrat, ont agi de façon délictuelle et abusé de leurs fonctions publiques, non pas personnellement mais dans leur rôle officiel, lorsqu'ils ont adopté le Plan de gestion du Parc national Banff de 1997.


[11]            Il est intéressant de noter ici que les références à Mme Copps concernent toutes, expressément ou implicitement, les actions qu'elle a posées en sa qualité de ministre, reliées à l'adoption du Plan de gestion de 1997 qui, comme je l'ai dit, accorde à l'exploitation estivale du télésiège un traitement identique à celui que lui attribuait le Plan de gestion à long terme qu'il remplaçait. De la même façon, le droit invoqué par la demanderesse à l'égard de MM. Zinkan, Lee et Fisher découle principalement, voire entièrement, de l'adoption du Plan de gestion de 1997. Il est donc difficile de voir un rapport entre les dommages réclamés et Mme Copps et MM. Zinkan, Lee et Fisher, défendeurs à titre personnel.

[12]            La demanderesse énonce dans la déclaration que le défendeur Fisher a refusé d'accorder un permis d'exploitation de la télécabine au début de l'automne 2000 et remonte ensuite la hiérarchie administrative pour en arriver à « la défenderesse Copps, à titre de ministre du Patrimoine canadien pour la défenderesse la Reine en chef du Canada » . (paragraphe 25 de la déclaration). La déclaration indique, d'après moi, que les actes délictueux reprochés aux défendeurs vont du Plan de gestion de 1997 à l'exercice de son pouvoir discrétionnaire par le directeur général de l'Agence Parcs Canada qui a débouché sur le refus d'accorder le permis d'exploitation estivale de la télécabine en septembre 2000.

[13]            Il est parfaitement inutile de poursuivre le procureur général du Canada, dans le présent contexte, et il n'existe aucune base juridique pour le faire, étant donné que le procureur général du Canada, tout comme le ministre du Patrimoine canadien et l'Agence Parcs Canada, est en fait la Reine du chef du Canada. Dans le cas de l'Agence Parcs Canada, je ferais également remarquer que l'Agence Parcs Canada n'est qu'un mandataire de Sa Majesté du chef du Canada : voir l'article 3 de la Loi l'Agence Parcs Canada, ch. 31 des Lois du Canada de 1998 :

3. Est constitué l'Agence Parcs Canada, dotée de la personnalité morale et exerçant ses attributions uniquement à titre de mandataire de Sa Majesté du chef du Canada.


Je reconnais toutefois qu'il est possible d'intenter contre l'Agence Parcs Canada des actions fondées sur l'article 18. À part cette possibilité, je ne vois aucune utilité à désigner l'Agence Parcs Canada « telle que représentée par son directeur général Tom Lee » et en fait, cette description n'est pas seulement une irrégularité, elle est redondante et dépourvue de tout lien avec l'espèce.

[14]            Il suffit de poursuivre la Reine du chef du Canada, sans nommer le ministre du Patrimoine canadien, que ce soit en qualité de ministre ou personnellement. Il n'est pas possible de poursuivre dans ce dernier cas le ministre dans sa capacité de représentant ou personnellement parce que ses décisions n'ont pas été prises à titre personnel. En outre, il est inutile de mentionner un ministère du gouvernement canadien, ici le ministère du Patrimoine canadien, étant donné que les ministères n'ont aucune existence juridique distincte de celle de Sa Majesté la reine. Les références au ministre et à Mme Copps dans l'intitulé sont radiées. En fait, comme l'a fait remarquer le juge Cullen dans Robichaud c. Procureur général du Canada (1991) 44 F.T.R. 172, à la page 177, Sa Majesté la reine est la seule défenderesse qu'il est obligatoire de nommer dans une action intentée contre la Couronne.


[15]            Pour ce qui est des autres défendeurs, comme je l'ai indiqué, j'ai beaucoup de mal à interpréter la déclaration comme si elle visait personnellement MM. Lee, Zinkan et Fisher. Cela semble toutefois apparemment l'intention de la demanderesse, une intention confirmée par la lettre du 7 mars 2001 de l'avocat des défendeurs envoyée à l'avocat de la demanderesse, dans laquelle le refus d'accorder le permis en 2000 est qualifié d'abus de fonctions publiques. Il y a également les observations de l'avocat de la demanderesse qui parlent de responsabilité personnelle découlant d'un abus de fonctions publiques, d'incitation à rupture de contrat et d'intervention délictuelle dans des relations commerciales, dans le contexte non seulement du rejet de la demande de permis mais également contre ces individus pour leur rôle personnel dans la rédaction du Plan de gestion de 1997. C'est pourquoi je devrais examiner de plus près la situation de chacun des défendeurs individuels : je laisse de côté la question de savoir si la déclaration allègue les éléments constitutifs de ces fautes délictuelles et j'aborde la question de la responsabilité personnelle de ces trois employés dans le contexte de la compétence de la Cour.

[16]            Le point de départ de la compétence de la Cour fédérale est l'arrêt ITO-International Terminal Operators Ltd. c. Miida Electronics Inc. [1986] 1 R.C.S. 752. Dans cette affaire, la Cour a formulé un critère à trois volets, dont chacun doit être présent pour fonder la compétence de la Cour fédérale :

1. Il doit y avoir attribution de compétence par une loi du Parlement fédéral.

2. Il doit exister un ensemble de règles de droit fédérales qui soit essentiel à la solution du litige et constitue le fondement de l'attribution légale de compétence.

3. La loi invoquée dans l'affaire doit être « une loi du Canada » au sens où cette expression est employée à l'art. 101 de la Loi constitutionnelle de 1867. (Page 766)


[17]            L'alinéa 17(5)b) de la Loi sur la Cour fédérale est une disposition législative qui attribue à la Cour la compétence d'entendre les actions intentées contre les défendeurs particuliers. L'avocat des défendeurs soutient que les deuxième et troisième volets du critère, la condition relative à l'existence d'un ensemble de règles de droit fédérales et d'une loi du Canada, ne sont pas remplis, étant donné que les allégations contre les défendeurs particuliers sont fondées sur la common law provinciale en matière de responsabilité contractuelle et délictuelle. Plus précisément, les allégations sont fondées sur la responsabilité délictuelle, notamment, pour reprendre la formulation de l'avocat de la demanderesse, le délit d'incitation à rupture de contrat.

[18]            Dans Holt c. Canada [1989] 1 C.F. 522, le juge McNair examinait une action délictuelle en dommages-intérêts contre le solliciteur général parce qu'il n'avait pas renouvelé la nomination du demandeur au poste de membre de la Commission nationale des libérations conditionnelles. La demande dont était saisi le juge McNair concernait la modification de la déclaration en vue d'ajouter, parmi d'autres défendeurs particuliers, un ancien président de la Commission nationale des libérations conditionnelles, pour le motif qu'il était nécessaire de nommer toutes ces personnes de façon à ce que la Cour puisse examiner pleinement toutes les questions en litige. Il s'agissait, dans cette affaire, de savoir si les deuxième et troisième volets du critère ITO étaient remplis. Il exprime son opinion sur ce point aux pages 531 et 532 :

À mon avis, les actes délictuels reprochés aux défendeurs particuliers ne découlent pas d'un ensemble de règles de droit fédéral applicables actuellement qui constitue un « cadre législatif détaillé » suffisant pour imputer la responsabilité à ces défendeurs. Le fait que le défendeur Outerbridge était le fonctionnaire exécutif en chef de la Commission nationale des libérations conditionnelles qui en surveille le travail est un lien trop fragile pour permettre de conclure à la compétence de la Cour à son égard, en sa qualité individuelle. Dans les circonstances, j'estime que les causes d'action alléguées contre les défendeurs particuliers ne sont pas attribuables à une source de droit fédéral mais proviennent plutôt, s'il en est, du droit provincial en matière de responsabilité délictuelle. Cela étant, la partie de la requête cherchant l'autorisation de faire constituer William J. Outerbridge, John Doe et Jane Doe parties défenderesses est rejetée.


Pour en arriver à cette conclusion, le juge McNair a examiné diverses affaires, y compris Oag c. Outerbridge et Howland [1987] 2 C.F. 511, arrêt dans lequel la Cour d'appel cite Rhine c. La Reine [1980] 2 R.C.S. 442, dans lequel le juge en chef a recherché l'existence d'un cadre législatif fédéral détaillé accordant des droits à l'appelant et qui exigeait l'application du droit relatif à la responsabilité délictuelle, en tant que partie des lois du Canada, pour pouvoir se prononcer sur ces droits fédéraux, des éléments qui se chevauchent souvent.

[19]            Il serait également bon de citer Hendricks c. Fairweather et Canada (1991) 45 F.T.R. 171, une action en responsabilité fondée sur le fait que le défendeur particulier s'était opposé au renouvellement du mandat du demandeur, à titre de membre de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. Dans cette affaire, le juge Denault a fait remarquer que l'alinéa 17(5)b) n'accordait pas à lui seul compétence à la Cour pour entendre une action contre des défendeurs particuliers, même s'il s'agissait de fonctionnaires poursuivis conjointement avec la Couronne fédérale. Il a ensuite adopté l'opinion exposée par le juge McNair dans Holt (précité).

[20]            Finalement, je mentionne l'arrêt Robinson c. Canada (1996) 120 F.T.R. 157, une décision du juge Richard, tel était alors son titre. Dans Robinson, un détenu poursuivait la Couronne et les fonctionnaires des services correctionnels en responsabilité pour violation des droits garantis par la Charte, complot civil, comportement délictuel volontaire, abus de pouvoir, diffamation et faute dans l'exercice de leurs fonctions, allégations qui étaient toutes, sauf celles qui étaient basées sur des droits garantis par la Charte, des causes d'action reconnues par la common law. Pour ce qui est des défendeurs particuliers, M. Robinson n'a pu invoquer un ensemble détaillé de règles de droit, étant donné l'absence d'obligations d'origine législative. Le juge Richard a examiné l'appel interjeté contre la décision du protonotaire en faisant remarquer à la page 161 :


Le protonotaire n'a pas commis d'erreur de droit quand il a conclu que les causes d'action déposées à l'encontre des particuliers défendeurs découlent de la responsabilité délictuelle et non pas d'un ensemble de règles de droit fédérales. Les causes d'action alléguées contre les particuliers défendeurs ne sont pas attribuables à une source de droit fédéral, mais proviennent du droit provincial en matière de responsabilité délictuelle. (Holt c. Canada [1989] 1 C.F. 522; 23 F.T.R. 109 (1re inst.); Hendricks c. Fairweather et Canada (1991), 45 F.T.R. 171 (1re inst.).

Le juge Richard a fait remarquer ensuite qu'il n'existait pas dans cette affaire de cadre législatif fédéral détaillé, en vertu duquel l'appelant aurait pu acquérir des droits, comme c'était le cas dans l'arrêt Oag c. Outerbridge (précité). Je signalerais qu'en l'espèce la demanderesse n'invoque pas des droits découlant de la loi mais plutôt des droits découlant du bail Norquay, ce qui est très différent.


[21]            L'avocat de la demanderesse connaît bien ces affaires et soutient qu'il existe un cadre législatif de droit fédéral suffisamment détaillé, notamment selon l'arrêt Oag c. Canada (précité). Dans cette affaire, le président de la Commission nationale des libérations conditionnelles faisait partie des particuliers assignés comme défendeurs. L'action a été rejetée en première instance, contre les particuliers défendeurs, pour défaut de compétence. Je noterais ici que le juge de première instance n'avait pas pu prendre connaissance de l'arrêt ITO-International Terminal Operators de la Cour suprême du Canada, prononcé après le jugement de première instance mais avant celui de la Cour d'appel dans l'affaire Oag. D'après ce que je comprends de l'affaire Oag, M. Oag bénéficiait d'une libération conditionnelle, assortie de la liberté surveillée, une mise en liberté fondée sur le droit fédéral. En vertu du droit fédéral, M. Oag avait le droit de jouir de cette liberté tant qu'il respectait les conditions de sa liberté surveillée. En bref, il avait des droits en vertu de dispositions législatives fédérales. Le juge Stone, parlant au nom de la Cour, a mentionné le fait que les droits que possédait M. Oag pouvaient, en cas de violation, donner lieu à des poursuites en responsabilité délictuelle, fondées sur des règles de droit fédérales. La demande de M. Oag relevait donc de la compétence de la Cour fédérale, conformément à la jurisprudence, notamment l'arrêt de la Cour suprême ITO-International Terminal Operators. L'élément essentiel de l'affaire Oag est qu'il existait un cadre législatif détaillé, un cadre comprenant des dispositions impératives donnant à M. Oag le droit à une liberté partielle, une liberté qui ne pouvait être restreinte que conformément aux dispositions relatives aux libérations conditionnelles. Le cadre législatif détaillé était celui de la Loi sur les pénitenciers et de la Loi sur la libération conditionnelle, et il accordait à M. Oag et à personne d'autre un droit d'origine législative.

[22]            Des faits semblables ont été soumis à la Cour d'appel dans l'affaire Kigowa c. Canada [1990] 1 C.F. 804. Dans cette affaire, M. Kigowa était un homme d'équipage qui avait abandonné son navire à Nanaimo, C.-B., et avait été arrêté par les autorités de l'immigration. Celui-ci avait intenté une action en responsabilité. Les trois juges de la Cour d'appel ont tous signalé, de diverses façons, que le droit à la liberté que possédait M. Kigowa ne découlait pas de la common law mais des dispositions de la Loi sur l'immigration. Il est possible de résumer ce raisonnement en disant que les droits que lui conférait la Loi sur l'immigration constituaient le cadre législatif détaillé.


[23]            Dans Maguire c. Canada [1990] 1 C.F. 742, le demandeur poursuivait en responsabilité des agents des pêches qui avaient agi en dehors de leurs fonctions, parce qu'ils avaient fait, selon ce qu'alléguait le demandeur, de fausses représentations. Dans Maguire, le juge McNair a examiné la question de savoir si les règles en matière de contrat, de responsabilité délictuelle, d'enrichissement sans cause, d'obligation fiduciaire et d'entrave au droit de propriété étaient suffisamment marquées par le droit fédéral pour que l'affaire relève de la compétence de la Cour fédérale. Il a conclu que les fausses déclarations faites par les agents des pêches, dont se plaignait le demandeur, découlaient de l'exercice des pouvoirs que leur attribuait la Loi sur les pêches. Il a conclu que les poursuites individuelles, bien considérées, reposaient sur un cadre législatif détaillé, à savoir la Loi sur les pêches. Cependant, pour en arriver à ces conclusions, il a reconnu que la loi en question ne doit pas être une simple loi d'exécution mais une loi donnant naissance à une demande fondée sur des droits d'origine législative; dans cette affaire il s'agissait des conditions énoncées dans la Loi, applicables aux personnes qui demandent des permis commerciaux de pêche au saumon.

[24]            En l'espèce, je constate que la Loi sur les parcs nationaux constitue soit le cadre législatif détaillé, soit l'équivalent des droits sur lesquels les cours d'appel se sont fondées dans les affaires Oag, Kigowa et Maguire. Cependant, l'avocat de la demanderesse invoque des droits fondés sur un bail et sur le jugement de 1996.


[25]            L'avocat de la demanderesse fait référence à l'issue de la poursuite de 1996 qui concernait les activités de la demanderesse, et affirme que le juge Campbell a déclaré que la demanderesse possédait des droits sur les terrains où elle exerçait ses activités, qu'il avait qualifiés de « droits éventuels très restreints quant à l'exploitation d'un commerce sur les terrains loués » , dans Peter G. White Management Ltd. c. Canada (1997) 132 F.T.R. 89, à la page 100. La demanderesse s'appuie sur cette observation pour soutenir que « les droits que possède la demanderesse en vertu du bail découlent uniquement d'une loi fédérale et de la capacité de conclure un bail concernant des terrains appartenant à un parc national aux termes de la ... [Loi sur les parcs nationaux] et de ses Règlements d'application, tels que modifiés » (page 8 du mémoire).

[26]            Je ne vois pas comment les commentaires formulés par le juge Campbell aux pages 98 et 100, savoir « ... ce qui a été accordé à Banff Mount Norquay est un droit éventuel très restreint quant à l'exploitation d'un commerce sur les terrains loués » , c'est-à-dire le droit d'utiliser ces terrains pour les fins très limitées prévues dans l'engagement, et « ... ce qu'elle a acheté était un droit éventuel très restreint quant à l'exploitation d'une entreprise, laquelle était également assujettie à des contraintes importantes lors de la cession du bail. » , permettent de conclure à l'existence d'un « cadre législatif détaillé » susceptible de fonder la compétence de la Cour fédérale à l'égard des employés du parc comme cela était le cas dans les affaires Oag, Kigowa et Maguire. Dans ces affaires, le droit invoqué était directement fondé sur une loi, et non pas sur un bail relatif à une terre de la Couronne. Il paraît plus exact de dire que les particuliers défendeurs, en l'espèce, exerçaient leurs fonctions aux termes des dispositions législatives pertinentes, mais que les droits de la demanderesse découlaient du bail Norquay : le bail découle des lois relatives aux parcs et ne confère pas de droits aux termes d'une loi fédérale comme dans Oag, et ne constitue pas non plus un cadre législatif détaillé susceptible de fonder la compétence de la Cour fédérale à l'égard des particuliers défendeurs dans la présente espèce.


[27]            L'avocat de la demanderesse soutient que le cadre législatif détaillé que constitue la Loi sur les parcs nationaux, comme l'a déclaré le juge Evans, tel était alors son titre, dans Canada c. Crosson (1999) 169 F.T.R. 218, permet d'asseoir la compétence de la Cour. Il s'agissait dans cette affaire de la capacité de la Couronne de percevoir un loyer sur les terres d'un parc national détenues à bail, conformément aux dispositions des baux et à celles de la Loi sur les parcs nationaux et de ses Règlements d'application. Le problème venait du fait que le droit qui avait été créée par la Couronne dans l'exercice de sa capacité contractuelle de common law, ne reposait pas sur une loi fédérale. Cependant, l'octroi, la modification et la cession des baux en question, l'évaluation des biens et les diverses options en matière de location étaient régies par la Loi et les Règlements sur les parcs nationaux. Le juge a par contre conclu, pour reconnaître la compétence de la Cour à l'égard de la Couronne, qu'il existait un cadre législatif suffisamment important pour que l'on puisse affirmer que la demande de la Couronne était fondée sur une loi fédérale existante. Le juge Evans a jugé que la Cour fédérale avait compétence pour entendre cette affaire (pages 226 et 277).


[28]            La conclusion à laquelle la Cour en est arrivée dans Crosson au sujet de l'existence d'un cadre législatif, en faveur de la Couronne, a permis à cette dernière de saisir la Cour fédérale de sa demande. Cela ne veut toutefois pas dire que la partie qui poursuit la Couronne bénéficie automatiquement de cette même compétence : par exemple, dans le cas d'une demande reconventionnelle qui doit être déclarée recevable, ou comme ici, dans celui non pas d'une action intentée par la Couronne au sens de Crosson, mais d'une action intentée contre la Couronne, la cause d'action doit être indépendante, comme l'a fait remarquer la Cour d'appel dans Innotech Pty. Ltd. c. Phoenix Rotary Spike Harrow Ltd. (1997) 215 N.R. 397. Ainsi, en l'espèce, l'arrêt Crosson n'est d'aucun secours pour la demanderesse, étant donné que, pour fonder la compétence, je dois découvrir l'existence d'un cadre législatif, qui soit équivalent au cadre législatif mentionné par le juge Evans dans Crosson, pour l'essentiel, un cadre qui accorderait des droits à la demanderesse. J'ai déjà effectué cette analyse et n'ai rien découvert de suffisamment solide pour fonder la compétence de la Cour à l'égard des divers particuliers défendeurs. Dès lors, les demandes visant MM. Lee, Fisher et Zinkan doivent être radiées parce que le second volet du critère ITO n'est pas rempli, étant donné que les liens qui permettraient d'établir la compétence du tribunal à l'égard de ces particuliers en leur capacité personnelle sont bien trop ténus.

[29]            J'ajouterais également qu'étant donné que l'action vise en réalité la Couronne, la présence de particuliers défendeurs, dont j'ai radié la mention, n'apporterait pas grand-chose à la présente action. J'aborde maintenant le fond de la demande, la réclamation contre la Couronne et la question de savoir si la demande a déjà été tranchée judiciairement.

L'exception de chose jugée (Issue estoppel)


[30]            C'est la seconde action qu'institue Peter G. White Management Ltd. pour essayer d'obtenir l'autorisation d'exploiter pendant l'été la télécabine du mont Norquay. La première instance, une demande de contrôle judiciaire, portait sur la décision du ministre du Patrimoine canadien et du directeur du Parc national Banff de refuser d'accorder un permis d'exploitation d'une entreprise, à savoir l'exploitation de la télécabine pendant l'été. Dans la décision Peter G. White Management Ltd. c. Canada (Ministre du Patrimoine canadien) (précitée), la Cour a jugé que le directeur du Parc national Banff avait agi de façon équitable et conformément à ses pouvoirs lorsqu'il avait refusé d'accorder un permis d'exploitation de la télécabine pendant l'été. Le juge Campbell en est arrivé à cette conclusion après avoir examiné le bail et le règlement commercial du parc national, et il a jugé que le droit éventuel restreint d'exploiter l'entreprise avait été accordé à la condition que soit délivré un permis d'exploitation à cette fin :

Compte tenu des dispositions du bail et des articles précités du Règlement, je suis d'avis que ce qui a été accordé à Banff Mount Norquay est un droit éventuel très restreint quant à l'exploitation d'un commerce sur le terrain loué, c'est-à-dire que le droit d'utiliser le terrain pour les fins très limitées prévues dans l'engagement dépend de la délivrance d'un permis aux termes de l'article 5 du Règlement. (Page 98)

[31]            Le juge Campbell a examiné ensuite la portée du pouvoir attribué au directeur, qu'il a qualifié de très large, et qui autorise le genre de décision qui a été prise et qui est en fait « ... suffisamment large pour permettre de restreindre l'exploitation de tout commerce exercé à l'intérieur d'un parc national, que ce soit ou non dans le cadre de l'application d'un bail. » (loc. cit.). La Cour a jugé ensuite que ce large pouvoir discrétionnaire avait été correctement exercé :

[34]      L'attitude que le directeur a adoptée et la profondeur de l'enquête qu'il a menée indiquent qu'il avait l'intention de tenir compte et qu'il a effectivement tenu compte de tous les facteurs concernés par la proposition, y compris les droits dont Banff Mount Norquay disposait aux termes du bail, et non simplement des facteurs liés à la politique relative au plan à long terme. À mon avis, non seulement le directeur avait-il le pouvoir discrétionnaire nécessaire pour accorder le permis, mais il estimait que ce pouvoir discrétionnaire était absolu. Je suis convaincu que le directeur a sincèrement mené une analyse poussée des éléments de preuve et des enjeux et qu'il n'a nullement entravé l'exercice de son pouvoir discrétionnaire. En conséquence, j'estime que le pouvoir discrétionnaire relatif à la délivrance du permis a été exercé en bonne et due forme. (Pages 100-101)

[32]            La décision du juge Campbell contient également des passages susceptibles de renforcer la position de la demanderesse et que j'ai examinés. Par exemple, le juge Campbell mentionne une décision du ministre qui, d'après les notes de bas de page des motifs, a peut-être été transmis par téléphone à M. White pendant les conversations qu'il a eues avec des adjoints ministériels les 23 et 24 juillet 1996 et dont il ressortait que le ministre avait refusé la proposition présentée par la demanderesse le 12 juillet 1996. Le juge Campbell a pris soin de préciser que la seule décision attaquée était celle du 2 juillet 1996 et que les seules preuves qu'il convenait d'examiner était celles qui concernaient les événements antérieurs à cette décision (page 96). Plus loin, le juge Campbell fait remarquer à la page 100, dans le cadre des éléments dont le directeur doit tenir compte, que les activités commerciales de la demanderesse étaient des facteurs qui doivent être pris en compte, « cependant, en ce qui a trait au poids accordé à ces facteurs, il est certain que chaque cas doit être tranché en fonction de la situation s'y rapportant » . La demanderesse en déduit que la proposition qu'elle a présentée en 2000 portait sur des circonstances nouvelles et que la décision prise en 2000 l'a été à un moment où les circonstances avaient changé. Je ne vois pas que les circonstances aient changé : il s'agit en fait de la même politique relative au parc national, du même bail Norquay et du même pouvoir discrétionnaire du directeur du Parc national Banff.


[33]            Avant d'examiner l'argument fondé sur l'exception de chose jugée (issue estoppel), je ferais également remarquer qu'il y a des parallèles et des ressemblances entre la demande de contrôle judiciaire qui a donné lieu à la décision du juge Campbell et la déclaration actuelle, tout comme il y a des différences entre ces deux documents. J'ai néanmoins axé mon analyse sur le fait que la question fondamentale ou centrale est celle de savoir si la question qui a été tranchée dans la décision de 1997 est identique à celle qui est soulevée dans la présente déclaration. J'aborde maintenant la notion d'exception de chose jugée (issue estoppel) et les règles qui s'y appliquent.

[34]            L'exception de chose jugée, qui est un aspect de l'autorité de la chose jugée (res judicata), a pour but d'éviter qu'un défendeur soit poursuivi plusieurs fois pour la même raison, et que soient gaspillées inutilement les ressources de toutes les parties concernées, y compris celles du tribunal. La notion de chose jugée est expliquée dans le passage suivant du traité intitulé Sopinka on the Law of Evidence in Canada, 2e édition, 1999, Butterworths, à la page 1078 :

[traduction] La notion de chose jugée comprend deux principes. Selon le premier, l'action ou la question qui a fait l'objet d'un litige et d'une décision ne peut être jugée à nouveau dans une affaire opposant les mêmes parties ou leurs ayants droit. Ce principe évite la contrariété de jugements, en interdisant que soient entendues à nouveau les questions qui ont déjà été tranchées par un tribunal.

Le second principe exige que le demandeur qui invoque une cause d'action sollicite toutes les mesures de redressement susceptibles d'en découler et lui interdit d'essayer par la suite d'invoquer l'aide des tribunaux dans la même affaire. On parle parfois de « fusion » parce que la cause d'action du demandeur est « fusionnée » dans le jugement. Le jugement constitue en fait une déclaration complète des droits de toutes les parties à l'égard des questions en litige.


[35]            Pour appliquer ce principe, il faut d'abord préciser la nature de la question en litige. En l'espèce, la question fondamentale de la présente instance, la question qui a été tranchée dans la demande de contrôle judiciaire antérieure est celle de savoir si la Couronne avait le droit d'interdire à la demanderesse d'exploiter la télécabine du mont Norquay pendant l'été. Les défendeurs soutiennent que cette question a été tranchée de façon définitive dans l'instance en contrôle judiciaire T-1776-96, étant donné qu'il y a eu désistement dans l'appel de cette décision, A-457-97. Je souscris à l'argument des défendeurs selon lequel l'exception de chose jugée interdit à la défenderesse de soumettre à nouveau aux tribunaux cette question centrale et fondamentale. C'est ce que justifie l'identité des questions en litige, même si la forme de la première instance était une demande de contrôle judiciaire et celle de la seconde une action : voir par exemple Patel c. Canada (Commission canadienne des droits de l'homme), une décision non rapportée de la Cour d'appel fédérale dans le dossier A-546-96, prononcée le 2 septembre 1999. Dans Patel, le jugement prononcé à la suite d'une demande de contrôle judiciaire antérieure, dans lequel la Cour avait jugé que la plainte en question avait été correctement traitée par la Commission, a déclenché l'application du principe de la chose jugée contre l'action intentée postérieurement dans laquelle le demandeur poursuivait en responsabilité la Commission et ses représentants. L'avant-dernier paragraphe de cette décision nous intéresse ici :

En outre, il avait déjà été décidé de façon définitive dans le cadre de la demande de contrôle judiciaire du 30 janvier 1996 que la façon dont la Commission et ses fonctionnaires avaient traité la plainte de l'appelante n'avait rien de répréhensible. Cette décision, prise isolément, n'a peut-être pas l'autorité de la chose jugée parce qu'une demande de contrôle judiciaire diffère par sa nature d'une action en responsabilité. Néanmoins, étant donné que la demande de contrôle judiciaire a permis de régler de façon définitive la principale allégation mise de l'avant dans l'action en responsabilité, à savoir qu'à la suite d'agissements contraires au droit de la part de la Commission et de ses fonctionnaires, la plainte avait fait l'objet d'une enquête et d'un traitement irréguliers, le principe d' « issue estoppel » (exception de chose jugée) trouve manifestement application ici et les actions en sont d'autant moins recevables.


[36]            L'aspect important ici est que la demande de contrôle judiciaire présentée dans l'affaire Patel n'a pas déclenché l'application de l'exception de chose jugée, étant donné qu'il ne s'agissait pas d'une action, mais en réglant l'allégation centrale qui était soulevée dans la seconde instance, une action en responsabilité, elle a permis d'appliquer cette exception. Lorsqu'une des instances est une demande de contrôle judiciaire et l'autre une action, il faut que les conditions d'application de l'exception de chose jugée soient réunies, il convient donc d'examiner le critère qui précise ces conditions pour déterminer si cette exception trouve application en l'espèce.

[37]            La formulation classique de l'exception de chose jugée est celle que l'on trouve dans Carl Zeiss Stiftung v. Rayner & Keeler Ltd. (No. 2) [1967] A.C. 853 (C. des L.), à la page 935 :

Les conditions de l'application du principe de la chose jugée sont toujours (1) que la même question ait été décidée; (2) que la décision judiciaire invoquée comme créant la [préclusion] soit finale; et (3) que les parties dans la décision judiciaire invoquées, ou leurs ayants droit, soient les mêmes que les parties engagées dans l'affaire où la [préclusion] est soulevée, ou leurs ayants droit.

Ce critère a été adopté par tous les tribunaux canadiens, notamment dans les arrêts Angle c. Ministre du Revenu national [1975] 2 R.C.S. 248, à la page 254 et Danyluk c. Ainsworth Technologies Inc. (2001) 201 D.L.R. (4th) 193, à la page 207.

[38]            Il est certain que la décision qu'a prononcée le juge Campbell dans le cas de la demande de contrôle judiciaire est définitive, puisqu'il y a eu désistement d'appel. En outre, étant donné que les particuliers défendeurs, le ministre, le procureur général, ont été radiés, ce qui ne laisse comme défendeurs que Sa Majesté la reine du chef du Canada et son mandataire légal, l'Agence Parcs Canada, la question des ayants droit ne se pose pas et je n'ai pas besoin d'examiner la jurisprudence concernant l'identité qui doit exister entre les défendeurs dans la demande de contrôle judiciaire et les défendeurs en l'espèce. L'aspect essentiel est de savoir si la question fondamentale en litige était la même dans la demande de contrôle judiciaire et dans la présente action.


[39]            Les parties qualifient différemment la question fondamentale en litige, ou dans le cas de la demanderesse, les questions fondamentales. L'avocat de la demanderesse soutient que la cause de l'action intentée contre la Reine est fondée sur une rupture de contrat, sur une expropriation par voie de réglement, sur l'absence de bonne foi et sur la violation des attentes contractuelles découlant de l'adoption du Plan de gestion de 1997. Les nombreuses causes d'action invoquées contre les particuliers défendeurs ne sont plus directement pertinentes ici, dans la mesure où les défendeurs ne sont plus parties à l'instance; cependant, en se basant sur la déclaration et non pas sur les mesures de réparation sollicitées, il y a peut-être report contre la Couronne de la cause d'action fondée sur une intervention délictuelle dans des relations commerciales. La question fondamentale en litige est en réalité la somme de toutes ces causes d'action. Je ne considère pas que cela soit totalement différent de la question fondamentale qu'a examinée le juge Campbell, étant donné que toutes les causes d'action invoquées par la demanderesse débouchent sur la même question fondamentale. J'affirme ce qui précède malgré la différence qui existe entre d'une part, une demande de contrôle judiciaire et de l'autre, une action fondée sur un contrat, un délit, la violation d'une obligation ou toute autre cause d'action découlant d'un préjudice. Je citerais ici la décision de la juge Abella, de la Cour d'appel, dans l'affaire Rasanen c. Rosemount Instruments Ltd. (1994) 112 D.L.R. (4th) 683, autorisation d'appel refusée (1995) 178 N.R. 80. Cette action portait sur la décision définitive d'un arbitre et sur un appel que le juge de première instance avait rejeté en se basant sur l'exception de chose jugée. La Cour a déclaré que l'arbitre qui avait examiné l'indemnité due en cas de licenciement avait tranché la question centrale du litige, celle de savoir si l'employé avait droit à une indemnité dans le cadre d'une action pour congédiement abusif, ou comme l'a formulé la juge Abella :

[traduction] J'estime que la question à trancher en l'instance est la même que celle qui a été décidée dans l'instance antérieure relative à la Loi sur les normes d'emploi : l'employé a-t-il droit à une indemnité en cas licenciement par l'employeur? (Page 703)

La juge Abella poursuit en faisant remarquer de façon très pertinente que, si la nature et la formulation des questions en litige dans les deux instances différaient, lorsque la question fondamentale, une question si fondamentale pour la première décision que celle-ci n'existerait pas si cette question n'avait pas été tranchée, est identique, alors l'exception de la chose jugée est applicable :

Il est vrai que dans la Loi sur les normes d'emploi, cette question est formulée en des termes qui diffèrent de ceux que l'on retrouve dans la common law. Mais l'existence d'une différence sur le plan de la qualification et du processus ne veut pas dire, en l'espèce, que les questions sont différentes.

Le droit de l'employé à une indemnité de licenciement soulevé dans les deux instances exigeait que soit déterminée la question de savoir si l'employeur avait violé une obligation découlant du contrat de travail et donnant lieu à responsabilité et à indemnisation. L'action intentée aux termes de la Loi sur les normes d'emploi a été rejetée parce que l'arbitre a conclu que l'employé disposait d'une alternative raisonnable en matière d'emploi et que l'employeur avait agi de bonne foi. La question de savoir si l'employé avait droit à une indemnité de licenciement a par conséquent reçu une réponse négative. Ce sont les mêmes questions qui devaient être tranchées dans l'instance en congédiement abusif introduite par l'appelant. Les questions ne sont pas simplement identiques, elles sont essentielles à la décision. (loc. cit.).

L'aspect qui est souligné ici est qu'il faut non seulement examiner si les questions sont identiques mais également si elles jouent un rôle essentiel dans la décision.


[40]            Il est certes possible de disséquer à l'infini la décision du juge Campbell, mais la question fondamentale demeure l'exploitation estivale de la télécabine du mont Norquay par la demanderesse. Le juge Campbell a tranché la question dans le contexte du refus opposé le 2 juillet 1996 par le directeur du Parc national Banff à cette exploitation estivale, en tenant compte du fait que la demanderesse savait que son prédécesseur avait cessé d'exploiter en été la télécabine, pour obtenir en échange un terrain supplémentaire pour pouvoir étendre ses activités hivernales, du plan à long terme des Services de Parcs Canada pour la région de ski du mont Norquay, du bail cédé et de divers règlements comprenant le Règlement sur la pratique de commerces dans les parcs nationaux. Tout cela se ramène à la question fondamentale de l'utilisation estivale de la télécabine, et au fait que le juge Campbell a confirmé la validité de l'interdiction de cette activité par la Couronne.

[41]            La présente action, telle qu'elle est formulée dans la déclaration du 28 février 2001, dans laquelle la demanderesse demande des dommages-intérêts, est fondée sur la Loi sur les parcs nationaux, sur les clauses du bail de la demanderesse, sur le plan à long terme actuel établi pour le parc, sur le refus opposé en juillet 1996 à la délivrance d'un permis d'exploitation de la télécabine et sur le second refus opposé par la Couronne le 6 septembre 2000 à une demande d'exploitation estivale de la télécabine. Il s'agit encore une fois de la même question fondamentale qui a été décidée par le juge Campbell, à savoir celle de l'exploitation estivale de la télécabine : je n'ai pas oublié le Plan de gestion du Parc national Banff de 1997, mais ce plan ne fait que décrire la situation créée par le Plan de gestion à long terme antérieurement à la décision qu'a prononcée le juge Campbell en 1996.


[42]            L'avocat du procureur général signale que, même si l'auteur de la requête, par exemple, ici les défendeurs dont la requête en radiation est fondée sur l'exception de chose jugée, établit l'existence des conditions déclenchant l'application de cette exception, le tribunal est tenu d'exercer son pouvoir discrétionnaire et de décider s'il y a lieu d'appliquer l'exception de chose jugée. Pour l'essentiel, même lorsque les conditions d'application de l'exception de chose jugée sont réunies, il peut être parfois injuste de l'appliquer : l'avocat cite l'arrêt Danyluk c. Ainsworth Technologies Inc. (2001) 201 D.L.R. 193 (C.S.C.).

[43]            Dans Danyluk, l'appelante avait déposé une plainte en vertu de la Loi sur les normes d'emploi et réclamait le versement de commissions impayées qui s'élevaient à 300 000 $. L'employeur avait congédié Mme Danyluk. Mme Danyluk a alors intenté une poursuite civile pour congédiement illégal, salaires et commissions impayés. Par la suite, un agent des normes d'emploi a tenu une audience de façon irrégulière et a finalement attribué à l'employée deux semaines de salaire. Les juridictions inférieures ont jugé que le fait que l'appelante avait tenté en vain d'obtenir ses commissions en saisissant l'agent des normes de travail de cette question avait déclenché l'application de l'exception de chose jugée. Le juge Binnie commence la partie de ses motifs qui portent sur cette exception (issue estoppel) en faisant remarquer : « Une doctrine élaborée par les tribunaux dans l'intérêt de la justice ne devrait pas être appliquée mécaniquement et donner lieu à une injustice. » (page 198). Dans Danyluk, le juge Binnie fait remarquer ce qui suit au début de son analyse :


Le droit tend à juste titre à assurer le caractère définitif des instances. Pour favoriser la réalisation de cet objectif, le droit exige des parties qu'elles mettent tout en oeuvre pour établir la véracité de leurs allégations dès la première occasion qui leur est donnée de le faire. Autrement dit, un plaideur n'a droit qu'à une seule tentative. L'appelante a décidé de se prévaloir du recours prévu par la [Loi sur les normes d'emploi]. Elle a perdu. Une fois tranché, un différend ne devrait généralement pas être soumis à nouveau aux tribunaux au bénéfice de la partie déboutée et au détriment de la partie qui a eu gain de cause. Une personne ne devrait être tracassée qu'une seule fois à l'égard d'une même cause d'action. Les instances faisant double emploi, les risques de résultats contradictoires, les frais excessifs et les procédures non décisives doivent être évités. (Page 204)

Dans son analyse, le juge Binnie conclut que les conditions d'application de l'exception de chose jugée sont remplies mais que l'application de ce principe n'est pas automatique.

[44]            Le juge Binnie fait remarquer qu'il ne faut pas appliquer cette notion de façon automatique mais qu'il convient de procéder en deux temps, la première étape consistant à déterminer si les conditions d'application du principe sont remplies et ensuite, si c'est le cas, s'il est opportun d'appliquer en l'espèce l'exception de chose jugée :

Les règles régissant la préclusion découlant d'une question déjà tranchée ne doivent pas être appliquées machinalement. L'objectif fondamental est d'établir l'équilibre entre l'intérêt public qui consiste à assurer le caractère définitif des litiges et l'autre intérêt public qui est d'assurer que, dans une affaire donnée, justice soit rendue. (Il existe des intérêts privés correspondants.) Il s'agit, au cours de la première étape, de déterminer si le requérant (en l'occurrence l'intimée) a établi l'existence des conditions d'application de la préclusion découlant d'une question déjà tranchée énoncées par le juge Dickson dans l'arrêt Angle, précité. Dans l'affirmative, la cour doit ensuite se demander, dans l'exercice de son pouvoir discrétionnaire, si cette forme de préclusion devrait être appliquée : British Columbia (Minister of Forests) c. Bugbusters Pest Management Inc. (1998), 50 B.C.L.R. (3d) 1 (C.A.), paragr. 32; Schweneke c. Ontario (2000), 47 O.R. (3d) 97 (C.A.), par. 38-39; Braithwaite c. Nova Scotia Public Service Long Term Disability Plan Trust Fund (1999), 176 N.S.R. (2d) 173 (C.A.), paragr. 56. (Pages 209-210)

[45]            Le tribunal jouit d'une discrétion dans ce domaine parce que l'exception de chose jugée (issue estoppel), à la différence de la notion de res judicata de la common law, est une notion d'equity; c'est d'un côté un moyen de rendre la justice et de l'autre, une protection contre les injustices (pages 217-218 de Danyluk). D'où la possibilité, dans le cas de l'exception de chose jugée, d'examiner les circonstances et les réalités propres à chaque espèce.

[46]            Au sujet de l'exercice du pouvoir discrétionnaire, je note l'avertissement, lancé à la page 217, selon lequel le pouvoir discrétionnaire, dans le contexte d'une instance judiciaire, est très limité dans son application mais que « ... le pouvoir discrétionnaire est nécessairement plus étendu à l'égard des décisions des tribunaux administratifs, étant donné la diversité considérable des structures, missions et procédures des décideurs administratifs. » Par conséquent, dans le contexte de la présente affaire, il y a lieu d'exercer ce pouvoir discrétionnaire de façon plus limitée.

[47]            Le juge Binnie déclare, à la page 219, que les facteurs à prendre en compte pour décider s'il y a lieu d'exercer le pouvoir discrétionnaire et éviter l'application de l'exception de chose jugée ne sont pas exhaustifs. Pour les fins qui le concernait, ces facteurs comprenaient l'examen de la loi en question, l'existence d'un droit d'appel, les garanties offertes dans le cadre de l'instance administrative, l'expertise du décideur administratif, les circonstances ayant donné naissance à l'instance administrative initiale et le risque d'injustice. Bien évidemment, certains de ces facteurs étaient dictés par la nature de la décision antérieure, à savoir celle d'un tribunal administratif. En l'espèce, la décision antérieure est une décision de la Cour.

[48]            En l'espèce, les facteurs à prendre en compte pour exercer le pouvoir discrétionnaire sont l'existence d'un droit d'appel, les circonstances ayant entouré l'instance précédente et le risque d'injustice, du point de vue des deux côtés.

[49]            Il est évident que la demanderesse aurait pu porter en appel la décision du juge Campbell mais elle s'est désistée de cet appel.

[50]            Les circonstances ayant donné naissance à la première affaire, entendue par le juge Campbell, ne montrent pas qu'il y ait eu des lacunes ou des manquements sur le plan de la procédure : elles n'offrent donc aucun motif d'exercer ce pouvoir discrétionnaire.

[51]            Quant au risque d'injustice, il convient de l'examiner du point de vue des deux côtés. La demanderesse a certes eu toute latitude pour présenter ses arguments au juge Campbell. Le fait qu'elle se soit désistée de son appel indique, entre autres, que la procédure adoptée par le juge Campbell et sa décision étaient toutes deux équitables. Du point de vue de la Couronne, il n'est pas souhaitable que le défendeur soit contraint de se défendre plusieurs fois au sujet de la même question. Cependant, et c'est là ce qui me paraît le plus important, l'ancien titulaire du bail Norquay, celui qui a cédé le bail à la demanderesse, a renoncé à l'exploitation estivale de la télécabine pour obtenir une contrepartie de valeur, à savoir l'usage d'une autre parcelle de terrain pour ses activités hivernales; la demanderesse actuelle était parfaitement au courant de cette opération. Je ne vois aucune utilité à rejuger la même question fondamentale.

CONCLUSION


[52]            Radier des parties pour défaut de compétence ou par application de l'exception de chose jugée sont des méthodes toutes deux bien établies. Dans le premier cas, l'absence de compétence doit être manifeste : voir par exemple, Hodgson c. Ermineskin Indian Band (2000) 180 F.T.R. 285, à la page 289 (C.F. 1re inst.), confirmé par (2000) 267 N.R. 143 (C.A.F.), autorisation d'appel refusée (2001) 276 N.R. 193 (C.S.C.) et Charlie c. Vuntut Gwitchin Development Corp. (2002) 218 F.T.R. 116.

[53]            Dans le second cas, voir, à titre d'exemple de la radiation par application de l'exception de chose jugée, Gajic c. Ministre du Revenu national (1998) 148 F.T.R. 198, confirmé par [1998] 4 C.T.C. 189 (C.F. 1re inst.) et [2000] 2 C.T.C. 300 (C.A.F.). Dans ce genre d'affaires, il doit être clair et indubitable que l'exception de chose jugée interdit au demandeur de présenter une autre demande.

[54]            La norme à appliquer pour radier, soit pour défaut de compétence soit par application du principe de la chose jugée, est pour l'essentiel celle qui est énoncée dans la trilogie d'affaires bien connue, Hunt c. Carey Canada Inc. [1990] 2 R.C.S. 959, Operation Dismantle Inc. c. La Reine [1985] 1 R.C.S. 441 et Procureur général du Canada c. Inuit Tapirisat of Canada [1980] 2 R.C.S. 735 : il doit être clair, manifeste et indubitable que le demandeur ne peut obtenir gain de cause.


[55]            La norme rigoureuse applicable en matière de radiation, telle qu'énoncée dans la jurisprudence et qui permet à des poursuites quelque peu douteuses de procéder, chaque fois que les motifs énoncés dans la règle 221 et le critère appliqué à ces motifs ne sont pas rigoureusement remplis, est parfois difficile à établir et à appliquer dans les questions touchant la compétence et l'exception de chose jugée. Dans ce genre d'affaires, il est parfois impossible d'être aussi strict et d'affirmer avec certitude qu'une instance donnée est manifestement, clairement et indubitablement vouée à l'échec. Cependant, la présente espèce ne soulève pas ce genre de doute, que ce soit sur le plan de la compétence ou de l'exception de chose jugée. Il est non seulement clair, manifeste et indubitable que le seul défendeur approprié est Sa Majesté la reine avec peut-être l'Agence Parcs Canada mais il est également clair, manifeste et indubitable que la demande visant les autres défendeurs ne peut réussir, étant donné l'absence de compétence à leur égard. De la même façon, par l'application de l'exception de chose jugée, il est clair, manifeste et indubitable que la demande présentée contre Sa Majesté la reine et l'Agence Parcs Canada est vouée à l'échec.

[56]            L'action est radiée. Il y aura une série de dépens pour les particuliers défendeurs concernant la première requête et une série de dépens pour la Couronne pour la seconde requête.

          « John A. Hargrave »          

    Protonotaire

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.,


                                     COUR FÉDÉRALE

                      AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                             T-363-01

INTITULÉ :                          PETER G. WHITE MANAGEMENT LTD. c.

SA MAJESTÉ LA REINE ET AL.

LIEU DE L'AUDIENCE :      CALGARY (ALBERTA)

DATE DE L'AUDIENCE :    LE 10 OCTOBRE 2002

MOTIFS DE L'ORDONNANCE :              LE PROTONOTAIRE HARGRAVE

DATE DES MOTIFS :           LE 4 MARS 2004

COMPARUTIONS :

Bruce Mellett et                                                POUR LA DEMANDERESSE

Jacqueline Cullen

Kirk N. Lambrecht, c.r.                                     POUR LES DÉFENDEURS

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Bennett Jones LLP                                            POUR LA DEMANDERESSE

Calgary (Alberta)

Morris Rosenberg                                              POUR LES DÉFENDEURS

Sous-procureur général du Canada


 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.