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Date : 20040227

Dossier : IMM-655-03

Référence : 2004 CF 293

OTTAWA (Ontario), le 27 février 2004

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE MICHAEL KELEN

ENTRE :

                                                   ALWYN LLOYD TOWNSEND

                                                                                                                                          demandeur

                                                                          - et -

                                            LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

                                                       ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                           défendeur

                                MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

[1]                Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire concernant la décision de la Section d'appel de l'immigration (la Section d'appel), en date du 8 janvier 2003, qui a rejeté la requête du demandeur en vue de rouvrir l'appel formé contre son expulsion parce que le paragraphe 64(1) de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (LIPR) fait obstacle à l'appel.


LES FAITS

[2]                Le demandeur est un citoyen jamaïcain de 41 ans qui a obtenu le statut de résident permanent au Canada. Il a fait l'objet d'une mesure d'expulsion le 25 novembre 1999, en raison de condamnations criminelles au Canada. Le 18 février 2000, le ministre s'est dit d'avis que le demandeur constituait « un danger pour le public » au Canada aux termes du paragraphe 70(5) de l'ancienne Loi sur l'immigration, L.R.C. 1985, ch. I-2 (l'ancienne Loi), qui se lisait comme suit :


70(5) Ne peuvent faire appel devant la section d'appel les personnes, visées au paragraphe (1) ou aux alinéas (2)a) ou b), qui, selon la décision d'un arbitre :

70(5) No appeal may be made to the Appeal Division by a person described in subsection (1) or paragraph (2)(a) or (b) against whom a deportation order or conditional deportation order is made where the Minister is of the opinion that the person constitutes a danger to the public in Canada and the person has been determined by an adjudicator to be

a)     appartiennent à l'une des catégories non admissibles visées aux alinéas 19(1)c), c.1), c.2) ou d) et, selon le ministre, constituent un danger pour le public au Canada;

(a)    a member of an inadmissible class described in paragraph 19(1)(c), (c.1), (c.2) or (d);

b)     relèvent du cas visé à l'alinéa 27(1)a.1) et, selon le ministre, constituent un danger pour le public au Canada;

(b)    a person described in paragraph 27(1)(a.1); or

c)      relèvent, pour toute infraction punissable aux termes d'une loi fédérale d'un emprisonnement maximal égal ou supérieur à dix ans, du cas visé à l'alinéa 27(1)d) et, selon le ministre, constituent un danger pour le public au Canada.

(c)    a person described in paragraph 27(1)(d) who has been convicted of an offence under any Act of Parliament for which a term of imprisonment of ten years or more may be imposed.


[3]                Le demandeur en a appelé de la mesure d'expulsion à la Section d'appel qui, le 14 mars 2000, a rejeté son appel parce que le paragraphe 70(5) stipule qu'aucun appel ne peut être fait à la Section d'appel par une personne contre qui un « avis de danger » a été rendu.

[4]                Le 27 mars 2003, la présente Cour a rejeté la demande de contrôle judiciaire du demandeur et noté que son casier judiciaire comprenait au moins 26 condamnations. Après l'entrée en vigueur de la LIPR le 28 juin 2002, le demandeur a déposé une requête afin que son appel soit réentendu par la Section d'appel parce que le paragraphe 64(2) de la LIPR aurait changé le seuil applicable aux cas de « grande criminalité » .

LA DÉCISION DE LA SECTION D'APPEL

[5]                La Section d'appel a décidé que le demandeur n'a aucun droit d'appel du fait de l'application du paragraphe 64(1) de la LIPR et du paragraphe 326(2) du Règlement sur l'immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227 (le Règlement). La Section d'appel a statué que le paragraphe 326(2) du Règlement stipule que tous les « avis de danger » délivrés en vertu de l'ancienne Loi constituent des cas de « grande criminalité » pour les fins du paragraphe 64(1) de la LIPR, de sorte que le demandeur n'a aucun droit d'appel. Le paragraphe 64(1) de la LIPR est rédigé dans les termes suivants :



64. (1) L'appel ne peut être interjeté par le résident permanent ou l'étranger qui est interdit de territoire pour raison de sécurité ou pour atteinte aux droits humains ou internationaux, grande criminalité ou criminalité organisée, ni par dans le cas de l'étranger, son répondant.

64. (1) No appeal may be made to the Immigration Appeal Division by a foreign national or their sponsor or by a permanent resident if the foreign national or permanent resident has been found to be inadmissible on grounds of security, violating human or international rights, serious criminality or organized criminality.


[6]                Les extraits pertinents de la décision de la Section d'appel sont les suivants :

[traduction]

[16]     En toute déférence, je ne souscris ni à l'opinion du défendeur ni à celle de l'appelant pour ce qui concerne le paragraphe 326(2) du Règlement sur l'immigration et la protection des réfugiés. À mon avis, tous les avis de danger délivrés en vertu du paragraphe 70(5) de l'ancienne Loi tombent sous le coup du paragraphe 326(2) du Règlement. Cette disposition ne fait pas de distinction entre les peines d'emprisonnement pouvant être infligées à un appelant ou entre tout autre facteur, et en fait, elle n'établit pas non plus d'autres différences à cet égard. À mon avis, elle englobe tout simplement tous les cas de personnes qui ont reçu un avis ministériel de danger avant le 28 juin 2002, c'est-à-dire la date d'entrée en vigueur de la LIPR. Par conséquent, le fait que l'appelant ait fait l'objet d'une peine d'emprisonnement de moins de deux ans n'a absolument aucun effet sur l'application du paragraphe 326(2) du Règlement sur l'immigration et la protection des réfugiés.

[17]     J'estime que l'avis ministériel de danger délivré en vertu du paragraphe 70(5) de l'ancienne Loi a été versé au dossier de l'appelant. Le paragraphe 326(2) du Règlement est rédigé dans les termes suivants :

326(2) La personne visée par le paragraphe 70(5) ou l'alinéa 77(3.01)b) de l'ancienne loi à l'entrée en vigueur du présent article est visée par le paragraphe 64(1) de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés.

Le paragraphe 326(2) du Règlement stipule que le paragraphe 64(1) de la LIPR s'applique à l'appel de l'appelant. Contrairement aux articles 196 et 197, qui font référence à l'article 64 de la LIPR, qui incluent à la fois les paragraphes 69(1) et 64(2), la référence qui se trouve au paragraphe 326(2) du Règlement se limite au « paragraphe 64(1) » . Par conséquent, la condition de deux ans énoncée au paragraphe 64(2) ne s'applique pas en l'espèce.

[18]     Comme les dossiers de la SAI indiquent que l'avis ministériel de danger a été signé avant le 28 juin 2002, et qu'il visait le demandeur à cette date, j'estime que l'appelant n'a pas de droit d'appel à la Section d'appel en raison de l'application du paragraphe 326(2) du Règlement sur l'immigration et la protection des réfugiés et le paragraphe 64(1) de la LIPR. Comme le demandeur n'a aucun droit d'appel, la Section d'appel ne peut entendre sa demande visant la réouverture de son appel.


[19]     La demande de l'appelant est rejetée et le dossier concernant cette affaire est donc clos.

[7]                Je note que la Section d'appel fait référence aux paragraphes 69(1) et 64(2) comme étant inclus à l'article 64 de la LIPR. L'inclusion du paragraphe 69(1) est manifestement une erreur, et on devrait lire plutôt le paragraphe 64(1).

LES QUESTIONS EN LITIGE

[8]                La seule question en litige soulevée dans la présente demande est de savoir si un « avis de danger » délivré à l'encontre du demandeur en vertu du paragraphe 70(5) de l'ancienne Loi fait obstacle à un appel à la Section d'appel, du fait de l'application du paragraphe 64(1) de la LIPR et du paragraphe 326(2) du Règlement. Le demandeur soulève cette question parce que le paragraphe 64(2) de la LIPR définit l'expression « grande criminalité » comme étant une infraction punie par un emprisonnement d'au moins deux ans, alors que toutes les peines d'emprisonnement qui ont été infligées au demandeur étaient inférieures à deux ans. Le paragraphe 64(2) est rédigé dans les termes suivants :


(2) L'interdiction de territoire pour grande criminalité vise l'infraction punie au Canada par un emprisonnement d'au moins deux ans.

(2) For the purpose of subsection (1), serious criminality must be with respect to a crime that was punished in Canada by a term of imprisonment of at least two years.



Le paragraphe 326(2) du Règlement se lit comme suit :


326 (2) La personne visée par le paragraphe 70(5) ou l'alinéa 77(3.01)b) de l'ancienne loi à l'entrée en vigueur du présent article est visée par le paragraphe 64(1) de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés.

326 (2) A person in respect of whom subsection 70(5) or paragraph 77(3.01)(b) of the former Act applied on the coming into force of this section is a person in respect of whom subsection 64(1) of the Immigration and Refugee Protection Act applies.


Puisque qu'il s'agit d'une pure question de droit, la norme de contrôle applicable est celle de la décision juste pour ce qui concerne la décision de la Section d'appel de ne pas réentendre l'appel du demandeur.

Les prétentions du demandeur

[9]                Le demandeur soutient que la LIPR a aboli les « avis de danger » et les a remplacés par un régime de « grande criminalité » . Il prétend que le paragraphe 64(1) de la LIPR n'empêche pas la Section d'appel de réentendre son appel parce qu'il n'a jamais été condamné à un emprisonnement de deux ans ou plus. Selon lui, le paragraphe 64(1) doit être lu de concert avec le paragraphe 64(2), ce qui établit une exemption pour les personnes qui n'ont pas fait l'objet d'un emprisonnement de moins de deux ans. Pour cette raison, le demandeur soutient qu'il n'est pas pertinent que le paragraphe 326(2) du Règlement ne fasse référence qu'au paragraphe 64(1) de la LIPR, alors que les articles 196 et 197, qui sont les dispositions transitoires pertinentes de la LIPR, font référence à l'article 64 dans son entier.


Les prétentions du défendeur

[10]            Le défendeur soutient pour sa part que le législateur s'est assuré qu'un « avis de danger » délivré en vertu du paragraphe 70(5) de l'ancienne Loi continuerait d'empêcher les appels à la Section d'appel au sujet des mesures d'expulsion, en adoptant les paragraphes 64(1) de la LIPR et 326(2) du Règlement. Le défendeur prétend que la présente Cour devrait interpréter la référence précise au paragraphe 64(1) du paragraphe 326(2) du Règlement, ainsi que l'omission du paragraphe 64(2), comme signifiant que le législateur avait l'intention de faire en sorte que le paragraphe 64(1) empêche les appels à la Section d'appel, sans tenir compte de la définition de l'expression « grande criminalité » donnée au paragraphe 64(2). Le défendeur soutient que le paragraphe 326(2) n'est nullement ambigu et que son objectif est de préserver la validité des « avis de danger » délivrés en vertu de l'ancienne Loi. Le défendeur affirme que la définition de « grande criminalité » donnée au paragraphe 64(2) ne s'applique qu'aux nouveaux cas de criminalité qui sont visés par la LIPR.

L'article 71 de la LIPR


[11]            À l'audience, aucune des parties n'a formulé d'observations concernant la question de savoir si l'article 71 de la LIPR restreint maintenant la compétence en « equity » de la Section d'appel qui lui permettrait de rouvrir l'appel, et le demandeur n'a pas allégué que la Section d'appel avait contrevenu à un principe de justice naturelle au cours de l'audition initiale de son appel concernant la mesure d'expulsion. L'article 71 de la LIPR est rédigé dans les termes suivants :


71. L'étranger qui n'a pas quitté le Canada à la suite de la mesure de renvoi peut demander la réouverture de l'appel sur preuve de manquement à un principe de justice naturelle.

71. The Immigration Appeal Division, on application by a foreign national who has not left Canada under a removal order, may reopen an appeal if it is satisfied that it failed to observe a principle of natural justice.


Dans sa décision, la Section d'appel n'a pas du tout examiné l'effet de l'article 71, et s'est contentée d'analyser l'effet de l'article 64(1) de la LIPR et du paragraphe 326(2) du Règlement.

[12]            À l'invitation de la Cour, les parties ont fourni après l'audition des observations concernant l'effet que peut avoir l'article 71 sur la compétence de la Section d'appel de rouvrir les appels. Le demandeur admet qu'il est un « étranger » pour les fins de l'article 71 de la LIPR, et que la Section d'appel a constamment statué que l'article 71 de la LIPR exclut toutes les requêtes en réouverture d'appel, sauf lorsque le motif invoqué est un manquement à la justice naturelle. Toutefois, le demandeur soutient que le sens ordinaire du paragraphe 326(2) du Règlement n'indique pas que les personnes qui ont fait l'objet d'un « avis de danger » continuent d'être empêchées de se pourvoir en appel devant la Section d'appel. Il prétend de plus que le paragraphe 326(2), qui est subordonné à la LIPR, ne devrait pas rendre inopérant le paragraphe 64(2) de la LIPR.


[13]            Le défendeur prétend que le paragraphe 326(2) du Règlement règle définitivement la question de savoir si l'appel du demandeur peut ou non être rouvert. Le défendeur soutient que la Section d'appel ne devrait pas rouvrir l'appel en vertu de l'article 71 de la LIPR, et qu'il n'est pas nécessaire qu'elle le fasse, pour entendre et décider de la question préliminaire de compétence posée par le paragraphe 326(2) du Règlement.

ANALYSE

[14]            Dans la décision Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration c. Atwal, 2004 CF 7 (CF 1re inst.), le juge Pinard dit ceci au paragraphe 15 :

[traduction]

Pour ce qui est de l'article 64 de la LIPR, le législateur a cherché à établir une norme objective de criminalité au-delà de laquelle un résident permanent perd son droit d'appel [...]

La personne qui constitue un « danger pour le public » conformément au paragraphe 70(5) est cette norme objective qui existait sous l'ancienne Loi sur l'immigration.

[15]            En vertu du paragraphe 326(2) du Règlement, une personne qui fait l'objet d'un « avis de danger » en vertu de l'ancienne Loi :

[...] est visée par le paragraphe 64(1) de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés.

Et le paragraphe 64(1) stipule qu'aucun appel ne peut être fait à la Section d'appel. Le paragraphe stipule également qu'il s'applique à une personne qui est interdite de territoire pour raison de « grande criminalité » . Le demandeur soutient que cela est ambigu parce que le paragraphe 64(2) se lit comme suit :

L'interdiction de territoire pour grande criminalité vise l'infraction punie au Canada par un emprisonnement d'au moins deux ans.


Puisque le demandeur a fait l'objet de peines d'emprisonnement de moins de deux ans, il prétend que le paragraphe 64(1) ne s'applique pas à son cas.

[16]            La Cour n'accepte pas ce point de vue. Si, pour les fins de la transition, le paragraphe 64(2) devait s'appliquer, le gouverneur en conseil aurait fait référence aux deux paragraphes ou du moins il aurait fait référence à l'article 64 dans sa totalité. Cela a été fait pour les autres dispositions transitoires de la LIPR, notamment les articles 196 et 197.

[17]            Je suis d'avis que le paragraphe 326(2) du Règlement doit signifier qu'un « avis de danger » délivré en vertu de l'ancienne Loi continue, pour les fins de la LIPR, d'empêcher les appels. Si le paragraphe 326(2) n'avait pas été adopté pour la période de transition, alors les « avis de danger » délivrés en vertu de l'ancienne Loi n'auraient plus aucune utilité. Par conséquent, le gouverneur en conseil avait l'intention de faire en sorte que la norme objective de criminalité en vertu de l'ancienne Loi, qui était le « danger pour le public » , continue d'avoir pour effet d'empêcher un appel à la Section d'appel après l'entrée en vigueur de la nouvelle Loi le 28 juin 2002. Le paragraphe 326(2) a prolongé la durée de validité de l' « avis de danger » .

[18]            Mon opinion est renforcée par la Partie 20, Division 3 du Résumé de l'étude d'impact de la réglementation (REIR) traitant du règlement transitoire dans les termes suivants :


Ces dispositions transitoires :

[...]

- garantissent que sont toujours considérées comme un danger pour le public les personnes que le ministre a considérées comme telles sous le régime de la Loi actuelle, dans le contexte de la détermination de la recevabilité des demandes d'asile, de la restriction des droits d'appel, ou du renvoi des réfugiés au sens de la Convention; Ne pas maintenir les décisions prises en application de la Loi actuelle reviendrait à annuler toutes celles qui s'appliqueraient lors de l'entrée en vigueur de la nouvelle Loi. Il faudrait ainsi prendre de nouveau les décisions concernant, entre autres, l'interdiction de territoire, de même que les décisions du ministre concernant les personnes présentant un danger pour le public (dans le contexte de l'irrecevabilité des demandes d'asile, de la restriction des droits d'appel et du renvoi des réfugiés au sens de la Convention). Ce processus entraînerait des dépenses considérables et nuirait à l'intégrité des programmes d'immigration et de protection des réfugiés. L'incertitude qui en découlerait exposerait en outre le Gouvernement à faire l'objet de poursuites, ce que permettra d'éviter l'adoption de dispositions transitoires.

Bien que le REIR n'ait aucune force obligatoire, il peut être considéré comme un commentaire pertinent.


[19]            Puisque le demandeur a un casier judiciaire qui se compose d'au moins 26 condamnations, la Cour ne peut présumer que le législateur avait l'intention de faire en sorte qu'une personne qui a déjà été considérée comme un « danger pour le public » , et qui était empêchée de faire appel contre la mesure d'expulsion prise contre elle, ait un nouveau droit d'appel en vertu de la LIPR dans les cas où chaque peine d'emprisonnement serait inférieure à deux ans. Par conséquent, je ne suis pas persuadé que c'est par accident ou par omission que le gouverneur en conseil ne fait référence qu'au paragraphe 64(1), et non pas au paragraphe 64(2). S'il en était autrement, l' « avis de danger » serait théorique en ce sens qu'il pourrait être réexaminé pour déterminer si une personne qui, de l'avis du ministre, constituait un « danger pour le public » était toujours un grand criminel aux termes de la nouvelle Loi. Les dispositions transitoires font en sorte que la Section d'appel n'a pas à chercher au-delà de l' « avis de danger » en appliquant le paragraphe 64(2) aux circonstances. Pour cette raison, la demande doit être rejetée.

QUESTIONS ADDITIONNELLES

[20]            La question de savoir si l'article 71 de la LIPR restreint la compétence en « equity » de la Section d'appel en vue de lui permettre de rouvrir une audience n'est pas pertinente. En vertu de l'ancienne Loi sur l'immigration, la Section d'appel n'avait aucune compétence en « equity » lui permettant de rouvrir un appel quand une personne faisait l'objet d'un « avis de danger » . Cette situation n'a pas changé avec l'adoption de la LIPR.

[21]            La question que j'ai soulevée à l'audience est de savoir si la Section d'appel avait compétence pour examiner la requête visant à rouvrir l'appel puisque cette requête ne comportait pas d'allégation indiquant qu'il y avait eu manquement à un principe de justice naturelle, comme l'exige l'article 71 de la LIPR. Les deux parties ont convaincu la Cour que, en l'espèce, la Section d'appel n'a pas à examiner cette question avant de se prononcer sur la question préliminaire de compétence que pose le paragraphe 326(2) du Règlement.


QUESTIONS CERTIFIÉES

[22]            Les parties ont proposé les trois questions suivantes aux fins de la certification concernant l'appel :

1.         Si une personne a été reconnue coupable d'un crime punissable au Canada d'un emprisonnement de moins de deux ans, et qu'elle constitue un « danger pour le public » en vertu du paragraphe 70(5) de l'ancienne Loi sur l'immigration, de sorte que cette personne n'avait pas de droit d'appel devant la Section d'appel en vertu de l'ancienne Loi, le paragraphe 326(2) du Règlement sur l'immigration et la protection des réfugiés, qui fait référence au paragraphe 64(1) de la LIPR mais non au paragraphe 64(2) de cette même Loi, fait-il obstacle à un appel devant la Section d'appel?

2.         La Section d'appel a-t-elle la compétence de rouvrir un appel pour des motifs d' « equity » ou l'article 71 de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés codifie-t-il ce domaine concernant les requêtes en réouverture?

3.         La Section d'appel doit-elle rouvrir un appel aux termes de l'article 71 de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés avant d'examiner, aux termes du paragraphe 326(2) du Règlement sur l'immigration et la protection des réfugiés, si un demandeur ne peut en appeler d'une mesure d'expulsion?

[23]            La Cour ne croit pas que les deuxième et troisième questions doivent être certifiées. La deuxième question ne réglerait pas cet appel parce que le demandeur a fait l'objet d'un « avis de danger » , et que la Section d'appel n'a jamais eu de compétence en « equity » pour rouvrir un appel dans une telle situation.

[24]            La troisième question est une question de procédure. Ce n'est pas une question grave de portée générale qui justifie la certification. La question de savoir si la Section d'appel doit d'abord rouvrir un appel pour décider d'une question de compétence constitue une question de procédure qui relève de son pouvoir discrétionnaire.

[25]            Par conséquent, la Cour certifiera la première question, même si elle est d'avis que l'intention de la Loi est claire, c'est-à-dire que les « avis de danger » délivrés en vertu de l'ancienne Loi sur l'immigration doivent avoir la même force et le même effet en vertu de la LIPR.

ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE CE QUI SUIT :

1.         La demande de contrôle judiciaire est rejetée, et

2.                   La question suivante est certifiée :


Si une personne a été reconnue coupable d'un crime punissable au Canada d'un emprisonnement de moins de deux ans, et qu'elle constitue un « danger pour le public » en vertu du paragraphe 70(5) de l'ancienne Loi sur l'immigration, de sorte que cette personne n'avait pas de droit d'appel devant la Section d'appel en vertu de l'ancienne Loi, le paragraphe 326(2) du Règlement sur l'immigration et la protection des réfugiés, qui fait référence au paragraphe 64(1) de la LIPR mais non au paragraphe 64(2) de cette même Loi, fait-il obstacle à un appel devant la Section d'appel?

                                                                                                                           _ Michael A. Kelen _              

                                                                                                                                                     Juge                           

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.


COUR FÉDÉRALE

Avocats inscrits au dossier

DOSSIER :                                                           IMM-655-03

INTITULÉ :                                                          ALWYN LLOYD TOWNSEND c. MCI

DATE DE L'AUDIENCE :                                  le 21 janvier 2004

LIEU DE L'AUDIENCE :                                    Toronto (Ontario)

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                                          LE JUGE KELEN

DATE DES MOTIFS :                                         le 27 février 2004

COMPARUTIONS :

Michael Crane                                       Pour le demandeur

Ann-Margaret Oberst                                              Pour le défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Michael Crane                                       Pour le demandeur

Toronto (Ontario)

M5H 1L3

Morris Rosenberg                                                    Pour le défendeur

Sous-procureur général du Canada


                         COUR FÉDÉRALE

                                                          Date : 20040227

                                                 Dossier : IMM-655-03

ENTRE :

ALWYN LLOYD TOWNSEND

demandeur

- et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

                                                                                

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE

                                                                                

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