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     T-1313-96

OTTAWA (ONTARIO), Le 24 février 1997

EN PRÉSENCE du juge Allan Lutfy

ENTRE :

     AKTIEBOLAGET HASSLE,

     demandeur,

     et

     NOVOPHARM LIMITED,

     défenderesse.

     ORDONNANCE

     La requête du demandeur en vue d'obtenir un jugement sommaire est rejetée avec dépens en faveur de la défenderesse, quelle que soit l'issue de la cause.

                             Allan Lutfy

                             Juge

Traduction certifiée conforme             

                             Martine Guay, LL.L.

     T-1313-96

ENTRE :

     AKTIEBOLAGET HASSLE,

     demandeur,

     et

     NOVOPHARM LIMITED,

     défenderesse.

     MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE LUTFY

     Le demandeur Aktiebolaget Hassle ("Hassle") demande un jugement déclaratoire sommaire mettant fin à la licence no J2324-39(4)-978 ("licence") qui a été accordée à la défenderesse Novopharm Limited ("Novopharm") à l'égard des brevets canadiens de Hassle nos 1 127 158 ("'158") et 1 129 417 ("'147") et du médicament oméprazole. La licence dont les extraits pertinents sont reproduits ci-après a été accordée le 29 octobre 1991 :

     [TRADUCTION]         
     9.      Si le titulaire de licence manque à une condition de la présente licence, le breveté peut à son gré résilier la licence en donnant un préavis écrit de trente (30) jours par courrier enregistré exposant les circonstances du manquement sur lesquels la résiliation est fondée, et la licence est résiliée automatiquement à l'expiration de ce délai, à moins que le titulaire de la licence ait remédié au manquement décrit dans le délai imparti; toutefois, cette résiliation ne porte pas atteinte au droit du breveté d'exiger un état de compte et le versement des redevances accumulées à la date de la résiliation.         
     10.      Malgré le paragraphe 9, si le titulaire de licence conteste le manquement et avise le breveté par écrit en ce sens dans ledit délai de trente (30) jours, la licence demeurera en vigueur jusqu'à ce que ce différend soit tranché par une cour de justice ou dans le cadre d'une procédure d'arbitrage dont le titulaire de licence et le breveté conviendront à cette fin.         
     ...         
     12.      La présente licence est incessible et le titulaire de la licence ne peut concéder aucune sous-licence.         

     Le 27 novembre 1992, Novopharm et Apotex Inc. ("Apotex") ont conclu une entente ("entente") dont voici les dispositions pertinentes :

     [TRADUCTION]         
     ATTENDU que le gouvernement fédéral a déposé le Projet de loi C-91 qui, s'il était adopté, aurait pour effet d'éliminer l'octroi de licences obligatoires sous le régime de la Loi sur les brevets.         
     ATTENDU que Novopharm et Apotex sont titulaires de différentes licences et ont présenté différentes demandes de licence qui sont menacées par le Projet de loi C-91.         
     ATTENDU que, selon les dates limites qui s'appliqueront lorsque le Projet de loi C-91 sera promulgué, il se peut que les parties aux présentes soient titulaires de licences valables à l'égard de produits relativement auxquels l'autre ne détient pas de licences valables dans des circonstances qui ne peuvent être prévues pour l'instant.         
     ATTENDU que les parties désirent s'assurer qu'elles disposent de licences visant le nombre maximal de produits afin de conserver les avantages qu'elles possèdent par rapport aux autres concurrents.         
     ATTENDU que les parties ont donc convenu qu'elles partageront leurs droits sous licences à l'égard de tout produit pour lequel une seule est titulaire d'une licence utilisable.         
     EN CONSÉQUENCE, compte tenu de ce qui précède et des avantages mutuels ainsi que pour d'autres contreparties valables, les parties aux présentes conviennent de ce qui suit :         
     1.      En tout temps après la date de promulgation du Projet de loi C-91 ou d'un projet de loi qui en découle, dans le cas de tout produit pour lequel une partie (ci-après appelée la "partie autorisée") est titulaire d'une licence utilisable alors que l'autre partie (ci-après appelée la "partie non autorisée") n'en détient pas, la partie autorisée utilisera, à la demande de la partie non autorisée, sa licence au profit de celle-ci de la façon énoncée ci-après.         
     2.      Si la licence est une licence d'importation, la partie autorisée importera les marchandises depuis la source et selon la quantité et les conditions que la partie non autorisée précisera et revendra les marchandises importées à ladite partie non autorisée au coût desdites marchandises ainsi que les redevances exigibles aux termes de la licence.         
     3.      S'il s'agit d'une licence permettant la fabrication au Canada, la partie autorisée conclura avec des fabricants de produits chimiques canadiens les contrats que la partie non autorisée précisera en vue de la fabrication des produits pertinents et lui vendra les produits fabriqués au coût de ceux-ci ainsi que les redevances exigibles aux termes de la licence.         
     4.      Si la partie autorisée a une source d'importation ou qu'elle fabrique les produits aux termes d'une licence de fabrication et qu'il n'est pas possible pour la partie non autorisée de trouver une autre source d'importation ou d'approvisionnement, la partie autorisée fournira les produits à ladite partie non autorisée depuis sa source à un prix correspondant à la juste valeur marchande des produits ainsi que les redevances exigibles aux termes de la licence. Tout désaccord concernant la juste valeur marchande sera tranché dans le cadre d'une procédure d'arbitrage obligatoire.         

     ...

     6.      La partie autorisée se conforme à toutes les conditions de la licence.         
     7.      La partie autorisée n'est pas excusée de l'omission d'exécuter un acte que la partie non autorisée lui demande d'exécuter aux termes des paragraphes 2, 3 ou 4 des présentes en raison de l'existence d'un doute quant à la question de savoir si la licence est en vigueur ou qu'elle permet les actes demandés ou de l'existence, réelle ou possible, d'une action de la part du titulaire de brevet, pourvu que la partie non autorisée s'engage à contester toute action en justice intentée contre la partie autorisée par suite de cet acte et qu'elle l'indemnise des frais de cette action ainsi que des dommages-intérêts en découlant.         
     8.      Pour plus de certitude, les dispositions qui précèdent n'ont pas pour effet de restreindre l'utilisation de la licence et la partie autorisée collabore le plus possible avec la partie non autorisée et se conforme aux directives de celle-ci afin de lui permettre d'utiliser la licence dans la même mesure où elle aurait pu le faire si elle avait détenu elle-même cette licence, pourvu que la partie autorisée soit indemnisée à l'égard de cette utilisation.         

     ...

     11.      La présente entente prend fin le 31 décembre 1994, sauf si elle est prolongée par accord mutuel.         

     ...

     13.      Malgré le paragraphe 11 des présentes, dans le cas de toute licence spécifique à l'égard de laquelle la partie non autorisée a informé la partie autorisée, au plus tard le 31 décembre 1994, de son intention d'utiliser ladite licence, la présente entente demeurera en vigueur jusqu'à l'expiration du dernier brevet visé par ladite licence.         

     L'entente a été conclue en prévision des modifications qui ont été apportées en 1992 à la Loi sur les brevets et qui ont remplacé le régime de l'homologation obligatoire par le régime actuel.

     L'entente ainsi qu'une entente similaire conclue entre Apotex et une autre partie ont été examinées de façon approfondie dans une instance fondée sur le Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité) ("Règlement")1. Ces actions ont été intentées en réponse à des avis d'allégation délivrés par Apotex. Dans trois décisions rendues en 1995, deux différents juges des requêtes ont statué que Novopharm et Apotex avaient conclu une entente d'approvisionnement2. Ces trois décisions ont été portées en appel. Un troisième juge des requêtes a rendu une décision semblable dans l'autre affaire concernant Apotex et une autre partie3.

     Le 1er avril 1996, la Cour d'appel a conclu, dans un jugement majoritaire, que l'entente était une sous-licence qui allait à l'encontre de la clause 12 de la licence4. Deux formations subséquentes de la Cour d'appel en sont arrivées à la même conclusion en adoptant à l'unanimité le raisonnement majoritaire qui avait été suivi dans la première décision5.

     Le 3 avril 1996, deux jours après la première décision de la Cour d'appel, Hassle a remis à Novopharm un avis écrit de sa décision de mettre fin à la licence en raison du manquement de celle-ci à la clause 12. L'avis de Hassle a été donné en application de la clause 9 de la licence.

     Le 11 avril 1996, conformément à la clause 10 de la licence, Novopharm a avisé Hassle qu'elle contestait le manquement à la licence et la résiliation de celle-ci.

     Le 4 juin 1996, Hassle a déposé sa déclaration dans laquelle il a demandé à la Cour de déclarer que la licence est résiliée. Son avis de requête portant jugement sommaire a été déposé le 15 juin 1996. La contestation a été liée en juillet, lorsque Novopharm a immédiatement déposé son affidavit et les documents s'y rapportant en réponse à la requête portant jugement sommaire. Après le contre-interrogatoire des déposants des deux parties, la présente requête a été entendue les 26 et 27 novembre 1996.

     Le 6 février 1997, la Cour suprême du Canada a accordé l'autorisation d'interjeter appel à l'égard des trois décisions de la Cour d'appel6.

     Les arguments de Hassle sont courts. La Cour d'appel a interprété l'entente comme une sous-licence, ce qui constitue une question de droit. Les conditions de l'entente ne sont pas ambiguës et aucune preuve verbale concernant l'intention des parties ne peut être présentée, compte tenu de la règle de l'exclusion de la preuve extrinsèque. Aucune preuve pertinente ne serait présentée dans le cadre d'une instruction. La sous-licence va à l'encontre des conditions de la licence. Les décisions de la Cour d'appel doivent être suivies en l'espèce. En conséquence, selon Hassle, la Cour devrait rendre un jugement déclaratoire portant que la licence est résiliée.

     Novopharm refuse d'admettre que les conclusions que la Cour d'appel a formulées dans l'instance fondée sur le Règlement doivent être suivies en l'espèce7. À son avis, il est nécessaire de tenir une instruction pour entendre des témoins concernant la question de savoir comment l'entente devait être appliquée; selon Novopharm, la présentation de ces témoignages ne serait pas interdite par la règle de l'exclusion de la preuve extrinsèque.

     Novopharm soutient qu'il existe au moins trois autres questions factuelles en litige. Étant donné que l'entente n'a jamais été mise en oeuvre relativement à la licence et aux brevets '158 et '147, en partie en raison des deux ordonnances d'interdiction rendues contre Novopharm et Apotex8, il ne peut y avoir manquement à la clause 12 de la licence. En deuxième lieu, la clause 11 de l'entente stipule une date d'expiration, soit le 31 décembre 1994, et la clause 13 énonce que l'entente peut être prolongée. Une des questions à trancher est celle de savoir si la lettre qu'Apotex a envoyée à Novopharm le 27 avril 1993 a eu pour effet de prolonger l'entente au-delà du 31 décembre 1994. De plus, le silence de Hassle en ce qui a trait à la fourniture de matières premières par Novopharm à Apotex constitue un acquiescement, comme question de fait, et une fin de non-recevoir, comme question de droit. De l'avis de Novopharm, Hassle était au courant de l'"entente mutuelle" qu'elle avait conclue avec Apotex en avril 1993 et de l'existence de l'entente écrite en octobre 1993. Les conditions de l'entente ont été divulguées en février 1995. Ce n'est qu'après la décision que la Cour d'appel a rendue le 1er avril 1996 que Hassle a pris des mesures pour résilier la licence.

     Les parties ne s'entendent pas non plus sur la portée de leurs lettres respectives des 3 et 11 avril 1996 en ce qui a trait à la résiliation de la licence. Cette correspondance a été échangée en application des clauses 9 et 10 de la licence.

     Dans l'arrêt Feoso Oil Ltd. c. Sarla (Le)9, le juge Stone a reconnu que les Règles de la Cour fédérale sur les jugements sommaires "doivent être interprétées dans le contexte qui est le leur"10, mais qu'il est possible de se fonder sur les décisions que les tribunaux supérieurs provinciaux ont rendues pour interpréter leurs règles correspondantes. Le juge a ensuite cité les commentaires que le juge en chef adjoint Morden a formulés dans l'arrêt Irving Ungerman Ltd. c. Galanis11 :

     [TRADUCTION] Le droit d'une partie à un litige de se faire entendre, au sens de la tenue d'une instruction, peut avoir été considéré traditionnellement comme l'élément essentiel de la justice procédurale, et le fait d'en priver une partie, comme la marque d'une injustice procédurale. Il se peut toutefois que dans des procédures ne comportant pas de véritables questions litigieuses qui commandent une instruction, la tenue d'un procès soit inutile, et représente donc un manquement à la justice procédurale. Dans ce type de procédure, la partie qui a gain de cause a, à la fois, subi un retard inutile avant d'obtenir justice sur le fond et dû engager des frais additionnels. La règle 20 est un mécanisme qui permet d'éviter pareil manquement à la justice procédurale.         
     Il serait pratique que l'expression "question litigieuse" puisse être exprimée sous forme d'une formule précise facile d'application. Toutefois, compte tenu des façons très variées et imprévisibles dont des questions peuvent surgir sous le régime de la règle 20, il n'est pas possible - et l'expérience relative à l'alinéa 56c ) aux États-Unis a démontré qu'il peut être nuisible - de donner de l'éclat au libellé de la règle à l'aide d'expressions qui n'en rendent pas bien le sens. (Voir Wright, Miller et Kane, supra, vol. 10A, pp. 97 à 107 et 176 et 177.)         
     On peut sans risque affirmer que la question ne doit pas être fallacieuse et, plus précisément, que les termes "à instruire" aident à l'interprétation de cette expression. Si la preuve produite dans le cadre d'une requête sollicitant un jugement sommaire convainc la Cour qu'il n'existe pas de questions de fait dont la résolution exige une instruction, les conditions posées par la règle sont remplies. Il doit être clair qu'une instruction est inutile. C'est à la partie requérante qu'il incombe de convaincre le tribunal que sa requête satisfait aux exigences de la règle . De plus, il est important de se rappeler que le rôle du tribunal n'est pas de résoudre une question de fait, mais de déterminer s'il en existe une.         

     (non souligné dans l'original)

     Dans l'arrêt Patrick c. Canada12, la demanderesse a accepté ce qu'elle croyait être la confirmation verbale d'un contrat d'emploi de trois ans. Elle a été renvoyée après dix-neuf mois conformément aux conditions du contrat écrit. Le juge Strayer, alors juge de la Section de première instance, a rejeté la requête du défendeur en vue d'obtenir un jugement sommaire pour les motifs suivants :

     Je suis tout à fait conscient de l'avantage qu'il y a à régler sommairement les affaires où les faits et le droit applicable ne sont pas contestés et où les différends sont susceptibles d'être réglés         

     ...

     Je n'estime pas, cependant, disposer en l'occurrence d'éléments suffisants de preuve pour trancher deux questions essentielles définies ainsi par la demanderesse :         
         [TRADUCTION]                 
         a)      En quoi consiste le contrat de travail de la demanderesse - des discussions de vive voix qui ont eu lieu avec M. Husli avant que la demanderesse n'arrive en Allemagne, ou du contrat écrit signé par la suite?                 
         b)      La défenderesse peut-elle exciper des politiques du personnel incorporées par renvoi au contrat de travail?                 
     Voilà, d'après moi, les essentielles questions de droit et de fait qui doivent être tranchées.         
     À l'étape où nous en sommes, je ne suis pas disposé à admettre que la règle de la preuve extrinsèque nous porte nécessairement à exclure le témoignage de la demanderesse quant à la manière dont elle avait compris ce qui était prévu. D'après moi, le juge de première instance peut très bien, en l'espèce, vouloir prendre en compte certains facteurs et se demander par exemple si, lors de la signature du contrat, les deux parties se trouvaient sur un pied d'égalité pour négocier, s'il s'est agi d'un contrat type et s'il y a vraiment lieu de supposer que la demanderesse connaissait la teneur de la politique en matière de personnel et comprenait les dispositions visant la cessation des contrats. Je relève que, à l'époque contemporaine, la science du droit s'est intéressée à ce genre de situation où un défendeur cherche à se prévaloir d'un contrat que le demandeur prétend ne pas avoir en fait compris13.         

     Dans la présente affaire, il appartient à Hassle de démontrer que la tenue d'une instruction n'est pas nécessaire. Essentiellement, Hassle établit un lien direct entre la conclusion que la Cour d'appel a tirée le 1er avril 1996 et selon laquelle l'entente est une sous-licence allant à l'encontre de la licence et la résiliation de la licence en application de la clause 9. À mon avis, la situation n'est pas si simple. Pour reprendre les propos que le juge Strayer a formulés dans l'arrêt Patrick, précité, il existe des "questions de droit et de fait [essentielles] qui doivent être tranchées".

     Dans la première décision que la Cour d'appel a rendue au sujet de l'entente, le juge MacGuigan, qui s'exprimait au nom de la majorité, a reconnu que, d'un point de vue subjectif, les parties n'avaient pas l'intention de créer une sous-licence :

     ... c'est la réalité et non la forme qui doit prévaloir, et la réalité me semble être qu'une sous-licence non autorisée a été créée -- sans le vouloir, je l'admets, puisque les parties souhaitaient ardemment éviter d'enfreindre l'interdiction contenue dans la licence d'octroyer une sous-licence. Néanmoins, tel était l'effet juridique de ce qu'elles ont fait. À mon avis, l'accord n'était pas tout à fait un subterfuge au sens habituel du terme, en ce que leur intention subjective, que révèle l'accord contredit l'intention objective du document. Néanmoins, l'accord a été conclu en se fondant sur une conception juridique erronée de ce que les parties pouvaient faire sans ennuis14.         

En plus de leur propre point de vue subjectif, les parties pouvaient également se fonder sur les conclusions que quatre juges de première instance ont formulées et selon lesquelles leur entente était une entente d'approvisionnement. C'est seulement lors de la décision que la Cour d'appel a rendue le 1er avril 1996 que l'entente est devenue, en droit, une sous-licence.

     Dans les circonstances, je ne suis pas disposé à conclure, sur la foi de la preuve et du matériel dont je suis saisi, que la licence est résiliée. Il existe des questions non tranchées qui peuvent toucher le résultat de la présente action. La preuve concernant l'intention des parties en ce qui a trait à la mise en oeuvre de l'entente et leur conduite subséquente et celle de Hassle touchera-t-elle l'interprétation de la licence quant à sa résiliation15? La lettre du 27 avril 1993 que la société Apotex a envoyée à Novopharm a-t-elle pour effet de prolonger l'entente au-delà du 31 décembre 1994, conformément à la clause 13, même après les différentes décisions rendues par les tribunaux, ou l'entente est-elle maintenant résiliée aux termes de la clause 11? L'ordonnance d'interdiction rendue par consentement le 3 mai 199616, trente jours après l'avis de résiliation de Hassle en date du 3 avril 1996, touche-t-elle d'une façon ou d'une autre la question de la rectification dont il est fait mention à la clause 9 de la licence? À mon avis, ces questions, et il en existe peut-être d'autres, constituent des questions de fait et de droit véritables qui ne peuvent être tranchées à ce stade de l'instance. En conséquence, la requête visant à obtenir un jugement sommaire sera rejetée.

     Les présents motifs sont fondés sur la présomption selon laquelle l'entente est une sous-licence allant à l'encontre de la licence, comme l'a dit la Cour d'appel. Néanmoins, j'en suis arrivé à la conclusion qu'il existait des questions sérieuses à trancher avant qu'un tribunal puisse déterminer si la licence est résiliée. Dans les circonstances, je n'ai pas examiné les arguments de Novopharm selon lesquels les décisions de la Cour d'appel17 ont force obligatoire en l'espèce.

     Dans la même veine, la question de la compétence de la Cour d'appel fédérale en ce qui a trait à la résiliation d'une licence obligatoire n'est pas encore réglée. L'avocat de Hassle a présenté des décisions pertinentes sur ce point18. Cependant, en raison de la position que Novopharm a adoptée dans une autre instance, son avocat a préféré s'abstenir de formuler des arguments sur ce point au cours de l'audition de la présente requête. À mon avis, il est préférable que la question de la compétence soit tranchée une fois que des observations complètes des deux parties seront reçues.

     Les dépens seront adjugés à la défenderesse quelle que soit l'issue de la cause.

                             Allan Lutfy

                             Juge

Ottawa (Ontario)

Le 24 février 1997

Traduction certifiée conforme             

                             Martine Guay, LL.L.

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

     AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER

No DU GREFFE :              T-1313-96

INTITULÉ DE LA CAUSE :          Aktiebolaget Hassle c. Novopharm Limited

LIEU DE L'AUDIENCE :          Toronto (Ontario)

DATES DE L'AUDIENCE :          26 et 27 novembre 1996

MOTIFS DE L'ORDONNANCE DU JUGE LUTFY

EN DATE DU :              24 février 1997

ONT COMPARU :

Me James Kokonis              POUR LE DEMANDEUR

Me Sheldon Hamilton

Me Donald Plumley              POUR LA DÉFENDERESSE

Me Mark Mitchell

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :

Smart & Biggar              POUR LE DEMANDEUR

Toronto (Ontario)

Ridout & Maybee              POUR LA DÉFENDERESSE

Toronto (Ontario)


__________________

     1      DORS/93-133.

     2      Eli Lilly and Co. c. Novopharm Ltd. (1995), 60 C.P.R. (3d) 181; Eli Lilly and Co. c. Apotex Inc. (1995), 60 C.P.R. (3d) 206 et Merck Frosst Canada Inc. c. Canada (ministre de la Santé nationale et du Bien-être social) (1995), 67 C.P.R. (3d).

     3      Janssen Pharmaceutica Inc. c. Apotex Inc. (1995), 63 C.P.R. (3d) 501. L'appel interjeté à l'égard de cette décision sous le numéro A-636-95 est en suspens.

     4      Eli Lilly and Co. c. Apotex Inc. (1996), 66 C.P.R. (3d) 329 (une demande visant à obtenir l'autorisation d'interjeter appel devant la Cour suprême du Canada a été déposée le 31 mai 1996 sous le numéro 25348).

     5      Eli Lilly and Co. c. Novopharm Ltd. (1996), 67 C.P.R. (3d) 377 (demande d'autorisation d'interjeter appel devant la Cour suprême du Canada déposée le 24 juin 1996 sous le numéro 25402) et Merck Frosst Canada Inc. c. Canada (ministre de la Santé nationale et du Bien-être social (1996), 67 C.P.R. (3d) 455 (demande d'autorisation d'interjeter appel devant la Cour suprême du Canada déposée le 8 juillet 1996 sous le numéro 25419).

     6      Ibid. et supra, note 4.

     7      Novopharm se fonde sur les arrêts David Bull Laboratories (Canada) Inc. c. Pharmacia Inc. , [1995] 1 C.F. 588 (CAF), aux pages 598 à 600, et Merck Frosst Canada Inc. c. Canada (ministre de la Santé nationale et du Bien-être social) (1994), 55 C.P.R. (3d) 302 (CAF).

     8      AB Hassle c. Canada (ministre de la Santé nationale et du Bien-être social) (1995), 62 C.P.R. (3d) 3 et AB Hassle et Astra Pharma Inc. c. Canada (ministre de la Santé nationale et du Bien-être social), ordonnance par consentement rendue le 3 mai 1996 dans le dossier T-1446-93 (avis d'appel déposé le 13 mai 1996 sous le numéro de greffe A-398-96).

     9      [1995] 3 C.F. 68 (CAF).

     10      Le juge Stone a ainsi repris les propos que Madame le juge Reed avait formulés dans l'arrêt Marine Atlantic Inc. c. Blyth (1994), 77 F.T.R. 97, p. 103.

     11      (1991), 4 O.R. (3d) 545 (C.A.), p. 550-551.

     12      [1994] F.C.J. no 1216.

     13      Ibid., aux paragraphes 6 à 8.

     14      Eli Lilly and Co. c. Apotex, supra, note 4, p. 338.

     15      Une distinction est établie ici entre la preuve qui peut être admissible aux fins de l'interprétation de la licence quant à sa résiliation et l'application de la règle de la preuve extrinsèque à l'interprétation de l'entente, comme l'a dit le juge MacGuigan dans l'arrêt Eli Lilly and Co. c. Apotex Inc. , supra, note 4, p. 335.

     16      AB Hassle et Astra Pharma Inc. c. Canada ((ministre de la Santé nationale et du Bien-être social), précité, note 8.

     17      Supra, notes 4 et 5.

     18      Eli Lilly and Co. c. Novopharm Ltd. (1994), 53 C.P.R. (3d) 428 (D.G. Ont.); Eli Lilly and Co. c. Novopharm Ltd. (1994), 54 C.P.R. (3d) 402 (C.F. 1re inst.); Imperial Chemical Industries P.L.C. c. Apotex Inc. (1994), 31 C.P.R. (3d) 517, p. 523 (C.F. 1re inst.); Aktiebolaget Hassle c. Apotex Inc., [1988] 1 C.F. 360; 17 C.P.R. (3d) 349 (C.F. 1re inst.); Eli Lilly & Co. c. Novopharm Ltd., supra, note 2, p. 203.

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