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Date : 20010917

Dossier : T-677-95

Référence neutre : 2001 CFPI 1024

ENTRE :

                                   BOSTON PIZZA INTERNATIONAL INC.

                                                                                                                 demanderesse

                                                               - et -

                                               BOSTON CHICKEN INC.

                                                                                                                  défenderesse

                                           MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE NADON

[1]                 Il s'agit d'une demande visant la radiation des marques de commerce BOSTON CHICKEN, enregistrée sous le n ° LMC 398700 et BOSTON CHICKEN Design, enregistrée sous le n ° LMC 396282, au nom de la défenderesse. La demande est présentée en vertu du paragraphe 57(1) de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. (1985), ch. T-13 (la Loi), qui dispose :


57. (1) La Cour fédérale a une compétence initiale exclusive, sur demande du registraire ou de toute personne intéressée, pour ordonner qu'une inscription dans le registre soit biffée ou modifiée, parce que, à la date de cette demande, l'inscription figurant au registre n'exprime ou ne définit pas exactement les droits existants de la personne paraissant être le propriétaire inscrit de la marque.

57. (1) the Federal Court has exclusive original jurisdiction, on the application of the Registrar

or any person interested, to order that any entry in the register be struck out or amended on the ground that at the date of the application the entry as it appears in the register does not accurately express or define the existing rights of the person appearing to be the registered owner of the mark.



[2]                 La demande se fonde sur les motifs suivants :

a)         l'enregistrement des marques de commerce était invalide puisqu'elles n'étaient pas, et ne sont toujours pas, distinctives des services de la défenderesse, en contravention de l'alinéa 18(1)b) de la Loi;

b)         les marques de commerce n'étaient pas enregistrables parce qu'elles créaient de la confusion avec une marque de commerce déposée, en vertu de l'alinéa 12(1)d) de la Loi;

c)         la défenderesse n'était pas la personne qui avait droit à l'enregistrement des marques de commerce, puisque chaque marque de commerce créait de la confusion avec les marques de commerce de la demanderesse qui avaient été largement employées antérieurement au Canada.

[3]                 La demanderesse demande que l'enregistrement n ° LMC 398700 de la marque de commerce BOSTON CHICKEN et l'enregistrement n ° LMC 396282 de la marque de commerce BOSTON CHICKEN Design soient déclarés invalides et que les enregistrements soient radiés du registre des marques de commerce. Elle demande également les dépens.

[4]                 La demanderesse est une société par actions de Colombie-Britannique, constituée sous la dénomination Bushby Industries Ltd. le 26 mai 1982. Sa dénomination a été changée pour Boston Pizza International Inc. le 10 décembre 1982 à la suite de l'acquisition par la demanderesse de Boston Pizza International Ltd.


[5]                 La demanderesse est propriétaire de sept marques de commerce déposées au Canada, notamment de la marque de commerce BOSTON PIZZA, enregistrée sous le n ° LMC 171428, le 18 septembre 1970, en liaison avec les marchandises et services suivants :

- Marchandises : Pizza et spaghetti, à la fois sous forme chaude et congelée, ainsi que les ingrédients, en combinaison, pour faire ces plats.

- Services : Services de restauration et franchisage de services de restauration.

En 1994, il y avait 93 restaurants Boston Pizza, situés dans cinq provinces du Canada.

[6]                 La défenderesse était une société constituée et existant selon les lois de l'État du Delaware. À la date du commencement de la présente procédure, la défenderesse était propriétaire des enregistrements au Canada n ° LMC 398700 de la marque de commerce BOSTON CHICKEN et n ° LMC 396282 de la marque de commerce BOSTON CHICKEN Design. Les marques de commerce de la défenderesse ont été enregistrées le 29_mai 1992 et le 27 mars 1992 respectivement en liaison avec les services suivants :

- Services de restaurant-traiteur et services de traiteur.

[7]                 À la fin de 1994, 530 restaurants étaient exploités aux États-Unis sous la bannière BOSTON CHICKEN.


[8]                 Le 3 avril 1995, la demanderesse a déposé la présente demande de radiation du registre des marques de commerce des enregistrements de la défenderesse n ° LMC 398700 portant sur la marque de commerce BOSTON CHICKEN et n ° LMC 396282 portant sur la marque de commerce BOSTON CHICKEN Design.

[9]                 En octobre 1998, la défenderesse a demandé la protection de la loi sur la faillite en vertu du chapitre 11 du Bankruptcy Code des États-Unis. À la suite de la faillite aux États-Unis, la défenderesse a été dissoute et tous les droits aux enregistrements au Canada n ° LMC 398700 et LMC 396282 ont été cédés à Global Restaurant Operations of Ireland Limited (Global), y compris le droit de poursuivre la présente procédure.

[10]            Au commencement de l'audience, Global a présenté une requête pour être jointe comme partie à la procédure. Cette requête est accueillie.

LA PREUVE DE LA DEMANDERESSE

[11]            Au soutien de sa demande, la demanderesse a déposé au départ l'affidavit de George Melville, vice-président de Boston Pizza International Inc., daté du 24 février 1995.

[12]            Le 16 novembre 2000, j'ai prononcé une ordonnance autorisant la demanderesse à déposer un supplément de preuve par affidavit en réponse aux observations de la défenderesse concernant l'article 50 de la Loi. La demanderesse a donc déposé l'affidavit de George Melville, daté du 28 novembre 2000.


LA PREUVE DE LA DÉFENDERESSE

[13]            En réponse, la défenderesse a déposé les affidavits suivants :

·           l'affidavit de F. Warren Ellish, vice-président, Marketing de Boston Chicken International, daté du 7 août 1995;

·           l'affidavit de John Plessas, président de Boston Seafoods Inc., daté du 20 juillet 1995;

·           l'affidavit d'Alan L. Ross, stagiaire en droit, daté du 13 juillet 1995;

·           l'affidavit de Jack Trapp, propriétaire, A & A Surplus, daté du 4 août 1995;

·           l'affidavit d'Adam Joseph, étudiant en droit, daté du 3 août 1995;

·           l'affidavit de Thomas J. Denholm, stagiaire en droit, daté du 8 août 1995;

·           l'affidavit de Michael F. Morgan, stagiaire en droit, daté du 1er août 1995;

·           l'affidavit de Jennifer Leah Stecyk, recherchiste en marques de commerce, daté du 30 janvier 1996.

[14]            La défenderesse a également contre-interrogé le témoin de la demanderesse, George Melville, et a déposé à l'appui de sa position une copie de la transcription du contre-interrogatoire de M. Melville et des engagements qu'il y a pris.

LES QUESTIONS EN LITIGE

[15]            Dans sa demande, la demanderesse soulève les questions suivantes :

1.         Quelle protection devrait-être accordée, le cas échéant, à la marque de la demanderesse?


2.         À la date de l'enregistrement, les marques de la défenderesse créaient-elles de la confusion avec celles de la demanderesse?

3.         La défenderesse avait-elle le droit à l'enregistrement de ses marques de commerce?

4.         À la date de la demande, les marques de commerce de la défenderesse étaient-elles distinctives des services de la défenderesse conformément à l'alinéa 18(1)b) de la Loi?

DISPOSITIONS PERTINENTES DE LA LOI SUR LES MARQUES DE COMMERCE, L.R.C. (1985), ch. T-13

[16]            Les dispositions pertinentes de la Loi sont ainsi conçues :


6. (2) L'emploi d'une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l'emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises liées à ces marques de commerce sont fabriquées, vendues, données à bail ou louées, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces marchandises ou ces services soient ou non de la même catégorie générale.

6. (2) The use of a trade-mark causes confusion with another trade-mark if the use of both trade-marks in the same area would be likely to lead to the inference that the wares or services associated with those trade-marks are manufactured, sold, leased, hired or performed by the same person, whether or not the wares or services are of the same general class.


6. (5) En décidant si des marques de commerce ou des noms commerciaux créent de la confusion, le tribunal ou le registraire, selon le cas, tient compte de toutes les circonstances de l'espèce, y compris :

a)    le caractère distinctif inhérent des marques de commerce ou noms commerciaux, et la mesure dans laquelle ils sont devenus connus;

b)    la période pendant laquelle les marques de commerce ou noms commerciaux ont été en usage;

c)    le genre de marchandises, services ou entreprises;

d)    la nature du commerce;

e)    le degré de ressemblance entre les marques de commerce ou les noms commerciaux dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu'ils suggèrent.

6. (5) In determining whether trade-marks or trade-names are confusing, the court or the Registrar, as the case may be, shall have regard to all the surrounding circumstances including:

(a) the inherent distinctiveness of the trade-marks or trade-names and the extent to which they have become known;

(b)    the length of time the trade-marks or trade-names have been in use;

(c)    the nature of the wares, services or business;

(d)    the nature of the trade; and

(e)    the degree of resemblance between the trade-marks or trade-names in appearance or sound or in the ideas suggested by them.

12. (1) Sous réserve de l'article 13, une marque de commerce est enregistrable sauf dans l'un ou l'autre des cas suivants_:

a) elle est constituée d'un mot n'étant principalement que le nom ou le nom de famille d'un particulier vivant ou qui est décédé dans les trente années précédentes;

b)    qu'elle soit sous forme graphique, écrite ou sonore, elle donne une description claire ou donne une description fausse et trompeuse, en langue française ou anglaise, de la nature ou de la qualité des marchandises ou services en liaison avec lesquels elle est employée, ou à l'égard desquels on projette de l'employer, ou des conditions de leur production, ou des personnes qui les produisent, ou du lieu d'origine de ces marchandises ou services;

c)    elle est constituée du nom, dans une langue, de l'une des marchandises ou de l'un des services à l'égard desquels elle est employée, ou à l'égard desquels on projette de l'employer;

d)    elle crée de la confusion avec une marque de commerce déposée;

e)    elle est une marque dont l'article 9 ou 10 interdit l'adoption;

f)    elle est une dénomination dont l'article 10.1 interdit l'adoption;

g)    elle est constituée, en tout ou en partie, d'une indication géographique protégée et elle doit être enregistrée en liaison avec un vin dont le lieu d'origine ne se trouve pas sur le territoire visé par l'indication;

h) elle est constituée, en tout ou en partie, d'une indication géographique protégée et elle doit être enregistrée en liaison avec un spiritueux dont le lieu d'origine ne se trouve pas sur le territoire visé par l'indication.

(2) Une marque de commerce qui n'est pas enregistrable en raison de l'alinéa (1)a) ou b) peut être enregistrée si elle a été employée au Canada par le requérant ou son prédécesseur en titre de façon à être devenue distinctive à la date de la production d'une demande d'enregistrement la concernant.

12. (1) Subject to section 13, a trade-mark is registrable if it is not

(a)    a word that is primarily merely the name or the surname of an individual who is living or has died within the preceding thirty years;

(b)    whether depicted, written or sounded, either clearly descriptive or deceptively misdescriptive in the English or French language of the character or quality of the wares or services in association with which it is used or proposed to be used or of the conditions of or the persons employed in their production or of their place of origin;

(c)    the name in any language of any of the wares or services in connection with which it is used or proposed to be used;

(d)    confusing with a registered trade-mark;

(e)    a mark of which the adoption is prohibited by section 9 or 10;

(f)    a denomination the adoption of which is prohibited by section 10.1.;

(g)    in whole or in part a protected geographical indication, where the trade-mark is to be registered in association with a wine not originating in a territory indicated by the geographical indication; and

(h)    in whole or in part a protected geographical indication, where the trade-mark is to be registered in association with a spirit not originating in a territory indicated by the geographical indication.

(2) A trade-mark that is not registrable by reason of paragraph (1)(a) or (b) is registrable if it has been so used in Canada by the applicant or his predecessor in title as to have become distinctive at the date of filing an application for its registration.


16. (1) Tout requérant qui a produit une demande selon l'article 30 en vue de l'enregistrement d'une marque de commerce qui est enregistrable et que le requérant ou son prédécesseur en titre a employée ou fait connaître au Canada en liaison avec des marchandises ou services, a droit, sous réserve de l'article 38, d'en obtenir l'enregistrement à l'égard de ces marchandises ou services, à moins que, à la date où le requérant ou son prédécesseur en titre l'a en premier lieu ainsi employée ou révélée, elle n'ait créé de la confusion :

a)    soit avec une marque de commerce antérieurement employée ou révélée au Canada par une autre personne;

b)    soit avec une marque de commerce à l'égard de laquelle une demande d'enregistrement avait été antérieurement produite au Canada par une autre personne;

c)    soit avec un nom commercial qui avait été antérieurement employé au Canada par une autre personne.

16. (1) Any applicant who has filed an application in accordance with section 30 for registration of a trade-mark that is registrable and that he or his predecessor in title has used in Canada or made known in Canada in association with wares or services is entitled, subject to section 38, to secure its registration in respect of those wares or services, unless at the date on which he or his predecessor in title first so used or made it known it was confusing with

(a)    a trade-mark that had been previously used in Canada or made known in Canada by any other person;

(b)    a trade-mark in respect of which an application for registration had been previously filed in Canada by any other person; or

(c)    a trade-name that had been previously used in Canada by any other person.

18. (1) L'enregistrement d'une marque de commerce est invalide dans les cas suivants :

a)    la marque de commerce n'était pas enregistrable à la date de l'enregistrement;

b)    la marque de commerce n'est pas distinctive à l'époque où sont entamées les procédures contestant la validité de l'enregistrement;

c)    la marque de commerce a été abandonnée.

Sous réserve de l'article 17, l'enregistrement est invalide si l'auteur de la demande n'était pas la personne ayant droit de l'obtenir.

18. (1) The registration of a trade-mark is invalid if

(a)    the trade-mark was not registrable at the date of registration,

(b)    the trade-mark is not distinctive at the time proceedings bringing the validity of the registration into question are commenced, or

(c)    the trade-mark has been abandoned,

and subject to section 17, it is invalid if the applicant for registration was not the person entitled to secure the registration.


50. (1) Pour l'application de la présente loi, si une licence d'emploi d'une marque de commerce est octroyée, pour un pays, à une entité par le propriétaire de la marque, ou avec son autorisation, et que celui-ci, aux termes de la licence, contrôle, directement ou indirectement, les caractéristiques ou la qualité des marchandises et services, l'emploi, la publicité ou l'exposition de la marque, dans ce pays, par cette entité comme marque de commerce, nom commercial -- ou partie de ceux-ci -- ou autrement ont le même effet et sont réputés avoir toujours eu le même effet que s'il s'agissait de ceux du propriétaire.

50. (1) For the purposes of this Act, if an entity is licensed by or with the authority of the owner of a trade-mark to use the trade-mark in a country and the owner has, under the licence, direct or indirect control of the character or quality of the wares or services, then the use, advertisement or display of the trade-mark in that country as or in a trade-mark, trade-name or otherwise by that entity has, and is deemed always to have had, the same effect as such a use, advertisement or display of the trade-mark in that country by the owner.



LES OBSERVATIONS DE LA DEMANDERESSE

Question 1 : La protection à accorder à la marque de commerce de la demanderesse

[17]            Dans son mémoire des faits et du droit supplémentaire, la demanderesse soutient qu'elle a établi le degré de contrôle nécessaire pour que soit accordée l'ample protection prévue au paragraphe 50(1) de la Loi. Elle soutient que le paragraphe 50(1) n'exige pas que le propriétaire de la marque de commerce conclut un contrat de licence écrit, mais exige seulement que le propriétaire de la marque de commerce contrôle, directement ou indirectement, les caractéristiques et la qualité des marchandises et services offerts par le licencié. La demanderesse allègue que les services fournis par un franchisé dans le cadre d'un contrat de franchise constituent un emploi conforme au paragraphe 50(1) de la Loi (We Care Health Services Inc. (Re), [1995] C.O.M.C. n ° 39 (C.O.M.C.)).


[18]            La demanderesse soutient qu'elle a un contrat détaillé de franchise qui contrôle presque chaque aspect de l'activité du franchisé et qui est complété par un manuel d'exploitation, des notes de service et des inspections pour veiller à ce que le contrôle de qualité soit effectué. Elle prétend que de nombreux articles du contrat de franchise, énumérés au paragraphe 9 de son mémoire des faits et du droit supplémentaire, assurent le contrôle sur le franchisé. La demanderesse prétend également que le deuxième affidavit de George Melville, aux paragraphes 2 à 14, explique de quelle manière elle exerce un contrôle étroit et continu sur l'activité des franchisés. La demanderesse indique que le contrat de franchise expose en détail le type de contrôle qu'elle exercera sur ses franchisés au sujet des caractéristiques et de la qualité de leurs marchandises et services. Elle soutient également que le contrat de franchise lui donne le pouvoir de prendre les mesures nécessaires pour que les normes de qualité soient respectées et que, si ce n'est pas le cas, elle peut mettre un terme aux franchises.

[19]            S'agissant des entités mentionnées par la défenderesse qui n'avaient pas été inscrites comme usagers de la marque de commerce, la demanderesse soutient qu'elle n'a pas éprouvé le besoin particulier de fournir une preuve à leur sujet, puisqu'elles n'ont pas été mentionnées de façon spécifique dans le mémoire des faits et du droit de la défenderesse. Elle déclare qu'elle aurait pu fournir une copie de chaque contrat de franchise auquel elle est partie, mais que, vu qu'elle a plus de 150 franchisés, cela aurait constitué un fardeau pour elle, de même que pour la Cour. Elle conclut qu'elle a démontré qu'elle exerce un contrôle de la qualité des marchandises et services offerts par ses franchisés et que, donc, l'emploi de ses marques de commerce par ses franchisés entre dans la portée de l'article 50 et que cet emploi vaut à son profit.

Question 2 : La confusion


[20]            En ce qui concerne le premier facteur énuméré au paragraphe 6(5) de la Loi, le caractère distinctif inhérent, la demanderesse fait valoir que, si la marque de commerce BOSTON PIZZA n'est pas en elle-même distinctive, elle a acquis un caractère distinct fondé sur 30 années d'emploi et de commercialisation du nom. Elle prétend que la marque de commerce BOSTON PIZZA a acquis un caractère distinctif puisqu'elle est reconnue par le public comme une chaîne de restaurants franchisés établie sur l'ensemble du territoire qui sert une cuisine « bostonnaise » et qu'elle a donc besoin d'une protection étendue.

[21]            La demanderesse plaide que la marque de la défenderesse, BOSTON CHICKEN, n'a pas été employée au Canada, n'est pas notoire, et qu'elle n'a donc pas acquis de caractère distinctif et qu'il faudrait lui accorder peu de protection. La demanderesse soutient que, sur le fondement de son emploi au Canada, la défenderesse n'a pas distingué sa marque de commerce du nom des autres restaurants employant le nom « Boston » .

[22]            S'agissant du deuxième facteur, la période pendant laquelle les marques ont été en usage, la demanderesse signale que la marque de commerce BOSTON PIZZA est employée au Canada depuis 1965 et est enregistrée depuis 1970, tandis que la marque de commerce BOSTON CHICKEN a été enregistré en 1992. Elle prétend qu'il faudrait donc accorder à la marque de commerce BOSTON PIZZA une protection importante par comparaison à la marque de commerce BOSTON CHICKEN.


[23]            S'agissant du troisième facteur, le genre de marchandises et de services, la demanderesse soutient qu'elle-même et la défenderesse ont la même activité, le franchisage et l'exploitation de restaurants. Elle prétend que la nature des marchandises et des services est si semblable que la confusion est probable. Elle relève que la Commission des oppositions des marques de commerce a refusé de façon constante les demandes de marques de commerce pour des restaurants qui étaient susceptibles de créer de la confusion avec les marques préexistantes (Boston Pizza International v. Boston Seafood House Ltd. (1988), 23 C.P.R. (3d) 564 (C.O.M.C.); Foodcorp Ltd. v. Hardee's Food Systems Inc. (1981), 66 C.P.R. (2d) 217 (C.O.M.C.); Restaurant Au Chalet Suisse Inc. v. Cara Operations Ltd. (1988), 20 C.P.R. (3d) 331 (C.O.M.C.); Old Spaghetti Factory Canada Ltd. v. Spaghetti House Restaurants Ltd. (1999), 2 C.P.R. (4th) 398 (C.O.M.C.)).

[24]            S'agissant du quatrième facteur, la nature du commerce, la demanderesse fait valoir qu'elle-même et la défenderesse franchisent et exploitent des restaurants, offrent un produit similaire et s'adressent à des marchés similaires, ce qui conduira probablement à la confusion.


[25]            Enfin, quant au cinquième critère, le degré de ressemblance, la demanderesse fait valoir que, dans l'appréciation de la confusion entre marques de commerce, le premier mot ou la première syllabe d'une marque est plus importante que ce qui suit pour établir une distinction (Conde Nast Publications Inc. c. Union des Éditions Modernes (1979), 46 C.P.R. (2d) 183 (C.F. 1re inst.); Everex Systems Inc. c. Everdata Computer Inc. (1992), 44 C.P.R. (3d) 175 (C.F. 1re inst.)). La demanderesse prétend que, du fait qu'elle exerce déjà son activité sous plusieurs noms, par exemple Boston Pizza, Boston Pizza Quick Express, et BP's Lounge, il n'est pas invraisemblable que la personne ordinaire suppose que la défenderesse n'est qu'une autre manifestation de la demanderesse. Selon la demanderesse, cela est particulièrement vraisemblable puisqu'elle-même et la défenderesse visent la même clientèle. La demanderesse allègue que les membres de la clientèle des restaurants peuvent présumer que la défenderesse constitue un prolongement de la demanderesse s'adressant aux clients qui préfèrent le poulet à la pizza.

[26]            La demanderesse fait valoir que, selon les alinéas 18(1)a) et 12(1)d) de la Loi, l'enregistrement d'une marque de commerce est invalide si la marque de commerce n'est pas enregistrable, ce qui est le cas si la marque de commerce crée de la confusion avec une marque de commerce déposée. Elle soutient que la marque de commerce BOSTON CHICKEN sera vraisemblablement confondue avec la marque de commerce BOSTON PIZZA puisqu'elle n'est pas distinctive en elle-même, qu'elle n'a pas été employée au Canada et qu'elle s'emploie en liaison avec une activité similaire à celle de la demanderesse. La demanderesse plaide donc que la marque de commerce BOSTON CHICKEN est invalide et devrait être radiée du registre.

Question 3 : La défenderesse avait-elle le droit d'enregistrer la marque de commerce?

[27]            Enfin, la demanderesse soutient que la défenderesse n'avait pas le droit d'enregistrer sa marque de commerce en vertu de l'alinéa 16(1)a) de la Loi puisque cette marque créait de la confusion avec la marque de commerce de la demanderesse, antérieurement employée au Canada. Elle indique que sa marque de commerce est employée au Canada depuis au moins 1965 et qu'elle a été enregistrée en 1970, alors que les marques de commerce de la défenderesse n'ont été enregistrées au Canada qu'en 1992.


Question 4 : Le caractère distinctif

[28]            La demanderesse fait valoir que les marques de commerce de la défenderesse ne distinguent pas les marchandises et services en liaison avec lesquels elles sont employées des marchandises et services offerts par d'autres. Elle prétend que la marque de la défenderesse BOSTON CHICKEN fait référence à un lieu géographique, associé à un produit alimentaire et, puisqu'il existe au moins quatre autres restaurants au Canada dont le nom commercial comprend le mot « Boston » , n'est pas distinctive. La demanderesse plaide qu'au contraire, sa marque est distinctive parce que le public associe la cuisine « bostonnaise » à la demanderesse en raison de son emploi actif de la marque (Petro-Canada v. UPI Inc., [2000] C.O.M.C. n ° 32 (C.O.M.C.)).

[29]            En outre, la demanderesse soutient que, lorsqu'une marque de commerce ne distingue pas les marchandises et services des marchandises et services des autres, elle n'est pas distinctive et ne peut être enregistrée (Williams Companies Inc. v. William Tel. Ltd., [1999] C.O.M.C. n ° 240 (C.O.M.C.)). Au dire de la demanderesse, la marque de commerce BOSTON CHICKEN ne distingue pas les marchandises et services de la défenderesse d'autres restaurants employant le mot « Boston » comme élément de leur marque de commerce ou de leur nom commercial, dont BOSTON PIZZA.


[30]            La demanderesse soutient donc que l'enregistrement de la marque de commerce BOSTON CHICKEN est invalide, puisque cette marque n'a jamais été distinctive, notamment à la date de l'introduction de la présente procédure, et que les marques de commerce de la défenderesse devraient être radiées du registre.

LES OBSERVATIONS DE LA DÉFENDERESSE

Question 1 : La protection à accorder à la marque de la demanderesse

[31]            Selon la défenderesse, pour que l'emploi d'une marque par un licencié soit réputé constituer l'emploi par le propriétaire, il faut que le propriétaire établisse l'existence de la licence et un contrôle de qualité suffisant sur les marchandises ou services (Cheung Kong (Holdings) Ltd. c. Living Realty Inc. (1999), 4 C.P.R. (4th) 71 (C.F. 1re inst.) à la page 83; MCI Communications Corp. v. MCI Multinet Communications Inc. (1995), 61 C.P.R. (3d) 245 (C.O.M.C.)).

[32]            La défenderesse soutient que la demanderesse n'a pas établi que l'emploi dans le cadre de licences de la marque de commerce BOSTON PIZZA s'est fait soit selon une inscription d'usagers inscrits (exigée avant que la Loi ne soit modifiée en 1993 avec effet rétroactif), ou dans des circonstances dans lesquelles s'appliquait l'article 50 de la Loi. La défenderesse plaide donc que l'étendue de la protection à accorder à la marque de commerce de la demanderesse BOSTON PIZZA doit être très étroite, à supposer qu'elle existe.


[33]            Dans son mémoire des faits et du droit supplémentaire, la défenderesse soutient que parmi les tiers usagers qui employaient la marque de commerce BOSTON PIZZA, il y avait sept entités qui employaient la marque de commerce depuis 1971, qui n'avaient jamais été inscrites comme usagers et pour lesquelles il n'y avait pas de preuve de contrôle sur les caractéristiques et la qualité de leurs services. Cinq de ces entités sont énumérées au paragraphe 2 du mémoire des faits et du droit supplémentaire de la défenderesse.

[34]            La défenderesse prétend que le deuxième affidavit de George Melville fournit une preuve générale sur les contrats de licence que la demanderesse avait conclus avec ses franchisés, mais n'établit pas que les entités spécifiques énumérées au paragraphe 2 étaient licenciées par la demanderesse ou par son prédécesseur en titre. À titre subsidiaire, si le deuxième affidavit peut être accepté comme preuve que ces entités étaient licenciées par la demanderesse ou par son ayant droit, la défenderesse plaide que l'affidavit n'établit pas les modalités ou conditions de ces licences.

[35]            La défenderesse fait valoir que, puisque la demanderesse a eu l'occasion de fournir une preuve supplémentaire, qu'elle avait des exemples précis de lacunes dans sa preuve et qu'elle n'a pas fourni de preuves pour remédier à ces lacunes, l'étendue de la protection à accorder, le cas échéant, à la marque de commerce de la demanderesse BOSTON PIZZA doit être très étroite (Chalet Bar B-Q (Canada) Inc. c. Foodcorp Inc. (1982), 66 C.P.R. (2d) 56-68 (C.A.F.)).


Question 2 : La confusion

[36]            En ce qui concerne le premier facteur énuméré au paragraphe 6(5) de la Loi, le caractère distinctif inhérent, la défenderesse soutient que, lorsqu'une marque décrit les marchandises ou leur désignation géographique, une protection moindre lui sera accordée (Prince Edward Island Mutual Insurance c. Insurance Co. of Prince Edward Island (1999), 86 C.P.R. (3d) 342 (C.F. 1re inst.) à la page 352; United Artists Corp. c. Pink Panther Beauty Corp. (1998), 80 C.P.R. (3d) 247 (C.A.F.) à la page 259; California Fashion Industries, Inc. c. Reitmans (Canada) Ltd. (1991), 38 C.P.R. (3d) 439 (C.F. 1re inst.) aux pages 445 à 447). Elle prétend également que la marque qui comprend un terme descriptif, comme un type de mets, est considérée comme faible et non distinctive en elle-même (A. Lassonde Inc. c. Canada (Registraire des marques de commerce) (2000), 5 C.P.R. (4th) 517 (C.F. 1re inst.) à la page 525; General Motors c. Bellows (1949), 10 C.P.R. 101 (C.S.C.); United Artists Corp., précité, aux pages 268 à 271).


[37]            En outre, la défenderesse soutient que la marque composée à la fois d'une description des marchandises ou services et d'une désignation géographique n'est pas considérée comme distinctive en elle-même et n'aura droit qu'à une faible protection (In re Broadway Chicken, Inc., No série 74/326,626 à la page 18 (Trademark Trial and Appeal Board, U.S. Department of Commerce, Patent and Trademark Office)). Selon la défenderesse, de telles marques peuvent coexister avec d'autres marques sans donner lieu à une probabilité de confusion. Elle soutient que celui qui adopte une marque descriptive, comme un lieu géographique ou un type de mets, doit accepter qu'un certain degré de confusion puisse se produire, puisque, dans ces cas, la confusion est presque inévitable (Walt Disney Productions v. Fantasyland Hotel Inc. (1994), 56 C.P.R. (3d) 129 (B. R. Alberta) à la page 183).

[38]            La défenderesse fait valoir que la preuve indique qu'un certain nombre de restaurants choisissent une marque de commerce contenant le mot « Boston » pour associer leurs services à la cuisine bostonnaise. Elle prétend que la marque de commerce de la demanderesse BOSTON PIZZA n'est pas distinctive en elle-même parce qu'elle suggère un style ou un type de pizza associé à la ville de Boston. Selon la défenderesse, il en résulte qu'il ne faudrait pas accorder à la marque de la demanderesse une protection étendue.

[39]            Quant au caractère distinctif acquis, la défenderesse prétend que les marques de commerce BOSTON CHICKEN et BOSTON CHICKEN Design, bien qu'elles n'aient pas été largement employées au Canada, sont devenues connues des consommateurs par l'effet de la publicité indirecte et de la renommée générée par la réussite de la défenderesse.


[40]            S'agissant du deuxième facteur, la période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage, la défenderesse prétend que ses marques de commerce ont été employées au Canada depuis au moins 1995 en liaison avec des services de traiteur et qu'elles ont été annoncées au Canada depuis au moins la fin des années 80. Elle soutient que la marque de commerce BOSTON PIZZA a été employée en liaison avec des restaurants offrant de la pizza depuis environ 1968, mais que la demanderesse, si elle arrive à établir l'emploi antérieur de la marque de commerce BOSTON PIZZA, ne peut démontrer l'emploi exclusif de la marque ni la réunion dans sa main de tous les droits à la marque.

[41]            En ce qui concerne les troisième et quatrième facteurs, le genre de marchandises et services et la nature du commerce, la défenderesse soutient qu'il existe un degré considérable de recoupement entre les services des parties, puisque ses marques de commerce sont enregistrées en vue de l'emploi en liaison avec les services de restaurant-traiteur et de traiteur tandis que la marque de commerce de la demanderesse BOSTON PIZZA est enregistrée en liaison avec les services de restauration et le franchisage de services, ainsi qu'avec la pizza et le spaghetti.


[42]            Quant au cinquième facteur, le degré de ressemblance, la défenderesse prétend que, s'il est bien établi que le degré de ressemblance entre les marques est un facteur important dans l'appréciation de la probabilité de confusion, ce n'est pas le facteur le plus important à prendre en compte dans l'appréciation de marques comportant des mots et des indicateurs géographiques communs (California Fashion Industries, Inc., précité, à la page 446). Selon elle, il est bien établi que les marques comportant des mots communs peuvent être distinctives si la différence entre les marques sert à dominer les éléments communs et que l'élément distinctif de chaque marque de commerce est constitué des différences entre les marques et non des mots communs (United Artists Corp., précité, aux pages 262 et 263; California Fashion Industries, Inc., précité, aux pages 445 et 446; Ikea Ltd./Ikea Ltée c. Idea Design Ltd. (1987), 13 C.P.R. (3d) 476 (C.F. 1re inst.) à la page 478; Sunshine Village Corp. c. Sun Peaks Resort Corp., [2000] C.O.M.C. n ° 102 (Q.L.); Phantom Industries Inc. c. Sara Lee Corp., [2000] C.O.M.C. n ° 112 (Q.L.); United States Polo Assn. c. Polo Ralph Lauren Corp., [2000] A.C.F. n ° 1472 (C.A.F.), au par. 44).

[43]            La défenderesse soutient qu'en l'espèce, bien que les deux marques soient employées en liaison avec des services de restauration, elles se rapportent à des types de mets différents, ce qui est clairement indiqué dans les marques BOSTON CHICKEN et BOSTON PIZZA. Elle fait valoir que la différence dans la nature des marchandises auxquelles les marques se rapportent est suffisante pour rendre chaque marque distinctive, malgré les éléments de ressemblance, et n'est pas susceptible de créer de la confusion chez les consommateurs canadiens.

[44]            Enfin, à propos des circonstances supplémentaires de l'espèce, la défenderesse soutient que la preuve de l'emploi par des tiers d'un mot ou d'une marque de commerce similaire à la marque de commerce d'une opposante peut limiter l'étendue de la protection accordée à la marque de l'opposante si l'on peut déduire de la preuve que les consommateurs sont tellement habitués à voir des marques similaires ou des marques comportant un élément commun à l'égard des mêmes marchandises ou services qu'ils prennent l'habitude de faire des distinctions fines entre les marques (United States Polo Assn., précité, au par. 25).


[45]            La défenderesse soutient que la preuve établit un emploi considérable par des tiers du mot « Boston » dans la restauration, sans que la demanderesse ait pu produire de preuve de confusion. Elle plaide qu'il est donc raisonnable de conclure que la preuve de l'emploi par des tiers suffit à établir que les consommateurs canadiens sont tellement habitués à voir le mot « Boston » qu'ils feraient des distinctions fines entre la marque de commerce de la défenderesse et d'autres marques de commerce, comme celles qui appartiennent à la demanderesse. La défenderesse fait valoir que l'absence de preuve établissant la confusion avec les marques similaires de tiers est un facteur important à prendre en compte dans l'appréciation du risque de confusion (Baylor University c. Hudson's Bay Co., [2000] A.C.F. n ° 984 (C.A.F.) au par. 37).

[46]            La défenderesse soutient donc que la marque de commerce BOSTON CHICKEN ne crée pas moins de confusion que les autres marques employées par des tiers, notamment BOSTON CAFÉ, BOSTON SEAFOOD HOUSE, BOSTON CHINESE FOOD et BOSTON RESTAURANT. Selon elle, il n'y a pas de raison de croire que ses marques de commerce créeraient plus de confusion que n'importe laquelle des autres marques « Boston » employées par les tiers.

[47]            La défenderesse plaide également que, compte tenu de la prolifération de marques de commerce de tiers comprenant le mot « Boston » , la demanderesse ne peut invoquer la protection de ses marques de commerce en tant que famille de marques. Elle soutient que la protection d'une famille de marques contenant un élément commun doit être refusée s'il est établi que cet élément est également commun aux marques de commerce de tiers (Techniquip Ltd. c. Canadian Olympic Association (1999), 3 C.P.R. (3d) 298 (C.A.F.) aux pages 303 et 304; Canadian Olympic Association v. Olymel, Société en commandite, [2000] A.C.F. n ° 842 (C.F. 1re inst.)).


[48]            La défenderesse prétend donc qu'il n'y avait pas de probabilité de confusion entre ses marques de commerce et la marque de commerce de la demanderesse BOSTON PIZZA à l'époque de l'enregistrement des marques de commerce de la défenderesse.

Question 3 : La défenderesse avait-elle droit à l'enregistrement de ses marques de commerce?

[49]            La défenderesse ne présente pas d'observations particulières sur cette question.

Question 4 : Le caractère distinctif

[50]            La défenderesse prétend qu'il incombe à la demanderesse d'établir l'absence de caractère distinctif des marques de commerce de la défenderesse. Elle soutient que la demanderesse ne s'est pas acquittée de ce fardeau et n'a établi aucun motif d'absence de caractère distinctif autre que la probabilité de confusion. Selon elle, comme il n'y a pas de probabilité de confusion, il n'y a pas absence de caractère distinctif (Philip Morris Inc. c. Imperial Tobacco Ltd. (No. 1) (1987), 17 C.P.R. (3d) 289 (C.A.F.) aux pages 297 et 298).

ANALYSE

[51]            Je commence mon analyse en traitant de la question du paragraphe 50(1) que je reproduis à nouveau pour plus de commodité :



50. (1) Pour l'application de la présente loi, si une licence d'emploi d'une marque de commerce est octroyée, pour un pays, à une entité par le propriétaire de la marque, ou avec son autorisation, et que celui-ci, aux termes de la licence, contrôle, directement ou indirectement, les caractéristiques ou la qualité des marchandises et services, l'emploi, la publicité ou l'exposition de la marque, dans ce pays, par cette entité comme marque de commerce, nom commercial -- ou partie de ceux-ci -- ou autrement ont le même effet et sont réputés avoir toujours eu le même effet que s'il s'agissait de ceux du propriétaire.

50. (1) For the purposes of this Act, if an entity is licensed by or with the authority of the owner of a trade-mark to use the trade-mark in a country and the owner has, under the licence, direct or indirect control of the character or quality of the wares or services, then the use, advertisement or display of the trade-mark in that country as or in a trade-mark, trade-name or otherwise by that entity has, and is deemed always to have had, the same effect as such a use, advertisement or display of the trade-mark in that country by the owner.


[52]            Le paragraphe 50(1) exige que le propriétaire d'une marque de commerce qui a octroyé à une entité une licence d'emploi de sa marque de commerce exerce, aux termes de la licence, un contrôle direct ou indirect des caractéristiques ou de la qualité des marchandises et services associés à la marque de commerce. Si le propriétaire de la marque de commerce satisfait à cette exigence, l'emploi de la marque par l'entité licenciée est réputé avoir été un emploi par le propriétaire de la marque de commerce. Les deux parties conviennent que le paragraphe 50(1) a un effet rétroactif.


[53]            L'argument de la défenderesse est qu'il faut accorder à la marque de commerce de la demanderesse BOSTON PIZZA, enregistrée sous le n ° LMC 171428, un faible degré de protection, son caractère distinctif ayant été perdu du fait de l'emploi de la marque de commerce par des franchisés qui, avant 1993, n'étaient pas inscrits correctement[1], et, depuis le 9 juin 1993, du fait que la demanderesse n'a pas démontré un contrôle suffisant, direct ou indirect, sur les caractéristiques et la qualité des marchandises et services offerts par les franchisés.

[54]            À l'appui de sa position, la demanderesse a déposé les affidavits de George Melville, souscrits le 24 février 1995 et le 28 novembre 2000. L'affidavit de M. Melville du 28 novembre 2000 comporte en annexe des copies des contrats de franchise conclus par la demanderesse avec les franchisés depuis 1968.

[55]            M. Melville indique, dans son deuxième affidavit, que la demanderesse a actuellement environ 150 franchisés dans tout le Canada et qu'elle exerce un contrôle étroit sur ses franchisés, particulièrement en ce qui concerne la décoration ainsi que la nature et la qualité des mets et services offerts par les franchisés.

[56]            Il est indéniable que la demanderesse, par son contrat détaillé de franchise, vise à contrôler tous les aspects de l'exploitation des franchises. Au contrat viennent s'ajouter le manuel d'exploitation de la demanderesse, des notes de service et des inspections, visant à assurer que le contrôle de qualité soit exercé. Le contrat prévoit en outre que la demanderesse a le droit de pénétrer dans les locaux du franchisé pour vérifier le respect par le franchisé de ses obligations. Le non-respect de ses obligations par le franchisé constitue un manquement qui permet à la demanderesse, à son choix, de mettre fin au contrat.


[57]            Je suis donc d'avis que la demanderesse satisfait aux exigences du paragraphe 50(1) de la Loi, puisqu'elle exerce un contrôle, par le contrat de licence, sur les caractéristiques et la qualité des marchandises et services liés à l'emploi de sa marque de commerce par les franchisés.

[58]            À l'appui de sa position, la défenderesse cite le jugement du juge Evans (tel était alors son titre) dans l'affaire Cheung Kong (Holdings) Ltd. c. Living Realty Inc. (2000), 4 C.P.R. (4th) 71 et la décision de la Commission des oppositions des marques de commerce MCI Communications Corp. v. MCI Multinet Communications Inc. (1995), 61 C.P.R. (3d) 245. Ces affaires établissent que le concédant de licence doit exercer un contrôle réel sur ses licenciés pour se prévaloir de leur emploi de la marque. Je conviens avec l'avocat de la demanderesse qu'il faut établir une distinction entre ces affaires et l'espèce, puisque, dans les affaires Cheung Kong et MCI Communications, les concédants de licence n'avaient pas de contrat de licence formel avec leurs licenciés. En l'espèce, la demanderesse, par son contrat de franchise, contrôle presque tous les aspects de l'activité du franchisé. Joint au manuel d'exploitation de la demanderesse, aux notes de services et aux inspections, le système en place permet à la demanderesse d'exercer un contrôle efficace sur la qualité des marchandises et services offerts par le franchisé.


[59]            En outre, la défenderesse fait valoir que sept entités, des tiers usagers de la marque de commerce BOSTON PIZZA, n'ont jamais été inscrites comme usagers de la marque de commerce avant le 9 juin 1993 et qu'à l'égard de ces entités, la demanderesse n'a donc pas présenté de preuve de contrôle des caractéristiques et de la qualité de leurs marchandises et services.

[60]            Dans son deuxième affidavit, M. Melville déclare que la demanderesse, dès le départ, a exigé des franchisés qu'ils signent des contrats de franchise écrits. Il déclare également qu'en qualité de représentant de la demanderesse depuis 1983, il est au courant que tous les franchisés ont effectivement signé un contrat de franchise. Dans les circonstances, je suis convaincu que la demanderesse contrôle efficacement la nature et la qualité des marchandises et services offerts par les franchisés en liaison avec la marque de commerce.

[61]            Je passe maintenant aux autres questions, qui se ramènent en fait à une seule, à savoir si les marques de commerce de la défenderesse créent de la confusion avec celles de la demanderesse. La date pertinente pour l'appréciation de cette question est la date de l'enregistrement des marques de la défenderesse dont la demanderesse cherche à obtenir la radiation.


[62]            L'emploi d'une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l'emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises liées à ces marques de commerce sont fabriquées, vendues, données à bail ou louées, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces marchandises ou ces services soient ou non de la même catégorie générale. En décidant si la confusion est probable, la Cour doit tenir compte de toutes les circonstances de l'espèce, notamment des facteurs énumérés au paragraphe 6(5) de la Loi.

[63]            Au paragraphe 54 de son premier mémoire, l'avocat de la défenderesse énumère un certain nombre de « principes directeurs pratiques[2] » que notre Cour a appliqués pour décider de la probabilité de confusion :

i)              La Cour doit se mettre à la place d'une personne ordinaire qui est familière avec la marque antérieure mais qui n'en a qu'un vague souvenir.                                 

ii)          La question que la Cour doit se poser est de savoir si un consommateur ordinaire, au vu de la marque postérieure, aura comme première impression que les services avec lesquels la seconde marque est employée sont en quelque façon associés à ceux de la marque antérieure.

iii)            Les marques de commerce en cause doivent être examinées comme un tout. Puisque c'est la combinaison des éléments qui constitue la marque de commerce et lui confère son caractère distinctif, il n'est pas correct, pour l'application du critère de la confusion, de placer les marques l'une en regard de l'autre et de comparer ou observer les ressemblances ou les différences des éléments ou des composantes de ces marques.Au contraire, il faut examiner la marque de commerce comme un tout, et ne pas la disséquer. Des marques de commerce peuvent être différentes l'une de l'autre et ne pas créer de confusion lorsqu'elles sont vues comme un tout même s'il existe des similarités entre certains éléments vus séparément.


iv)            Pour déterminer le caractère distinctif d'une marque de commerce, il ne faut pas la considérer séparément des marchandises ou services avec lesquels elle est associée, mais en liaison avec ces marchandises ou services.

v)             Les facteurs énumérés au paragraphe 6(5) ne doivent pas nécessairement se voir attribuer le même poids. Les tribunaux ont reconnu que chaque cas de confusion peut justifier qu'on accorde plus d'importance à l'un de ces critères.

[64]            Je dois indiquer, avant d'aller plus avant, que, dans une procédure de radiation, il incombe à la demanderesse de prouver la probabilité de confusion.

[65]            J'en viens à l'examen des facteurs énumérés au paragraphe 6(5) de la Loi. À mon avis, il n'est pas nécessaire de procéder à une analyse détaillée de ces critères à l'égard de la marque de commerce de la défenderesse BOSTON CHICKEN logo. Cette marque de commerce, à mon avis, n'est pas susceptible de confusion avec la marque de commerce de la demanderesse. Par conséquent, la discussion qui suit concerne seulement la marque de commerce de la défenderesse BOSTON CHICKEN.

[66]            Je commence par l'alinéa 6(5)a) - le caractère distinctif inhérent des marques de commerce ou noms commerciaux et la mesure dans laquelle ils sont devenus connus. Ni la marque de la demanderesse, ni celle de la défenderesse n'est distinctive en elle-même. J'adopte, à cet égard, les propos du juge Rouleau dans l'affaire Prince Edward Island Mutual Insurance c. Insurance Co. of Prince Edward Island (1999), 86 C.P.R. (3d) 342, aux paragraphes 32, 33 et 34 :


[32]         Quant au premier facteur mentionné au paragraphe 6(5) de la Loi, savoir le caractère distinctif inhérent des marques de commerce en cause, il est bien reconnu que les marques qui contiennent des termes descriptifs n'ont pas ce caractère distinctif inhérent et que la Cour ne leur offrira que très peu de protection. En particulier, les marques de commerce ou les noms commerciaux qui mentionnent un lieu géographique comme les noms en cause en l'espèce, sont descriptifs plutôt que distinctifs et ne doivent pas bénéficier d'une protection très étendue. Lorsque le tribunal est appelé à décider si un nom commercial ou une marque de commerce « cause vraisemblablement de la confusion » , même de légères différences entre ces marques seront suffisantes pour atténuer toute « confusion » possible.

[33]         En outre, lorsqu'une partie adopte une appellation descriptive, elle doit accepter une certaine confusion. Dans l'arrêt Walt Disney Productions c. Fantasyland Hotel Inc. (1994), 56 C.P.R. (3d) 129 (Alta. Q.B.); conf. (1996) 67 C.P.R. (3d) 444 (C.A. Alb.); le tribunal a déclaré à cet égard à la page 183:

[TRADUCTION] Même lorsque les services sont identiques, si le nom commercial est descriptif plutôt que distinctif, il y aura inévitablement une certaine confusion acceptable ... Office Cleaning Services Ltd. v. Westminster Window and Sign General Cleaners Ltd., précitée. Dans cette dernière affaire, lord Simonds a dit, à la page 41 :

« Tant que deux commerçants utilisent des termes descriptifs dans leur nom commercial, il est possible que cela entraîne de la confusion chez certaines personnes quels que soient les mots qui les distinguent... En fin de compte, je crois qu'il s'agit tout simplement de ceci : quand un commerçant décide que son nom commercial contiendra des mots courants, il y aura, inévitablement, une certaine confusion. Mais le risque est acceptable sauf si le premier utilisateur est autorisé injustement à s'approprier pour lui seul ces termes. Le tribunal acceptera des différences peu importantes comme étant suffisantes pour éviter toute confusion. Il faut s'attendre à une plus grande discrimination de la part du public lorsqu'un nom commercial est formé en tout ou en partie de termes qui décrivent les articles vendus ou les services offerts.

[34]         En l'espèce, le nom de la demanderesse est très descriptif (Insurance Company) et comporte un élément géographique descriptif (Prince Edward Island). Par conséquent, elle n'a pas droit à un degré élevé de protection et elle doit accepter le risque inévitable d'une certaine confusion dans l'utilisation d'un nom commercial aussi descriptif.


[67]            En l'espèce, il y a une preuve abondante de l'emploi par des tiers de noms commerciaux ou de marques de commerce contenant le mot BOSTON. En effet, un grand nombre de restaurants sont exploités sous la bannière de « Boston » pour associer leurs services et marchandises avec la cuisine bostonnaise. Les affidavits déposés par Alan L. Ross, John Plessas, Jack Trapp, Adam Joseph et Michael F. Morgan fournissent une preuve abondante à cet égard. Pour nommer quelques-uns de ces restaurants, il y a par exemple le Boston Café Restaurant and Tavern à Hawkesbury (Ontario), le Boston Seafood House à Burlington (Ontario), le Boston Café à Kingston (Ontario) and finalement, le Boston Harbour Seafood à Peterborough (Ontario).

[68]            Bien que sa marque ne soit pas distinctive en elle-même, la demanderesse m'a convaincu que du fait d'un long usage, la marque a acquis un caractère distinctif en liaison avec une chaîne de restaurants franchisés qui servent une cuisine « bostonnaise » . Par conséquent, la marque mérite protection.

[69]            Quant à la marque de commerce BOSTON CHICKEN, il y a une preuve abondante du fait qu'elle est largement reconnue aux États-Unis en liaison avec les restaurants Boston Chicken qui offrent une cuisine familiale, avec un comptoir traiteur. Par contre, en ce qui concerne l'emploi de la marque de commerce au Canada, il n'y a guère de preuve, si ce n'est la déclaration de M. Warren Ellish, dans son affidavit du 7 août 1995, qu'en mai 1995, la défenderesse a commencé à employer sa marque de commerce BOSTON CHICKEN au Canada en offrant des services de traiteur à Windsor (Ontario). Donc, dans les circonstances, la marque de commerce BOSTON CHICKEN mérite peu de protection.


[70]            S'agissant du second facteur énuméré au paragraphe 6(5) - la période pendant laquelle les marques de commerce ou noms commerciaux ont été en usage - il favorise sans aucun doute la marque de commerce de la demanderesse BOSTON PIZZA.

[71]            En ce qui concerne le troisième critère, il existe un recoupement considérable entre les services offerts par les parties. Les marques de la défenderesse sont enregistrées pour l'emploi en liaison avec des services de restaurant-traiteur et de traiteur, tandis que la marque de commerce de la demanderesse BOSTON PIZZA est enregistrée en liaison avec les services de restauration et le franchisage de services, ainsi que la pizza et le spaghetti.

[72]            Je passe maintenant au cinquième facteur - le degré de ressemblance entre les marques de commerce ou les noms commerciaux dans la présentation. La demanderesse fait valoir que, puisqu'elle exerce son activité sous différent noms, par exemple Boston Pizza, Boston Pizza Quick Express et BP's Lounge, il est probable que la personne ordinaire supposera que la défenderesse n'est qu'une autre manifestation de la demanderesse. Je ne puis souscrire à cette position. J'adopte plutôt la position exprimée par l'avocat de la défenderesse au paragraphe 69 de son premier mémoire, où il expose que les marques de la demanderesse et de la défenderesse se rapportent à des types de mets différents, à savoir la pizza et le poulet. Il ajoute que la différence dans la nature des marchandises auxquelles se rapporte la marque suffit à distinguer les marques, malgré les éléments de ressemblance.


[73]            Au soutien de cette proposition, je renvoie à la décision du U.S. Trademark Trial and Appeal Board dans l'affaire Re Broadway Chicken, Inc., No série 74/326,626; la Commission d'appel américaine y était appelée à décider si la marque de commerce BROADWAY CHICKEN créait de la confusion avec la marque de commerce déposée BROADWAY PIZZA (avec désistement à l'égard de PIZZA) pour des services de restauration et BROADWAY BAR & PIZZA (avec désistement à l'égard de BAR & PIZZA) pour des services de restauration et de bar. En concluant que la confusion n'était pas probable, la Commission d'appel a fait, aux pages 16, 17 et 18, les observations suivantes :

[TRADUCTION] Nous en venons maintenant à la question de la probabilité de confusion soulevée dans la présente affaire. Parce que l'identification des services dans la demande de la requérante (à savoir, « services de restauration » ) est identique à celle de l'enregistrement de la déposante pour la marque BROADWAY PIZZA, et est en partie identique et pour le reste reliée étroitement à celle de l'enregistrement de la déposante pour la marque BROADWAY BAR & PIZZA ( « services de restauration et de bar » ), on ne peut établir de distinction entre les services des parties par rapport à cette question. D'ailleurs, la demanderesse ne plaide pas le contraire. Donc, la seule question qu'il reste à trancher consiste à savoir si l'emploi simultané de la marque de la requérante BROADWAY CHICKEN et des marques de la déposante BROADWAY PIZZA et BROADWAY BAR & PIZZA en liaison avec des services de restauration est susceptible de causer de la confusion.

La preuve d'un large emploi par des tiers, dans un domaine particulier, de marques contenant un terme commun est de nature à suggérer que les acheteurs ont été conditionnés à examiner d'autres éléments des marques comme moyen de distinguer la source des marchandises ou services dans le domaine. [renvois omis]


En l'espèce, la marque de la requérante, BROADWAY CHICKEN, et les marques de la déposante, BROADWAY PIZZA et BROADWAY BAR & PIZZA, se composent toutes du même mot initial, BROADWAY, et d'éléments descriptifs ou génériques. Ordinairement, ces similarités, combinées à l'identité des services, vont dans le sens d'une conclusion de probabilité de confusion. Par contre, les marques, considérées dans leur totalité, sont faciles à distinguer l'une de l'autre du fait des différences dans les autres éléments. En outre, au moins la moitié, sinon davantage des entreprises tierces ayant un nom commercial ou une marque de commerce commençant par BROADWAY et dont le nom figure dans l'annuaire téléphonique ont une adresse sur une rue, avenue, etc., appelée « Broadway » . Pour les acheteurs qui connaissent bien ces entreprises, le mot BROADWAY aura une signification géographique. Nous notons également que le mot BROADWAY est défini dans The Random House Dictionary of the English language (Second Edition Unabridged 1987) comme, notamment, « une rue de New York, réputée pour ses théâtres, ses restaurants et sa vie nocturne » .

Il s'agit d'une affaire très serrée. Néanmoins, compte tenu des différences des marques et de la signification géographique du mot BROADWAY, la preuve de la requérante établissant un large emploi par des tiers de noms commerciaux et de marques de commerce contenant le mot BROADWAY pour les services de restaurant/établissement de restauration et des marchandises et services étroitement reliés, ainsi que pour des marchandises et services sans aucun rapport, suffit dans la présente procédure ex parte à nous persuader qu'il n'est pas probable qu'il résulte de la confusion de l'emploi simultané de la marque de la requérante BROADWAY CHICKEN et des marques de la déposante BROADWAY PIZZA et BROADWAY BAR & PIZZA en liaison avec des services de restauration.

[74]            Enfin, compte tenu de toutes les circonstances de l'espèce, l'emploi par les tiers du mot « Boston » est, à mon avis, un facteur hautement pertinent en vue de décider de la probabilité de confusion entre les marques de la demanderesse et de la défenderesse. Le juge Malone, traitant de cette question dans l'arrêt United States Polo Assn. c. Polo Ralph Lauren Corp., [2000] A.C.F. n ° 1472 (C.A.F.), a formulé les observations suivantes au paragraphe 25 :

[25]         La présence d'un élément commun dans les marques de commerce (soit le cheval et le maillet de polo en l'occurrence) a été jugée dans d'autres instances comme ayant des répercussions importantes sur la question de la confusion. Comme le déclare le Contrôleur général dans Harrods Ltd. - In the Matter of an Application by - to Register a Trade Mark, (1934), 52 R.P.C. 65 à la p. 70 :

Lorsqu'il s'agit d'examiner la possibilité de confusion entre deux marques de commerce, c'est un principe généralement reconnu que, si les deux marques en question comportent un élément commun qui figure également dans plusieurs autres marques utilisées sur le même marché, cette utilisation courante sur le marché tend à inciter les acheteurs à porter davantage leur attention sur les autres éléments, non communs, des différentes marques et à faire ainsi la distinction entre elles.


[75]            Ces observations concordent avec celles de la Commission d'appel américaine dans l'affaire Re Broadway Chicken. La preuve présentée par la défenderesse, comme je l'ai déjà indiqué, établit un emploi considérable par des tiers du mot « Boston » dans le secteur de la restauration. À cet égard, la demanderesse n'a présenté aucune preuve établissant la confusion ou la probabilité de confusion. Compte tenu de la jurisprudence et de la preuve, je dois conclure que les consommateurs canadiens « ont été conditionnés » à examiner d'autres éléments d'une marque comme moyen de distinguer la source des marchandises ou services dans leur domaine. En d'autres termes, les consommateurs canadiens examineraient non le mot « Boston » , mais les mots « Pizza » et « Chicken » et distingueraient donc les marques de commerce sur ce fondement.

[76]            Je suis donc d'opinion qu'à l'époque de l'enregistrement de la marque de commerce BOSTON CHICKEN et du logo BOSTON CHICKEN de la défenderesse, il n'y avait pas de probabilité de confusion entre la marque de commerce de la demanderesse BOSTON PIZZA et les marques de la défenderesse. De toute façon, la demanderesse ne s'est pas acquittée de son fardeau de démontrer la probabilité de confusion.


[77]            Pour ces motifs, la demande de radiation des marques de commerce de la défenderesse est rejetée avec dépens en faveur de la défenderesse.

                                                                                               Marc Nadon

                                                                                                           JUGE

O T T A W A (Ontario)

Le 17 septembre 2001

Traduction certifiée conforme

Martine Guay, LL. L.


COUR FÉDÉ RALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

N ° DU GREFFE :                                T-677-95

INTITULÉDE LA CAUSE :         BOSTON PIZZA INTERNATIONAL INC. c.

BOSTON CHICKEN INC.

LIEU DE L'AUDIENCE :            Ottawa (Ontario)

DATE DE L'AUDIENCE :              le 6 février 2001

MOTIFS DE L'ORDONNANCE PAR : MONSIEUR LE JUGE NADON

EN DATE DU :                                   17 septembre 2001

ONT COMPARU :

M. Gregory Harney

M. Andrew Morrison                                                                     POUR LA DEMANDERESSE

M. Glen Bloom                                                                              POUR LA DÉFENDERESSE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Shields Harney

Vancouver (Colombie-Britannique)                                             POUR LA DEMANDERESSE

Osler, Hoskin & Harcourt

Ottawa (Ontario)                                                                            POUR LA DÉFENDERESSE



[1]            Les anciens paragraphes 50(1), (2) et (3) de la Loi sont ainsi conçus :

50.          (1)    Une personne autre que le propriétaire d'une marque de commerce déposée peut être inscrite comme usager inscrit de cette marque pour la totalité ou une partie des marchandises ou services à l'égard desquels elle est inscrite.

(2)    L'emploi d'une marque de commerce déposée, par un usager inscrit de cette marque, selon les termes de son enregistrement à ce titre, en liaison avec les marchandises qu'il a fabriquées, vendues, données à bail ou louées, ou avec les services qu'il a loués ou exécutés, ou l'usage d'une marque de commerce projetée, ainsi que le prévoit le paragraphe 40(2), par une personne agréée comme usager inscrit de la marque, est appelé, au présent article, l' « emploi permis » .

(3)    L'emploi permis d'une marque de commerce a le même effet, pour l'application de la présente loi, qu'un emploi de cette marque par le propriétaire inscrit.

[2]            Ces « principes directeurs pratiques » ont été énoncés par le juge Malone dans l'affaire United States Polo Assn. c. Polo Ralph Lauren Corp,, [2000] A.C.F. n ° 1472 (C.A.F.) au paragraphe 18.

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